Demandeurs d’asile à la rue à Saint-Brieuc : le soutien de l’évêque

Denis Moutel, évêque de Saint-Brieuc (photo "Le Trégor").

Denis Moutel, évêque de Saint-Brieuc, a apporté hier, à l’occasion de la messe du jeudi de Pâques, un soutien de poids au collectif contre le racisme et pour la solidarité, et aux 5 familles sans logis de Saint-Brieuc. Il s’est engagé à en loger une partie, et a invité les paroissiens à faire offrande de nourriture pour ces personnes, au nom de la charité chrétienne. Une réunion rassemble en ce moment les membres du collectif en compagnie de l’évêque, pour mettre en place le dispositif.

Le site vous informera le plus régulièrement possible de l’évolution de la situation.

Voici le texte de la déclaration de Denis Moutel, prononcée pendant la messe de jeudi soir, et publiée par le journal Ouest-France.

« Ce soir, nous revivons le geste du Seigneur Jésus, qui a lavé les pieds de ses disciples frères et sœurs, l’appel du Seigneur à aimer et à servir est d’une grande actualité en ce moment à Saint Brieuc. En effet plusieurs familles venues du Caucase et d’Afrique sont sans logement depuis quelques jours. Et, au moment du geste du lavement des pieds, des catholiques de nos paroisses, servent,

Parmi d’autres, une soupe chaude à ces personnes inquiètes. J’ai rencontré cet après-midi ces chrétiens qui apportent leur aide concrète.

Dans ce jeudi saint, il est normal que je vous dise ce que je souhaite faire avec eux, avec vous.

Notre démarche n’est pas située sur un plan politique, car la question grave des migrations est complexe et mondiale, mais notre réponse, ici, doit être humaine et chrétienne.

J’invite les catholiques à prier pour ces familles, arrivées ici à Saint Brieuc, et aussi pour tous ceux qui connaissent l’inquiétude du lendemain. À ceux qui viendront prier un moment, cette nuit, comme nous le faisons chaque année à la Chapelle Saint Guillaume, je demande de participer à l’offrande qui sera organisée pour que des repas chauds puissent être servis à ces familles, dans les jours qui viennent.

J’irai moi-même leur rendre visite, demain vendredi saint, dans ce jour où nous nous rappelons combien le Seigneur s’est fait proche de tous.

Depuis toujours l’Église a une tradition d’accueil. J’ai demandé que l’on mette dès demain une maison, à disposition de ces personnes sans logis, au moins pour une partie d’entre elles.

Je remercie encore tous ceux qui se sont rendus disponibles, dans un passé récent, pour un tel accueil à Binic, Plédran et Saint-Jacut-de-la-Mer, avec notamment le secours catholique et les paroisses(1).

Nous ne pouvons pas l’impossible. Mais la charité du Christ nous presse de nous tenir auprès de tous ceux pour qui il a lui-même donné sa Vie ».

1. L’évêque a oublié de citer la municipalité de Plérin qui a logé gratuitement Deux couples de Géorgiens pendant 6 mois, en leur apportant une aide considérable.

Interpellation des candidats : la Ligue des droits de l’Homme sur les étrangers

Nous poursuivons la publication des lettres ouvertes adressées par la Ligue des droits de l’Homme aux candidats à la présidentielle et aux législatives. Aujourd’hui : « les étrangers comme bouc émissaire ? »

Parce que la France demeure l’une des premières destinations des demandeurs d’asile au sein des pays industrialisés, depuis 2003 les successives réformes législatives ont privilégié des procédures accélérées pour l’examen de leur dossier et l’octroi de la protection subsidiaire au détriment d’une pleine application de la convention de Genève.

Les réformes du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et demandeurs d’asile (Ceseda) de 2003, 2006, 2007 et 2011 ont chaque fois réduit un peu plus les perspectives d’obtention d’un titre de séjour pour des étrangers résidant et travaillant dans notre pays, depuis de longues années parfois. Ce faisant, ces étrangers sont livrés sans défense, lorsqu’ils ont un emploi, à la surexploitation de leurs employeurs et aux trafics des marchands de sommeil, puisqu’ils ne peuvent bénéficier de l’attribution d’un logement social.

Les conditions très restrictives d’octroi des visas entraînent des drames familiaux et personnels en empêchant la réunion des familles, et poussent souvent les migrants à prendre de grands risques pour pouvoir quand même venir dans notre pays.

L’enfermement des étrangers, en zone d’attente à l’entrée du territoire (touristes, demandeurs d’asile, mineurs isolés…) et en centres de rétention (familles avec enfants, malades…) est devenu la règle.

Dans la majorité des pays européens, les résidents étrangers votent aux élections locales. Ainsi le vote est-il en accord avec les réalités vivantes du pays. Aujourd’hui, l’exercice de la démocratie doit s’élargir et le droit de vote ne peut plus être strictement conditionné à la nationalité.

Pour rompre avec cette situation, la Ligue des droits de l’Homme soutient un certain nombre de propositions qu’elle entend mettre en débat publiquement ; elle souhaite que les candidates et candidats se déterminent sur ces propositions et rendent publics leurs remarques, critiques ou accords.

Neuf propositions pour l’accueil des étrangers dans la dignité et le respect des droits :

  1. Des conditions d’accueil et des procédures équitables pour que chaque demandeur d’asile puisse défendre sa situation et l’autorisation de travailler pour subvenir à ses propres besoins ;
  2. La suppression de la liste Ofpra des pays d’origine sûrs, puisqu’elle sert de filtre aux demandes d’asile, et l’abolition du règlement Dublin II ;
  3. Le caractère suspensif du recours sur toute décision de l’Ofpra ;
  4. La régularisation de tous les sans-papiers, par la réforme du Ceseda, avec l’attribution de plein droit de la carte de résident de dix ans ;
  5. La suppression des visas de court séjour et la justification explicite et écrite par les services consulaires de tout refus de visa ;
  6. La fin de la politique d’enfermement, la fermeture des centres de rétention et la garantie de procédures suspensives, respectueuses des droits des demandeurs et de leur défense, notamment par l’existence de permanences d’avocats dans les zones d’attente ;
  7. Le rétablissement de procédures contentieuses en faveur des droits de la défense par l’abrogation des dispositions contraires votées depuis 2003 ;
  8. La ratification, par la France, de la Convention des Nations unies sur les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille ;
  9. L’instauration immédiate du droit de vote de tous les résidents étrangers aux élections locales.

    Les migrations, une question de droits

    La section de Royan et du pays royannais de la Ligue des droits de l’Homme organisait, le week-end du 25 février, la première « Rencontre du livre et du citoyen », en partenariat avec la région Poitou-Charente et le département de la Charente-maritime. Le thème de cette première édition était « Peuples et migrations ». Il a été l’occasion, pour le secrétaire général de la Ligue des droits de l’Homme, Dominique Guibert, d’introduire une réflexion sur les migrations. Voici son texte.

    Les migrations, une question de droits

    Dans ces deux jours de débats, nous allons faire des rencontres, partager des histoires, rencontrer l’histoire, revendiquer l’universel, confronter le particulier. On pourrait dire fréquenter l’autre, accueillir les autres. Mais un tel programme ne peut se contenter d’évoquer leur essence sans se préoccuper de leur existence.

    Vous le savez, la situation faite aux migrants et plus largement le sort des étrangers est l’un des fils rouges du travail de la Ligue des droits de l’Homme à tous ses niveaux. Au jour le jour, nos équipes locales auprès des sans-papiers, des familles d’enfants scolarisés, auprès des Roms font valoir que les droits sont universels.

    Derrière ces dossiers, ces lettres, ces démarches, ces données administratives et judiciaires, il y a une politique. Il y a des lois. Celles qui, depuis tant d’années, font de la vie de tant d’êtres humains une succession d’épreuves et d’angoisses.

    Ces lois, elles disent successivement vouloir « maîtriser » l’immigration, Puis elles disent lutter contre une « immigration subie », enfin organiser une « immigration choisie ». Elles ont en commun une certaine conception  de l’« identité nationale », qui rend toujours plus difficile l’entrée des étrangers sur le territoire français, qu’ils viennent travailler, étudier ou tout simplement vivre en famille. Il s’agit de mener avec rigueur une « politique du chiffre » qui produit son lot quotidien de drames, d’injustices et d’inhumanité.

    Drames, inhumanité : ce n’est pas une exagération de « droitsdel’hommistes » cherchant à jouer sur l’émotion. La vie des migrants, c’est la précarité mais c’est aussi ces regards, ces façons de mettre en cause leur altérité.

    Ce sont ces enfants laissés seuls, ici dans un camp de Roms après que les adultes ont été embarqués, là dans un appartement où personne ne se demande comment ils subviendront à leurs besoins. Et ces autres, parfois des bébés, enfermés dans des centres de rétention, des enfants que l’on embarque ensuite de force avec leurs parents dans des avions qui les renvoient vers la misère et l’inconnu.

    C’est l’humiliation des contrôles au faciès, des expertises osseuses, et même parfois ces examens pileux et génitaux, visant à démontrer qu’un enfant est plus âgé qu’il n’y paraît, afin de pouvoir le bouter de France. C’est l’expulsion des étrangers malades vers des pays où chacun sait qu’ils ne pourront être soignés.

    C’est pour les cas les plus graves, ces femmes et ces hommes renvoyés vers le danger voire la mort, parce que leur pays figure sur la liste des pays sûrs, qui permet à l’OFPRA une gestion a minima des demandes d’asile.

    Si l’on ne veut pas se complaire dans la si habituelle euphémisation des temps d’aujourd’hui, il fallait bien parler de ces choses qui fâchent. Dire ce qui se cache derrière la politique d’immigration, celle qui tend vers une certaine xénophobie d’État. Le tableau est noir. Prenons conscience de ce double symbole. D’un côté des « gated communities » qui interdisent qu’on y rentre si l’on est étranger, et de l’autre des lieux d’enfermement, qui interdisent aux étrangers d’en sortir. La migration est une réalité parce que le droit de circulation est un droit de l’Homme, garanti par les textes internationaux. Il vaut le coup que l’on se batte pour lui.

    Mais les femmes et les hommes « contre » agissent. L’engagement des « délinquants de la solidarité », dans le Réseau Éducation sans frontières, à la Ligue des droits de l’Homme ou dans d’autres organisations associatives ou syndicales, non seulement apporte aide et solidarité, mais pose dans les faits que ce n’est pas la nécessité qui fait loi, mais que ce sont les droits qui sont la loi. Le mouvement de grève des travailleurs sans papiers, avec un fort soutien syndical et associatif pour la régularisation de leur situation, pose dans les faits la nécessité de lutter contre une surexploitation contre laquelle il se révolte. Ensemble, ces actions citoyennes montrent que les habitants de France profiteraient d’un changement profond de politique, qui prendrait au sérieux l’universalité des droits.

    Car le statut des étrangers, dans une société démocratique est emblématique de l’état des droits. Aucune considération politique ou économique ne saurait  justifier la méconnaissance de droits universels indissociables du respect de la dignité humaine. Des droits aussi fondamentaux que le droit d’asile, le droit à la santé, au logement, à l’éducation, au respect du droit du travail ou encore de la vie privée et familiale ne peuvent être refusés à aucun être humain présent sur le territoire d’un État : l’égalité en dignité et en droits exclut toute discrimination fondée soit sur la nationalité soit sur la régularité du séjour.

    À une époque marquée par l’accélération de la globalisation, c’est-à-dire par la circulation, de moins en moins limitée par des frontières, des capitaux, des marchandises et des services, il est injustifié que des êtres humains – ou plus exactement une partie d’entre eux, ceux dont les pays sont catalogués « à risque migratoire » ‑ se voient assignés à résidence au risque de la misère et parfois de la terreur.

    Il est à la fois injuste et, au regard des raisons multiples des migrations, absurdement inutile, de continuer à refuser le droit d’entrée sur le territoire et, plus largement, sur celui de l’Union européenne. Ces restrictions instituent l’arbitraire : séparation des familles, trafic de visas en tous genres, traitement indigne des étrangers lorsqu’ils présentent une demande de visa, imprévisibilité des décisions prises… Elles nourrissent en outre les réseaux, parfois mafieux, qui profitent des limitations apportées à l’entrée des étrangers pour s’enrichir, au risque de la mort de ceux qui y ont recours. Il y a une hypocrisie insupportable dans l’attitude des États qui affirment leur volonté de réprimer de plus en plus sévèrement les organisateurs de ces réseaux, alors que ceux-ci ne peuvent prospérer que grâce aux entraves mises par ces mêmes États à la liberté de circulation.

    Liberté de circulation, liberté d’établissement, voyager, visiter, partir, revenir, s’établir dans le pays de son choix : ce sont des libertés essentielles auxquelles il est possible, comme à toutes les libertés, d’apporter des restrictions, mais qui ne doivent pas être sacrifiées aux politiques protectionnistes des États. En tout état de cause, le recours à une politique unilatérale de quotas, y compris professionnels, ne peut être une réponse acceptable, dès lors qu’elle peut conduire à priver les pays les plus pauvres de personnes formées dont ils ont besoin.

    Si un État entend réglementer ce droit au séjour durable, c’est-à-dire conférer ou non la qualité de « résident » (au-delà du court séjour lié à l’exercice de la liberté de circulation), ce ne devrait être qu’en fonction de sa capacité de garantir concrètement l’exercice de leurs droits aux migrants, en apportant la preuve des difficultés qu’il invoquerait pour expliquer cette restriction et en instituant des mécanismes assurant la protection des droits universels (santé, éducation, vie familiale normale) contre l’arbitraire, l’égalité réelle d’accès au droit au recours et le caractère suspensif des recours étant ici d’une importance décisive.

    En un mot, nous ne retrouverons le chemin de l’humanité commune qu’en refondant les politiques migratoires sur le respect de tous les droits partout et pour tous.

    C’est pourquoi la Ligue des droits de l’Homme se bat pour l’abrogation des visas de court séjour, pour la dépénalisation du séjour irrégulier, pour la suppression effective de la « double peine », pour la suppression des zones d’attente et des centres de rétention, pour l’interdiction d’expulser des étrangers installés durablement en France ou en Europe, pour la généralisation du caractère suspensif des recours judiciaires et administratifs concernant le séjour des étrangers, pour le rétablissement du droit au travail pour les demandeurs d’asile, et pour la ratification de la Convention des Nations unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles.

    En rappelant ces principes et en formulant ces revendications, la LDH poursuit l’œuvre qu’elle a entreprise depuis sa fondation : porter assistance à ceux qui sont victimes de l’injustice et de l’arbitraire, mais aussi restituer à l’humanité tout entière l’universalité et l’indivisibilité de ses droits.

    Dominique Guibert, secrétaire général de la LDH

    Avec Guéant, Marie Curie aurait-elle pu travaille en France ? Pas sûr…

    Photo Delphine Roucaute, Le Monde

    Guéant avait annoncé de façon tonitruante, courant janvier, qu’il allait revoir sa circulaire du 31 mai sur le travail des étudiants étrangers arrivés en fin de cursus. Qu’est-ce que cette nouvelle circulaire a modifié ?

    Rien.

    Le collectif du 31 mai, mobilisé depuis la parution de la première circulaire, explique sur son site :

    « Comme vous le savez, la Conférence des Grandes Ecoles remontait jusqu’il y a peu tous vos dossiers au Ministère. Suite à la circulaire du 12 janvier, le gouvernement a transféré aux préfectures le soin de gérer l’ensemble des dossiers de réexamen des refus de changement de statut. Il n’y a plus de remontée de dossiers au Ministère.

    Le collectif du 31 mai déplore cette situation qui laisse place à l’arbitraire des préfectures et livre les jeunes diplômés à eux-mêmes ».

    La situation n’a donc pas évolué, et les étudiants multiplient les manifestations, et trouvent de nouvelles formes d’actions.

    Parmi ces nouvelles formes d’actions : le parrainage d’étudiants, par des personnalités scientifiques ou non. Le Monde indique : « De prestigieux parrains se sont portés volontaires, le Prix Nobel de physique Albert Fert, l’économiste Olivier Pastré, les historiens Michelle Perrot et Pierre Rosanvallon, l’essayiste Caroline Fourest, des présidents d’université, ou encore les réalisatrices Tonie Marshall et Caroline Huppert« . Il y a aussi Axel Kahn, généticien, ancien président de l’Université Paris Descartes, Isabelle Giordano, et beaucoup d’autres.

    Une première cérémonie de parrainage a eu lieu le 10 janvier dernier à la Sorbonne, dans l’amphithéâtre Marie-Curie. Ce qui a permis à un des organisateurs de poser la bonne question : « avec la réglementation d’aujourd’hui, la Polonaise Marie Curie aurait-elle pu rester en France ? »

    A lire aussi : l’histoire de Nadia (prénom modifié), Algérienne, titulaire d’un master 2, internée en centre de rétention avant même que son recours au tribunal administratif ait été jugé ! Lire ici.

    L’Etat rackette les demandeurs d’asile

    Les taxes sur les titres de séjours viennent d’être augmentées dans des proportions scandaleuse : ainsi, le prix de la carte de séjour passe de 70€ à 349€ !

    Voici la liste des augmentations, dans le détail, recensées par la coordination sans papiers Ouest.

    Des augmentations faramineuses :

    • la carte de séjour salarié passe de 70€ à 349€, soit une augmentation de 498,57 %.  349€, c’est la « taxe de primo-délivrance » applicable à la plupart des titres.
    • le changement de statut d’étudiant vers un autre statut, salarié par exemple, passe de 87 euros (tarif d’un renouvellement) à 349€, soit une augmentation de 401, 15 %.
    • la taxe de chancellerie passe de 220€ à 340€ et s’appelle le « droit de visa de régularisation » (154,55% d’augmentation). C’est un droit exigible des personnes entrées en France irrégulièrement ou qui se sont maintenues irrégulièrement sur le territoire.

    Des  augmentations plus modestes pour tout le reste, mais ça avait déjà bien augmenté en 2011 : par exemple la carte0″ Vie Privée et Familiale » (VPF) passe de 340€ à 349€, son renouvellement passe de 85€ à 87€.

    Une nouveauté : un droit de timbre de 19€, exigible pour les primo délivrances, les renouvellements, les duplicata, toute édition d’un nouveau titre suite à changement d’adresse, d’état civil … Destiné à « financer les titres biométriques »… Ce qui finit par faire des sommes astronomiques : par exemple, pour une 1°délivrance d’un titre VPF à une personne entrée irrégulièrement : 349€ (titre) + 19€ (droit de timbre) + 340€ (droit de visa de régularisation) = 708€  ! (560€ en 2011, +126,43%)

    Mais la cerise sur le gâteau, c’est que le tiers du droit de visa de régularisation, soit 110€, est exigible dès le dépôt du dossier de demande de régularisation, c’est même une « condition de la recevabilité de la demande » et ce n’est pas remboursable en cas de rejet. Idem en cas de réexamen demandé par le juge du Tribunal administratif, si ça n’a pas déjà été payé.

    Toute demande de titre de séjour déposée par un étranger se trouvant, au moment où il présente sa requête, dans une situation d’irrégularité au regard des règles de l’entrée ou du séjour, devra, sauf exceptions prévues par la loi elle-même, être soumise au paiement d’un droit de visa de régularisation de 110€, quelle que soit l’issue que vous réserverez à sa demande. Cette somme devra être requise à chaque demande successive de régularisation ; elle ne donne en aucun cas lieu à remboursement, que la demande reçoive une réponse positive ou négative. Elle est versée, en tant qu’elle constitue une condition de la recevabilité de la demande avant la remise d’un récépissé de première demande de carte de séjour

    Ça doit être payé en timbre fiscal ordinaire, qui donne droit à un reçu, qui doit être collé sur la lettre de demande et oblitéré par l’agent d’accueil. Dans ces conditions ça semble risqué d’envisager d’envoyer le dossier par la poste : perte possible du timbre, pas de reçu … risque de demande irrecevable.

    RESF interpelle les candidats

    Le Réseau Éducation sans frontière, qui apporte aide et soutien aux demandeurs d’asile et lutte contre leurs placements arbitraires en rétentions administrative et leurs expulsions, vient de rendre publique une « adresse aux citoyens, aux candidats à la présidentielle et aux législatives de 2012 ». Nous la reproduisons ci-dessous, et vous pouvez la télécharger.

    Adresse du Réseau Éducation sans frontières aux citoyens, aux candidats à la présidentielle et aux législatives de 2012

    Pour qu’ils et elles puissent grandir et vivre ici…

    Le Réseau Éducation Sans frontières (RESF) a été créé en 2004 par des citoyens d ’opinions et de convictions très diverses (enseignants, parents d’élèves, soutiens) et par des organisations syndicales et associatives, en réaction d des situations insupportables :

    • lycéens scolarisés depuis plusieurs années menaces d ’expulsion dès leurs 18 ans ;
    • familles dont les enfants sont scolarisés, enfermées en centre de rétention pour être expulsées.

    De très nombreux collectifs se sont alors constitués pour aider ci la régularisation de ces personnes qui sont des voisins, des amis, les parents des copains de nos enfants.

    En 2012, un président de la République sera élu, puis des députés.

    Nous, membres de RESF, continuerons à :

    • défendre et soutenir les jeunes majeurs scolarisés et les parents d’enfants scolarisés ;
    • dénoncer le démantèlement des familles, la destruction de l’avenir des jeunes scolarisés, et l’enfermement d’enfants, de jeunes et de familles ;
    • nous battre contre toute politique du chiffre et les souffrances infligées à tant de personnes ;
    • faire savoir que derrière chaque numéro de dossier, il y a une histoire de femmes et d’hommes qui souhaitent seulement un avenir meilleur ;
    • refuser une politique qui remet en cause les droits fondamentaux, accentue des logiques de repli et de défiance, aggrave les discriminations et renie les principes républicains au profit d’une véritable xénophobie d’État.

    Nous attendons des candidats à ces élections des engagements clairs, pour en finir avec la politique actuelle sur l‘immigration.

    Nous demandons des mesures d’urgence :

    Sans attendre la mise en chantier d’une nouvelle législation, il est indispensable que :

    • tout enfant puisse suivre une scolarité, ce qui implique la régularisation de sa famille ;
    • tout jeune scolarisé en France puisse poursuivre ses études et sa formation avec le droit de travailler,
    • s’installer et vivre ici ;
    • les interpellations arbitraires et l’enfermement des personnes cessent, les OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français) en cours et les objectifs chiffrés en matière d’immigration soient annulés ;
    • l’accès aux droits fondamentaux (vivre en famille, se soigner, travailler, se loger. ..) soit assuré ;
    • toute référence à un lien suppose entre « immigration» et « identité nationale» disparaisse de l‘intitulé de tout ministère.

    Nous exigeons surtout que la loi change :

    • Le droit d’asile doit redevenir un droit fondamental dans les faits :
    • la liste des pays dits « sûrs » doit être supprimée.
    • Les demandes d’asile doivent être étudiées avec humanité et objectivité plutôt qu’avec une suspicion systématique et une demande de preuves souvent impossibles à fournir.
    • Les demandeurs doivent pouvoir travailler.

    Nous exigeons la refonte complète du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers en France  (Ceseda) et I ’abrogation des législations d’exception dans les départements d’Outre-Mer avec pour objectif de mettre en œuvre une loi claire :

    • qui mette fin à l’arbitraire préfectoral et remplace l’empilement des lois, textes et circulaires et conduise à la délivrance d’un titre unique de séjour;
    • qui tienne compte du facteur humain et de l’histoire des migrations et accepte la mobilité des hommes comme naturelle ;
    • qui se fonde sur les meilleurs aspects de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la Convention internationale des Droits de l’Enfant, la Convention Internationale de protection des droits des migrants et de leur famille.

    Il ne doit plus y avoir en France de citoyens, français ou étranger, sans accès aux droits !

    La société des inégaux, ou la déstructuration sociale, par Dominique Guibert

    Dominique Guibert à la tribune du congrès de Reims en juin 2011

    Dans une tribune intitulée « La société des inégaux, ou la déstructuration sociale », publiée dans l’Humanité dimanche du 22 décembre, Dominique Guibert, secrétaire général de la Ligue des droits de l’Homme, revient sur quelques décisions ou propositions gouvernementales récentes.

    Dans un pays où les crédits destinés au logement d’urgence n’ont pas été entièrement consommé, il est proposé par un membre du gouvernement, Valérie Pécresse, d’affecter le solde à l’achat de gilets pare-balles… Une preuve, s’il en fallait, que ce pays va mal. Cela montre à quel point le fossé entre ceux qui gouvernent la France et le peuple est abyssal.
    Par Dominique Guibert, secrétaire général de la Ligue des droits de l’Homme.

    Dans ce pays, un ministre propose l’illégalité de détourner la finalité de certains fichiers électroniques pour gérer la fraude aux allocations sociales censée attirer les immigrés…
    Dans ce même pays, on généralise la délation et la création de véritables patrouilles miliciennes. Le nom de l’une est « participation citoyenne », le nom de l’autre « voisins vigilants »…
    Enfin, un autre ministre a dénoncé la société d’assistanat et ses nombreux profiteurs, ces personnes qui, avec 500 euros de RSA par mois, grèvent le budget et nourrissent sans doute la dette.

    Ces événements sont assez éclairants de l’écart avec le réel. Reprenons-les.

    L’urgence sociale. L’un des derniers rapports de la Cour des comptes souligne sévèrement la faiblesse des moyens pour faire face à l’urgence en matière de logement. Toutes les associations qui agissent sur ce terrain savent que la majorité des arrivants dans le sans-logement ou le mal-logement sont des familles de « travailleurs pauvres » qui vivent dans l’attente angoissée d’un lendemain sans visibilité. La crise est sans doute pour  tout le monde, mais à tout le moins la vulnérabilité est différentielle.

    L’accueil des étrangers. Les rapports des experts soulignent que l’immense majorité des migrations sont intrazones et que les immigrés, réfugiés, demandeurs d’asile, dont on dénonce le nombre, ne sont qu’une minorité qui ne deviennent des « sans papiers » que devant la contraction des conditions d’accueil qui leur sont fates, alors même qu’ils ne prennent ni le travail, ni la place de personne. À moins de dire que le partage se fait à due concurrence entre les pauvres et les très pauvres, les « sans papiers » sont une construction politique, pas le résultat d’une invasion sauvage.

    Le contrôle généralisé. Alors que les services publics subissent les coupes claires de la révision générale des politiques publiques (RGPP), y compris même les services de sécurité, quel meilleur moyen de faire d’une pierre deux coups que celui de faire de la population les acteurs de la surveillance de proximité puisque l’on a supprimé l’idée que la police du même nom servait à quelque chose ? Se dessine alors un triptyque : le développement des fichiers électroniques débarrassés des contraintes voulues pourtant par le législateur ; l’organisation d’une surveillance de premier niveau par l’enrôlement de la population dans le contrôle mutuel ; enfin l’utilisation maîtrisée de la police et de la gendarmerie.

    L’assistanat social. Haro sur la fraude ! Les chiffres des organismes sociaux démontrent pourtant qu’elle est faible par rapport aux fraudes organisées par les vrais délinquants et celles perpétrées par les employeurs indélicats. Et tout dernièrement, le rapport de la commission d’évaluation du RSA a souligné que la majorité des bénéficiaires potentiels du RSA activité ne font pas la demande et qu’une forte proportion de celles et ceux qui pourraient prétendre au RSA socle l’ignore… Et le ministre menteur peut parler des droits et des devoirs de la conditionnalité des uns par rapport aux autres, alors que les faits n’en démontrent pas la matérialité.

    Dans cette France du nouveau mensonge déconcertant, on peut craindre que s’installe une société des inégaux, où les 10% des ménages les plus riches possèderont 50% des richesses alors que 50% des ménages les plus pauvres ne possèderont que de 10% des richesses. Sans parler de l’infime minorité des 0,1% de prédateurs qui concentrent une telle masse de revenus et de patrimoine que le sens commun n’arrive pas à percevoir l’utilité sociale d’une telle accumulation. Or, pour protéger les uns de la rage des autres, il faut faire croire que les uns et les autres ont une identité commune à défendre. Et pourtant comment faire société si les comportements des uns sont si éloignés de la survie des autres ? Comment oser parler de cohésion sociale à retrouver quand la crise fait le bonheur de quelques-uns et le malheur de tous les autres ? Quand la concentration des richesses est telle qu’il ne peut plus y avoir de valeurs communes ? Quand la dérisoire équation des revenus est que les uns gagnent en quelques heures ce que certains mettent une année à gagner ?

    Il y faudra de la solidarité pour que l’on retrouve des égaux dans la société. C’est du charabia de « bonnes âmes », me dira-t-on ? Être  une bonne âme qui s’occupe des pauvres diables, ça me plaît bien. Pas vous ?

    Dominique Guibert

    Centres de rétention : le rapport 2010

    Les cinq associations (ASSFAM, Forum des réfugiés, France Terre d’asile, Cimade, et l’Ordre de Malte France) habilitées à intervenir dans les centres de rétention administratives où sont parqués les étrangers en attente d’expulsion viennent de livrer l’édition 2010 de leur rapport annuel. Un rapport fouillé, qui passe en revue tous les centres de rétention de France (métropole et Outremer).

    Le principal constat, ce sont les conséquences de la fameuse « politique du chiffre », érigée en dogme. Un chiffre, justement : seuls 42% des personnes placées en rétention sont ensuite expulsées. Cela veut dire, en clair, que 58% de personnes enfermées n’auraient pas dû l’être : elles ont été libérées soit par le juge de libertés et de la détention, soit par décision du tribunal administratif qui n’a pu que constater l’irrégularité de la rétention, soit par l’administration qui ne parvient pas à exécuter l’éloignement. Qu’importe : ils apparaîtront dans les statistiques. Le rapport précise, dans son introduction : « Ces pratiques administratives et policières, ces conditions d’interpellation et de privation de liberté, de réadmission aux frontières, nous les constatons et ne pouvons en tirer
    qu’un bilan accablant : celui de l’obsession statistique au détriment du droit. En d’autres termes, il s’agit d’une politique qui pousse trop souvent les autorités à éloigner à tout prix plus d’étrangers en bafouant les procédures et les droits les plus fondamentaux, en mettant en oeuvre une politique d’éloignement qui démontre son inefficacité et son injustice ».

    L’alongement de la durée de rétention (45 jours) inscrit dans la nouvelle loi « confirme la banalisation de l’enfermement comme mode de gestion de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière, et réduit considérablement le contrôle des pratiques policières et administratives par le pouvoir
    judiciaire ».
    En conclusion, les associations notent que « C’est finalement cette banalisation de l’enfermement administratif, contraire à l’esprit du droit européen, que nous dénonçons ensemble, autant que les situations absurdes et les atteintes aux droits et à la dignité des personnes générées par une politique marquée par l’obsession de l’atteinte des objectifs chiffrés ».

    Le rapport est téléchargeable sur les sites des associations citée en introduction de l’article.

    L’État hors la loi, pas en notre nom ! UN TOIT POUR TOUS.

    Un communiqué de la Cimade, réunie à Saint-Brieuc le 17 septembre :

    Décembre 2006. Nicolas Sarkozy lance pendant la  campagne présidentielle : « Je veux que d’ici à deux ans, plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir. Parce que le droit à l’hébergement, c’est une obligation humaine », déclaration relayée en 2007 par Benoit Apparu secrétaire d’Etat au logement: «  Il y a une mise à l’abri humanitaire, quelle que soit la situation individuelle des personnes ».

    Été 2011 : le gouvernement supprime 30% des moyens pour les services d’accueil d’urgence et les Centres d’Accueil pour les Demandeurs d’Asile (C.A.D.A.), en contradiction avec de nombreuses conventions internationales, et notamment la Convention de Genève (1953) relative aux conditions d’accueil des demandeurs d’asile. Ces services sont donc  dans l’impossibilité de remplir leur mission ; des expulsions continuent à jeter des centaines de familles pauvres à la rue ; la loi Dalo, pourtant votée par l’actuelle majorité, ne peut pas être appliquée ; des familles de demandeurs d’asile, qui ont aussi droit à un hébergement, comme  le Conseil d’État  l’a confirmé le 5 août 2011, se retrouvent à la rue partout en France, dans de très grandes difficultés pour  scolariser leurs enfants.

    Le Préfet de Région, devant l’engorgement des services sociaux de la ville de Rennes ainsi créé, a décidé de déplacer des personnes demandeuses d’asile de Rennes, là où ils doivent faire leurs démarches administratives, vers les autres départements bretons. Les services d’accueil d’urgence doivent domicilier ces personnes, c’est à dire  leur donner une adresse administrative, sans  aucun moyen supplémentaire pour leur hébergement, obligeant ainsi les personnels à remettre ces personnes à la rue après les avoir enregistrées.  Les services d’accueil d’urgence, asphyxiés, sont amenés parfois à faire des choix selon des critères forcément discriminants, contraires à leur mission : l’accueil des personnes les plus vulnérables de façon inconditionnelle, comme l’ordonne la loi.

    Résultat : en Bretagne, en Pays de Loire comme partout en France, des français et des étrangers dorment dans les rues de nos villes.

    Ça ne tient pas très chaud, une domiciliation administrative pour dormir la nuit dehors quand il pleut et qu’il fait froid.

    Ça n’aide pas non plus beaucoup à rédiger sa demande d’asile.

    Ça ne sert pas à grand-chose finalement une domiciliation administrative si ce n’est, pour le Préfet, à se débarrasser d’eux vers d’autres départements.

    En lieu et place de la solidarité envers les plus démunis, inscrite dans la loi et la Déclaration des Droits de l’Homme, le gouvernement utilise la stigmatisation, la précarité et l’exclusion. Sa politique d’exclusion et de discrimination envers les étrangers ne résoudra en aucune manière les problèmes des 8 millions de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté  en France.

    Cela ne peut se faire en notre nom !

    Nous demandons aux pouvoirs publics :

    • L‘accueil inconditionnel de toute personne sans abri.
    • L’application des lois et un plan d’urgence pour réaliser cet objectif, en utilisant au besoin la loi de réquisition  sur les immeubles et logements vacants, appartenant aux collectivités locales, à des administrations, à l’État, à des banques, à des compagnies d’assurance, à de gros propriétaires, à des professionnels de l’immobilier.
    • Les moyens nécessaires pour  l’hébergement et l’accompagnement de toutes les personnes en difficulté  sans aucune discrimination. Toute domiciliation doit s’accompagner d’un hébergement.

    LA SOLIDARITÉ ACTIVE EST LA SEULE RIPOSTE POUR FAIRE RESPECTER L’ÉTAT DE DROIT DANS NOTRE PAYS.

    Le collectif régional de la Cimade auquel se joint la section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme, appelle tous les citoyens à soutenir les actions prévues localement dans la semaine du 8 au 15 octobre pour :

    • mettre concrètement à l’abri les personnes actuellement à la rue ;
    • alerter les pouvoirs publics, les élus et la population sur la situation intolérable imposée aux plus démunis d’entre nous .

    Sa compagne française est décédée : N’kambou arrêté

    L’indignité n’a pas de limites. Ca s’est passé le 30 septembre, à Guingamp (22).

    N’Kabou, dit « Papi » (ce qui montre son degré d’intégration), vivait depuis plusieurs années avec sa compagne, française, Annie.

    N’Kabou est un citoyen congolais (République démocratique du Congo).

    Annie était malade. Elle est décédée au mois d’août dernier.

    Depuis le décès d’Annie, la gendarmerie cherchait le domicile de N’Kambou. Ils l’ont vu jeudi soir. Et ils l’ont convoqué vendredi matin. Ils l’ont jeté au centre de rétention administrative de Rennes Saint-Jacques. Un guet-apens.

    On peut appeler N’Kabou à la cabine téléphonique du centre de rétention, au 02-99-35-13-93.

    Il comparaîtra prochainement devant le Juge des Libertés et de la Détention (JLD). A moins qu’il ne soit expulsé avant. Parce que la loi Besson permet cela, figurez-vous…