Dédé Marquer, 10 ans en 1944, La Forge, et Gérard Brazidec, 7 ans en 1944, rue Jean-Sohier

Les tirailleurs étaient en kaki, en militaires. Suivant ce qu’ils étaient il y avait des uniformes différents.

Je me rappelle, il y en avait un qui descendait à la maison. Il était frigorifié. Il voulait se chauffer dans la cheminée. Il prenait tout le devant de la cheminée, il était large comme ça ! il avait des narines !…

Il sortait régulièrement du camp et devait rentrer pour le couvre- feu. Souvent, il prenait le café avec nous à 4 heures. Ma mère, qui avait toujours refusé de travailler pour les  Allemands  tant que son mari serait prisonnier, avait accepté de réparer les vêtements des Sénégalais, puisqu’ils étaient prisonniers. C’est pour cela que lui était descendu pour amener les vêtements, et, du coup, il avait pris des habitudes…

Michel Moisan, 11 ans en 1944, Le Montoir-d’en-Bas

C’est surtout les gars qui allaient voir le camp. Les filles étaient plus tenues. Les noirs avaient des balafres sur la figure. Ils étaient en liberté. Ils avaient froid, c’était la fin de l’année.

Je ne sais pas comment ils étaient apparus au Montoir-d’en-Bas. C’est deux copains qui sont arrivés.

Ce dont je suis sûr c’est qu’ils étaient dans la cheminée à se chauffer. Mon père était parti s’occuper des vaches dans l’étable et ma sœur était à les traire. Notre mère était déjà décédée.

Moi, je suis resté les garder dans la maison. Un des deux m’a dit qu’il était instituteur. Je me rappelle qu’il y avait une poule et ils se chauffaient au coin du feu pendant que la poule était à cuire dans la soupe.

On a mangé ensemble et ils nous ont donné quelques conserves de sardines. C’est qu’ils devaient avoir des colis, parce qu’il n’y avait pas grand-chose dans les commerces.

Ils parlaient avec le père de leur situation, mais moi, je ne comprenais pas trop leur affaire.

Il faut dire aussi que nous, on n’avait rien contre eux.

Fifine Le Caër, 14 ans en 1944, le Bourg

Les noirs étaient libres de circuler durant la journée. Ils parlaient assez bien français, avec un fort accent. Ils allaient dans la campagne, un peu partout. Ils étaient bien vus par les habitants. Certains finissaient par avoir leur maison. Comme ils étaient bien accueillis, ils y retournaient. Il y avait des officiers parmi les prisonniers. Ils logeaient au couvent avec leur ordonnance. Je me rappelle d’ une ordonnance qui venait chercher le lait pour Monsieur et Madame Morinville. Il avait sympathisé avec les parents. Un jour, il a demandé à Maman s’il elle avait des œufs à vendre. Maman, lui en a vendus. L’ordonnance a voulu qu’elle fasse l’omelette sur-le-champ et que je mange les œufs avec lui. Il ne voulait pas manger seul. Avait-il peur d’être empoisonné ? Il était très gentil cet homme. Il nous parlait de son pays… Il avait hâte de rentrer chez lui. Il se plaignait du froid.

Les noirs étaient habillés en soldat : un uniforme kaki, un gros manteau et des bandes molletières. Ils faisaient leur lessive au bord du Kerbiguet, le ruisseau à l’emplacement de l’étang aujourd’hui.

Les noirs aimaient bien les gamines. Ils étaient amoureux, disait-on. Ils couraient après les adolescentes… Les parents étaient sur leur garde.

Les prisonniers n’avaient pas le droit de boire d’alcool. Ça faisait partie du règlement. Les gens qui les accueillaient avaient pour consigne de ne pas leur servir d’alcool. L’alcool, nous disait-on, les rendait fous.

Les prisonniers avaient une heure pour rentrer au camp le soir.

Jean Auffret, 19 ans en 1944, Kergohy

Jean Auffret

On le voyait, alors on se demandait pourquoi puisqu’il ne parlait pas du tout. Il faisait son petit tour dans les écuries, il manœuvrait par là sans parler. On était inquiets. Il y avait aussi quelqu’un, un des Sénégalais qui venait à la ferme avec qui le père discutait beaucoup. Je crois bien qu’il était instituteur. C’était un homme qui parlait beaucoup. En famille, on disait qu’il y avait peut être un peu de jalousie entre les noirs. C’était bizarre cette ordonnance là qui ne parlait pas mais qui venait quand même. Il s’en allait comme ça quand il était servi avec son lait et son beurre. A l’époque, l’autre, l’instituteur venait raconter sa vie mais nous on ne participait pas tellement à ça ! Le père était très curieux car il lisait beaucoup, il aimait bien.

Le noir lui faisait découvrir.

Monique Lallican, 9 ans en 1944, le bourg de Trévé

Monique Lallican

Il y avait une grande cheminée avec une grande fouée. Quand j’arrivais de l’école, c’était au moment du froid, il me faisait monter sur ses genoux. Maman me préparait à goûter et j’étais sur les genoux du Sénégalais. Je ne sais pas son nom mais je l’appelais Doudou.

Papa était charron et « Doudou » était là avant que j’arrive à l’atelier à regarder travailler. Il y avait une très grande cheminée dans la maison et il donnait un coup de main au soufflet quand on cerclait les roues des charrettes.

Manifestation ce soir à Saint-Brieuc pour Aminate et le respect du droit d’asile

Pour loger Aminate et le respect du droit d’asile dans les Côtes d’Armor, rassemblement  devant les Champs  à 17h45 puis marche sur la permanence de l’UMP (c’est bien à l’UMP qu’on doit ces lois scélérates). On ne touchera évidemment pas aux locaux !
Les organisations qui nous ont montré leurs soutien, en étant certes peu présentes sont:Cimade, LDH, NPA, Parti de Gauche, Parti Socialiste, UDB.
Merci de venir nombreux !

Maison d’arrêt de Saint-Malo : la loi du silence

L'entrée de la maison d'arrêt de Saint-Malo (photo ministère de la justice).

Jeanine Pichavant, présidente de la section de Saint-Malo, siège, en tant que représentante de la Ligue des droits de l’Homme, au comité de surveillance de la maison d’arrêt de Saint-Malo.

Elle vient d’adresser une lettre au directeur de cet établissement pénitentiaire, à la suite d’un événement tragique qui s’y est déroulé en 2007. Le comité de surveillance de la maison d’arrêt aurait dû en être informé : il n’en a jamais été question.

Nous publions ci-dessous la lettre adressée par Jeanine Pichavant au directeur de la maison d’arrêt, lorsqu’elle a appris cet événement.

Elle précise : « J’ai reçu deux réponses, dont une de très mauvaise foi ».

Jeannine Pichavant

Présidente de la section malouine de la
Ligue des Droits de l’Homme

A Monsieur le Directeur de la Maison d’Arrêt de Saint-Malo.

« Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels ou inhumains ou dégradants. »
(Article 5 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme)

Monsieur,

Je fais partie, au nom de la Ligue des Droits de l’Homme, du Comité de surveillance de la Maison d’arrêt de Saint-Malo ; j’assiste donc chaque année à la réunion annuelle durant laquelle il nous est présenté le bilan de la vie de ce lieu dit de « privation de liberté ».Ce bilan, je le croyais sincère mais j’ai récemment eu la preuve qu’il ne l’était pas.

J’ai en effet appris qu’en l’année 2007 un fait grave avait eu lieu dont on ne nous avait jamais parlé.

Un jeune homme écroué pour délinquance routière, à savoir annulation de son permis de conduire, est condamné par les juridictions malouines à passer un mois en prison.

Mais là, il va devoir subir une double peine. Et quelle peine ! Il se va trouver enfermé dans la même cellule que deux autres détenus dont le casier judiciaire portait mention de 18 condamnations pour l’un et de 20 pour l’autre.

Ce dernier avait commis des faits relevant des Assises.

Jugé particulièrement dangereux, il avait fait pendant une année, l’objet d’une détention particulièrement signalée (DPS).

Comment vos services pouvaient-ils ignorer une telle situation ?

Le jeune homme a dû subir une maltraitance quotidienne, jusqu’au moment où ses codétenus se sont acharnés sur lui au point de le laisser sur son lit dans un état comateux.

Transporté à l’hôpital, il attendra d’être sorti de prison pour déposer une plainte qu’il retirera par la suite par peur des représailles.

Ces faits se sont donc passés en 2007 et nous n’en avons rien su ! Le rapport d’activité de 2008 n’en fait pas mention.

Ils étaient pourtant passibles d’une plainte pour non assistance à personne en danger, sur le fondement de l’article 223-6 du Code pénal qui dispose que « Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle de la personne, s’abstient volontairement de le faire est puni de cinq ans d’emprisonnement. »

C’est donc lors du procès, en 2010, que nous avons appris cela… grâce à la presse.

Je m’interroge donc sur la confiance que nous pouvons accorder à l’administration pénitentiaire dans sa façon d’assumer ses fonctions à l’intérieur de la prison, mais également sur la sincérité qui doit exister dans nos relations mutuelles lors de ces rencontres, ainsi que dans la rédaction du rapport annuel d’activité.

Ces faits seront présentés et débattus lors de la prochaine réunion de la section malouine de la Ligue. Le dossier sera aussi l’objet d’un examen juridique précis par un avocat membre de notre section.

Dans l’attente de vous lire, veuillez croire, Monsieur, en mes salutations distinguées.

Une copie de la présente sera adressée à : M. le Préfet de Région, M. Michel Cadot, M. le Procureur général près de la Cour d’Appel, M. le Procureur de la République près du Tribunal de grande Instance de Saint-Malo et enfin, M. le Directeur régional de l’Administration pénitentiaire.

Après quatre mois de lutte, Martine Mégret continue à se battre

La CGT Pôle emploi Bretagne a accompagné Martine Mégret à un entretien avec Nadine Crinier, directrice régionale de Pôle emploi.

Un entretien qui s’est soldé sur un échec : la direction de Pôle emploi campe sur ses positions, et ne propose toujours à Martine qu’un poste d’EVS (emploi de vie scolaire) dans une école maternelle, auprès d’un enfant handicapé. Poste rémunéré… 600€ par mois !

Télécharger le communiqué de la CGT Pôle emploi Bretagne : Indignons-nous.

Un délinquant constitutionnel récidiviste

La Ligue des droits de l’Homme vient de publier le communiqué suivant :

Pour la troisième fois en quelques années, Nicolas Sarkozy vient de violer sciemment la norme constitutionnelle la plus fondamentale de la République : la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.

De même qu’il avait désigné Yvan Colonna comme le meurtrier du préfet Erignac avant même qu’aucune autorité judiciaire n’ait examiné le dossier – lequel n’est toujours pas clos –, de même qu’il avait désigné Dominique de Villepin comme le commanditaire des faux de l’affaire Clearstream plusieurs semaines avant le procès – qui a d’ailleurs démenti ce « pré-jugement » –, il vient de qualifier la personne arrêtée dans l’affaire du meurtre de la jeune Laëtitia de « présumé coupable », en répétant volontairement cette qualification qui annule toute différence entre interrogatoire policier et condamnation judiciaire.

Le président de la République, que l’article 5 de la Constitution charge de veiller au respect de la Constitution et dont l’article 64 de cette même Constitution fait le garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire, vient ainsi de se substituer une fois encore aux juges indépendants pour décider de l’innocence ou de la culpabilité d’une personne soupçonnée d’un crime.

Ainsi, non seulement il accuse mensongèrement magistrats et policiers d’avoir manqué aux devoirs de leur charge – alors que c’est la politique qu’il mène depuis des années qui empêche le suivi efficace des personnes déjà condamnées en privant de moyens ceux qui y travaillent réellement –, mais il viole délibérément l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen qui garantit constitutionnellement la présomption d’innocence, c’est-à-dire le droit à être jugé dans des conditions conformes à l’état de droit et non désigné publiquement à la vindicte populaire.

Dans toute autre démocratie, un tel comportement serait considéré comme incompatible avec l’exercice de responsabilités politiques au plus haut niveau de l’Etat.

L’article 68 de la Constitution prévoit que le président de la République relève de la Haute Cour « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ». Si la violation délibérée et répétée de la séparation des pouvoirs et d’un des principes constitutionnels les plus fondamentaux de la République ne relève pas de cette procédure, quel niveau de délinquance constitutionnelle faudra-t-il atteindre pour mettre fin à l’impunité présidentielle en la matière ?

La Ligue des droits de l’Homme, qui assure magistrats et policiers de son soutien face à la calomnie, rappelle que « toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » (article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen). Le respect des lois et de l’ordre public ne se divise pas. Il est gravement menacé lorsque ceux qui ont la charge de le garantir donnent l’exemple de sa méconnaissance.