Reine, jeune Nigériane, expulsée vers l’enfer par Valls et Cazeneuve

On peut légitimement imaginer que Manuel Valls, et son homme lige Bernard Cazeneuve n’avaient qu’un souci : dépasser les Hortefeux, Besson, et autres Guéant dans l’inhumanité. Cela fait déjà un moment qu’ils les talonaient : c’est désormais chose faite.

La preuve ? Ce témoignage du réseau Welcome, qui raconte l’histoire (ça n’est pas un conte de Noël…) de Reine, une jeune Nigériane de 24 ans, qui vient de vivre l’horreur dans le « pays des droits de l’Homme ». Sans commentaire.

Le récit de l’histoire de Reine

Rennes, le 23/12/14.

Madame, Monsieur,

 Elle s’appelle Reine . C’est une femme nigériane âgée de 24 ans, arrivée en France le 8 février 2010. Après bientôt 5 ans de présence en France, elle s’est fait arrêter à Tours, lors d’un banal contrôle en bus, pour défaut de titre de transport.

Elle est placée en rétention au local de rétention de Tours, le 16/11/14, puis transférée à Rennes. Elle se retrouve, le 17 novembre 2014, enfermée au CRA de Rennes-Saint-Jacques.

Après 4 jours d’enfermement, elle a des douleurs au ventre et souffre de saignements. Elle est hospitalisée quelques heures, puis ramenée au CRA. Le médecin estime que « son état n’est pas incompatible avec la rétention ». Pourtant Reine ne va pas bien et présente quelques troubles. La Cimade demande à ce qu’elle voit un psychiatre, mais elle n’aura droit qu’à un entretien avec l’infirmière du centre.

 Reine reçoit le soutien régulier de F., une visiteuse, qui lui apporte un peu de réconfort et de nourriture car elle ne peut plus ingérer les repas du centre, notamment le soir. Au 25e jour de rétention, alors qu’elle doit être présentée pour la seconde fois devant le JLD, Reine est réveillée brutalement, à 4h du matin, pour être conduite à l’aéroport. Face à ses cris en montant dans l’avion, l’escorte décide de la ramener à Rennes pour la présenter au juge. Malgré le désespoir de la jeune femme, le JLD prononce une nouvelle prolongation de 20 jours.

De retour au CRA, Reine se retrouve seule face à ses angoisses.

 Selon le témoignage de la visiteuse, samedi 20 décembre, « vers 4h, sans avoir été invitée àse préparer a minima, Reine a été entravée, pieds et mains, et n’a pu s’opposer à son départ…Elle se retrouve au Nigéria, pays dangereux, seule, sans argent, ne sachant pas où est sa famille … »

Comment peut-on , en notre nom à tous, infliger de tels traitements à un être humain, et qui plus est, à une femme en danger à son retour au Nigéria compte tenu de son histoire antérieure ?

 Comme de nombreuses femmes nigérianes, Reine fuyait un réseau d’esclavagisme moderne qui l’obligeait à se prostituer pour rembourser le passeur. Malgré ses craintes de représailles, elle avait fini par se résoudre à dénoncer ses proxénètes en espérant obtenir la protection de la France…

Il faut rappeler qu’en avril 2013, Reine avait envoyé une plainte écrite au procureur de la République de Tours pour dénoncer le réseau organisé de proxénétisme (dont l’activité s’apparente à une traite des êtres humains) qui avait organisé sa venue en France et l’avait soumise à la prostitution à Bordeaux, plainte classée sans suite par le Procureur de Tours…

Au CRA de Rennes St-Jacques, Reine avait souhaité être entendue par les services de police pour, à nouveau, dénoncer le réseau de proxénétisme, demande non suivie d’effets !

 Si la plainte avait été classée sans suite en 2013, c’est que Reine n’avait pu donner alors plus d’éléments suffisants aux forces de police par peur des représailles. Par la suite, elle s’est finalement résolue à aller plus loin dans la dénonciation du réseau dont elle était victime, lorsqu’elle a été enfermée au centre de rétention. Rien que pour cette raison, elle aurait dû bénéficier du dispositif prévu dans la loi (CESEDA article L316-1 et R316-1) qui lui aurait permis d’être mise à l’abri durant 30 jours, afin de poursuivre sa démarche dans les meilleures conditions possibles.

Au lieu de cette protection que la France lui devait, les autorités françaises ont décidé de l’expulser !  Un plan d’action national contre la traite des êtres humains a pourtant été adopté en mai 2014 et cette lutte est une politique publique à part entière…

 Nous tenions à vous informer que nous sommes profondément révoltés par cette expulsion que nous trouvons ignoble et cette politique inhumaine rendue en notre nom et financée par nos impôts. Nous continuerons de lutter contre cette politique migratoire basée sur la suspicion et l’obsession sécuritaire au mépris des valeurs humaines qui nous animent.

 Signatures : MRAP 35 ; RESF 35 ; CCFD -Terre solidaire 35 ; La Cimade Rennes / Hendaye ; La Vie Nouvelle 35 ; Ensemble ! 35 ;  Bienvenue 35 ! ; Cercle de silence 35 ; Un toit, c’est un droit ; LDH Rennes/ Redon / Paris ; Parti de Gauche 35. (Cette liste n’est sans doute pas exhaustive, elle est susceptible d’évoluer, tant ce drame a suscité d’indignation).

Marche ou crève: Angoulême déclare la guerre aux sans-abris

Tollé contre le maire d’Angoulême. L’installation, par la municipalité, de grillages condamnant l’accès à des bancs publics scandalise, d’autant plus que l’objectif est clairement affiché et assumé : des commerçants demandent à la municipalité d’éloigner les personnes sans domicile de leurs boutiques. Demande acceptée. Circonstance agravante : ces installations ont été réalisées la veille de Noël . Pas très chrétien ! Et sur les réseaux sociaux, on s’enflamme, on dénonce.

À juste titre, évidemment.

Mais curieusement, on s’emballe moins vite lorsque de tels dispositifs sont l’œuvre de designers. Eh oui, ça existe ! Prenez les bancs publics par exemple. Il suffit d’installer, en leur  milieu, une sorte d’accoudoir : on ne peut plus s’y allonger. Le mobilier urbain destiné à éloigner les sans-abri pullule dans les villes, et pas seulement dans les villes de droite. Les villes de gauche généralement n’installent pas ces dispositifs : les propriétaires le font eux-mêmes. Et on sait bien que la propriété, c’est sacré : on ne peut donc rien faire…

Souvent c’est plus subtil encore : des pics élégants, des plots, petits arceaux sur l’appui de vitrine, qui empêchent même de s’asseoir, eux aussi élégants, sont installés sur les surfaces qui pourraient constituer un lieu de repos. Ces dispositifs sont si nombreux qu’un site leur est consacré, intitulé « Marche ou crève » : « Ce blog recense les moyens architecturaux pour confisquer l’espace public aux populations. Du mobilier urbain anti-SDF à la disparition des bancs, en passant par l’invasion des terrasses sur les places ». Cachez cette misère que je ne saurais voir ! Le bourgeois a ses pudeurs, comprenez-vous… Mais c’est du design, presque de l’art ! en fait, c’est de la culture !

Tandis que le maire d’Angoulême arrive avec ses gros sabots et son vulgaire grillage… ça jure un peu à côté d’une bijouterie !

Lire également cet article sur le site d’Arte.

Une pétition a été mise en ligne ici pour demander le démontage de ces cages.

 

 

Projet de réforme du droit d’asile : peut mieux faire !

Le premier ministre avait annoncé une réforme du droit d’asile. Des consultations ont eu lieu, avec les associations de défense des droits de l’Homme, mais le résultat de cette démarche est loin de les satisfaire.

Nous publions ici un avis important, celui de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNDH), où siège notamment Michel Miné, membre du comité central de la Ligue des droits de l’Homme, et qui était venu en octobre 2013 à Loudéac à l’invitation de la section LDH Loudéac centre Bretagne, dans le cadre de la journée internationale du refus de la misère, faire une conférence intitulée « la reconnaissance de la discrimination de la misère, une utopie ? ».

D’autres avis ont été émis, par la Ligue des droits de l’Homme (lire ici), le Défenseur des droits (télécharger ici), ainsi que par le groupe de travail « Asile et immigration » du réseau Alerte (lire ici). La liste n’est pas exhaustive. Avis tous très partagés comme vous pourrez le constater, en raison du manque notable d’ambition, malgré quelques avancées comme le caractère suspensif des recours.

Rappelons que les articles 13, 14, et 15 de la déclaration universelle des droits de l’Homme, qui a été adoptée par la France, établit le droit d’asile comme un droit fondamental :

Article 13

1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat.
2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.

Article 14

1. Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays.
2. Ce droit ne peut être invoqué dans le cas de poursuites réellement fondées sur un crime de droit commun ou sur des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

Article 15

1. Tout individu a droit à une nationalité.
2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité.

Avis de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNDH)

Paris, le 21 novembre 2014 – La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), sur saisine du ministre de l’Intérieur, rend aujourd’hui un avis sur le projet de loi relatif à la réforme de l’asile, présenté le 23 juillet 2014 en Conseil des ministres. Ce projet s’inscrit dans le processus de communautarisation de l’asile, au titre duquel la France se doit d’assurer la transposition de quatre directives européennes définissant un régime d’asile européen commun.

Dans le contexte actuel marqué par les conflits armés en Irak, en Syrie et ailleurs, ainsi que par la survenance d’événements tragiques aux frontières de l’espace Schengen, il est à craindre que les pouvoirs publics ne soient, une fois de plus, tentés de durcir leur politique de contrôle des flux migratoires, et de prendre des mesures de plus en plus restrictives concernant l’exercice du droit fondamental d’asile. Pour Christine Lazerges, présidente de la CNCDH, « La prolifération de discours sécuritaires assimilant à tort politique d’asile et politique d’immigration et opposant les « bons » demandeurs d’asile aux « mauvais » risque d’entraîner un repli identitaire portant préjudice à l’exercice du droit d’asile par l’alimentation d’un climat de suspicion généralisée à l’encontre de ceux qui sollicitent une protection internationale ».

Pourtant, en 60 ans le nombre de bénéficiaires de l’asile est resté le même. La crainte, souvent exprimée, d’un afflux massif n’est donc pas fondée.

Par son avis, la CNCDH s’inscrit dans sa tradition de défense des droits fondamentaux et appelle le gouvernement et le législateur à aborder la réforme du droit d’asile avec davantage d’ambition. Certes elle relève plusieurs aspects positifs dans le projet de loi, comme notamment l’extension de l’effet suspensif des voies de recours, la présence d’un tiers lors de l’entretien mené par l’agent de l’OFPRA, la reconnaissance d’un droit à l’hébergement pour tous les demandeurs d’asile ou le maintien d’un juge spécialisé de l’asile. Mais le projet lui paraît devoir être amélioré dans le sens d’une meilleure garantie des droits et libertés fondamentaux.

A cette fin, la CNCDH propose dans son avis articulé en quatre axes, des recommandations concrètes qui permettront de garantir mieux encore :

  • le droit à un accès effectif à la procédure d’asile ;
  • le droit au traitement équitable de la demande d’asile ;
  • le droit à des conditions matérielles d’accueil ;
  • le droit à la prise en compte de l’état de vulnérabilité.

 Synthèse des principales recommandations de la CNCDH

Recommandation n° 1 : La CNCDH recommande aux pouvoirs publics de valoriser le savoir-faire associatif et de prévoir des financements permettant aux associations de remplir leurs missions dans de bonnes conditions. Elle se doit tout particulièrement de saluer le travail considérable et le dévouement exemplaire des associations impliquées au premier chef dans l’accueil, l’orientation, l’hébergement et l’accompagnement des demandeurs d’asile.

Recommandation n° 2 : La CNCDH recommande l’urgente simplification de la législation relative au droit d’asile.

Recommandation n° 3 : La CNCDH recommande de supprimer du projet de loi toutes formulations et terminologies entretenant une confusion fâcheuse entre les questions d’asile et d’immigration (par exemple, l’emploi du vocable « l’étranger »), ainsi que celles pouvant être interprétées comme l’expression d’une méfiance de principe manifestée à l’égard de ceux qui sollicitent une protection internationale (par exemple, l’emploi récurrent de doubles négations telles que l’exigence que la demande de réexamen ne soit pas irrecevable ou que la demande d’asile à la frontière ne soit pas manifestement infondée).

Recommandation n° 4 : La CNCDH recommande de consacrer dans le CESEDA la définition donnée par le HCR des motifs de craintes de persécution tenant à l’appartenance à un certain groupe social.

Recommandation n° 5 : La CNCDH recommande de faciliter la domiciliation des demandeurs d’asile.

Recommandation n° 6 : La CNCDH recommande de supprimer le préalable du passage en préfecture. A tout le moins, si celui-ci devait être maintenu, elle en souhaite ardemment l’extrême simplification.

Recommandation n° 7 : La CNCDH recommande de confier à une autorité qui n’est ni sous la tutelle ni sous le pouvoir hiérarchique de l’exécutif, l’ensemble des questions relatives à l’accès au territoire français des demandeurs d’asile et à la décision à prendre sur l’octroi d’une protection internationale.

Recommandation n° 8 : La CNCDH recommande qu’il soit procédé à l’enregistrement de la demande d’asile dans un délai de trois jours.

Recommandation n° 9 : La CNCDH recommande de reconnaître à tous ceux qui sollicitent une protection internationale, sans distinction, un véritable droit au séjour sur le territoire français pendant la durée de la procédure d’asile.

Recommandation n° 10 : La CNCDH recommande de remédier aux difficultés relatives à l’orientation de la procédure d’asile en garantissant les droits des demandeurs faisant l’objet d’une « procédure Dublin » par l’application systématique des clauses humanitaire et de souveraineté. En outre, la CNCDH est opposée à la possibilité de placer en rétention ces demandeurs d’asile.

Recommandation n° 11 : La CNCDH recommande d’entourer la décision de placement en procédure accélérée de davantage de garanties en confiant à la seule autorité responsable de la détermination, le soin de décider de l’orientation de la procédure d’asile. Elle recommande également de permettre à la CNDA, en cas de décision de placement en procédure accélérée affectée d’un vice de procédure, d’annuler celle-ci et de renvoyer à l’OFPRA l’examen de la demande d’asile.

Recommandation n° 12 : La CNCDH recommande d’interdire le placement des mineurs isolés étrangers en procédure accélérée.

Recommandation n° 13 : La CNCDH recommande de revoir les motifs de placement en procédure accélérée, en rappelant tout particulièrement sa ferme opposition à la notion de « pays d’origine sûr ».

Recommandation n° 14 : La CNCDH recommande de garantir une aide lors du dépôt de la demande d’asile en :

  • informant les demandeurs, dans une langue qu’ils comprennent, de la procédure à suivre et de leurs droits et obligations au cours de la procédure,
  • leur permettant de bénéficier gratuitement des services d’un interprète
  • Recommandation n° 15 : La CNCDH recommande d’entourer l’examen des demandes d’asile à la frontière de davantage de garanties en rappelant notamment que l’appréciation de la recevabilité de ces demandes ne peut en aucun cas relever d’un examen au fond des craintes de persécution invoquées par l’intéressé.

Recommandation n° 16 : La CNCDH recommande l’organisation en zone d’attente d’une permanence d’information et d’une permanence d’avocat au titre de l’aide juridictionnelle.

Recommandation n° 17 : La CNCDH recommande d’améliorer l’examen de la demande d’asile sur le territoire en renforçant la qualité des auditions et celle du compte rendu d’audition. En outre, le principe du contradictoire exige que la discussion sur la transcription de l’entretien et sa communication aient systématiquement lieu avant la prise de décision et ce, que la procédure soit normale ou accélérée.

Recommandation n° 18 : La CNCDH recommande que :

  • le demandeur soit informé avant l’entretien de la possibilité d’être assisté par un conseil ;
  • le demandeur puisse se présenter à l’entretien accompagné d’un avocat ou d’un représentant d’une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d’asile, étant précisé que l’effectivité de cette garantie dépendra des moyens consacrés à cette assistance ;
  • le conseil puisse jouer un rôle actif au cours de l’entretien et non uniquement à la fin de celui-ci.

Recommandation n° 19 : La CNCDH recommande de supprimer toute référence à la preuve dans les dispositions du projet de loi relatives à l’appréciation par l’OFPRA de la demande d’asile. Elle entend également rappeler que le principe d’intime conviction s’oppose à la fixation de toute règle gouvernant l’appréciation d’une demande d’asile et interdit de déterminer a priori la valeur probatoire d’un indice ou de tout autre élément de fait. Elle recommande tout particulièrement de veiller à ce que les nouvelles dispositions n’établissent aucune hiérarchie entre les « craintes de persécution » et les « persécutions déjà subies ».

Recommandation n° 20 : La CNCDH recommande de réduire la durée de la procédure d’asile en écartant tout gel du traitement des demandes. La procédure menée devant l’OFPRA doit être encadrée dans un délai de 6 mois, étant précisé que la réduction des délais ne doit aucunement nuire à l’effectivité des garanties procédurales reconnues aux demandeurs d’asile.

Recommandation n° 21 : La CNCDH recommande que toute décision d’irrecevabilité rendue par l’OFPRA soit conditionnée par l’exigence d’effectivité de la protection dans l’Etat concerné – qu’il soit ou non membre de l’UE – et la possibilité d’une réadmission. La CNCDH préconise également de permettre à la CNDA, en cas de décision d’irrecevabilité affectée d’un vice de légalité, d’annuler celle-ci et de renvoyer à l’OFPRA l’examen de la demande d’asile.

Recommandation n° 22 : La CNCDH recommande d’améliorer le régime juridique des décisions de clôture.

Recommandation n° 23 : La CNCDH recommande d’instituer un recours suspensif de plein droit dans le cadre de l’ensemble des procédures d’asile.

Recommandation n° 24 : La CNCDH recommande d’allonger le délai de recours à l’encontre des décisions de refus d’entrée sur le territoire français, des décisions de transfert des personnes faisant l’objet d’une procédure « Dublin » et des décisions d’irrecevabilité ou de rejet prononcées à l’encontre d’un demandeur d’asile en rétention. Elle recommande également la transformation des délais d’heure à heure en délais à jours ouvrés.

Recommandation n° 25 : S’agissant de la procédure d’asile à la frontière, la CNCDH recommande de fixer pour point de départ du délai de recours contre les décisions de refus d’entrée, la date de remise des notes d’entretien de l’OFPRA, afin que le demandeur soit mis à même de motiver son recours contre la décision de rejet de l’office.

Recommandation n° 26 : La CNCDH recommande que la CNDA statue en formation collégiale, que la procédure soit accélérée ou normale. Devant cette juridiction, le libre choix d’un défenseur doit en outre être préservé, y compris au titre de l’aide juridictionnelle. Un temps suffisant pour la préparation de la défense doit être impérativement garanti.

Recommandation n° 27 : La CNCDH recommande de garantir des conditions matérielles d’accueil en :

  • améliorant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement, notamment par la création de nouvelles places dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile,
  • réévaluant le montant de l’allocation temporaire d’attente,
  • renforçant les droits sociaux des demandeurs d’asile, afin de leur permettre d’accéder au marché de l’emploi après le dépôt de la demande, d’être affiliés au régime général de l’assurance maladie et de bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire.

Recommandation n° 28 : La CNCDH, marquant son attachement au libre choix par les demandeurs d’asile de leur lieu de résidence, recommande aux pouvoirs publics de ne pas opter pour un hébergement directif et surtout de ne pas mettre en place un système de contrôle des demandeurs d’asile proche d’un régime d’assignation à résidence. En effet, chaque demandeur d’asile doit avoir la faculté de pourvoir lui-même à son hébergement ou d’être hébergé par un tiers sans se voir pénalisé par la perte de son droit à une allocation. Si le principe d’un hébergement directif devait néanmoins être retenu, la CNCDH estime qu’il est nécessaire de recueillir le consentement du demandeur d’asile.

Recommandation n° 29 : La CNCDH recommande de prendre en compte l’état de vulnérabilité des demandeurs d’asile afin de répondre à leurs besoins réels et sans que cela se fasse au détriment de ceux qui ne présentent pas un tel état de vulnérabilité. En outre, l’utilisation d’outils d’identification de la vulnérabilité ne saurait pallier le manque de moyens dédiés à l’accompagnement et à l’offre de soins afférents. Ces outils doivent être appréciés et validés par les instances responsables, en particulier par le ministère de la santé et des affaires sociales ; ils doivent également être discutés au préalable, de manière pluridisciplinaire, avec les institutions référentes sur le sujet (autorités universitaires, sociétés savantes reconnues, etc.), afin d’éviter que ne soit créée une filière spécialisée pour les demandeurs d’asile sous la responsabilité du ministère de l’intérieur. Enfin, la vulnérabilité doit pouvoir être identifiée tout au long du parcours du demandeur d’asile, et non exclusivement en amont ou lors du dépôt de la demande.

Recommandation n° 30 : La CNCDH recommande l’interdiction de toute privation de liberté pour les mineurs isolés étrangers, ceux-ci ne devant en aucun cas être placés en zone d’attente ou en rétention administrative. Pour la CNCDH, les pouvoirs publics doivent considérer que le fait pour un mineur d’être isolé et étranger emporte une présomption de danger, qui fonde, à son tour, le droit d’accéder à la protection du juge des enfants. En conséquence, les mineurs isolés étrangers doivent recevoir une protection judiciaire et le soutien de l’aide sociale à l’enfance.

 

« Tous unis pour les droits de l’Homme » : se méfier des imitations !

« Faire des droits de l’Homme une réalité » : qui pourrait ne pas être d’accord ?

C’est le titre d’un document luxueus, présenté sous la forme d’un dossier qui rassemble quelques fiches, et un livret sur la déclaration universelle des droits de l’Homme, offert gracieusement par l’association « Tous unis pour les droits de l’Homme », en anglais « United for human rights » (son siège est aux Etats-Unis), et qui publie également un site Internet, fr.humanrights.com, qui réaffirme sa vocation pédagogique.

Jusqu’ici, rien que de normal.

La brochure est accompagnée d’un DVD, avec un documentaire sur les droits de l’Homme, et des « spots d’information 30 droits – 30 spots ». Il y a donc bien une vocation pédagogique forte.

Pour se légitimer, l’association cite des personnalités qui lui témoignent leur soutien : « un » membre du conseil d’administration de l’association (?) des Nations unies, « un » membre du gouvernement suédois, « un » évêque chrétien du Royaume-Uni, « un » fonctionnaire de l’ambassade d’Afrique du Sud (laquelle ?), « un » enseignant des Etats-Unis », « un » haut fonctionnaire des Philippines… avec citation de l’intéressé à la clé. Curieusement, aucune identité : « un »

Beaucoup plus discret, et cette fois ça n’est pas anonyme, le soutien d’une association très connue. On peut lire sur le site de cette association qu’elle « soutient la plus grande campagne d’information non gouvernementale visant à faire connaître au monde entier la Déclaration universelle des droits de l’Homme ».

Question : quelle est cette association qui soutient sans réserve cette campagne d’information ?

Ça n’est en fait pas une association, c’est une église. Richissime. Il s’agit de l’église de scientologie…

L’église de scientologie, qui pratique avec méthode la manipulation mentale, et a fait l’objet de nombreuses condamnations, est sans nul doute experte en matière des droits de l’Homme…

On reconnaît là les méthodes de nombreuses sectes  et associations d’extrême droite, qui attirent le public avec des valeurs unanimement respectées et qui, dans le même temps, les combattent consciencieusement. Elles avancent masquées, et parient sur la naïveté et la fragilité de certaines personnes pour les attirer dans leurs filets…

 

 

Un jeune Malien cible de l’extrême droite dans le Finistère

Additif 14/12/2014 18h40

Comme c’est bizarre : Le Lay (qui signe sa pétition Boris L. On a parfois des pudeurs…) a curieusement supprimé son appel aux don pour « financer » son « opération » (lire en fin d’article)… Et quelques heures plus tard, l’article réapparaît, avec une autre illustration…

Par ailleurs, une omission dans ce papier : Le Lay a également lancé une opération baptisée « BDS, boycott, décolonisation, sanction », directement inspirée du mouvement pro-palestinien destiné à boycotter les produits israëliens. Le Lay a lancé cette mascarade pour intimider la personne qui a signé un contrat d’apprentissage à Boumara.

Ça se passe à Concarneau (29) :

« Bourama est un jeune Malien de 17 ans, originaire de Bamako.

Il a quitté le Mali en 2012 après avoir perdu son père, tué par des islamistes. Ces derniers menaçant de tuer tous les jeunes, sa mère a réuni toutes ses économies pour lui faire quitter le pays, vendant sa maison et ses derniers biens dans le but de préserver la vie de son fils.

Après avoir connu les affres d’une vie de clandestin, il est arrivé en Bretagne et recueilli par une association. Il est installé à Concarneau depuis Aout 2014

Il est actuellement en stage dans une boulangerie. Le renouvellement lui a été refusé par la préfecture au motif qu’il n’avait pas effectué ses 6 mois de formation et ce malgré le fait qu’il soit inscrit en contrat d’apprentissage en pâtisserie à Cuzon pour les deux années à venir.

Malgré le soutient de ses patrons et du Président de la Chambre des Métiers, son visa aura expiré à sa majorité (le 14 février prochain)

Il est important de soutenir ce jeune homme et de signer cette pétition pour qu’il puisse, après une vie déjà dure, se projeter et avoir enfin un avenir serein en France ». (Texte de la pétition mise en ligne ici, et qui a déjà recueilli 3658 signatures, le 14 décembre à 15h16. Vous pouvez signer aussi !).

Alors, évidemment, ce mouvement de solidarité agace le petit Boris Le Lay, rédacteur du site breizatao.

Comme il le fait régulièrement depuis quelques semaines, il utilise les moyens qu’utilisaient ses ancêtres de la milice : délation, mise à l’index, appels à boycott du commerce de l’artisan chez qui le jeune homme fait son apprentissage. Ces dernières semaines, il avait déjà lancé des appels à la délation contre les francs-maçons, les membres de la Ligue des droits de l’Homme, et d’autres organisations qui n’ont pas l’heur de lui plaire. A la Ligue, on est plutôt fiers d’être la cible de ce pauvre garçon.

Mais le petit Boris doit se sentir bien seul : ça ne fonctionne pas. En dehors des quelques dizaines d’abrutis qui inondent certaines pages facebook de militants des droits de l’Homme (c’est très facile de se fabriquer plusieurs identités sur Internet, et/ou de générer d’innombrables adresses IP, et l’extrême droite est coutumière du fait, pour donner l’illusion de rassembler des foules), la mayonnaise ne prend pas, et la triste pétition qu’il a lancée rassemble pour le moment 566 signatures (14/12, 15h24), à comparer avec les « près de 40 000 personnes (…)mises au courant de l’affaire » par les réseaux sociaux. Mais ceci n’empêche pas le marchand de galettes de lancer un appel solennel au peuple : le petit Boris a besoin d’argent ! Ayez pitié de lui ! Rendez-vous compte, il a déjà investi « environ 70€ » dans cette opération (lu sur son site) qu’il intitule « remigration » (c’est le mot à la mode chez les fachos en ce moment ; jusqu’ici c’était « le grand remplacement »…). À ce propos il semblerait que ce brave homme ait effectué sa propre « remigration » du Japon : rien ne s’oppose donc plus à ce qu’il aille purger les deux mois de prison ferme, et à payer les quelques milliers d’euros d’amende et de dommages intérêts auxquels il a été condamné ! Donc Boris lance un appel à assistanat. Ça n’est pas bien.

La pétition pour la régularisation de Bourama est toujours en ligne, et il est encore temps de la signer, ne serait-ce que pour énerver la breizhtapo !

Non au « mur de la honte » à Calais !

Le nombre de migrants explose à Calais, depuis quelques mois. Comme d’habitude, les politiques, incapables de trouver des solutions pérennes et respectueuses des droits de ces réfugiés, parent au plus pressé, avec des solutions qui n’en sont pas, consistant la plupart du temps à déplacer le problème. Dernière idée : la construction d’un mur, comme l’ont fait les Espagnols à Ceuta et Mellila (lire ici et ). Dans un article consacré à ce problème, le site des Inrocks précise : « Le ministre de l’Intérieur actuel, Bernard Cazeneuve, pressé de trouver une solution, a annoncé l’ouverture en janvier d’un centre de jour – ne passent-ils pas leurs nuits à courir après des camions ? Les associations y voient surtout un moyen de nettoyer le centre-ville. Parallèlement, le ministre de l’Intérieur a passé un accord avec le Royaume-Uni : les Anglais financent à hauteur de 15 millions d’euros la construction d’une palissade infranchissable autour du port de Calais, enjeu touristique et économique. Il ne faut plus voir au journal de 20 heures ces images de centaines de migrants entrant dans le port et donnant corps au fantasme d’invasion lepéniste – que les chiffres infirment »

Le Mouvement Emmaüs, et l’Organisation pouri,e Citoyenneté universelle, auxquels s’est jointe la Ligue des droits de l’Homme et de nombreuses autres associations lancent un appel pour faire échouer ce triste projet.

L’appel est téléchargeable ici, et son texte reproduit ci-dessous.

Douze ans après la fermeture du hangar de Sangatte, la France va-t-elle avoir son Ceuta et Me­lilla à Calais ? Le nombre croissant de migrants, présents depuis plusieurs mois dans le Calaisis, conduit nos gouvernants à franchir une étape dangereuse pour les libertés et le respect des droits des migrants.

Non au « mur de la honte » à Calais !

La légitimité de la présence des migrants est incontestable. Les pays dont ils proviennent – Afghanistan, Erythrée, Irak, Libye, Soudan, Syrie, notamment – en témoignent. Ils fuient la guerre, la répression, la dictature et l’arbitraire à la recherche d’une protection en Europe. Contraire­ment à ce qui est répété inlassablement, y compris au sommet de l’Etat, il ne s’agit nullement d’une « invasion ». Les conditions de survie indignes qui leur sont imposées en France sont into­lérables. Malgré la solidarité des associations locales et la générosité des calaisiens, ils su­bissent l’abandon des pouvoirs publics qui proposent, à la marge, des solutions insuffisantes et n’assument pas leur responsabilité. Des moyens puissants doivent être déployés immédiate­ment pour secourir ces réfugiés qui se sont tournés vers nous. Faut-il attendre les premiers morts de froid dans les jungles de Calais pour déclencher enfin une réelle prise de conscience ?

Une nouvelle escalade dans l’aveuglement est en marche avec la construction d’un mur et le déploiement d’un dispositif sécuritaire de grande envergure à Calais, véritable appareil de guerre contre les migrants, entre la France et le Royaume-Uni. Nous, migrants et organisations de la société civile qui travaillons côte à côte depuis des années, refusons une telle dérive et deman­dons à nos concitoyens de s’y opposer fermement et massivement.

Depuis des décennies, les contrôles renforcés aux frontières, les dispositifs de surveillance, d’in­timidation et de contention, les mesures de déportation des migrants ont totalement échoué, ont coûté très cher et ont surtout provoqué des milliers de morts. Le mur en construction à Calais n’est qu’une nouvelle et triste illustration de cette réponse sécuritaire. Est-ce cela que nous voulons poursuivre, dans une fuite en avant inacceptable et irresponsable ?

En refusant l’asile et l’accueil, c’est la liberté dont nous jouissons nous-même qui est menacée : nous construisons les murs de notre propre prison. De cela nous ne voulons pas ! L’érection de fortifications à Calais doit cesser, et des discussions s’ouvrir sans attendre avec les autorités britanniques pour recevoir les demandes d’asile qui s’adressent à elles (comme cela a été pra­tiqué en 2002, à l’occasion de la fermeture du camp de Sangatte). Avec tous les Etats européens, ou avant eux, la France doit revoir la totalité de sa législation et de sa réglementation en matière d’asile et de migration (dénonciation du règlement Dublin et suppression de Frontex). Elle doit le faire dans le strict respect de l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, comme de la Convention de Genève. La France doit enfin réviser sa dangereuse et illusoire conception « nationale » de la migration, totalement inadaptée à la mondialisation des échanges humains et aux drames vécus aux portes de l’Europe. La France doit contribuer, au sein de l’ONU, à promouvoir une nouvelle gouvernance en matière de migration, respectueuse de la li­berté de circulation, des droits enfin reconnus et appliqués pour tous les migrants.

Non au « mur de la honte » à Calais !

Le 18 décembre prochain, Journée Internationale des Migrants, nous, migrants et organisations de la société civile engagées aux cotés des migrants, appelons à une mobilisation d’ampleur, à Calais et partout en France,

► pour dénoncer l’indignité de l’accueil des migrants et exiger, conformément aux propositions des acteurs associatifs, la mise en place d’un dispositif d’accueil réaliste dans le Calaisis ;

► pour refuser la réponse sécuritaire et la construction, en notre nom, du mur de la honte à Calais ;

► pour obtenir de nouvelles politiques migratoires au niveau national, européen et mondial, respectueuses des droits et de la dignité des migrants.

Marseille : le triangle jaune pour les SDF abandonné, la carte serait modifiée

Le projet de badge destiné aux SDF serait abandonné et la carte modifiée.

Le projet de triangle jaune distribué aux personnes sans domicile fixe à Marseille a été abandonné, alors que sa distribution avait commencé.
Rappelons les faits : le Réseau éducation sans frontière (RESF) s’était ému (lire ici) de la distribution, à l’initiative de la mairie et du Samu social, d’une « carte de secours » aux SDF, pour faciliter la tâche des services de secours et pour faciliter l’accès de ces personnes aux soins. Le problème, c’est que cette carte, qui était en fait un badge, était ornée sur son recto, d’un logo, un triangle jaune, rappelant forcément l’étoile jaune que devaient porter les Juifs pendant la première guerre mondiale

D’autres associations s’étaient émues, notamment le collectif « Le Jugement dernier », qui regroupe des personnes à la rue. Une manifestation était prévu ce jour, mercredi 3 décembre. La Croix-rouge et le Secours populaire ont eux aussi émis de sérieuses réserves (lire ici).

Xavier Méry, adjoint au maire délégué à la solidarité, et René Giancarli ont aussitôt plaidé leur bonne foi, expliquant que cette initiative n’avait qu’un seul but : venir en aide aux personnes sans abri (lire ici), allant jusqu’à affirmer que la population concernée appréciait largement cette opération. « Je suis scandalisé par les polémiques absurdes autour de la carte de secours distribuée par le Samu Social, qui remettent en cause non seulement la nécessité absolue de ce dispositif pour les personnes sans domicile fixe mais également les engagements de la Ville de Marseille, du Samu Social et de ses bénévoles pour venir en aide aux plus démunis », réagit dans un communiqué Xavier Mery, adjoint au maire de Marseille délégué à l’intégration et à la lutte contre l’exclusion. (Source)

Dont acte: il ne s’agit pas de faire de procès d’intention, et on préfère qu’il s’agisse simplement d’une grosse maladresse. Qui méritait d’être signalée.

Et, d’après le journal Le Monde, la distribution du badge a été interrompue. Le projet ne seraut pas abandonné, mais amendé, de telle sorte qu’il n’y ait plus de risque qu’il soit vécu ou interprété comme une discrimination, une stigmatisation.

 

70ème anniversaire du massacre de Thiaroye (Sénégal) : la France responsable

André Bokar, un des prisonniers du camp de Trévé.

On commémore cette année le 70ème anniversaire du massacre des Tirailleurs sénégalais, à Thiaroye, près de Dakar (Sénégal).

Ces soldats, qui avaient combattu pour la France pendant la 2ème guerre mondiale, avaient, après la défaite de 1940, été faits prisonniers par les Allemands. Mais les nazis ne voulaient pas les interner chez eux : ils ont donc construit des camps en France. A la libération, la France les a renvoyés chez eux. Mais il y avait un problème : ils n’avaient pas reçu leurs soldes. Et ils ne l’ont pas admis. C’est la principale raison du massacre qui s’est déroulé Thiaroye : pour ne pas verser ces soldes, l’armée française a tiré, massacrant plusieurs centaines de ces soldats africains.

La région de Loudéac est concernée par ce drame, puis qu’une centaine de ces soldats ont été enfermé à Trévé, pendant trois mois. La section LDH Loudéac centre Bretagne a, en 2011, réalisé un travail important sur ce dossier, en collaboration avec l’historienne Armelle Mabon. Ce travail s’est terminé par l’édition d’un livre, « Nous n’avions jamais vu de Noirs » (éditions Récits), recueil de témoignages de Trévéens, et par l’érection, par la municipalité de Trévé, d’une stèle à la mémoire de ces soldats (voir le dossier des témoignages ici, et l’article sur l’inauguration de la stèle de Trévé là). Renseignements sur l’ouvrage « Nous n’avions jamais vu de Noirs » ici.

A l’occasion de ce 70ème anniversaire, la Ligue des droits de l’Homme a publié un communiqué, demandant à la France de reconnaître enfin sa responsabilité dans ce drame.

IL Y A SOIXANTE-DIX ANS, MASSACRE À THIAROYE (SÉNÉGAL) : LA FRANCE DOIT RECONNAÎTRE SES RESPONSABILITÉS

Il y a soixante-dix ans, à Thiaroye, près de Dakar, plusieurs centaines de tirailleurs africains démobilisés qui demandaient le paiement de leur solde de captivité, prévue par les textes en vigueur à leur départ de France, ont été qualifiés de « mutins ». La Ligue des droits de l’Homme demande à la France de reconnaître les faits et d’assumer ses responsabilités.

Ces faits sont établis. Des dizaines de soldats ont été tués et blessés, d’autres condamnés. Ils étaient de retour en Afrique après avoir été appelés en 1940, pour défendre la France, puis détenus sur son territoire par les nazis qui refusaient qu’ils le soient en Allemagne. Le 1erdécembre 1944, ils ont subi une répression brutale qui a fait plusieurs dizaines de morts, suivie d’un procès où trente-quatre d’entre eux ont été lourdement condamnés.

Le silence officiel sur cet événement a commencé à être levé en 2004 par les déclarations de l’ambassadeur spécial, Pierre-André Wiltzer, dépêché à Dakar par le président Chirac pour la première Journée du tirailleur. Puis, par celles du président Hollande qui, avant de se rendre au Sommet de la francophonie de Kinshasa, a regretté à Dakar, le 12 octobre 2012, cette « répression sanglante ». Les recherches récentes des historiens, notamment celles de l’universitaire Armelle Mabon, de l’université de Bretagne-Sud-Lorient, et d’un chercheur auteur d’une thèse à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, Martin Mourre, conduisent à une meilleure connaissance des faits et amènent la Ligue des droits de l’Homme à demander aux autorités françaises de reconnaître clairement les injustices commises.

Plus d’un millier de tirailleurs embarqués à Morlaix, le 5 novembre 1944, sur le « Circassia », et arrivés le 21 novembre, à Dakar, ont été spoliés des trois quarts de leur solde de captivité prévue par les textes officiels. Et quand, le 28 novembre, ils ont demandé à recevoir ce qui leur était dû, ils ont été considérés en état de rébellion. L’armée a ouvert le feu sur eux, et justifié cette répression en prétextant des tirs de leur part.

En réalité, à ces tirailleurs qui avaient passé plus de quatre années en France, lié connaissance avec des Français de métropole, et, pour certains, rejoint des groupes de Résistants après le débarquement de Normandie, il s’agissait de faire comprendre qu’ils devaient réintégrer en Afrique française leur statut d’indigènes. Pour cela, selon le mot du général commandant les troupes coloniales à Dakar, un « coup de bistouri » douloureux était nécessaire. Comme lors des massacres de Sétif et Guelma en Algérie, quelques mois plus tard, il s’agissait d’ôter à ces colonisés toute idée d’émancipation.

Soixante-dix ans après, la LDH estime que la France s’honorerait à reconnaître clairement les faits. A l’occasion du Sommet de la francophonie à Dakar, elle demande aux autorités françaises :

  • de rendre publique la liste nominale des tirailleurs à bord du navire « Circassia » parti de Morlaix, le 5 novembre, et arrivé à Dakar, le 21 novembre 1944 ;
  • de reconnaître la spoliation dont ont été victimes ces tirailleurs des trois quarts de la solde de captivité qui leur était due ;
  • d’exprimer les regrets officiels de la France pour la répression qui les a frappés à Thiaroye, le 1erdécembre 1944 ;
  • de rendre publics les noms des morts et des blessés qu’elle a faits parmi eux ;
  • de s’engager au paiement aux descendants de ces tirailleurs du complément de solde dont ils ont été spoliés ;
  • de transmettre à la Cour de cassation la demande d’annulation sans renvoi des condamnations prononcées en février 1944 par le tribunal de Dakar.

Paris, le 27 novembre 2014

 

Exhibit B, Projet crocodile : la liberté de création une nouvelle fois menacée

Sale temps pour la liberté de création! Deux affaires viennent simultanément démontrer qu’il ne faut pas lâcher la pression, et la défendre obstinément, sans arrêt.

La première concerne la pièce de l’artiste Sud-Africain, Brett Bayley, intitulée Exhibit B, qui met en scène des acteurs noirs dans des situation qui évoquent l’esclavage, la ségrégation raciale, le colonialisme, les zoos humains… Des scènes dures, évidemment, puisqu’il s’agit de dénoncer des événements qui eux n’étaient pas mis en scène. Une contreverse s’est rapidement déclenchée, qui, et c’est là l’aspect particulièrement pervers de cette affaire, demande, au nom de la lutte contre le racisme, d’interdire ce spectacle. Une pétition a été lancée, dressant un procès d’intention inadmissible à l’auteur. Il semble bien que la simple évocation de ces périodes honteuses où l’homme noir était humilié, exploité, martyrisé, demeure insupportable à certains. Une contreverse qui est intervenue presque simultanément aux propos scandaleux de l’entraîneur de l’équipe de football des Girondins de Bordeaux, prouvant que la lutte contre le racisme doit toujours être à l’ordre du jour.

La deuxième affaire concerne une bande dessinée, qui évoque les violences conjugales. Elle rappelle naturellement celle qu’avait lancée M. Coppé contre le livre « Tous à poil » il y a quelques mois. Les planches de cette bande dessinée, intitulée « le projet crocodile », réalisée par Thomas Matthieu, devait être exposée par la mairie de Toulouse dans le cadre de la journée internationale contre les violences faites aux femmes. L’exposition a finalement été annulée, les élus de Toulouse considérant que la bande dessinée était « vulgaire ». On est bien d’accord : la violence contre les femmes est bien vulgaire… Une jeune femme, victime de viol conjugal, a réagi en adressant une lettre ouverte poignante au conseil municipal de Toulouse. On peut la lire ici, sur le site du Huffington post.

La Ligue des droits de l’Homme, la Licra et le MRAP, et l’Observatoire de la Liberté de création ont tous deux réagi à la cabale contre Exhibit B dans deux communiqués, qui analysent parfaitement l’enjeu de cette affaire.

La pièce de Brett Bailey, Exhibit B, est au centre d’une controverse qui a pris une forme inadmissible.

 

EXHIBIT B : UN SPECTACLE QUI NE DOIT PAS ÊTRE INTERDIT OU ANNULÉ !

Communiqué commun de la Ligue des droits de l’Homme, de la Licra et du MRAP.

D’aucuns, jugeant cette pièce sans l’avoir vue, la considèrent raciste et demandent sa déprogrammation du TGP, à Saint-Denis, et du 104, à Paris. Ils l’accusent de montrer les Noirs dans des positions de victimes, et vont jusqu’à demander son interdiction aux préfets.

Comme si la représentation de la façon dont les préjugés racistes ont pu aboutir aux situations les plus abominables, comme l’esclavage, les discriminations coloniales, les humiliations, les zoos humains, n’avait plus aucun sens aujourd’hui. Comme s’il n’était plus convenable ou utile de montrer comment l’être humain est capable de se comporter quand il se croit supérieur, grâce à la couleur de sa peau.

Dans la France d’aujourd’hui, dont les préjugés racistes n’auront pas disparu, loin s’en faut, nous, organisations antiracistes, affirmons que l’art doit être libre de contribuer à la lutte contre ce fléau, et que nul ne saurait interdire à un artiste de représenter la souffrance qui en résulte, dès lors qu’il n’en fait pas l’apologie. Nous affirmons qu’il n’est pas admissible de faire un procès d’intention à l’artiste au motif qu’il est blanc, la lutte contre le racisme étant universelle et ne pouvant dépendre de la couleur de la peau, des origines ethniques ou des convictions religieuses de ceux qui la portent.

Car l’actualité récente nous rappelle avec force la nécessité impérieuse de promouvoir en permanence le devoir de mémoire. Ainsi, dans un entretien accordé à Sud-Ouest, le 4 novembre dernier, Willy Sagnol a déclaré : « L’avantage du joueur typique africain, c’est qu’il n’est pas cher quand on le prend, il est généralement prêt au combat et on peut le qualifier de puissant sur un terrain. Mais le foot, ce n’est pas que ça. Le foot, c’est aussi de la technique, de l’intelligence, de la discipline. » Ces propos nauséeux et racistes, qui renvoient le joueur africain, le Noir, à l’animalité, à la « puissance », tandis que la technique, l’intelligence et la discipline restent l’apanage des Nordiques, des Blancs, auraient dû susciter une réprobation unanime.

Au lieu de cela, les instances officielles du football ont soutenu l’entraîneur, le président des Girondins a répondu de façon agressive à une demande de sanction en se solidarisant avec Willy Sagnol, et ont été diffusées massivement des images sidérantes de joueurs noirs et méritants venant consoler leur coach !

Si un spectacle de théâtre, dont la diffusion est infiniment plus modeste, ne peut, à lui seul, résoudre la question aussi cruciale du racisme, il est non seulement légitime qu’une œuvre, à sa manière, et avec toute la subjectivité de l’artiste, puisse s’adresser aux spectateurs sans que personne ne s’immisce entre les deux pour juger en lieu et place du public, mais nécessaire quand elle illustre, fût-elle d’une manière crue et dérangeante, les dangers des clichés les plus éculés du racisme.

 

Paris, le 21 novembre 2014

 

Paris, le 25 novembre 2014

 

communiqué de l’Observatoire dela liberté de création

Contre les préjugés, nous avons besoin d’art, de partage et de parole

Les directeurs du TGP et du 104, Jean Bellorini et José-Manuel Gonçalvès ont choisi de programmer dans leurs établissements l’installation performance Exhibit B de Brett Bailey.

Elle repose, par la succession de tableaux vivants représentant alternativement des évocations de l’esclavage, de la colonisation et de la répression violente de l’immigration, sur la dénonciation de ce que le racisme a produit de pire. Chacun de ces tableaux incarnés est porté par des performeurs qui ne quittent pas du regard les spectateurs accueillis par petits groupes. Chaque scène est accompagnée d’un cartel explicatif. La fin du parcours d’installation permet de lire les témoignages des performeurs sur leur propre expérience, mais aussi à chaque spectateur d’écrire son ressenti, quel qu’il soit.

Créé en 2010, ce spectacle a été vu depuis dans plusieurs villes européennes, à Avignon et au 104 en 2013, ou encore tout récemment à Poitiers, sans qu’aucun incident ne trouble sa programmation, ni sa découverte par des spectateurs ayant librement choisi d’y assister.

Evoquer n’est pas approuver. Tout artiste doit pouvoir librement représenter une part de l’histoire humaine passée et présente, et chercher à ébranler les consciences, à interroger les préjugés.

Pourtant, des personnes jugeant raciste et indigne un spectacle qu’ils n’ont pas vu, animent depuis plusieurs semaines une campagne d’intimidation qui va de la demande d’annulation puis d’interdiction, à la menace d’empêcher les représentations par un appel à la manifestation.

Si le procédé n’est pas nouveau, il choque toujours pour au moins trois raisons fondamentales. C’est d’abord le procès d’une intention : celle de l’artiste, celle des performeurs et celle du directeur. C’est aussi la condamnation de l’art, qui n’existe que par la représentation, l’image, le lien, la question, et surtout le dialogue du singulier et de l’universel. C’est enfin l’interdiction pour tous, demandée par quelques-uns.

L’Observatoire de la liberté de création assure de son soutien Brett Bailey, Jean Bellorini, José-Manuel Gonçalvès et leurs équipes. Le TGP et le 104 ont choisi d’accueillir une œuvre dans une programmation qu’ils assument – artistiquement et politiquement – et qu’ils  accompagnent d’une médiation, pour ce projet comme pour tous les autres. Ils ne font là que leur métier.

Il convient de garantir à chacun la liberté de devenir spectateur et de participer à la représentation d’une œuvre. L’intimidation et le désir de censure sont illégitimes, c’est dans le débat critique que chacun doit pouvoir s’exprimer.

L’Observatoire de la liberté de création demande donc à tous ceux qui partagent ses valeurs d’aider à assurer le bon déroulement des représentations.

L’Observatoire de la liberté de création appelle ses adhérents, mais aussi les citoyens et les spectateurs, à se rassembler pacifiquement sur le parvis des théâtres à l’occasion des représentations. L’Observatoire de la liberté de création assurera une mission de médiation et de dialogue, et participera au débat du 28 novembre à 19 h au TGP, qui doit permettre à tous les points de vue de s’exprimer.

Pour combattre les préjugés, nous avons besoin d’art, de partage et de parole.

Il est urgent de protéger les œuvres, les artistes et les professionnels, dans un pays qui doit porter haut la liberté de création, d’expression et de diffusion de l’art comme de la pensée.

 

Les 25 ans de la convention internationale des droits de l’enfant : la France à la traîne…

Ce 20 novembre, on célèbre le 25ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant. On ne sait pas si Manuel Valls a prévu quelque chose… Peut-être lui reste-t-il suffisamment de pudeur pour ne pas trop se manifester. Parce que les droits de l’enfant, en France, en 2014, sous un gouvernement « de gauche », ça fait quand même un peu rêver… Enfants en rétention, malgré les promesses, mineurs isolés abandonnés, dans le meilleur des cas, expulsés… Enfants Rroms condamnés à l’errance… Enfants handicapés non scolarisés (enfants autistes notamment)… le tableau est sombre. Et on n’a pas vu de progrès par rapport à la triste période sarkozyque.

Le réseau éducation sans frontière est évidemment bien placé pour dresser un bilan à l’occasion de cet anniversaire. Il le fait dans communiqué publié ce jour, et diffusé également par la Ligue des droits de l’Homme. Nous le reproduisons ci-dessous. En lien ici, le texte de la déclaration avec les réserves émises par la France.

25e anniversaire de la CIDE
La France piétine allègrement les droits des enfants

 

25ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, ratifiée par la France en 1990. Au cœur de ses principes, la non-discrimination, la recherche de l’intérêt supérieur de l’enfant et la participation de celui-ci aux décisions qui le concernent.

Dans ce pays, de nombreux mineurs n’en bénéficient pas, ou pas autant que d’autres. Parce qu’ils font partie des pauvres, ceux que l’on ne veut pas voir, qui font peur. Parmi eux, certains en sont encore davantage exclus.

Des enfants ballotés d’un hébergement de fortune à l’autre, qui dorment dans la rue, changeant d’école au gré des hébergements insalubres, déplacés, refusés d’inscription scolaire (forcément, ils sont roms)

Des enfants cachés, des enfants qui redoutent le jour, où avec leurs parents déboutés de leur demande d’asile, la Police viendra en force les chercher pour les arracher au quartier, à la ville où ils avaient repris l’espoir d’une vie normale. Des enfants qui voient leurs parents menottés, certains subir des violences lorsqu’ils refusent l’expulsion vers un pays où ils sont menacés.

Des enfants privés de liberté des jours et des jours, enfermés dans un Centre de rétention administrative, vivant eux-aussi l’angoisse de l’expulsion annoncée

Des adolescents isolés étrangers, pris en charge par l’Aide Sociale parce qu’ils sont mineurs, soupçonnés au moment de leurs 18 ans d’avoir menti, sur leur âge, leur vie : convoqués à la police, conduits à l’hôpital sous escorte policière, ils subissent des tests osseux, des examens physiologiques humiliants destinés à les caractériser comme majeurs, quelle que soit la réalité de leur parcours ou des documents fournis, et leur attribuent un âge compris entre 19,7 et 35 ans… En les disant majeurs, on fait d’eux des menteurs, profiteurs, coupables, et certains sont emprisonnés. La plupart sont « seulement » rejetés, mis hors des circuits d’accueil. Parfaits boucs émissaires de fantasmes sur l’étranger parasite. D’autres encore, mineurs ou jeunes majeurs isolés, pourtant scolarisés, vivent dans la rue.

Nous exigeons

  • Que soient vraiment appliqués tous les droits fondamentaux prévus par la Convention Internationale des Droits de lʼEnfant.
  • Qu’une politique d’accueil et d’asile, véritablement protectrice, assure aux mineurs et à leurs familles des conditions de vie décentes et durables dans ce pays.

Le 19 novembre 2014