Saint-Brieuc, dimanche 20 mars : « Nous sommes plus nombreux à vouloir aider qu’à vouloir rejeter ! « 

arton256L’interdiction de la manifestation prévue par l’extrême droite contre l’immigration et les réfugiés par le préfet est parfaitement justifiée : le discours de ces gens ne relève pas de la liberté d’expression, mais du droit pénal, puisqu’il s’agit de racisme, d’incitation à la haine raciale, qui constituent des délits prévus dans le code pénal. Il est bon également de rappeler que l’organisateur de cette manifestation, un certain Mickaël Bussard, qui prétend sans rire que cette manifestation était « apolitique », était candidat du front national aux élections municipales de Saint-Brieuc, et aux élections départementales dans le canton de Plaintel. Et que cette manifestation, organisée au niveau européen par le mouvement néonazi allemand pegida, est relayée par l’association « résistance républicaine », sorte de filiale de « riposte laïque ».

La contre manifestation prévue ce même jour par de nombreux syndicats et associations de défense des droits de l’Homme ne se justifiait donc plus. La section briochine de la Ligue des droits de l’omme, qui était partie prenante de cette manifestation, a donc pris la décision d’organiser, le 20 mars, une journée du « printemps solidaire », « pour un sursaut citoyen, dans la grande unité et fraternité qui caractérisent Saint- Brieuc et les Côtes d’Armor ».

De nombreuses organisation syndicales et associations ont déjà annoncé leur participation à cette grande manifestation, dont nous vous

Voici le communiqué de la section LDH de Saint-Brieuc.

Nous sommes plus nombreux à vouloir aider qu’à vouloir rejeter

Les événements tragiques de janvier et novembre ont soulevé une immense vague de mobilisations citoyennes exprimant la condamnation de la violence, l’attachement aux valeurs de la République française et la volonté d’être unis et solidaires.

Elles portaient haut et fort la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité comme affirmation de ne pas se laisser diviser, de garantir la liberté de conscience, de pratiquer une religion ou de ne pas en avoir, le refus des discriminations. Et pourtant, aujourd’hui, xénophobie et racisme continuent de progresser dangereusement partout.

Ils conduisent à exalter la force, à pratiquer la violence, à conjuguer la haine des faibles, des minorités et des étrangers. Ils sont nourris par des discours démagogiques qui se  saisissent de difficultés objectives, de peurs et de colères pour justifier l’injustifiable : la désignation de boucs émissaires qui seraient responsables des problèmes qu’affronte le monde.

Des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, qu’ils soient syriens, irakiens, érythréens, congolais, afghans … fuient les violences, les persécutions, la misère et se tournent vers l’Europe. Ils veulent tout simplement vivre. Nous appartenons à la même humanité.Traiter ces réfugié-e-s comme des envahisseurs, comme des marchandises illégales est inacceptable.

L’ Asile, c’est un droit ! Le destin de ces réfugié-e-s, c’est notre destin et notre avenir.

Leur accueil doit être digne. En niant leur droit d’asile, c’est notre propre avenir que nous mettons en péril. La France, comme Etat, a des obligations et doit accroître considérablement les moyens mis en œuvre.

Dans ce climat difficile, nous nous opposons à tous les discours haineux, racistes, xénophobes, sexistes et homophobes.

Nous appelons les femmes, les hommes, les citoyen-ne-s, les élu-e-s et les organisations démocratiques :

  • à combattre les discours indignes qui refusent à ces hommes, ces femmes et ces enfants leurs droits élémentaires d’êtres humains
  • à poursuivre et à renforcer l’aide et l’assistance nécessaires, dans la durée
  • à participer le dimanche 20 mars, à une journée du « printemps solidaire », pour un sursaut citoyen, dans la grande unité et fraternité qui caractérisent Saint- Brieuc et les Côtes d’Armor.

Les premières organisations signataires : Amnesty International, Asti, Bistrots de l’histoire, CIDFF, Ligue de l’enseignement, Ligue des droits de Homme, Marche mondiale des femmes, Planning familial, Resia.

Tribune : « Parlementaires, rejetez ce texte au nom de nos libertés ! « 

Maître Henri Leclerc, président d'honneur de la Ligue des droits de l'Homme.

Maître Henri Leclerc, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme.

Le texte sur la parlementatisation de l’état d’urgence a été examiné ce matin en conseil des ministres, et va arriver rapidement au Parlement réuni en congrès. Quelques modifications lui ont semblent-il été apportées, mais, concernant la déchéance de nationalité, si la référence aux binationaux semble avoir été supprimée, il s’agit d’une modification purement cosmétique puisqu’on sait parfaitement qu’elle ne peut s’appliquer qu’à eux.

Cette tribune, cosignée par Henri Leclerc, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, est parue dans le journal Le Monde, et elle a été signée par plusieurs personnalités.

« Parlementaires, rejetez ce texte au nom de nos libertés »
Tribune. La France est une république parlementaire. Sous la Ve République, le président a certes des pouvoirs très étendus mais seuls le Parlement et le peuple français peuvent modifier la Constitution. Sur proposition de François Hollande, le gouvernement soumet au Parlement – donc à chacun des parlementaires – un projet de loi visant à introduire dans la Constitution une disposition qui légitime et autorise la déchéance de la nationalité française.
Parlementaires, ce projet de révision, ce sera sans doute l’un des votes les plus importants de toute votre vie politique. Nous demandons à chacun d’entre vous de réfléchir en conscience et, dans l’intérêt supérieur de la République et de la Nation, de le rejeter.

Quel message donneriez-vous en effet aux Français, d’aujourd’hui et surtout de demain, de ne mentionner dans la Constitution qui s’ouvre par la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, symbole d’unité entre tous les Français, notre nationalité que pour affirmer l’éventualité d’en être déchu, notamment pour de simples délits politiques ?

Dans la version d’origine, la mesure de déchéance ne s’appliquait qu’aux Français possédant une autre nationalité, instituant dans le texte le plus fondamental de notre République une distinction peu compatible avec ses principes, qui a choqué.

Dans la version récemment amendée par le gouvernement, la déchéance s’appliquerait à tout Français condamné « pour un crime ou un délit constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ». Le premier ministre s’est aussi engagé à faire ratifier une convention internationale de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

La distinction entre Français – selon qu’ils possèdent ou non une autre nationalité – s’inscrira donc dans la loi plutôt que dans la Constitution. Un Français doté d’une seule nationalité pourra cependant aussi être déchu. Car la France, en signant la convention de 1961, s’est gardé la possibilité de transformer un Français en apatride si son comportement a été « de nature à porter un préjudice grave aux intérêts essentiels de l’Etat ».

Enfin, cette dernière version du projet de réforme constitutionnelle prévoit non pas seulement qu’un crime mais qu’un simple délit « constituant une atteinte grave à la vie de la Nation » pourra conduire à une déchéance de nationalité. Etendre une sanction aussi grave à de simples délits, catégorie la plus vaste de notre droit pénal qui englobe notamment les délits d’opinion, c’est ouvrir la porte à ce qu’un jour, pour des raisons d’opinion politique, syndicale ou de divergence d’idées avec un pouvoir autoritaire, un Français puisse être déchu de sa nationalité. Le Conseil d’Etat s’y était donc nettement opposé.

Au total, le nouveau projet du gouvernement continue de traiter inégalement les Français, ouvre la voie à des situations d’apatridie, et surtout institue dans la Constitution une menace pour notre liberté politique, au fondement même de toute démocratie.

Depuis 1803, les règles relatives à la nationalité n’ont plus figuré dans aucune constitution de la France. Quand ces règles sont inscrites dans des constitutions étrangères, comme aux Etats-Unis, c’est seulement pour y affirmer de grands principes qui unissent, comme le droit du sol ou la naturalisation.

Nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les parlementaires, de laisser la déchéance de notre nationalité dans le domaine législatif, dans des dispositions qui pourront continuer de varier selon l’alternance des majorités et les changements de contexte. La Constitution n’est pas destinée à être le réceptacle de mesures de circonstances, et c’est se tromper sur les fonctions d’une constitution que de vouloir constitutionnaliser la déchéance.

Face aux terroristes qui, cherchant à mourir en tuant, n’accordent aucune importance à leur nationalité, vous devez réaffirmer l’égalité devant la loi, les droits fondamentaux de l’homme et la liberté politique qui nous unissent et qui seuls nous feront triompher.

Jacques Attali, écrivain ; William Bourdon, avocat ; Stéphane Brabant, avocat ; Daniel Cohen, économiste, membre du Conseil de surveillance du Monde ; Marie-Anne Cohendet, professeur de droit ; Daniel Cohn-Bendit, ancien parlementaire européen ; Mireille Delmas-Marty, professeur émérite du Collège de France ; Luc Ferry, ancien ministre ; Pascale Gonod, professeur de droit ; Christine Lazerges, professeur de droit ; Henri Leclerc, avocat ; Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel ; Thierry Marembert, avocat ; Thomas Piketty, économiste, chroniqueur au Monde ; Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France ; Dominique Schnapper, sociologue ; Patrick Weil, historien.

Le Préfet interdit la manifestation raciste et xénophobe du 6 février à Saint-Brieuc

Le préfet des Côtes-d’Armor, Pierre Lambert, a interdit la manifestation organisée par l’extrême droite, qui devait avoir lieu samedi 6 février à Saint-Brieuc. La section briochine de la Ligue des droits de l’Homme avait demandé cette interdiction. Il était en effet impensable que, dans une période d’état d’urgence, une telle manifestation, dont il est notoire qu’elle comporte des risques énormes pour l’ordre public, puisse être autorisée. D’autres de ce type l’ont pourtant été : celle organisée par le mouvement raciste adsav à Pontivy, le 14 novembre 2015, lendemain des attentats de Paris et Saint-Denis, l’état d’urgence étant déjà en vigueur. Personne n’avait compris qu’elle avait pu être autorisée. Et le danger qu’elle représentait a été vérifié, puisque un homme avait été passé à tabac par des manifestants.

La manifestation interdite était organisée au niveau européen, notamment par le mouvement fasciste allemand pegida. A Saint-Brieuc, l’association « résistance républicaine », sorte de filiale de « riposte laïque », dirigée par Christine Fasin, condamnée pour incitation à la haine contre les musulmans dans un article publié sur le site « boulevard Voltaire ». Le relais briochin de cette officine n’est  autre que Mickaêl Bussart, qui a été candidat front nationale aux dernières élections municipales à Saint-Brieuc et cantonales à Plaintel.

L’institut civitas ne bénéficiera plus de l’avantage fiscal qu’il avait usurpé

"L'institut" (!!!) civitas ne bénéficiera plus de l'avantage fiscal qu'il avait usurpé.

Les bonnes nouvelles ne sont pas si fréquentes pour que nous boudions notre joie : l’avantage fiscal (réduction d’impôt de 66% des sommes versées à l’association par des particuliers, 60% par des entreprises) que « civitas », officine catholique intégriste, anti-avortement, raciste, xénophobe, homophobe… va devoir rembourser  55.000€ au fisc, et n’a plus désormais le droit de délivrer des reçus fiscaux à ses donateurs. Une pétition, qui demandait la suppression de cet avantage fiscal pour ce ramassis de réactionnaires avait réuni quelque 16.000 noms. Il était effectivement insupportable que nos impôts servent à subventionner une association qui troublait gravement l’ordre public, en faisant le siège des établissements pratiquant l’interruption volontaire de grossesse (contribuant donc activement à la diminution dramatique pour les femmes du nombre de centre de ce type, et à l’augmentation des difficultés pour elles de se faire avorter), pratiquant les prières de rues, participant à des manifestations violentes, notamment pendant le vote de la loi sur l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe. Il en aura fallu du temps, pour que la raison l’emporte dans cette histoire ! Mais il reste du pain sur la planche : à quand la même mesure pour des officines telles que la fondation Lejeune, « laissez-les-vivres », et tant d’autres ? Lire ici le communiqué de l’Union des familles laïques, qui a contribué activement à cette victoire.

Urgent de sortir de l’état d’urgence !

La Ligue des droits de l’Homme a contesté devant le conseil d’Etat la constitutionnalité de l’état d’urgence. Sa demande a été rejetée : Hollande et Valls ont donc désormais les mains libres. Il semble qu’ils essayent de rafistoler la déchéance de nationalité pour les doubles nationaux, histoire d’amadouer les quelques « frondeurs » qui contestent la mesure, mais ce rafistolage ne serait que cosmétique. Les sondages annoncent une confortable majorité des électeurs favorable à ce projet (constitutionnalisation de l’état d’urgence et de la déchéance de nationalité) : Hollande et Valls vont pouvoir s’en donner à cœur joie, d’autant plus que la seule ministre qui risquait de leur faire un peu d’ombre a préféré partir (à moins qu’on ne l’y ait contrainte).

Etienne Margot-Duclot, ligueur de la section de Saint-Denis et 93 Ouest a réalisé une analyse critique passionnante de ce projet liberticide, et la met à la disposition du public.

Nous la mettons à votre disposition en téléchargement (l’éditeur de ce blog rend très difficile sa publication) au format Acrobat reader.

Urgent de sortir de l’état d’urgence V.5-3

 

 

Saint-Brieuc : le 6 février, rassemblement contre l’extrême droite

L’extrême droite s’en donne à cœur joie en ce moment, et n’hésitent plus à se montrer, en allant brailler leur haine dans les rues. Après Pontivy, Quimper, et d’autres villes bretonnes, ce sera le tour de Saint-Brieuc, samedi 6 février. Alors que la plupart des manifestations qui ont eu lieu jusqu’alors étaient organisées par le groupuscule adsav, cette fois-ci c’est « résistance républicain » qui s’y collent. Une fois de plus l’extrême droite emprunte le vocabulaire de la gauche et ses mots emblématiques : résistance et république. Ils avaient déjà fait le coup avec « riposte laïque », dont la première officine est, comme par hasard, une filiale. Organisation « non politique » évidemment, ce groupuscule répond en fait au mot d’ordre européen lancé par pegida, l’extrême droite allemande qui veut stopper l’accueil des réfugiés et n’hésite pas, tout comme adsav, à recourir à la violence.

Plusieurs organisations, syndicats, partis politiques, associations, se sont associer pour appeler à une contre manifestation, le même jour et à la même heure : samedi 6 janvier, à Saint-Brieuc. Le rendez-vous est fixé place Allende. A noter qu’un des organisateurs de la parade xénophobe n’est autre qu’un candidat aux dernières élections municipales à Saint-Brieuc et élections aux départementales.

Le temps est révolu où on pouvait croire que manifester contre ces individus ne servaient qu’à en faire la publicité : il s’agit maintenant de les faire taire.

 

Tribune : « François Hollande, ne créez pas des sous-catégories de citoyens ! »

Ce n’est pas parce que la famille Le Pen émet une idée qu’il s’agit forcément d’une bonne idée. Le président de la République et le gouvernement ont l’air de découvrir cette évidence : décidés à faire entre la « déchéance de nationalité » pour les double-nationaux dans l’arsenal législatif anti-terroriste, il semblerait qu’ils sont en train de faire machine arrière. Peut-être cette tribune, co-signée par plusieurs responsables d’associations et syndicats y est-elle pour quelque chose ?

Dominique Sopo, président de SOS Racisme, Françoise Dumont, Pierre Tartakowsky, respectivement présidente et président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, Alain Le Cléach  et Pierre Henry, France Terre d’asile, William Martinet, président de l’UNEF, Sacha Reingewirtz, président de l’union des étudiants juifs de France (UEJF) et Frédérique Rolet (secrétaire générale du SNES – FSU) on publié cette tribune dans le journal le Monde, le 17 décembre dernier.

Comme chacun d’entre nous, Monsieur le président vous avez été touché au plus profond de votre chair par les événements tragiques du 13 novembre dernier. En tant que garant de nos institutions, vous êtes maintenant en quête de solutions pour réduire, autant qu’il est possible, le risque d’attentat dans notre pays. Pour ce faire, vous seriez manifestement prêt à proposer une loi permettant de déchoir de la nationalité française, les binationaux convaincus de terrorisme, y compris ceux nés Français.

Cette proposition, formulée de longue date par le Front national, nous parait dangereuse et nous attendons de vous que vous y renonciez. Car au-delà du fait que la déchéance de nationalité pour faits de terrorisme est déjà prévue dans le droit français pour les personnes binationales naturalisées depuis moins de 15 ans, de nombreux arguments nous poussent à nous élever contre cette annonce.

Tout d’abord, d’un point de vue pragmatique, permettez-nous de vous dire qu’une telle mesure ne dissuadera en aucun cas les terroristes de tenter de commettre des attentats sur notre sol. En effet, ceux-ci sont dans une logique nihiliste et ont parfaitement acquis que leurs projets, en cas de succès, se termineront dans le carnage et la mort. Risquer la déchéance de la nationalité n’est donc guère susceptible de les impressionner. De plus, comme le révèlent les investigations antiterroristes, les factieux peuvent aussi bien être français depuis plusieurs générations, que français de parents étrangers ou simplement étrangers. Le terrorisme n’est pas le monopole des Français binationaux nés sur notre sol.

Par ailleurs, la déchéance de nationalité étendue viserait donc à renvoyer davantage de monde de notre territoire. Concrètement, il s’agirait de renvoyer des gens vers le Maghreb ou le Mali, des zones qui ont déjà fort à faire avec les attaques menées par des organisations terroristes qui rêvent, de Tunis à Bamako, de ces renforts que nous leur apporterions.

Enfin, et il s’agit là de la conséquence la plus grave, vous valideriez, depuis le plus haut sommet de l’Etat, l’idée qu’il y aurait deux catégories de Français. Les binationaux nés Français, qui sont « un peu moins français » et les Français qui n’ont qu’une nationalité et qui seraient « un peu plus français ». Il s’agit là d’une idée contraire à notre pacte républicain et aux valeurs les plus nobles constitutives depuis 1789 de notre identité commune. Ce sont précisément ces valeurs que Daech cherche à détruire et que nous devons plus que jamais préserver. A l’heure où de trop nombreux jeunes doutent de leur pleine appartenance à la société française, cette mesure, quand bien même elle ne les concerne pas, serait un signal vécu comme une défiance supplémentaire à leur endroit, là où il faudrait au contraire que la France montre pleinement qu’elle embrasse l’ensemble de ses enfants. La déstabilisation serait d’autant plus grave que chacun sait que vous ouvririez là un dangereux précédent. Car, une fois cette brèche ouverte, qui sait quels seront les critères qui pourront, demain ou après-demain, provoquer la déchéance de la nationalité ?

Installer l’idée que les Français ne sont pas tous égaux face à la loi, c’est donner du grain à moudre aux discours haineux des djihadistes ou de l’extrême droite « traditionnelle » qui prétendent que la coexistence entre Français de différentes origines est impossible, c’est imprimer une marque indélébile sur nos concitoyens, nés en France, ayant vécu toute leur vie dans notre pays, mais ayant pour seul tort d’avoir un parent étranger. C’est en définitive tourner le dos à « l’âme de la France [qui] est l’égalité » comme vous l’affirmiez au Bourget, le 22 janvier 2012.

« Le terrorisme ne détruira pas la République, car c’est la République qui le détruira » avez-vous proclamé avec force lors de votre adresse aux parlementaires à Versailles.

Monsieur le président, mettez vos actes en adéquation avec vos propos en renonçant à cette mesure qui n’a pas sa place dans la patrie qui offrit la Grande Révolution à ses citoyens et au monde.

Dominique Sopo est président de SOS Racisme ; Françoise Dumont et Pierre Tartakowsky sont respectivement présidente et président d’honneur de la Ligue des Droits de l’Homme ; Alain Le Cléach et Pierre Henry sont respectivement président et directeur général de France Terre d’Asile ; William Martinet est président de l’Union nationale des étudiants de France ; Sacha Reingewirtz est président de l’Union des étudiants juifs de France et Frédérique Rolet est secrétaire générale du syndicat national des enseignements de second degré – FSU

La liste intégrale des signataires se trouve ici :

http://sos-racisme.org/non-la-decheance-de-nationalite/

Sortir de l’état d’urgence !

Les « dégâts collatéraux » liés à l’état d’urgence se multiplient : interdiction de manifestations sans aucun lien avec le terrorisme, climat de suspicion généralisé… Le tout pour des résultats d’une efficacité toute relative. C’est la raison pour laquelle, après l’appel « nous ne céderons pas », une centaine d’associations ont convoqué, jeudi 17 décembre, une conférence de presse au siège de la Ligue des droits de l’Homme à Paris. Elle a débouché sur la publication de ce communiqué intitulé « sortir de l’état d’urgence » :

En réaction à l’horreur des attentats, l’état d’urgence a été décrété par le gouvernement, puis aggravé et prolongé pour une durée de trois mois. Nos organisations ont immédiatement exprimé leurs craintes vis-à-vis de ce régime d’exception ; ces craintes sont aujourd’hui confirmées par l’ampleur des atteintes aux libertés constatées depuis quelques semaines. Nous assistons à un véritable détournement de l’état d’urgence qui cible également des personnes sans aucun lien avec des risques d’attentat. Ces abus doivent cesser.

La volonté de se rassembler et de manifester ensemble a prévalu après les attentats commis à Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de Vincennes, en janvier 2015. Elle prévaut encore. Or, depuis le 13 novembre 2015, les interdictions visant les mobilisations sur la voie publique se multiplient. Manifester n’est plus un droit, et les rares concessions accordées par les préfectures, qui attendent souvent le dernier moment pour informer de leurs intentions, entravent dans les faits son exercice.

Le ministère de l’Intérieur justifie tout cela par son incapacité à sécuriser les parcours alors même qu’il autorise, dans le même temps, les rencontres sportives et des événements tels que les marchés de Noël, qui se tiennent sur la voie publique. L’interdiction des rassemblements et manifestations entraîne la multiplication des arrestations, des gardes à vue, des assignations à résidence, un fichage policier des militants, et, pour quelques-uns,  des condamnations. Qui peut croire que cela soulage les autorités ?

La censure, ici, s’avère doublement contreproductive…

L’état d’urgence autorise par ailleurs des perquisitions sur ordre des préfectures, de jour comme de nuit, en dehors de tout cadre judiciaire, sur le fondement de fiches possiblement erronées, de dénonciations, d’informations et de soupçons sujets à caution. Plus de deux mille six cents intrusions discrétionnaires sont intervenues à domicile, dans des mosquées, des commerces, interventions souvent violentes, sans qu’aucune mise en examen pour terrorisme n’ait eu lieu. Rien n’indique qu’une telle frénésie va s’arrêter, chacun peut en être victime.

Les assignations à résidence se multiplient sur la base de motifs aussi vagues que la présence sur le lieu d’une manifestation ou le fait de « connaître » tel ou tel individu. Ces graves restrictions sont appliquées, sans distinction, et de manière massive, d’autant que les juridictions administratives ont montré qu’elles s’en accommodent, quitte à ce que les libertés en souffrent. Elles reprennent à leur compte toutes les allégations du ministère de l’Intérieur et, comble de la démission, sont nombreuses à considérer qu’il n’y aurait pas d’urgence à statuer sur l’état d’urgence.

L’état d’urgence et le climat de guerre intérieure alimenté par le gouvernement contribuent au renforcement des amalgames et aux pratiques discriminantes, notamment de la part des forces de police. Ce ne sont pas «  les terroristes qui sont terrorisés », ce sont des jeunes et des populations victimes de l’arbitraire en raison de leur origine et/ou de leur religion qui voient leur situation encore davantage fragilisée.

Reprenant à son compte les exigences de l’extrême droite, FN en tête, le gouvernement s’engage honteusement dans une modification de la Constitution visant à étendre la déchéance de la nationalité aux binationaux nés en France.

Ces multiples atteintes portées au contrat démocratique sont une mauvaise réponse aux actes terroristes. Notre pays a été blessé, mais loin d’en apaiser les plaies, l’état d’urgence risque de les exacerber en appauvrissant notre démocratie, en délégitimant notre liberté.

Dans ces circonstances, nous appelons les pouvoirs publics à :

  • jouer leur rôle de garants de la défense des droits et des libertés publiques ;
  • rétablir, sans délai, le droit plein et entier de manifester ;
  • cesser les perquisitions et les assignations à résidence arbitraires et à agir dans le cadre de procédures judiciaires ;
  • mettre en place des garanties effectives de contrôle ;
  • lever l’état d’urgence ;
  • renoncer à une réforme constitutionnelle préparée dans l’urgence et au contenu inacceptable.

Paris, le 17 décembre 2015

Signataires :

AFD International, Agir pour le changement démocratique en Algérie (Acda), Altertour, L’Appel des appels, Assemblée citoyenne des originaires de Turquie (Acort), Association démocratique des Tunisiens en France (ADTF), Association française des juristes démocrates (AFJD), Association France Palestine solidarité (AFPS), Association Grèce France Résistance, Association interculturelle de production, de documentation et de diffusion audiovisuelles (AIDDA), Association des Marocains en France (AMF), Association pour la reconnaissance des droits et libertés aux femmes musulmanes (ARDLFM), Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF), Association des Tunisiens en France (ATF), Association des universitaires pour le respect du droit international en Palestine (Aurdip),  Attac, Cadac, Cedetim, Centre islamique Philippe Grenier (CIPG), Centre de recherche et d’information pour le développement (Crid), CGT-Police Paris, Collectif 3C, Collectif des 39, Collectif CGT Insertion-Probation (UGFF-CGT), Collectif Judéo Arabe et Citoyen pour la Palestine (CJACP), Collectif Stop le contrôle au faciès, Confédération générale du travail (CGT), Confédération nationale du logement (CNL), Confédération paysanne, Conseil national des associations familiales laïques (Cnafal), Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), Collectif des féministes pour l’égalité (CFPE),  Collectif Memorial 98, Collectif des musulmans de France (CMF), Collectif national pour les droits des femmes (CNDF), Comité pour le développement et le patrimoine (CDP), Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), Commission islam et laïcité, Confédération syndicale des familles (CSF), Coordination de l’action non-violente de l’Arche (Canva), Coordination des collectifs AC !, Droits devant !, Droit au logement (Dal), Droit solidarité, Emmaüs France, Emmaüs International, Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH), Fédération nationale de la Libre pensée, Fédération des Tunisiens citoyens des deux rives (FTCR), Femmes Solidaires, Filles et fils de la République (FFR), Fondation Copernic, Fondation Danielle Mitterrand France Libertés,  Genepi, Ipam, La Cimade, La Ligue de l’enseignement, La Quadrature du Net, Le Gisti, Le Mouvement de la paix, Les Amoureux au ban public, Les Céméa, Ligue des droits de l’Homme (LDH), Maison des potes, Mamans toutes égales (MTE), Minga-agir ensemble pour une économie équitable, Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), Observatoire international des prisons (OIP) – section française, Organisation de femmes égalité, Osez le féminisme !, Planning familial, Réseau d’alerte et d’intervention pour les droits de l’Homme (RaidH), Réseau éducation sans frontières (RESF), Réseau euromaghrébin culture et citoyenneté (REMCC), Réseau Euromed France (REF), Réseau Immigration Développement Démocratie (IDD), SNPES-PJJ/FSU, Solidaires étudiant-e-s, Solidarité laïque, Sud Intérieur, Syndicat des avocats de France (Saf), Syndicat français des artistes interprètes (SFA), Syndicat de la magistrature, Syndicat de la médecine générale, Syndicat national des arts vivants (Synavi), Syndicat national des journalistes (SNJ), Syndicat national unitaire interministériel des territoires, de l’agriculture et de la mer (SNUITAM – FSU), SNJ-CGT, Unef, Union générale des fédérations de fonctionnaires CGT (UGFF-CGT), Union juive française pour la paix (UJFP), Union nationale lycéenne (UNL), Union syndicale de la psychiatrie (USP), Union syndicale Solidaires, Union des travailleurs immigrés tunisiens (Utit).

Associations locales et autres :

Asti 93, Collectif 07 stop au gaz et huile de schiste, Collectif BDS Saint-Etienne, Collectif Justice & Libertés (Strasbourg), Collectif Maquis de Corrèze, Collectif Romeurope 94, la revue Ecole émancipée, Espace franco-algérien, Faucheurs volontaires de la Loire, la revue Inprecor, le journal Regards, Réseaux citoyens Saint-Etienne, Vigilance OGM 18.

Manifestation interdite à Pontivy : la réaction du comité régional Bretagne de la LDH

Le préfet du Morbihan a interdit la manifestation prévue samedi 19 décembre à Pontivy, contre le racisme et la xénophobie, à la suite des violences commises par les manifestants de l’association identitaire bretonne adsav le 14 novembre dernier.

Le comité régional Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme a décidé de se ranger à décision du collectif organisateur d’annuler la manifestation. Mais elle est scandalisée par cette interdiction, alors que la manifestation d’adsav avait été autorisée. Elle a transmis le communiqué suivant à la presse:

Manifestation interdite à Pontivy : la réaction de la Ligue des droits de l’Homme

Le comité régional Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme avait apporté son soutien à l’organisation d’une manifestation contre le racisme et la xénophobie, prévue le 19 décembre à Pontivy, en réponse à la manifestation fasciste organisée le 14 novembre dans cette même ville.

L’interdiction de cette manifestation par le préfet nous amène à nous en retirer, comme plusieurs autres organisations (associations, syndicats, partis politiques).

Le comité régional de la LDH tient cependant à protester vigoureusement contre le fait que la manifestation du 14 novembre, qui était ouvertement raciste et xénophobe, et organisée par une association dont la violence et l’agressivité sont connues de tous, ait pu être autorisée, le lendemain des attentats de Paris, alors que l’état d’urgence était déjà décrété. L’interdiction aujourd’hui d’une manifestation qui se voulait « pacifique et festive » est d’autant plus incompréhensible.

Pontivy (56) : manif pacifique et festive contre l’extrême droite samedi 19 décembre à 14h

Un collectif « contre le racisme et la xénophobie » s’est constitué à Pontivy, au lendemain de la manifestation fasciste du samedi 14 novembre (se souvenir que c’était le lendemain des attentats de Paris et Saint-Denis, et que l’état d’urgence était déjà décrété) organisée par le groupuscule identitaire breton « adsav ». De nombreuses violences gratuites s’étaient produites sur le chemin de cette manifestation, (autorisée par la préfecture malgré l’état d’urgence), notamment une agression à caractère raciste.

Une des premières décisions de ce collectif a été d’organiser une « manifestation pacifique et festive » à Pontivy, le samedi 19 décembre à 14h, avec une marche et un rassemblement festif (avec notamment des groupes musicaux).

De nombreuses organisations (syndicats, partis politiques, associations) ont apporté leur soutien à cette initiative, dont le comité régional Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme.

Il se trouve que la date choisie coïncide avec le traditionnel marché de Noël organisé chaque année par l’union des commerçants industriels et artisans (UCPIA) de Pontivy. Association qui, avec d’autres, redoute des débordements, compte-tenu de ce qui s’était passé le 14 novembre.

Les organisateurs de la manifestation ont tenu compte de cette situation, en faisant en sorte que le parcours ne risque pas de perturber le marché.

La section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme s’associe naturellement à cette manifestation, et a relayé l’appel auprès du comité régional de la LDH, qui encourage toutes les sections bretonnes de la LDH à y participer.

Et voici le communiqué que le collectif a transmis aux journaux.

Le 14 Décembre 2015

Plus jamais ça !

Un mois après…

Le Collectif de Pontivy contre le racisme et la xénophobie, en réponse aux violences perpétrées le samedi 14 novembre dernier, au lendemain des tragiques événements de Paris, vous invite à un rassemblement festif, familial et convivial ce samedi 19 décembre à 14 heures au square Lenglier.

Face à la haine, des habitants s’organisent…

Une pétition contre les violences de l’extrême droite du 14 Novembre avait déjà réuni plus de 1000 signataires. le 21 Novembre une première réunion d’habitants a rassemblée 120 personnes au palais des congrès pour s’organiser et imaginer comment réagir ensemble. Aujourd’hui notre appel, largement partagé, a suscité des engagements de divers horizons et générations. C’est ainsi qu’une trentaine d’organisations associatives, syndicales et politiques ont exprimées leur soutien pour la manifestation de samedi prochain, nous les en remercions (voir la liste des soutiens à la fin).

L’image de notre ville ne restera pas ternie !

Le Collectif propose cette rencontre afin de redonner un peu d’éclat aux valeurs fondamentales de Liberté, d’Égalité et de Fraternité ; valeurs bien malmenées ces derniers temps. Nous marcherons sans peur ni haine et pour la défense des idées de progrès social, de vivre ensemble, pour la sauvegarde des Libertés publiques et dans l’intérêt de toutes et de tous.

A cette même date, se tient également le marché de Noël entre la Plaine et les différentes places de la ville. Nous avons bien pris en compte les préoccupations des commerçants en changeant le lieu de rassemblement et en prévoyant un parcours qui ne gêne pas la bonne tenue du marché de Noël. Nous tenons, au passage, à remercier nombre de commerçants pour l’élan de solidarité dont ils ont fait preuve le 14 Novembre à l’égard des personnes blessées ou désemparées.

Nous espérons qu’il y aura du monde en perspective pour honorer ces deux événements ; il fera sans doute froid mais on aura sûrement chaud au cœur de rappeler qu’autant le Breton sait se faire accueillir à l’Étranger, autant il sait combien la Bretagne est une terre d’accueil.

Nous résisterons ensemble à la haine !

Rendez-vous à Pontivy, samedi 19 décembre à 14h, square Lenglie (derrière la mairie).

Liste des partenaires (non fermée) :

  • Associations : ATTAC56, DAL56, DAL35, Ras l’front Trégor, APEIS, CIMADE-Bretagne Pays de la Loire, Collectif antifasciste Rennais, RESF56, MRAP56, Comité régional Ligue des droits de l’Homme Bretagne.
  • Syndicats : UD-CGT-56, UL-CGT-Pontivy, FSU Bretagne, CNT interpro-Brest, CSR- Bretagne, UR Solidaires Bretagne, SLB, Confédération Paysanne 56.
  • Organisations politiques : PCF56, NPA35, Ensemble Bretagne ! PG, République et Socialisme 56, gauche indépendantiste, groupe libertaire Lochu (Vannes), Liaison Vannes de la fédération anarchiste, Groupe Le ferment de la fédaration anarchiste Breizh Europa, Alternative Libertaire, UDB-Jeunes.