Dans sa résolution « Environnement, écologie et droits », [1]la LDH a formalisé une position politique de fond sur les liens entre la défense des droits et des libertés et la préservation des écosystèmes.
L’effectivité du droit à un environnement sain doit être soutenue par le principe de non-régression, selon lequel la préservation de l’environnement ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante.
Il s’agit de formaliser un réseau de solidarité et de délibération autour de « communs » qui n’ait pas une finalité d’appropriation mais, au contraire, de vigilance face aux usages abusifs afin d’en prévenir la confiscation, notamment par des acteurs économiques.
Dégradation du droit à un environnement sain et durable
Les méga-bassines sont de gigantesques ouvrages artificiels, plastifiés et imperméables. Elles sont alimentées par le pompage d’eau de bonne qualité dans les nappes phréatiques en période hivernale. Les conditions de stockage en plein soleil entraînent la perte de la ressource par évaporation et sa dégradation par la prolifération de bactéries et de micro-algues.
Ces prélèvements dans les nappes, loin de profiter d’une surabondance de la ressource en eau dans les sols en hiver, entretiennent et aggravent les manques d’eau qui déséquilibrent les écosystèmes de nos régions toute l’année. Les sols, particulièrement les zones humides, ne remplissent plus leur fonction de stockage de l’eau, la température du sol augmente, le phénomène de ruissellement de l’eau aussi.
Bien que largement financées par des fonds publics, les bassines constituent un accaparement privé de la ressource en eau qui offre à une minorité d’irrigants un passe-droit face aux restrictions préfectorales frappant les autres usages sur des périodes de plus en plus longues.
Cet accaparement permet de ne pas se soucier de la disponibilité de la ressource en eau et évite ainsi aux exploitants qui en bénéficient de questionner le modèle agricole et son adéquation au changement climatique en cours.
Refus du débat démocratique sur la question des méga-bassines
Les associations et militant.e.s opposé.e.s à la construction des méga-bassines utilisent toutes les voies du débat démocratique pour faire valoir leurs positions : réunions, manifestations, tractages. Ils et elles s’appuient sur des expertises scientifiques et sur leurs propres connaissances des milieux impactés. Leur démarche rencontre un vaste succès avec des soutiens de plus en plus divers et déterminés.
En refusant de reconnaître ce formidable engagement démocratique et de rouvrir les tables de discussions pour inclure ces mouvements au processus de décision, le pouvoir exécutif manque à son rôle de garant de la construction démocratique. Des processus participatifs doivent être mis en place par les pouvoirs publics pour garantir une concertation publique féconde sur ces projets.
Interdiction de manifestation, répression des mouvements écologiques
La décision d’interdire la manifestation du 29 octobre 2022 constitue une atteinte au droit à manifester qui engage le pouvoir exécutif dans une escalade répressive. Elle a justifié des usages disproportionnés de la force publique pour réprimer un mouvement de défense environnementale.
1700 policiers et gendarmes mobilisés, 6 hélicoptères, utilisation massive d’armes dites non-létales mais très dangereuses (gaz lacrymogènes, grenades assourdissantes, LDB) interdiction de circuler dans une large zone autour de Sainte-Soline, barrages policiers, contrôles d’identités et fouilles de véhicule à la clé.
Créant les conditions de possibles affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestant.e.s , cette décision a aussi fourni au ministre de l’Intérieur l’occasion d’utiliser le terme polémique d’ « écoterroristes » pour designer les participant.e.s à cette manifestation.
Les premières décisions de justice donnent à voir un pouvoir judiciaire qui emboîte le pas à l’exécutif dans son choix du tout répressif. Cinq manifestants ont été condamnés le 28 novembre 2022 pour « participation à un groupement en vue de commettre des violences » , un délit prétexte à la répression des mouvements sociaux déjà dénoncé par la LDH.
Le droit à manifester est un droit fondamental
Si cette escalade autoritariste permet à l’exécutif de s’en tenir à des discours sur le maintien de l’ordre et d’éluder toute remise en cause démocratique des méga-bassines, elle attente au droit à manifester et constitue une menace pour l’intégrité physique des opposant.e.s . Les mutilations et blessures de manifestant.e.s de Sainte-Soline le démontrent.
En 2014, lors des manifestations contre la construction d’un barrage à Sivens, Rémi Fraisse a été tué au cours d’une intervention des gendarmes mobiles. La survenue de circonstances comparables nous amène à appeler le gouvernement à prévenir toute violence policière et à garantir un droit à manifester en toute sécurité lors des prochaines manifestations contre les méga-bassines.
La section Fontenay-Luçon Sud Vendée de la LDH, avec la LDH Poitou-Charentes, appelle à se mobiliser le 25 et 26 mars prochain aux côtés des collectifs, syndicats et organisations écologiques qui défendent pour toutes et tous, et pour l’environnement, le droit à l’eau bien commun.
Le 3 février 2023
[1] https://www.ldh-france.org/resolution-environnement-ecologie-et-droits/