Perpignan : une jeune femme tuée à coup de couteau devant ses enfants, son compagnon placé en garde à vue

74 assassinats de femmes par leur conjoint dénombrées en France depuis le début de l’année. Les féminicides ne sont pas reconnus dans la législation française comme circonstance aggravante. La LDH  exige leur reconnaissance dans le droit français.

Ce ne sont pas des faits divers, ce ne sont pas des accidents, encore moins des “crimes passionnels” : c’est bien le machisme qui tue.

Parce que ces meurtres ne sont pas une fatalité : ils peuvent être empêchés, ces femmes protégées et les hommes violents arrêtés.

Nous attendons du Gouvernement et du Président de la république des mesures immédiates et de grande ampleur.

–> Publié dans lindependant.fr dans la rubrique « faits divers » …

Mère de famille tuée à Perpignan : son compagnon en garde à vue pour meurtre sur conjointe

Le suspect aurait reconnu immédiatement les faits.

Un terrible drame familial s’est noué ce vendredi dans la soirée au sein de la résidence le Conflent, située au numéro 121 de l’avenue de Prades à Perpignan.

Vers 23 heures, un appel d’urgence a été passé auprès des secours par une voisine déclenchant l’intervention immédiate du Samu, des sapeurs-pompiers et des policiers de la brigade canine. Là, dans cet îlot d’immeubles d’apparence paisible, ils ont alors pénétré dans un appartement. Malheureusement, il était déjà trop tard.

À l’intérieur, au milieu d’un véritable capharnaüm, ils n’ont pu que constater le décès d’une femme qui gisait au sol, vraisemblablement poignardée. La jeune mère de famille, âgée de 32 ans, aurait été tuée d’au moins un coup de couteau de boucher, au niveau du thorax.

En progressant plus loin, ils ont alors découvert que trois enfants se trouvaient sur les lieux, l’un âgé de 9 ans qui se serait réfugié au fond de la pièce et deux autres de 3 ans et 1 an qui auraient été couchés dans la chambre. Ne souffrant d’aucune blessure physique mais en état de choc, les petits ont été pris en charge et évacués vers le centre hospitalier de Perpignan dans l’attente d’une éventuelle mesure de placement auprès des services sociaux. Sachant qu’une quatrième fillette, âgée de 7 ans, était absente au moment des faits.

D’emblée, le compagnon de la victime et père de deux des enfants, âgé d’une quarantaine d’années, a été interpellé par les agents de police alors qu’il serait resté sur place. Placé en garde à vue pour meurtre sur conjointe, le suspect va être soumis à une expertise psychiatrique. Selon les résultats, il pourrait être déféré ce dimanche au parquet à l’issue de son audition. Selon nos sources, le quadragénaire aurait reconnu immédiatement être l’auteur des faits, sans fournir de plus amples explications.

D’après divers témoignages toutefois, les disputes auraient émaillé le quotidien de ce couple. Et selon les premiers éléments, un énième différend conjugal serait à l’origine de ce décès tragique, dans un contexte de misère humaine extrême.

Dans la nuit, les prélèvements et constatations de police technique et scientifique se poursuivaient pour tenter d’apporter des éléments de réponse à l’enquête aussitôt diligentée afin de faire toute la lumière sur cette affaire.

Laure Moysset

–> ​Publié sur francetvinfo.fr

Perpignan : une jeune femme tuée à coup de couteau devant ses enfants, son compagnon placé en garde à vue

Ses enfants étaient présents au moment du drame.

Une jeune femme âgée de 32 ans a été retrouvée morte, vendredi 6 juillet vers 23h, dans un appartement d’une résidence de Perpignan (Pyrénées-Orientales), a appris France Bleu Roussillon de sources concordantes. Elle a été tuée de plusieurs coups de couteau.

Son compagnon, un homme d’une quarantaine d’année, a été arrêté et placé en garde à vue. Le drame s’est déroulé en présence de plusieurs enfants, qui se trouvaient dans l’appartement. Des enfants âgés entre 1 et 9 ans qui n’ont pas été blessés, mais qui sont traumatisés. Ils ont été emmenés à l’hôpital de Perpignan.

Les faits se sont déroulés dans un appartement au premier étage d’une résidence calme, sur l’avenue de Prades, dans l’ouest de Perpignan. Les policiers ont été appelés par des voisins, qui faisaient état d’une violente dispute. La famille était d’ailleurs connue pour ses problèmes conjugaux, avec des disputes récurrentes.

–> Publié sur Le Monde avec AFP le 06 juillet 2019

Féminicides : plusieurs centaines de personnes mobilisées à Paris

Parmi les manifestants, 74 portaient des couronnes de fleurs, soit le nombre de féminicides recensés depuis le 1er janvier.

A Perpignan, dans la nuit du vendredi 5 au samedi 6 juillet, une femme de 32 ans a été tuée à l’arme blanche à son domicile. Selon les premiers éléments de l’enquête, elle serait morte lors d’une dispute, et son mari, suspecté de ce crime, est en garde à vue. Trois des quatre enfants du couple étaient présents dans l’appartement, selon le journal L’Indépendant. Deux jours plus tôt, jeudi 4 juillet, une femme de 20 ans, enceinte de trois mois, est morte frappée par son conjoint à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Le 27 juin, à Vaulx-en-Velin (Rhône), une femme de 29 ans a été tuée à coups de marteau par son mari, qui s’est ensuite pendu.

Il s’agit des trois dernières victimes de féminicide parmi les 74 dénombrées en France depuis le début de l’année, selon un collectif. Exigeant des mesures concrètes pour lutter contre les féminicides, le monde politique et la société civile sont montés au créneau ces derniers jours, par des pétitions, des tribunes ou des appels à la mobilisation.

Plusieurs centaines de personnes se sont ainsi rassemblées samedi 6 juillet à Paris pour réclamer des mesures immédiates et des moyens accrus pour lutter contre les féminicides, à l’appel d’un collectif de familles et proches de victimes. Parmi les manifestants – des femmes, mais aussi des hommes –, 74 portaient des couronnes de fleurs, soit le nombre de féminicides recensés depuis le 1er janvier.

Dans l’assistance figuraient la chanteuse Yael Naim et les actrices Julie Gayet, compagne de l’ancien président François Hollande, et Muriel Robin. Cette dernière a appelé les manifestants à observer symboliquement « 74 secondes de bruit et de colère », et interpellé le président Emmanuel Macron. « Vous avez parlé de cause nationale : où en êtes-vous ? Combien coûte la vie d’une femme ? » « Je veux une réponse », a martelé la comédienne, qui a incarné à l’écran Jacqueline Sauvage, condamnée – avant d’être graciée par François Hollande – pour le meurtre de son mari violent.

Le collectif à l’origine du rassemblement avait signé une tribune dans Le Parisien dimanche 29 juin. « Nous ne nous tairons plus », assuraient les signataires. La parution de ce texte a été suivie de nombreuses réactions, à commencer par celle de la sénatrice socialiste Laurence Rossignol. L’ancienne ministre des droits des femmes de François Hollande a écrit lundi aux ministres de la justice et de l’intérieur pour demander une enquête administrative sur les féminicides survenus depuis le 1er janvier qui, « souvent »« auraient pu être évités », selon elle.

En Algérie, « un moment contestataire exceptionnel et extraordinaire » (Bastamag)

PAR RACHEL KNAEBEL 5 AVRIL 2019 publié sur bastamag.net

Depuis le 22 février, les Algériens sont dans la rue tous les vendredis.
La révolte a démarré quand le président Bouteflika a annoncé, à 82 ans, son intention de briguer un cinquième mandat. Au terme de plusieurs semaines de manifestations monstres, Bouteflika, lâché par l’armée, a finalement abandonné le pouvoir. Le président de la chambre haute du Parlement, Abdelkader Bensalah (77 ans), doit assurer l’intérim en attendant des élections. Cela ne semble pas suffisant pour apaiser la contestation qui rejette l’ensemble de la classe politique. D’où vient ce mouvement populaire de masse ? Quelles perspectives pour les femmes et la jeunesse algérienne ? Réponses avec Layla Baamara, politiste et chercheuse à Science-Po.

Basta !  : Mardi 2 avril, la présidence algérienne a annoncé que Abdelaziz Bouteflika quittait le pouvoir immédiatement. Quelques jours plus tôt, il avait dit céder son mandat le 28 avril. Le dimanche précédent, un nouveau gouvernement a été mis en place. Quelle est la situation aujourd’hui ?

Layla Baamara [1] : Même en tant que spécialiste de l’Algérie, il est difficile de suivre tout ce qu’il se passe actuellement. Toutes les semaines, des informations, des communiqués officiels, sortent et sont parfois contredits ensuite. Un nouveau gouvernement a été constitué le 31 mars et il a été immédiatement très fortement critiqué dans la rue. Le président Bouteflika va a priori sortir du jeu politique. Mais les mobilisations n’ont pas cessé à cette annonce. L’incertitude demeure. On ne sait pas comment va s’organiser la transition post-Bouteflika, ni quelles sont les véritables intentions politiques de ceux qui gouvernent, que ce soit du côté du chef de l’État major de l’armée ou de la présidence. Ce qu’on peut observer c’est que les mobilisations se poursuivent, malgré les différentes annonces faites par les gouvernants.

La révolte est partie de la volonté de Bouteflika de briguer un cinquième mandat (il est président depuis vingt ans). Mais a-t-elle aussi à voir avec la situation économique et sociale du pays ?

J’essaie de ne pas déterminer de causes a posteriori. Mais il est certain que la situation sociale, économique, et politique du pays est problématique pour un grand nombre d’Algériens, et depuis longtemps. Des mobilisations contestataires, il y en a tous les jours en Algérie depuis des années. Elles prennent des formes diverses. Il y a par exemple des sit-in devant des bâtiments publics et des mairies, il y a eu des contestations contre le gaz de schiste dans le sud du pays (voir notre article). Il y a eu les mobilisations protestataires de 2001, parties de Kabylie qu’on a appelées « le Printemps noir ».

En 2011, on se demandait pourquoi l’Algérie n’était pas entrée en révolution [alors que la Tunisie, l’Égypte puis la Syrie et plusieurs États du Golfe étaient secoués par les « printemps arabes », ndlr], mais il y a eu des mobilisations, notamment du côté des étudiants. Des professions se mobilisent aussi, comme les « médecins résidents » [l’équivalent des internes] en 2018, pendant plusieurs mois. Le mouvement actuel n’émerge pas de nulle part. Il y a des traditions de contestation ancrées en Algérie. Après, ce qui est différent aujourd’hui, c’est clairement l’ampleur des mobilisations, en terme de nombre et d’étendue à l’ensemble du pays. Il s’agit d’un moment contestataire exceptionnel et extraordinaire.

C’est une mobilisation protéiforme, avec des slogans changeant selon les réponses du pouvoir. Mais quelles sont les revendications principales des manifestants ?

Les revendications sont en effet ciblées, au fil des semaines, selon les réactions qui émanent des gouvernants. Après, il y a des centaines de milliers de personnes dans les rues. Les slogans et les mots d’ordre sont donc très hétéroclites. Le trait commun est qu’ils se concentrent sur un rejet, en bloc, de l’ensemble de la classe gouvernante actuelle. « Qu’ils dégagent tous » est le dénominateur commun à l’ensemble des revendications des manifestations du vendredi. Mais durant le reste de la semaine, il y a aussi des mobilisations des enseignants, des étudiants, des avocats, des magistrats, avec des revendications plus spécifiques. Par exemple, les étudiants et les professeurs demandent une « Université véritablement démocratique » et une amélioration des conditions d’enseignement et de vie des étudiants à l’université. Les avocats et magistrats demandent de leur côté une justice libre et indépendante. Mais ces revendications sont associées à celles que l’on retrouve les vendredis qui visent l’ensemble de la classe gouvernante actuelle.

Existe-t-il une alternative politique possible dans les partis politiques d’opposition ? Quelle est la situation de la gauche algérienne ?

Il est difficile de parler d’alternative concrète et réelle en l’état. Parce que les partis d’opposition ont été largement affectés par des années de système politique autoritaire. Ce qu’il reste de la gauche algérienne, ce sont notamment des groupes issus des différentes scissions du parti communiste, et le parti socialiste des travailleurs, fondé par des étudiants et syndicalistes trotskistes. Mais il s’agit maintenant de groupes qui ont peu d’ancrage social et de militants. D’autres partis d’opposition qui se revendiquent de la social-démocratie, comme le Front des forces socialistes, sont dépendants du calendrier électoral et ont aussi un ancrage limité dans la société.

Comme l’ensemble des partis politiques, les partis d’opposition sont plutôt discrédités aux yeux de la population. Il ne sont pas perçus comme une alternative crédible. Néanmoins, la plupart des acteurs de cette opposition partisane participent aux mobilisations actuelles. Ils proposent des solutions, des « plateformes de sortie de crise ». Mais eux-mêmes prennent les premiers la précaution de dire qu’ils ne veulent pas récupérer le mouvement, qu’ils ne veulent pas mettre en avant des personnalités issues de leurs rangs.

Des collectifs s’étaient créés lors des mobilisations de 2011. Que sont-ils devenus ? Sont-ils encore présents dans les manifestations aujourd’hui ?

Les collectifs nés en 2011 n’existent plus, en tous cas pour ceux que j’avais rencontrés, qui réunissaient surtout des étudiants. Il y avait eu aussi la Coordination nationale pour le changement et la démocratie, la CNCD, qui rassemblait des partis d’opposition, des syndicats et des associations. Ces collectifs se sont désagrégés ensuite. Mais leurs membres ont continué à militer activement.

Il y a des associations locales, de quartier, qui proposent par exemple de l’aide aux devoirs pour les enfants, ou des associations engagées dans la préservation de l’environnement, qui organisent des campagnes de nettoyage, par exemple. Il y a aussi des associations qui portent des revendications ouvertement politiques, des associations féministes, pour les libertés et les droits humains. Et depuis quelques années, des associations et des collectifs sont créés par des jeunes étudiants ou diplômés de grandes écoles qui se réclament de l’économie sociale et solidaire ou de l’entrepreneuriat social. Il existe aussi de nombreux collectifs artistiques.

Les clubs de supporters de foot sont aussi porteurs d’engagement politique ?

Je n’ai pas enquêté auprès des supporters. Mais c’est certain que les stades sont depuis longtemps des lieux d’expression de la contestation, du rejet de la politique telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui par les gouvernants du pays. Les clubs de supporters sont à l’origine de slogans et de chants repris aujourd’hui dans les mobilisations. Par exemple, le chant de « La Casa del Mouradia » [El Mouradia désigne la présidence de la République, le chant critique les quatre mandats de Bouteflika et la perspective du cinquième], a été lancé par les supporters de l’Usma [Union sportive de la médina d’Alger], un club phare de la capitale. Aujourd’hui, il a des millions de vue sur Youtube et des centaines de milliers de personnes reprennent ce chant dans les manifestations du vendredi.

Le 8 mars 2019, dans les rues d’Alger, la foule chante « La Casa del Mouradia »

Est-ce la jeunesse qui est surtout descendue dans les rues ces dernières semaines ou y a-t-il toutes les classes d’âge ?

L’Algérie est un pays très jeune. Les moins de 30 ans représentent dans les statistiques officielles plus de 50 % de la population. C’est donc une catégorie de la population particulièrement visible. Mais ce sont toutes les classes d’âge qui sont dans la rue aujourd’hui. Toutes les catégories de la population algérienne sont présentes, tous les milieux sociaux aussi. C’est vraiment un mouvement populaire de masse.

Quelles sont les perspectives de la jeunesse algérienne ?

C’est sûrement la catégorie de la population la plus affectée par la situation politique et économique. C’est une catégorie qui regroupe aussi des réalités très hétérogènes. Les jeunes diplômés peinent à trouver du travail, mais ceux qui n’ont pas fait d’études se trouvent dans des situations catastrophiques. Le temps de la jeunesse s’allonge : à 35 ans, parfois plus, on est toujours chez ses parents. Il y a un problème structurel pour la jeunesse algérienne aujourd’hui. Beaucoup de jeunes sont sans perspective, se sentent dans l’impasse.

Les femmes participent-elles aussi aux manifestations ?

Oui. C’est ressorti immédiatement dans les entretiens que j’ai réalisés à Alger mi-mars, sans même poser la question : cette mixité dans les manifestations, a été très surprenante, positivement, pour les femmes que j’ai rencontrées. Elles étaient très heureuses de pouvoir s’y sentir en sécurité. Dans les grandes villes algériennes, l’espace public est largement à dominante masculine. Mais aujourd’hui, dans ce mouvement, les femmes sont largement présentes.

Propos recueillis par Rachel Knaebel

Bilan de la mobilisation du 8 mars 2019 dans le monde : grève des femmes et manifestations

8 mars : la grève des femmes dans le monde

Arrêter le travail tend à s’imposer comme mode d’action pour la journée internationale des droits des femmes. Lancé en 2017 en Argentine, le mot d’ordre de grève internationale a été repris dans une cinquantaine de pays, certains pour la première fois, comme en Belgique ou en Grèce. Petit tour du monde des mobilisations.

En France, environ 200 rassemblements ont été annoncés pour la journée du 8 mars, regroupant 15 000 manifestants selon les organisateurs. À Paris, 6000 personnes se sont rassemblées sur la Place de la République à partir de 15 h 40, heure symbolique à partir de laquelle les femmes travaillent gratuitement : l’écart de salaire avec les hommes est de 26 % inférieur en moyenne selon les associations. Si le rassemblement parisien est plus fournit cette année que le 8 mars 2018, il reste très en deçà de la mobilisation contre les violences faites aux femmes du mois de novembre, initiée par le mouvement Nous Toutes. À l’automne, 30 000 personnes à Paris, et 50 000 dans toute la France avaient défilé.

Pourtant, les femmes tuées sous les coups de leur compagnon ou ex-compagnon sont déjà au nombre de 30 depuis le début de l’année, selon le décompte de militantes féministes réalisé en épluchant la presse. Ainsi, le nombre de féminicides grimpe à un tous les deux jours en 2019, contre un tous les trois jours les années précédentes. Et ce, malgré qu’Emmanuel Macron ait promu l’égalité entre les hommes et les femmes au rang de grande cause nationale en novembre 2017. Le tout sans la moindre déclaration de Marlène Schiappa, pourtant secrétaire d’État chargée de l’égalité femmes-hommes.

En dehors de la capitale, 2500 manifestants, essentiellement des femmes, ont défilé dans les rues de Marseille. À Lille, elles étaient plusieurs centaines pour dénoncer les violences sexistes et réclamer comme dans toute la France l’égalité des salaires. À Toulouse comme à Grenoble : plus d’un millier. À Lyon, Montpellier et Strasbourg : quelques centaines. À Bordeaux, un cortège a fait le tour de lieux emblématiques de la violence faite aux femmes comme le palais de justice et le commissariat. À Paris, une manifestation de nuit suivant le rassemblement de l’après-midi a rassemblé environ 500 femmes.

Espagne

L’an dernier, cinq à six millions de femmes ont cessé le travail ou manifesté pour revendiquer une égalité effective entre les hommes et les femmes notamment sur la question des salaires. Cette année, pas moins d’un millier de rendez-vous ont été planifiés pour revendiquer la fin des violences sexistes et l’égalité salariale. Le travail domestique invisible a aussi été mis en avant, que ce soit pour les tâches ménagères ou les soins prodigués aux enfants et aux personnes à charge. Comme l’an dernier, le 8 mars a été une marée violette dans la péninsule.

S’il est difficile de comptabiliser pour l’heure le nombre effectif de grévistes sur l’appel à des débrayages de deux heures de l’UGT et des CCOO et à des appels de 24 h de la CGT et de la CNT, les rassemblements en journée ont regroupé des dizaines de milliers de femmes dans plusieurs villes. Les images publiées sur les réseaux sociaux de celui de Bilbao sont particulièrement impressionnantes. En soirée, les manifestations ont mobilisé plus encore que l’an passé. À Séville où Vox, un parti d’extrême droite très antiféministe, a fait son entrée au parlement régional en début d’année, 50 000 personnes ont manifesté au sein de trois cortèges convergeant vers le centre-ville.

Manifestation à Séville le 8 mars 2019À Madrid, les organisatrices du défilé annoncent un million de personnes, contre 350 000 selon la police, soit quand même le double de l’an passé. Toujours selon les chiffres des autorités, les cortèges barcelonais ont regroupé 200 000 manifestants. Les mêmes vagues féministes ont touché la plupart des villes espagnoles. Selon la presse espagnole, 4,91 % des agents de l’administration générale d’État ont cessé le travail toute la journée, et 5,99 % ont effectué un débrayage de deux heures. Cette journée de grève intervient un mois et demi avant les élections législatives anticipées du 28 avril où une percée du parti antiféministe Vox est pronostiquée.

Italie

L’association Non una di Meno appelait à une grève féministe le 8 mars pour lutter contre toutes les violences et discriminations dans la famille, au travail, dans la rue, les hôpitaux ou les écoles. Autres thèmes de la journée : les revenus et la liberté de choix des femmes dans un contexte d’attaques contre l’avortement et de retour aux valeurs de la famille. En effet, depuis l’arrivée au pouvoir de la Ligue, la pression contre les droits des femmes se fait plus pressante et les déclarations machistes se multiplient.

Pour le 8 mars, le parti de Matteo Salvini a édité un tract concluant que les femmes ont « une grande mission sociale pour assurer le futur et la survie de notre nation ». Les organisatrices de la journée du 8 mars en Italie avancent le chiffre de 50 000 manifestantes à Rome et plusieurs milliers à Milan, Naples, Gênes, Bologne ou Palerme. Plusieurs syndicats minoritaires se sont joints à la journée en déposant des préavis de grève.

Belgique

Pour la première fois, les Belges ont été appelées à la grève à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes. Six mois plus tôt, le Collecti.e.f 8 maars se lançait dans son organisation recevant l’appui de deux des trois centrales syndicales du pays : la FGTB et la CSC. L’appel à la grève se veut total : grève du travail salarié, du soin, de la consommation et des études. Les organisatrices ignorent combien de femmes ont cessé leur activité dans tout le pays, mais le 8 mars au matin, une centaine de chercheuses et d’étudiantes de l’Université libre de Bruxelles ont arrêté le travail. Dans l’après-midi 15 000 personnes ont défilé à Bruxelles à l’appel de la Marche des femmes, des syndicats et du collecti.e.f 8 maars.

À Liège, la manifestation a rassemblé 1700 personnes, contre 200 l’an dernier. À Mons et Louvain, elles étaient environ 500. Un résultat au-delà des espérances des organisatrices de cette première grève. « Il n’y a pas eu de débrayages en entreprise », explique Selena Carbonero responsable régionale du syndicat FGTB. Pour elle, il s’agit d’une contamination bienvenue de la sphère privée en direction du monde du travail. Cependant, elle constate encore un décalage entre la culture de la grève des organisations syndicales faite de blocage d’usines, et celle des collectifs citoyens. « Nous espérons que l’année prochaine cela prenne plus d’ampleur avec une mobilisation plus importante des délégués et des représentants du personnel sur le terrain » avance Selena Carbonero, admettant que les organisations syndicales sont encore construites sur un modèle patriarcal.

Grèce

Pour la première fois, comme en Belgique, un arrêt de travail de trois heures a été observé vendredi dans de nombreuses administrations publiques de Grèce à l’appel des syndicats. « Les femmes gagnent 226 euros moins que les hommes dans le secteur privé, selon des chiffres de la sécurité sociale », a affirmé Argyri Erotokritou du Mouvement du 8 mars, lors du rassemblement athénien. Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées dans la capitale pour dénoncer les inégalités de salaires et les violations des droits de l’homme dont sont victimes les femmes.

Turquie

Plusieurs dizaines de manifestations réunissant des milliers de femmes se sont déroulées dans le pays. Le nombre de femmes victimes de meurtres sexistes est passé de 210 en 2012 à 440 en 2018, selon l’association Nous ferons cesser le féminicide. À Istanbul, où le défilé était interdit, la police a utilisé des chiens, fait usage de gaz lacrymogène et de balles en plastique dans la soirée pour disperser une foule nombreuse. L’an dernier, la manifestation avait pu aller à son terme, malgré des slogans hostiles au gouvernement de l’AKP. Cette fois, comme au mois de novembre dernier, les féministes ont dû faire face à la répression. Dans trois semaines, les Turcs sont appelés à voter pour les élections municipales.

Algérie

Des appels de femmes à manifester pour leurs droits ont également eu lieu dans plusieurs villes d’Algérie, comme à Tizi Ouzou, Alger ou Oran, mais pas d’appel à la grève dans la mesure où le vendredi est une journée non travaillée. Cependant, cette journée a été dominée par les marches contre le 5e mandat du président Bouteflika qui ont vu descendre très massivement la population dans les rues de toutes les villes algériennes. À Alger, plusieurs centaines de milliers de personnes ont défilé l’après-midi. Même si les femmes ont été encore plus présentes dans les manifestations que les vendredis précédents, souvent spécifiquement en tant que femmes, la journée internationale des droits des femmes a été un peu noyée dans la masse.

Brésil

Fer de lance de l’opposition à l’élection de Jair Bolsonaro avec trois millions de femmes réunies sous le slogan unificateur « Ele Nao », « lui non », le mouvement féministe brésilien entend poursuivre son combat pour les droits des femmes et contre le fascisme. Pour le 8 mars, des milliers de femmes selon la presse brésilienne ont défilé dans les rues de São Paulo en mettant à l’honneur la figure de Marielle Franco, la militante féministe et élue noire des favelas assassinée par des paramilitaires à Rio de Janeiro le 14 mars 2018.

À Brasília, 3000 femmes auraient pris part à la mobilisation selon une information relayée par l’AFP. À Rio de Janeiro, plusieurs milliers d’entre-elles ont participé à la mobilisation du 8 mars. Des manifestations ont également eu lieu dans d’autres villes comme à Porto Alegre. Plus de 11 000 femmes brésiliennes ont déclaré avoir été victimes de violences entre janvier et février de cette année, soit une augmentation de 19,9 % par rapport à la même période en 2018, a annoncé vendredi le gouvernement.

Asie

Selon The Guardian, des centaines de femmes ont défilé à New Delhi, en Inde, pour demander la fin des violences domestiques, des agressions sexuelles et de la discrimination sur le lieu de travail. À Jakarta, en Indonésie, plusieurs centaines de femmes et d’hommes portaient des pancartes appelant à la fin des pratiques discriminatoires qui mettent fin aux emplois lorsque les femmes tombent enceintes. En Corée du Sud, des femmes portant des chapeaux pointus, ont défilé contre une « chasse aux sorcières » des féministes dans une société profondément conservatrice.

Argentine

Un nouveau slogan est apparu dans les manifestations féministes en Argentine : « Nous sommes des filles, pas des mères », en référence à la jeune Lucia, une fillette de 11 ans violée par le compagnon de sa grand-mère à qui l’avortement a été interdit. Les manifestantes réclament toujours le droit à l’avortement, rejeté par le Sénat en août 2018, en cette journée internationale des droits des femmes. La question des violences sexistes occupe aussi une place importante dans les défilés, alors que 54 femmes ont été tuées depuis le début de l’année selon une ONG qui recense les violences de genre.

À Buenos Aires, au moins 300 000 personnes se sont mobilisées, regroupant toutes les générations de femmes. D’autres manifestations massives se sont déroulées dans la plupart des villes comme à Cordoba, Mendoza ou Rosario. C’est d’Argentine qu’a été initié l’appel international à la grève des femmes en 2017.

Allemagne

À Berlin, pas de grève des femmes puisque la municipalité a fait du 8 mars un jour férié. Pour autant, 10 000 personnes se sont rassemblées dans la capitale allemande. Dans les autres villes, les femmes ont été appelées à cesser le travail entre 12 h et 14 h, au moment d’une pause repas rarement prise par les travailleuses allemandes. Des rassemblements se sont tenus dans plusieurs villes allemandes comme à Cologne.

Dans le reste du monde

De façon non exhaustive, des rassemblements parfois assortis d’arrêts de travail à 15 h 40 ont eu lieu en Irlande, en Suisse, au Royaume-Uni, au Bangladesh, en Chine, en Irak, au Cameroun, au Soudan, au Kenya, au Burkina Faso, en Serbie, en Pologne, en Ukraine, aux Philippines, au Honduras, au Salvador, au Chili, aux États-Unis et au Canada.

Violences policières à  Bordeaux, une manifestante blessée, quatre arrêtées à la marche féministe nocturne du 8 mars

13 mars 2019 sur le site reporterre.net

À l’appel du collectif 8 Mars Gironde, près de 800 femmes ont manifesté vendredi 8 mars soir à Bordeaux, Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, avec pour slogan « La rue est à nous ! ». L’idée pour les organisatrices était de marcher pacifiquement de nuit, pour se réapproprier l’espace public et dénoncer les violences faites aux femmes, raconte France Bleu. Au bout de quatre heures de marche, le bilan a pourtant fait état de quatre femmes arrêtées et une blessée par une grenade de désencerclement, lancée par les forces de l’ordre.

« La manifestation pacifique a dû faire face à une répression policière démesurée, rapporte le collectif dans un communiqué. Sur le cours Victor-Hugo, à 21 h 45, alors que le cortège manifestait depuis [une heure et demie] de manière pacifique, un camion de police est arrivé à l’arrière du cortège et trois policiers ont extrait de manière musclée l’une des manifestantes à la stupéfaction générale. La police a alors lancé une grenade de désencerclement avant de faire usage de bombes à poivre et de lacrymogène pour repousser les manifestantes. (…) Une manifestante est sévèrement blessée aux pieds par la grenade de désencerclement. »

Le cortège a ensuite rejoint l’hôtel de police pour demander la libération de la manifestante interpellée, laquelle a été relâchée vers 23 h 15. « Un peu plus tard, trois personnes quittant la manifestation sont interpellées et arrêtées sans raison devant le Musée d’Aquitaine alors qu’elles marchaient tranquillement sur le trottoir. (…) Les trois personnes interpellées sont placées en garde-à-vue et relâchées seulement le lendemain à 19 h », poursuit le communiqué, qui exige « l’abandon de poursuites injustifiées contre les femmes interpellées » et « que les responsables de ces violences institutionnelles soient dénoncés et jugés ».