Suède : La droite en quête d’un gouvernement avec l’appui de l’extrême droite

Un scénario se dessine proche de celui qui se déroule en Italie… Sans oublier ce qui se passe en Grande Bretagne avec l’arrivée de Liz Truss, une thatchérienne de choc, au poste de 1er ministre prête à s’attaquer aux syndicat anglais. L’extrême droite accède au pouvoir dans un nombre grandissant d’états en Europe…(Pologne, Hongrie, Roumanie, Grande Bretagne, …)

Le scrutin a été marqué par la nouvelle percée du parti anti-immigration des Démocrates de Suède.

20 Minutes avec AFP   Publié le 15/09/22

Droite et extrême droite se frottent les mains au lendemain de leur victoire inédite aux élections législatives en Suède. Le chef de file des conservateurs suédois entame pour de bon ce jeudi la tâche délicate de former un gouvernement avec l’appui de l’extrême droite. Le scrutin a été marqué par la nouvelle percée du parti anti-immigration des Démocrates de Suède (SD) dirigés par Jimmie Åkesson, devenu deuxième parti du pays nordique et première formation du bloc de droite avec 20,5 % des suffrages.

Défaite au terme d’élections ultra-serrées et malgré un bon score de son parti social-démocrate, la Première ministre de centre gauche Magdalena Andersson a remis jeudi matin sa démission au président de la Chambre, après avoir reconnu sa défaite mercredi soir. Le poste de Premier ministre revient traditionnellement en Suède au principal parti de la majorité, mais seul le chef du parti conservateur des Modérés, Ulf Kristersson, est en position d’avoir le soutien de tous les partis du nouveau bloc de droite et d’extrême droite.

« Nous allons remettre de l’ordre en Suède »

A 58 ans, ce tenant du rapprochement inédit de la droite avec les SD, doit se voir confier officiellement la semaine prochaine la tâche de trouver une majorité par le président de la Chambre. « Je commence maintenant le travail pour former un nouveau gouvernement efficace », avait annoncé dès mercredi soir le dirigeant en réaction à ce succès inédit, qui évince du pouvoir la gauche aux commandes depuis huit ans.

« Maintenant nous allons remettre de l’ordre en Suède ! », a-t-il promis, au terme d’une campagne dominée par les prix de l’énergie et les meurtriers règlements de comptes entre gangs qui noircissent sans interruption l’actualité suédoise. Le défi d’Ulf Kristersson consiste à trouver un accord réunissant quatre partis allant du centre droit à la droite nationaliste, où des lignes divergentes existent sur de nombreux dossiers.

Des semaines de négociations

Les SD affichent leur ambition d’entrer au gouvernement, mais les trois autres partis de droite traditionnelle (Modérés, Chrétiens-démocrates, Libéraux) y sont opposés, tout particulièrement le parti Libéral. Les négociations pour le retour de la droite au pouvoir après huit ans de gauche devraient durer plusieurs jours voire semaines, selon les analystes.

Le scénario le plus probable est que les Modérés et les chrétiens-démocrates, voire les Libéraux, forment un gouvernement, et que SD se contente de faire partie directement ou indirectement de la majorité au Parlement. En échange de quoi ? Avec une voix sur cinq, la formation peut faire valoir ses muscles pour peser dans la balance

Une majorité fragile

« Le processus prendra le temps qu’il faudra », a dit Jimmie Åkesson mercredi dans une déclaration sur Facebook, promettant d’être une « force constructive et d’initiative ». Mais la majorité reste fragile, d’autant que des députés libéraux pourraient être tentés de se rapprocher de la gauche en cas d’influence trop forte des SD.

Avec 176 sièges, dont 73 pour les Démocrates de Suède, le bloc de droite formé de quatre partis devance de très peu celui de gauche (173 sièges). La Première ministre Magdalena Andersson, qui va rester cheffe du parti sociale-démocrate, a réaffirmé jeudi en présentant sa démission que sa porte était ouverte à une collaboration avec la droite si la formation d’une majorité avec SD échouait.

Un groupe néonazi

Héritier d’un groupe néonazi à sa création en 1988, le parti d’extrême droite s’est peu à peu banalisé dans le paysage politique suédois, entrant au parlement en 2010 avec 5,7 %, puis grimpant à chaque élection, sur fond de forte immigration et de problèmes de gangs criminels en Suède. Mais il reste un repoussoir pour de nombreux Suédois.

« L’alternance, ça me va. Je suis juste inquiète que les partis de droite soient plus ouverts à collaborer avec SD, et comment cela va peser sur la politique menée », explique Ninnie Tägtström, une étudiante à Stockholm. Pour Axel Lundström, un psychologue de la capitale, « il y a beaucoup de grandes questions dans notre société qui n’ont pas été prises en compte correctement et je pense que beaucoup de gens attendaient un changement ».

Montée des partis nationalistes en Europe

« Même si ce changement implique une bascule vers la droite et l’extrême droite des Démocrates de Suède ». Les élections de dimanche étaient si serrées qu’il a fallu attendre le comptage d’environ 200.000 voix manquantes mercredi.

L’arrivée de l’extrême droite dans une majorité en Suède est le dernier chapitre de la montée des partis nationalistes dans de nombreux pays européens. Une coalition de droite et d’extrême droite est également grande favorite des élections italiennes du 25 septembre.

Un nouveau dérapage de Viktor Orban indigne le comité d’Auschwitz

Ce n’est plus un dérapage, c’est le discours officiel d’un premier ministre d’un état membre de l’Union Européenne qui affiche ouvertement son racisme digne des années 30 en Allemagne sous le nazisme. Il serait urgent que tous les états et toutes les associations démocratiques condamnent ces propos abjectes pour isoler Orban. L’Union Européenne devrait évidemment faire de même. Orban contrôle l’ensemble de la télévision publique ainsi que les médias privés rachetés par les oligarques proches du pouvoir (80 % du paysage médiatique d’après wikipédia).

Publié sur france24 le 27 juillet 2023 avec AFP

Le comité international d’Auschwitz s’est dit, mardi, « horrifié » après des propos du Premier ministre hongrois contre « les races mixtes ». Le même jour, Zsuzsa Hegedus, une sociologue conseillant Viktor Orban depuis près de vingt ans, a remis sa démission en dénonçant « un pur texte nazi digne de Goebbels ».

Un discours qui ne passe pas. Le comité international d’Auschwitz a manifesté son indignation, mardi 26 juillet, suite aux propos tenus par Viktor Orban, lors d’un déplacement en Transylvanie roumaine. L’intervention du Premier ministre, « un pur texte nazi », a également poussé une conseillère du gouvernement, à remettre sa démission.

En Transylvanie roumaine, où réside une importante communauté hongroise, Viktor Orban, connu pour sa politique anti-migrants, a réaffirmé avec virulence son rejet d’une société « multi-ethnique ». « Nous ne voulons pas être une race mixte », qui se mélangerait avec « des non-Européens », a-t-il dit.

Les pays « où des peuples européens et extra-européens cohabitent ne sont plus des nations. Ces pays ne sont rien d’autre que des conglomérats de peuples », a encore lancé le Premier ministre de 59 ans, qui avait tenu des propos similaires dans le passé mais sans utiliser le terme de « race », selon des experts.

Il a aussi fait apparemment allusion aux chambres à gaz en fustigeant le plan de Bruxelles de diminuer de 15 % la demande européenne de gaz. « Je ne vois pas comment ils peuvent y contraindre les États membres, quoiqu’il existe un savoir-faire allemand dans ce domaine, comme le passé l’a montré », a-t-il ironisé.

Le comité international d’Auschwitz s’est dit, mardi, « horrifié » après ces propos contre « les races mixtes », appelant l’Union européenne à « prendre ses distances avec de tels relents racistes ». Le discours du dirigeant nationaliste, « stupide et dangereux », rappelle aux survivants de l’Holocauste « les périodes sombres de leur propre exclusion et persécution », a réagi Christoph Heubner, vice-président de l’organisation, dans une déclaration transmise à l’AFP.

Il a appelé le chancelier autrichien Karl Nehammer, qui accueille, jeudi, Viktor Orban en visite officielle à Vienne, à se démarquer au nom de l’UE. Il faut « faire comprendre au monde qu’un Monsieur Orban n’a pas d’avenir en Europe », dont il « nie sciemment les valeurs ».

« Position honteuse », idées « inacceptables »

Fait rare sous l’ère Orban, Zsuzsa Hegedus, une sociologue conseillant de longue date le Premier ministre hongrois, a aussi remis, mardi, sa démission. Dans une lettre diffusée par le média hongrois hvg.hu, celle qui revendique « une amitié de près de 20 ans » avec Viktor Orban, a dénoncé « une position honteuse » et « un pur texte nazi digne de (Joseph) Goebbels » – référence à l’ancien chef de la propagande de l’Allemagne nazie.

Disant « regretter une déclaration disgracieuse », Zsuzsa Hegedus a pointé du doigt un discours du Premier ministre hongrois « qui va à l’encontre de toutes (s)es valeurs fondamentales ». Et de poursuivre à l’attention de Viktor Orban : « Je ne sais pas comment vous n’avez pas réalisé que vous avez transformé votre (discours) anti-migrant et anti-européen en un pur texte nazi digne de Goebbels (…). Je ne peux pas, en raison de la gravité des faits, même après notre amitié de près de 20 ans, passer outre cette fois-ci. »

En réponse, Viktor Orban a mis en avant « la politique de tolérance zéro de son gouvernement quand il s’agit d’antisémitisme et de racisme », selon un courrier rendu public. « Tu ne peux pas sérieusement m’accuser de racisme après 20 ans de collaboration », s’est-il défendu. 

La communauté juive hongroise s’était également insurgée en début de semaine. « De nombreuses espèces différentes peuplent notre planète. Sur deux pattes, travaillant, parlant et pensant parfois, une seule espèce vit pourtant sur cette terre : l’Homo Sapiens Sapiens. Cette race est une et indivisible », a écrit sur Facebook le grand rabbin, Robert Frölich.

Dans la classe politique, le ministre roumain des Affaires étrangères, Bogdan Aurescu, a jugé « inacceptables » de telles « idées ».

Quant à la Commission européenne, elle a dit « ne jamais commenter les propos tenus par des responsables politiques européens ». « Ce qui est clair, c’est que l’UE a un certain nombre de valeurs qui sont inscrites dans les traités et elle met en œuvre des politiques qui sont en relation avec ces valeurs et ces articles du traité », s’est contenté de réagir le porte-parole Eric Mamer, interrogé lors du point presse habituel.

Avec AFP

Fusillade dans une école au Texas : le combat pour mieux contrôler les armes à feu aux Etats-Unis est « perdu d’avance », prévient un spécialiste

Publié sur franceinfo le 25 mai 2022 Propos recueillis par – Louis Boy

Après le drame qui a coûté la vie à 19 enfants mardi, le président américain Joe Biden a promis d’agir et d' »affronter le lobby des armes ». Pourtant, les analystes ne s’attendent pas à un consensus politique.

Dix-neuf enfants de 7 à 10 ans et deux adultes sont morts dans leur école d’Uvalde au Texas (Etats-Unis), abattus par un tireur de 18 ans, mardi 24 mai, dix jours après une tuerie raciste dans un supermarché de l’Etat de New York. Ce nouveau drame remet en lumière la question douloureuse de l’attachement mortifère d’une partie des Etats-Unis et de certains représentants politiques aux armes à feu. 

« Quand, pour l’amour de Dieu, allons-nous affronter le lobby des armes ? » a lancé le soir même de la tuerie le président américain Joe Biden, qui a émis le vœu de « transformer la douleur en action ». Mais le président américain n’a mis aucune réforme concrète sur la table. Et les républicains n’ont montré aucun signe d’une ouverture à la moindre restriction.

Pour comprendre les blocages de la société américaine et la probabilité de les surmonter, franceinfo a interrogé Lauric Henneton, spécialiste de la société américaine et maître de conférences en civilisation américaine à l’Université Versailles-Saint-Quentin.

Franceinfo :  Après cette tuerie au bilan particulièrement lourd, Joe Biden a promis d’agir et de se confronter au lobby des armes. Quelles pourraient être les mesures mises sur la table ?

Lauric Henneton : Ce sont un peu toujours les mêmes, qui se résument en deux grands points. Premièrement, le fait de réduire l’accès aux armes automatiques. Le droit de porter des armes est protégé par la Constitution, mais il y a une différence entre un petit calibre et un gros fusil automatique. Et deuxièmement, le fait d’instaurer davantage de background checks [les vérifications sur le profil et les antécédents de l’acheteur d’une arme]. Ceux-ci ne sont pas non plus la panacée. Dans le cas du Texas, le tireur venait d’avoir 18 ans, et il n’a a priori aucun antécédent, ni judiciaire ni psychiatrique, qui aurait pu l’empêcher de se procurer une arme. Il y aura toujours des trous dans la raquette. En revanche, une interdiction des fusils d’assaut aurait pu le priver de ceux qu’il a utilisés, qui font autrement plus de dégâts qu’une arme de poing.

Joe Biden a-t-il vraiment la volonté et le pouvoir d’instaurer ces mesures ?

Joe Biden fait partie des politiques qui étaient aux premières loges en 2012 lors de la tuerie de Sandy Hook [26 personnes avaient été tuées dans une école primaire, dont 20 enfants]. Il était vice-président et il a essayé, à l’époque, de faire adopter des lois pour une réglementation plus ambitieuse du port d’armes. Ça n’a pas marché. On peut imaginer que, pour lui, une frustration s’est accumulée sur ce sujet, et que son émotion est réelle. Mais c’est perdu d’avance.

On sait que la Chambre des représentants pourra voter un certain nombre de dispositions. Mais au Sénat, non seulement les républicains ne les voteront pas, mais également certains démocrates. Quand vous êtes l’élu démocrate d’un Etat qui vote majoritairement pour Donald Trump, vos électeurs sont favorables au port d’armes.

Le problème est que les démocrates n’ont pas véritablement de majorité [ils disposent de 50 sièges, comme les républicains, mais en cas d’égalité lors d’un vote, c’est la vice-présidente Kamala Harris qui tranche].

« Sur des sujets aussi clivants que le port d’armes, il faut une majorité de 60 sièges qui permette de passer outre le filibuster, une technique de blocage qui permet aux républicains de faire obstruction au vote des lois. »

Lauric Henneton, spécialiste de la société américaine à franceinfo

Pourquoi les républicains s’opposent-ils à la restriction du port d’armes, et que proposent-ils pour mettre fin aux tueries de masse ?

Il y a aux Etats-Unis une telle polarisation sur les sujets culturels – les armes sont considérées comme en faisant partie, au même titre que l’avortement par exemple –que les républicains sont terrorisés à l’idée qu’on puisse leur retirer leurs armes. Ils sont obsédés par l’intervention de l’Etat dans leur vie. Le fondement historique du deuxième amendement de la Constitution américaine, qui garantit le droit de porter une arme, est de pouvoir être armé contre le risque de tyrannie de l’Etat central. C’est pour cela que, quand les démocrates sont élus, les ventes d’armes explosent. Et le nombre de tueries également, car il est scientifiquement prouvé que le ratio de morts par arme à feu est proportionnel au nombre d’armes en circulation, qu’ils s’agisse des tueries, des homicides ou des suicides.

Les républicains partent du principe que la nature est ainsi faite qu’il y aura toujours un « méchant avec une arme » et ils sont obsédés par l’idée qu’il faut s’y opposer avec un « gentil avec une arme ». Leurs propositions d’avoir des forces de sécurité plus visibles autour des établissements scolaires ou d’armer les enseignants sont vues comme un moyen d’avoir davantage de ces « gentils », dans une sorte de culte de l’héroïsme et de l’autodéfense. C’est une question philosophique, mais aussi pratique dans certaines zones peu denses où la police met un certain temps à intervenir, et dont les habitants réclament des armes pour se défendre eux-mêmes si besoin.

Des sondages montrent pourtant que les électeurs, même républicains, sont favorables au renforcement de certaines mesures, comme l’élargissement des « background checks », approuvé par 70% des républicains contre 90% des démocrates, selon un sondage du Pew Research Center (en anglais) en 2021. Pourquoi les politiques ne les suivent-ils pas ?

Longtemps, la National Rifle Association (NRA), le lobby des entreprises de l’armement, a financé généreusement les candidatures, se posant comme une sorte d’intermédiaire entre l’électeur et le candidat. Elle a cependant beaucoup perdu de sa superbe et de sa puissance financière, au point de tenter de se déclarer en faillite. Des fabricants célèbres comme Remington ont déposé le bilan. Cela a semblé affaiblir le lobby et l’écosystème pro-armes à feu.

Mais malgré cela, on ne remarque pas vraiment d’infléchissement dans les discours politiques. Il faut dire que la répétition des élections très rapprochées fait qu’il n’y a jamais le temps pour que ces idées s’installent. 

« On est toujours dans une logique de crise, attisée d’un côté par des démocrates qui hystérisent le débat avec des restrictions drastiques parfois irréalistes et, de l’autre côté, des républicains qui agitent cette menace pour mobiliser les électeurs. »

Lauric Henneton, spécialiste de la société américaine à franceinfo

Cette fois, ce sont 21 personnes, dont 19 enfants, qui ont été tuées. L’émotion provoquée par cette tuerie sera particulièrement forte. Peut-elle être un moment de basculement ?

On a envie de le croire. Mais la tuerie de l’école Sandy Hook, en 2012, a montré que, passé l’émotion des premiers jours, les choses reprennent leur cours. Pour moi, cela suggère que celle d’Uvalde n’aura pas d’impact non plus. Ce qui peut jouer, c’est l’accumulation des tueries, le fait qu’elles soient de plus en plus nombreuses, et que la NRA ne soit plus à même de financer des campagnes électorales. Les semaines à venir vont nous donner une indication sur la possibilité qu’un changement advienne.