Lettre de la société civile au Congrès des États-Unis sur la surveillance Internet et télécommunications

On savait depuis longtemps que les États-Unis se livrent à des écoutes des citoyens de la planète, avec « l’affaire Prism » on touche du doigt les preuves ! Interrogé sur le sujet, le président Obama déclare : « Si vous êtes un citoyen américain, la NSA ne peut pas écouter vos appels et intercepter vos emails, sauf dans le cas où cela découlerait d’une ordonnance individuelle émise par un tribunal. Telles sont les règles existantes. » Et il poursuit : « Mon travail est à la fois de protéger les Américains et leur style de vie, y compris la protection de leur vie privée ». Dommage pour tous les individus qui communiquent à travers la planète !

La LDH a signé et vous invite à signer cette adresse au Congrès américain initiée par un réseau de la société civile sur la gouvernance et les droits de l’Internet, qui prend en compte le sort de tous :

http://bestbits.net/fr/prism-congress/

Maryse Artiguelong, membre du comité central de la Ligue des droits de l’Homme.

Le texte de l’adresse

Nous écrivons en tant que coalition d’organisations de la société civile du monde entier pour exprimer notre sérieuse inquiétude au sujet de révélations concernant la surveillance des communications Internet et téléphone de citoyens US et non-US par le gouvernement des États-Unis. Nous tenons également à exprimer notre profonde préoccupation du fait que les autorités des États-Unis ont pu rendre les données résultant de ces activités de surveillance disponibles pour d’autres États, dont le Royaume-Uni, les Pays-Bas, le Canada, la Belgique, l’Australie et la Nouvelle-Zélande [1]. De nombreuses entreprises Internet à portée mondiale basées aux États-Unis semblent également prendre part à ces pratiques [2].

La mise en place de mécanismes de surveillance au cœur de communications numériques mondiales menace gravement les droits humains à l’ère numérique. Ces nouvelles formes de pouvoir décentralisé reflètent des changements fondamentaux dans la structure des systèmes d’information des sociétés modernes [3]. Toute démarche en ce sens doit être analysée lors de débats larges, profonds et transparents. La violation par un gouvernement des droits humains de citoyens, qu’ils soient de leur propre pays ou de l’étranger, est inacceptable. Rendre impossible à un citoyen de communiquer ses opinions sans surveillance par un État étranger, non seulement viole les droits à la vie privée et de la dignité humaine, mais menace également les droits fondamentaux à la liberté de pensée, d’opinion et d’expression et d’association qui sont au centre de toute pratique démocratique. Ces actions sont inacceptables et soulèvent de sérieuses préoccupations au sujet de violations extraterritoriales des droits humains. L’impossibilité pour des citoyens de savoir s’ils sont soumis à une surveillance étrangère, de contester une telle surveillance ou d’exercer des recours est encore plus alarmante [4].

La contradiction entre l’affirmation persistante des droits humains en ligne par le gouvernement des États-Unis et les récentes allégations de ce qui semble être de la surveillance massive, par ce même gouvernement, de citoyens US et non-US est très inquiétante et entraîne des répercussions négatives sur la scène mondiale. Il semble qu’il y ait un mépris flagrant et systématique des droits humains énoncés dans les articles 17 et 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), dont les États-Unis sont signataires, ainsi que dans les articles 12 et 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Gardant à l’esprit que les États-Unis doivent depuis longtemps s’engager dans une discussion sur la façon de mettre à jour et moderniser leur politique afin de s’aligner sur leurs propres documents et principes fondateurs, ce qui arrivera ensuite dans la supervision du législatif et de l’exécutif aux États-Unis aura des conséquences énormes et irréversibles pour la promotion et la protection des droits humains chez tous les peuples du monde.

Il faut aussi noter que le gouvernement des États-Unis a appuyé la résolution 20/8 du Conseil des droits humains des Nations Unies, qui affirme que « les droits dont les personnes jouissent hors ligne doivent également être protégés en ligne, en particulier le droit de toute personne à la liberté d’expression » [5] et, il y a quelques jours, le 10 juin, les États-Unis faisaient partie d’un groupe restreint de pays qui ont rédigé une déclaration interrégionale, qui a souligné à juste titre que « tout traitement de problèmes de sécurité sur Internet doit se faire d’une manière compatible avec les obligations des États au regard du droit international des droits de l’homme et le plein respect des droits de l’homme doit être sauvegardé » [6]. Ce n’était apparemment pas le cas des pratiques récentes du gouvernement des États-Unis. Outre qu’elle représente une violation majeure des droits humains fondamentaux des personnes dans le monde, l’incohérence entre les pratiques et les déclarations publiques des États-Unis sape également la crédibilité morale du pays au sein de la communauté mondiale qui se bat pour les droits humains, tels qu’ils s’appliquent à l’Internet et brise la confiance des consommateurs envers tous les Américains qui fournissent des services mondiaux.

Le 10 juin 2013, de nombreux signataires de cette lettre se sont réunis pour exprimer nos préoccupations au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies [7]. Nous l’avons fait dans le contexte du récent rapport du Rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à la liberté d’opinion et d’expression, M. Frank La Rue [8]. Ce rapport expose en détails des tendances inquiétantes dans la surveillance étatique des communications qui entraînent de graves conséquences pour l’exercice des droits humains à la vie privée et à la liberté d’opinion et d’expression. Nous notons que les parties prenantes états-uniennes ont également écrit une lettre au Congrès pour exprimer leurs préoccupations au sujet de la conformité du programme national de surveillance en cours avec la loi domestique [9].

Nous sommes également extrêmement déçus que, dans toutes les déclarations concernant les « divulgations » de courrier, les autorités US ont seulement insisté sur le fait qu’il n’y avait pas d’accès au contenu concernant des citoyens US, et que seules les métadonnées ont été recueillies. Il n’y a pas eu un mot sur la question de l’accès à grande échelle aux contenus concernant des citoyens non US, ce qui constitue une violation quasi certaine des droits humains. La focalisation des autorités US sur la différence entre le traitement des citoyens US et non-citoyens sur une question qui se rapporte essentiellement à la violation des droits de l’homme est très problématique. Les droits humains sont universels, et tous les gouvernements doivent s’abstenir de les violer pour toutes les personnes, et pas seulement pour ses citoyens. Nous préconisons fortement que les dispositions juridiques et les pratiques actuelles et à venir prennent en compte ce fait correctement.

Nous demandons donc instamment à l’administration Obama et au Congrès des États-Unis de prendre des mesures immédiates pour démanteler les systèmes existants de surveillance mondiale par l’Internet et les télécommunications et empêcher leur création à l’avenir. Nous demandons en outre à l’administration US, au FBI et au Procureur général d’autoriser les entreprises impliquées ou concernées à publier des statistiques concernant les demandes de renseignements, passées et futures, invoquant la Foreign Intelligence Surveillance Act (FISA), qu’ils ont reçues ou pourront recevoir [10]. Nous appelons en outre le Congrès américain à établir des protections pour les lanceurs d’alertes envers le gouvernement afin de mieux s’assurer que le public soit suffisamment informé sur les abus de pouvoir qui violent les droits fondamentaux des citoyens de tous les pays, États-Unis et les autres [11]. Nous nous joignons également à Human Rights Watch pour demander instamment la création d’un comité indépendant avec pouvoir d’assignation et toutes les garanties de sûreté nécessaires pour examiner les pratiques actuelles et formuler des recommandations afin d’assurer des protections appropriées aux droits à la vie privée, à la liberté d’expression et d’association. Les résultats de ce comité devraient être largement publiées.

Texte en anglais sur le site Best Bits

[1] http://www.ft.com/cms/s/0/d0873f38-d1c5-11e2-9336-00144feab7de.html, https://www.bof.nl/2013/06/11/bits-of-freedom-dutch-spooks-must-stop-use-of-prism/ and http://www.standaard.be/cnt/DMF20130610_063.
[2] Incluant Microsoft, Yahoo, Google, Facebook, PalTalk, AOL, Skype, YouTube et Apple: http://www.washingtonpost.com/investigations/us-intelligence-mining-data-from-nine-us-internet-companies-in-broad-secret-program/2013/06/06/3a0c0da8-cebf-11e2-8845-d970ccb04497_story.html
[3] http://www.state.gov/statecraft/overview/
[4] (A/HRC/23/40)
[5] http://ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/HRC/RES/20/8
[6] http://geneva.usmission.gov/2013/06/10/internet-freedom-5/
[7] http://bestbits.net/prism-nsa
[8] (A/HRC/23/40)
[9] Demandant au gouvernement des États-Unis d’autoriser Google à publier davantage de statistiques concernant les requêtes de sécurité nationale
http://googleblog.blogspot.com/2013/06/asking-us-government-to-allow-google-to.html
[10] https://www.stopwatching.us/
[11] Le texte qui vient d’être publié dont le titre est Principes généraux sur la sécurité nationale et la liberté d’information (les principes de Tshwane) qui concerne les lanceurs d’alerte et la sécurité nationale fournit une référence pertinente à ce sujet :
http://www.opensocietyfoundations.org/sites/default/files/Global%20Principles%20on%20National%20Security%20and%20the%20Right%20to%20Information%20%28Tshwane%20Principles%29%20-%20June%202013.pdf.

 

 

Manifestations des 22 et 23 juin à la mémoire de Clément Méric : appel de la Ligue des droits de l’Homme

A la veille des manifestations d’hommage à Clément Méric, les samedi 22 et dimanche 23 juin, la Ligue des droits de l’Homme publie un communiqué et appelle à participer massivement à ces manifestations.

Le 5 juin, Clément Méric, syndicaliste étudiant et militant antifasciste, a été victime d’un meurtre à Paris, commis à raison de ses convictions politiques. Cet acte, qui s’inscrit dans la suite de trop nombreuses agressions commises par des groupes d’extrême droite, ces derniers mois, est insupportable.

Il confirme tragiquement l’urgence à s’opposer à ces exactions et aux idéologies qui en favorisent, de près ou de loin, la banalisation et le développement. L’explosion de discours haineux à l’encontre des étrangers, des Roms, des musulmans, l’avalanche de propos mensongers et agressifs lors des débats sur le projet de loi du mariage pour tous, témoignent d’une montée de l’intolérance, du racisme et de la peur, dont on sait qu’ils sont facilement instrumentalisés par la violence.

Dans le même temps, confrontée aux difficultés sociales et aux déceptions politiques, une large partie de l’électorat de gauche se réfugie dans l’abstention, renvoyant de fait les partis dos à dos, ce qui favorise les candidats du Front national et incite une partie de la droite dite républicaine à converger avec leurs thématiques.

Il y a urgence à porter un coup d’arrêt à ces calculs dangereux. Il y a urgence à s’opposer à toute politique publique pouvant légitimer, de près ou de loin, des visions xénophobes et racistes. C’est bien en réaffirmant concrètement les droits des citoyens français, des étrangers, des migrants, des Roms et de tous ceux qui sont tenus en lisière des droits fondamentaux, qu’il est possible de rassembler largement contre les périls montants. Car ces droits sont, de façon indivisible, ceux qui fondent la République fraternelle, égale et libre.

C’est sur ces bases que la Ligue des droits de l’Homme appelle les habitants, les résidents, les citoyennes et citoyens à participer aux manifestations qui se tiendront les 22 et 23 juin, à Paris et en France.

 

Association européenne de défense des droits de l’Homme : « Une Europe pour tous les citoyens ! »

L’Association Européenne pour la défense des Droits de l’Homme (AEDH) et ses membres, réunis à Tallinn (Estonie) à l’occasion de l’Assemblée Générale Annuelle de l’AEDH, adoptent la résolution suivante :

Une Europe pour tous les citoyens !

A l’occasion de son assemblée générale réunie à Tallinn le 2 juin 2013, l’AEDH a tenu à examiner des questions sur l’effectivité de la citoyenneté dans l’Union européenne.

En cette année européenne des citoyens, l’AEDH tient à rappeler qu’on ne peut concevoir une Union européenne à 27 et bientôt à 28 réservant la jouissance de  l’ensemble des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels aux seuls titulaires de la nationalité d’un État-membre.

L’Union européenne se construisant avec l’apport de ressortissants de pays tiers, ceuxci doivent évidemment pouvoir en bénéficier sur un pied d’égalité. L’AEDH revendique pour eux la citoyenneté de résidence.

À Tallinn, l’AEDH constate avec consternation que l’Union européenne n’a toujours pas marqué de volonté de résoudre la situation indigne de près de 450 000 apatrides, particulièrement nombreux en Estonie et en Lettonie.

Sans nationalité, sans droits civils et politiques, ces citoyens européens sont privés en conséquence de certains droits sociaux. L’AEDH demande à l’UE d’organiser la ratification par ses États membres de tous les textes et conventions internationales relatives à la réduction des cas d’apatridie, notamment: la convention des Nations Unies de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, ainsi que la Convention du Conseil de l’Europe de 1997 sur la nationalité.

L’AEDH, dans le contexte de la crise économique, s’inquiète des atteintes aux droits économiques et sociaux dans certains pays, singulièrement dans le sud et dans l’est de l’Union. Notre association tient à rappeler que le respect et la promotion des droits sociaux n’est pas une cause de cette crise, mais reste une solution.

L’Assemblée Générale a décidé de porter un ensemble de revendications pour l’égalité des droits auprès des candidats à l’élection européenne de 2014, le Parlement européen étant la seule institution démocratiquement élue et représentative des citoyens européens.

 

Pour un manifeste antifasciste européen

Un manifeste pour la création d’un mouvement antifasciste européen vient de mettre en ligne une pétition intitulée « Manifeste antifasciste européen ».

La montée du fascisme. en Europe est aujourd’hui un fait, aucun pays n’y échappe, seules diffèrent l’intensité de cette progression, généralement proportionnelle à l’intensité des dégâts causés par la « crise » et les prétendus « remèdes » (qui se résument à une austérité dévastatrice) que proposent les gouvernements et l’Europe.

Ce  manifeste est relayé par le site « Visa » (pour Vigilance Initiatives Syndicales Antifascistes). On peut apporter son soutien en signant le manifeste ici : http://www.manifesteantifascisteeuropeen.fr/, et là : http://antifascismeuropa.org/manifiesto/fr.

Voici le texte de ce manifeste qui, après avoir analysé les causes de cette progression du fascisme, propose des moyens d’action pour l’enrayer.

Soixante-huit ans après la fin de la deuxième guerre mondiale et la défaite du fascisme et du nazisme on assiste presque partout en Europe à la montée de l’extrême droite. Mais, phénomène encore plus inquiétant, on voit se développer à la droite de cette extrême droite  des forces carrément néo-nazies qui, dans certains cas (Grèce, Hongrie,…) s’enracinent dans la société formant des vrais mouvements populaires de masse, radicaux, racistes, ultra-violents et pogromistes dont l’objectif déclaré est la destruction de toute organisation syndicale, politique et culturelle des travailleurs, l’écrasement de toute résistance citoyenne, la négation du droit à la différence et l’extermination – même physique –  des « différents » et des plus faibles.

Comme dans les années 20 et 30, la cause génératrice de cette menace néo-fasciste et d’extrême droite est la profonde crise économique, sociale, politique et aussi éthique et écologique  du capitalisme lequel, prenant prétexte de la crise de la dette, est en train de mener une offensive sans précédent contre le niveau de vie, les libertés et les droits des travailleurs, contre tous ceux d’en bas !   Profitant de la peur des nantis face aux risques d’explosion sociale, ainsi que de la radicalisation des classes moyennes laminées par la crise et les politiques d’austérité draconienne, et du désespoir des chômeurs marginalisés et paupérisés,  l’extrême droite et les forces néo-nazies et néo-fascistes se développent dans toute l’Europe ; ils  acquièrent une influence de masse dans les couches déshéritées  qu’elles tournent systématiquement contre des boucs émissaires traditionnels et nouveaux (les immigrés, les musulmans, les Juifs, les homosexuels, les handicapés,…) ainsi que contre les mouvements sociaux, les organisations de gauche et les syndicats ouvriers.

L’influence et la radicalité de cette extrême droite ne sont pas les mêmes partout en Europe.  Cependant, la généralisation des politiques d’austérité draconienne a comme conséquence que la montée de l’extrême droite soit déjà un phénomène presque général. La conclusion est évidente : Le fait que la montée impétueuse de l’extrême droite et l’émergence d’un néofascisme ultra-violent de masse ne soit plus l’exception à la règle européenne, oblige les antifascistes de ce continent à affronter ce problème à sa juste dimension, c’est-à-dire en tant que problème européen !

Mais, dire ça ne suffit pas, il faut ajouter que la lutte contre l’extrême droite et le néonazisme est d’une  urgence absolue. En effet, dans plusieurs pays européens la menace néofasciste est déjà si directe et immédiate qu’elle transforme la lutte antifasciste en combat de toute première priorité,  dont l’enjeu est la vie ou la mort de la gauche, des organisations ouvrières, des libertés et des droits démocratiques, des valeurs de solidarité et de tolérance, du droit à la différence. Dire qu’on est engagé dans une course de vitesse contre la barbarie raciste et néofasciste correspond désormais à une réalité vérifiée chaque jour dans les rues de nos villes européennes…

Vue la profondeur de la crise, les dimensions des dégâts sociaux qu’elle provoque, l’intensité de la polarisation politique, la détermination et l’agressivité des classes dirigeantes, l’importance des enjeux historiques de l’affrontement en cours et l’ampleur de la montée des forces d’extrême droite il est évident que le combat antifasciste constitue un choix stratégique exigeant un sérieux organisationnel et un investissement politique et militant à long terme. En conséquence, la lutte antifasciste doit être étroitement liée au combat quotidien contre les politiques d’austérité et le système qui les génère.

Pour être efficace et répondre aux attentes de la population, la lutte antifasciste doit être organisée de manière unitaire et démocratique et être le fait des masses populaires elles-mêmes. Pour ce faire, les citoyens et les citoyennes doivent organiser leur lutte antifasciste et leur auto-défense eux-mêmes. En même temps, pour être efficace cette lutte doit être globale, s’opposant à l’extrême droite et au néofascisme sur tous les terrains où se manifeste le poison du racisme et de la de l’homophobie, du chauvinisme et du militarisme, du culte de la violence aveugle et de l’apologie des chambres à gaz et d’Auschwitz. En somme, pour être efficace à long terme, le combat antifasciste doit proposer une autre vision de la société, diamétralement opposée à celle proposée par l’extrême droite : C’est-à-dire, une société fondée sur la solidarité, la tolérance et la fraternité, le refus du machisme, le rejet de l’oppression des femmes et le respect du droit à la différence, l’internationalisme et la protection scrupuleuse de  la nature, la défense des valeurs humanistes et démocratiques.

Ce mouvement antifasciste européen doit être l’héritier des grandes traditions antifascistes de ce continent !  Pour ce faire, il devrait poser les bases d’un mouvement social doté des structures, ayant une activité quotidienne, pénétrant toute la société, organisant les citoyens antifascistes en réseaux selon leurs professions, leurs habitations et leurs sensibilités, menant combat sur tous les fronts des activités humaines et assumant pleinement la tâche de la protection même physique des plus vulnérables de nos concitoyens, des immigrés, des Roma, des minorités nationales, des musulmans, des Juifs ou des homosexuels, de tous ceux et celles qui sont systématiquement victimes du racisme d’État et de la pègre fasciste.

C’est donc parce que le besoin de la mobilisation antifasciste à l’échelle européenne se fait chaque jour plus pressant que nous qui signons ce manifeste, nous appelons à la constitution d’un Mouvement Antifasciste Européen unitaire, démocratique et de masse, capable d’affronter et de vaincre la peste brune qui relève la tête sur notre continent. Nous ferons tout pour que le congrès constitutif de ce Mouvement Antifasciste Européen dont on a tant besoin, se tienne à Athènes au printemps 2013 et soit couplé  d’une grande manifestation antifasciste européenne dans les rues de la capitale grecque.

 Cette fois, l’histoire ne doit pas se répéter !

NO PASARAN !

 

« Cause commune » : l’histoire d’une intégration réussie de familles Rroms en Loire Atlantique grâce à la solidarité

« Fin 2009, une quarantaine de familles roms, indésirables à Nantes, tractant des caravanes hors d’âge, arrivent à Indre, une petite commune des bords de Loire.
Dès le lendemain, le maire Jean-Luc Le Drenn décide de mettre un terme à ce qu’il appelle « la politique de la patate chaude », en refusant de les expulser à son tour.
Grâce à l’engagement sans faille d’une poignée de citoyens et d’élus mobilisés par ce combat collectif et politique, les familles resteront 18 mois, avant qu’une solution digne et pérenne soit trouvée » (source : http://www.film-documentaire.fr/Cause_commune.html,film,38148.

On pourrait donc accueillir des familles Rroms dans une commune sans qu’il n’y ait une explosion des vols, des viols, du vandalisme… ? C’est un peu ce qu’a prouvé Jean-Luc Le Drenn, maire d’Indre, commune de 4000 habitants en Loire-Atlantique, et son équipe municipale. Le pari était « gonflé », et l’équipe ne s’y était pas trompé : « on va jouer notre mandat là-dessus », avait lancé comme un défi un conseiller municipal de la majorité.

Le film de Sophie Averty est magnifique. Elle ne disposait que de peu d’images de cette aventure : elle a dû avoir recours à des reconstitutions, à l’animation, à l’utilisation d’archives sonores… Son propos est passionnant : comment des gens qui ne sont pas particulièrement militants, se mobilisent presque spontanément pour s’organiser en collectif de soutien à ces familles (une cinquantaine), et ce pendant des mois et des mois ? La personnalité de Jean-Luc Le Drenn y est naturellement pour beaucoup : ce jeune maire a réussi à fédérer autour de lui à la fois élus et simples citoyens. Sans la moindre démagogie, et avec toute la rigueur que supposait une telle action, il a réussi la première étape de ce combat pour la dignité : les familles Rroms sont aujourd’hui logées dans des mobilhomes, répartis sur plusieurs communes (et ce n’est pas le moindre mérite de Jean-Luc Le Drenn d’avoir réussi à les convaincre !). Mais le travail n’est pas terminé : il le sera lorsque les Rroms auront trouvé des emplois stables et qu’ils auront pu être logés normalement. La municipalité d’Indre poursuit donc le travail.

Le film de Sophie Averty a été retenu dans la sélection du Mois du Documentaire dans les Côtes d’Armor.

On peut voir des extraits du film sur le site de TV Nantes :

http://www.telenantes.com/Documentaire/Documentaires/2013/03/Cause-commune

http://www.telenantes.com/Toute-l-actu/Infos-debats-territoires/CAUSE-COMMUNE-Indre-aux-cotes-des-Roms-0893

et une interview de Sophie Averty ici :

http://www.telenantes.com/A-la-votre-2012-2013-le-forum/2013/03/A-la-votre-2012-2013-le-forum3/Cause-commune-l-histoire-d-un-engagement-aupres-des-roms

P. Tartakowsky : du mariage pour tous aux cartes rebattues à droite

Pierre Tartakowsky a été réélu président de la Ligue des droits de l'Homme par le congrès de Niort.son rapport moral.

Dans l’éditorial qui ouvre le dernier numéro du bulletin mensuel de la Ligue des droits de l’Homme, son président, Pierre Tartakowsky, revient sur les débats autour du mariage pour tous qui ont occupé tout (ou presque) l’espace médiatique pendant ces derniers mois. Il en tire les leçons, politiques et sociétales.

La célébration du premier mariage entre deux personnes de même sexe à Montpellier aura heureusement marqué la fin d’une mobilisation politique intense autour de l’élargissement d’un droit. Il est, de fait, peu probable qu’une majorité de droite de retour aux affaires ose jamais revenir sur cette avancée et sur des actes d’état civil. Au plan politique pourtant, le sujet va rester présent, comme va prolonger l’onde de choc des mobilisations des droites durant toute la période écoulée.

Revenons sur cette séquence, ses évolutions et ce qu’elles révèlent. Dès le départ, ce sont davantage des acteurs idéologiques que partidaires qui sont à la manœuvre ; la droite classique, mais également le FN apparaissent mal à l’aise sur le mariage pour tous, car divisés et hésitants sur les bénéfices à en tirer. L’UMP est en pleine guerre des chefs et ne compte sans doute pas moins de gays dans ses rangs que le FN, ce qui se résout par une sorte de neutralité agressive, focalisée sur l’adoption et la GPA, laquelle, rappelons-le, ne fait pas partie du projet gouvernemental. Les courants cathos tradis et autres identitaires sont quant à eux franchement homophobes, même avec des approches diverses et nuancées. Tous ces gens se rassemblent sous le drapeau consensuel de la famille et des enfants, lesquels méritent « un papa, une maman ».

Cette mobilisation se nourrit de ce qu’il faut bien appeler un pas de clerc du président de la République, lequel a évoqué une possible objection de conscience des maires appelés à célébrer les mariages gays. Le gouvernement saura rectifier le cap et tenir bon jusqu’au vote de la loi, ce dont il faut se féliciter. Mais cette défaillance énorme – l’état civil n’a rien à voir avec la conscience de qui que ce soit –, qui appelle immédiatement une réaction de l’Inter-LGBT et des associations de défense des droits, est évidemment interprétée comme une hésitation. Et lorsque l’adversaire hésite, il faut augmenter la pression. Les organisations à la manœuvre le font d’autant plus qu’elles bénéficient de l’engagement de l’UMP, Jean-François Copé voyant là l’occasion de marquer sa différence d’avec son rival François Fillon, et d’exprimer sa vraie nature. Cet apport se double de celui d’une véritable galaxie de réseaux, fondations et autres clubs historiquement ancrés à l’extrême droite, et qui voient dans ce mouvement « apolitique » et « populaire » l’occasion rêvée d’échapper à l’ostracisme qui les frappe depuis la Libération et la guerre d’Algérie.

C’est en effet la première fois que ces groupuscules – toutes tendances confondues – peuvent occuper un espace politique partagé avec les droites dites républicaines, en phase avec une partie de l’opinion publique allant bien au-delà des cercles militants habituels, mordant même sur des électeurs de gauche émus et troublés par un sujet qui touche à l’intime. Nicolas Sarkozy a fourni le cadre idéologique à cette parade nuptiale des droites et de leurs extrêmes. Sa défaite, d’autant plus frustrante que courte, a accéléré cette chorégraphie de séduction tout en accentuant son côté dispersé, concurrences internes obligent.

Cette dynamique de concurrence pour le leadership s’est traduite, dans les derniers jours de la mobilisation, par des exclusives, des appels à la violence, et la résurgence d’un vocable utilisant pêle-mêle le vocabulaire des généraux putschistes de l’Algérie française, la dénonciation de la franc-maçonnerie, des appels à la « résistance », le tout en assimilant la police – coupable de s’en prendre à « la France bien élevée » –, à la Gestapo… Cette confusion des termes ne doit rien au hasard mais traduit une stratégie d’effacement, par banalisation, des réalités historiques qui ont battu et stigmatisé ces courants d’idées englués dans la collaboration avec l’occupant nazi.

Au-delà, cette agitation verbale indique une circulation de la pensée réactionnaire, en recherche d’elle-même, et de repositionnements possibles. De fait, elle est passée en peu de temps – toutes organisations confondues – de la stigmatisation des « islamistes » à l’exaltation du peuple de France, puis à la chasse aux homosexuels. Ainsi de la dénonciation d’un ennemi extérieur « infiltré », les droites extrêmes se repositionnent sur la dénonciation et la chasse d’un ennemi « intérieur ». Homo aujourd’hui. Demain…

Cette inquiétante évolution participe d’un élargissement conséquent du champ d’action et de prétention des extrémismes droitiers : d’un vieil ordre racial à un nouvel ordre moral, patriarcal et porteur, hélas, d’illusions de changement. Illusions, car une mobilisation basée sur la ségrégation et la discrimination porte inéluctablement en elle des dynamiques d’exclusion et de violence. Illusions, car loin de répondre aux besoins d’épanouissement et de bien-être des individus, cette mobilisation n’envisage leur avenir qu’au prisme d’allégeances rancies dans un passé mythique.

Reste posée une question essentielle : une recomposition profonde des forces de droite est en cours, dont il n’est pas aisé de dire ce qu’il en résultera, même s’il est certain que ce ne sera bon ni pour les droits, ni pour les libertés, ni pour la démocratie. La société civile, les organisations syndicales, les associations ne peuvent donc évidemment pas se désintéresser de l’enjeu, singulièrement dans la perspective des élections municipales. Nous y reviendrons.

Adresse du 87ème congrès de la LDH au président de la République et à la majorité parlementaire

Adresse au président de la République et a la majorité parlementaire, adoptée par le congrès de la LDH, à Niort, le 20 mai 2013, pour leur rappeler leurs responsabilités de répondre aux besoins de l’élargissement de la démocratie, et pour la satisfaction des besoins sociaux.

Monsieur le président de la République,

Mesdames, Messieurs de la majorité parlementaire

Monsieur le président de la République,

Vous avez incarné l‘espoir d’un « changement maintenant » et, à ce jour, il a été déçu.
Vous avez désigné la finance comme votre adversaire, et elle règne toujours.
Vous avez prôné l’emploi et la justice sociale, mais le chômage augmente et le niveau de vie des moins favorisés diminue.

Le gouvernement de votre Premier ministre a su tenir bon face aux manifestations de l’extrême droite alliée à la droite parlementaire, et il a réussi à faire adopter la loi sur le mariage pour tous. Nous aurions souhaité la même détermination pour les autres réformes.

Il a certes beaucoup écouté la société civile mais sans l’avoir, semble-t-il, entendue. Les grands débats nécessaires à la réussite du changement — sur la politique migratoire et les demandeurs d’asile, la politique de sécurité, les réformes démocratiques, l’avenir de la jeunesse — ont été, jusqu’à ce jour, évacués.

Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Vous vous êtes présentes pour tourner la page des politiques inégalitaires, injustes et sécuritaires ; les stigmates de l’ancienne législature perdurent.
Vous avez voulu incarner l’alternative ; elle peine à se mettre en place.
Vous avez souhaité une pratique parlementaire indépendante et exigeante ; votre voix, trop souvent, est étouffée.

Vous avez l’honneur d‘élaborer et de voter les lois. Cette charge vous engage. Nous en appelons à votre responsabilité de représentants du Peuple souverain. L’opposition, la frilosité et l’esprit de renoncement seront toujours mobilisés pour faire échec aux reformes de justice et de progrès. Il vous incombe de faire en sorte que l’espoir et les changements se concrétisent.

Nous en appelons à cette relation démocratique forte, et a votre courage. Il est vain de vouloir apprivoiser ou contourner les maux qui découlent des politiques néolibérales ou des réflexes sécuritaires. Assumez les propositions de progrès pour les droits et les libertés du programme sur lequel vous avez été élus ; vous ne lui serez fidèles qu’en défendant des mesures de justice, de lutte contre les inégalités, et de restauration des droits des citoyens bafoués par la législation rétrograde des derniers quinquennats.

Monsieur le président de la République, Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Vous avez l’honneur et la charge de disputer notre pays aux crises financière, économique et morale qui alimentent chômage, xénophobies et défiance du politique. Nous avons besoin pour cela de justice et de pragmatisme, d’éthique et de démocratie, de décisions et de détermination.  Le changement et la justice ne sont pas des concessions accordées par les forces politiques et économiques qui s’y opposent. La justice, la démocratie et le progrès social ont toujours dû être conquis de haute lutte. Cette vérité est plus que jamais d’actualité.

Monsieur le président de la République, Mesdames, Messieurs les parlementaires,

Nous, militants de la Ligue des droits de l’Homme réunis en congres, vous demandons instamment de manifester l’éthique politique, le courage civique et la responsabilité nécessaires pour combattre la crise et promouvoir les valeurs proclamées de la République que sont l’égalité, la liberté et la fraternité.

Nous, militants de la Ligue des droits de l‘Homme, répondons toujours présents à l’appel de ces valeurs, et nous nous engageons pour les réformes qu’elles appellent. Nous continuerons à le faire :

  • jusqu’à ce que le droit de vote et d‘éligibilité de tous les résidents étrangers s’impose car il répond à un impérieux besoin d’élargissement de la démocratie ;
  • jusqu’à ce que les rapports entre la police et la population, et particulièrement la jeunesse, soient profondément réformés, car cela répond a un profond besoin de sécurité et de sérénité ;
  • jusqu’à ce que la politique pénale soit rééquilibrée, afin que le tout—carcéral laisse la place a une justice digne et réellement efficace,
  • jusqu’à ce que les étrangers soient traites dans le respect des droits de l’Homme et des conventions internationales, qu’il s’agisse de nos concitoyens europeens que sont les Roms ou de ceux qui vivent parmi nous ou y recherchent un droit effectif a la protection ;
  • jusqu’à ce que les politiques économiques poursuivent le progrès social plutôt que l’enrichissement inégal.

Monsieur le président de la République, Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Vous avez, là où vous êtes, là où le peuple vous a places, d’immenses responsabilités. Il vous revient de ne pas les décevoir, et il nous revient de vous le rappeler.

Croyez en notre détermination, à la hauteur de ce que mérite l’avenir de la République.

 

Ligue des droits de l’Homme : ensemble, s’opposer à l’extrême droite !

Communiqué de la Ligue des droits de l’Homme.

Paris, le 12 juin 2013

Ensemble, s’opposer aux extrêmes droites

Le 5 juin, Clément Méric, syndicaliste étudiant et militant antifasciste, a été assassiné à Paris. La Ligue des droits de l’Homme a dénoncé ce meurtre commis à raison des convictions politiques du jeune homme. Cet acte s’inscrit dans la suite de trop nombreuses agressions commises par des groupes d’extrême droite, ces derniers mois, et qui sont allés cette fois-ci jusqu’à la mort.

La Ligue des droits de l’Homme réitère toutes ses condoléances à la famille et aux amis de Clément Méric, et demande aux autorités de faire toute la lumière sur ces actes afin que leurs auteurs soient condamnés.

Au-delà, il est urgent de porter un coup d’arrêt à ces exactions et aux idées qui en favorisent de près ou de loin le développement. La radicalisation publique et « désinhibée » des droites extrêmes s’inscrit dans un contexte, marqué depuis plusieurs mois par des discours haineux et une véritable avalanche de propos mensongers et agressifs, ne reculant pas devant la désignation de « cibles » à l’occasion de l’adoption de la loi sur le mariage pour tous. Cette agressivité revendiquée est elle-même le fruit d’une dynamique de rapprochement entre l’extrême droite et la droite dite classique.

L’assassinat de Clément Méric n’est pas un fait isolé. Agressions racistes, homophobes, sexistes, violences progressent en France comme dans toute l’Europe. Le mensonge, la haine, la violence, la mort sont les marques de l’extrême droite, de tous temps et en tous lieux. L’extrême droite s’appuie, pour se légitimer, sur les peurs nées du chômage, de la pauvreté, de l’explosion des inégalités et de la précarité.

Elle se réclame d’une pseudo-opposition à ces phénomènes pour renouer avec ses vieux démons et désigner les boucs émissaires qu’elle a toujours stigmatisés pour semer la haine : étrangers ou soi-disant tels, immigrés, avec ou sans papiers, homosexuels, juifs et francs-maçons…

Il est d’autant plus important, dans ce contexte, de réaffirmer notre refus ferme de toute politique publique pouvant légitimer, de près ou de loin, ces visions xénophobes et racistes. C’est bien en réaffirmant concrètement les droits des étrangers, des migrants, des Roms et de tous ceux qui sont tenus en lisière des droits fondamentaux, qu’il est possible de rassembler largement contre les périls montants. Car ces droits sont, de façon indivisibles, ceux qui fondent la République telle que nous l’aimons : fraternelle, égale et libre.

C’est dans la perspective d’un tel rassemblement que la Ligue des droits de l’Homme, avec les habitants, les résidents, les citoyens, continuera à défendre les libertés et tous les droits partout et pour tous, et à agir pour une société de solidarité. C’est dans cet esprit qu’elle appelle les citoyennes et citoyens à manifester leur solidarité, leur vigilance et leurs mobilisations.

Deux heures de contrôles au faciès contre les sans papier à Paris le 6 juin

La fédération de Paris de la Ligue des droits de l’Homme proteste vigoureusement contre l’opération de police du 6 juin à proximité du métro Barbes.

Le jour même où les républicains se réunissaient afin de manifester leur indignation suite à l’agression violente de Clément Méric, militant antifasciste, par des groupuscules d’extrême droite, la police républicaine déployait ses forces pour traquer les sans-papiers.

Dans ce qui apparait être une gigantesque opération de police, d’aucuns parleraient de rafle, des dizaines de policiers en civil ou non ont bouclé le quartier durant près de 2 heures, procédé à des contrôles d’identité « sélectif », c’est à dire au faciès, et à l’arrestation de plusieurs dizaines de personnes placées dans des bus avant d’être conduites au centre de rétention de Vincennes.

La Ligue des droits de l’Homme condamne fermement toutes opérations policières qui, bien loin d’apporter une quelconque réponse à l’insécurité, se traduisent par une stigmatisation accrue d’un public déjà fragilisé et entraîne une défiance à l’égard des forces de police de la République. Elle demande la mise en place d’une attestation de contrôle d’identité.

La fédération de Paris a écrit au préfet (copie ci-dessous) pour l’interpeller sur cette rafle inacceptable.

 

Paris, le 9 juin 2013

 

Monsieur Bernard Boucault

Préfet de Police de Paris

 

Monsieur le Préfet,

Au nom de l’ensemble des militants de la Fédération de Paris de la Ligue des droits de l’Homme, je tiens à vous manifester notre profond étonnement quant aux évènements qui auraient eu lieu le jeudi 6 juin à Barbes.

Les informations que nous avons pu obtenir, si elles s’avéraient exactes, font état d’une opération de police de très grande ampleur. Un impressionnant dispositif policier aurait bouclé le quartier de Barbes pendant 2 heures, entravant la libre circulation des résidents et des passants.

Entre 40 et 50 de personnes auraient été arrêtées et placées dans des bus spécialement affrétés pour cette opération. Plusieurs d’entre elles seraient désormais retenues dans le Centre de rétention administrative de Vincennes. Je ne fais pas état des informations qui laissent entendre que les contrôles auraient été réalisés de manière sélective, au facies. Bref, il semblerait que les conditions de cette opération contreviennent à l’article 78-2 du code de procédure pénale. Sauf à penser que la couleur de peau soit en elle même un délit.

Vous comprendrez alors la vive émotion qui est la notre. Convaincu que notre République se doit de respecter les droits de tous, nous nous étonnons de cette opération dont la méthode fait davantage penser à une « rafle » qu’à une opération de contrôle d’identité. Ce d’autant plus que la veille nous avions pu rencontrer vos services à propos des conditions d’accueil des migrants et de travail du personnel préfectoral car nous constations que ces conditions ne favorisaient pas un accueil digne et respectueux envers les étrangers.

La ligue des droits de l’Homme défend une République respectueuse de ses valeurs et des droits de tous. Elle demande la mise en place d’une attestation de contrôle d’identité. Elle condamne fermement toutes opérations policières qui bien loin d’apporter une quelconque réponse à l’insécurité se traduisent par une stigmatisation accrue d’un public déjà fragilisé et entraîne une défiance accrue à l’égard des forces de police de la République.

Dans l’attente d’une réponse à notre interpellation, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Préfet, l’assurance de notre considération distinguée.

 

 

Julien Molesin

Président de la Fédération de Paris de la LDH

Copie : M. le Ministre de l’Intérieur

Lettre ouverte aux députés européens : « ne criminalisez pas les demandeurs d’asile ! « 

Le 11 juin prochain, le Parlement européen aura à se prononcer sur les derniers textes à adopter pour une réforme du régime d’asile européen commun (RAEC). Au vu des amendements très marginaux finalement apportés aux différents projets de textes, notre association ne peut que réitérer son opposition à cette réforme. L’AEDH a adressé, le 07 juin, une lettre ouverte aux parlementaires européens afin de les encourager à refuser particulièrement la détention des demandeurs d’asile et l’ouverture des fichiers d’empreintes digitales aux autorités répressives nationales et à Europol.

Nous reproduisons cette lettre ci-dessous, et elle est téléchargeable ici.

Bruxelles, le 07 Juin 2013

Ne criminalisez pas les demandeurs d’asile !

Madame la députée, Monsieur le député,

Le 11 juin prochain, votre Assemblée aura à se prononcer sur les derniers textes à adopter pour une réforme du régime d’asile européen commun.

Dans une « Lettre ouverte » diffusée le 10 décembre dernier, nous vous avions fait savoir toutes les réserves que nous inspiraient les directives sur les procédures et les conditions d’accueil envisagées.

Nous sommes conscients de la résistance que vous avez souvent opposée à la volonté des membres du Conseil. Mais, au vu des amendements très marginaux finalement apportés aux différents projets de textes, notre association ne peut que réitérer son opposition à cette réforme. En effet, elle ne marque pas de réels progrès des droits pour tous les demandeurs d’asile et maintient la majorité d’entre eux dans une position de suspicion de fraude ou d’abus du système d’asile.

L’AEDH, association « européenne », convaincue que l’Union à 27 pourrait être une source de progrès des droits, regrette profondément que régime d’asile européen commun (RAEC) futur ne conduise pas à une conception véritablement « commune » du droit d’asile dans l’UE. Elle déplore que perdure ainsi une inégalité flagrante entre les personnes en recherche de protection, en fonction du pays où leur demande sera examinée.

En tout état de cause, nous vous exhortons à exprimer fortement votre opposition à toutes les formes d’enfermement des demandeurs d’asile, en quelque circonstance que ce soit.

Nous vous demandons également de censurer la réforme du règlement EURODAC qui ouvrirait aux autorités répressives nationales et à Europol l’accès aux fichiers d’empreintes digitales des demandeurs d’asile. Cette pratique serait en contradiction totale avec le principe de respect absolu de la confidentialité garantie aux demandeurs d’asile, afin de ne pas les mettre en danger.

Ces femmes et ces hommes qui espèrent trouver un refuge entre nos frontières ne sont pas des criminels. Ils ont souffert et nous ne saurions nous montrer dignes de la confiance qu’ils nous font, dignes de l’image de défenseur des droits que nous entendons montrer au monde, si notre réponse prend les formes d’une répression qu’ils ont voulu fuir.

Croyez, Madame la députée, Monsieur le député, en la confiance que nous plaçons en votre volonté de continuer à défendre le droit d’asile.

Catherie Theule, vice-présidente

Serve Kollwelter, président.