Marie-Claude Bompard se prend pour la mère supérieure de Bollène et refuse de marier de deux femmes

Marie-Claude Bompard est maire de Bollène (Vaucluse). Elue sous l’étiquette de la ligue du sud, fondée par son mari, Jacques Bompart, maire d’Orange, conseiller général et député, cofondateur en 1972 du front national.

Marie Claude Bompard est aussi catholique. C’est à ce titre qu’elle a « consacré » sa ville au « cœur sacré de Jésus » ; elle ne comprend pas que ce geste puisse soulever quelques critiques…

Alors, évidemment, le mariage pour tous, elle n’aime pas. Et ne se prive pas pour le dire. C’est ainsi que cette année, elle a utilisé la cérémonie commémorative du 8-mai pour en faire une tribune contre le mariage étendu aux personnes de même sexe.

Elle a aussi à plusieurs reprises annoncé qu’elle refuserait de célébrer ces mariages.

Elle vient de passer au travaux pratiques.

Deux jeunes femmes, Amandine Gilles et Angélique Leroux avaient projeté de se marier à Bollène. La maire les a reçues hier, vendredi 23 août, et leur a signifié qu’elle refusait de célébrer leur mariage : « Marie-Claude Bompard nous a dit qu’elle respectait les couples homosexuels mais que par rapport à ses convictions religieuses, il lui était impossible de nous unir », expliquent-elles. Les jeunes femmes lui ont alors demander de demander à un de ses adjoints de le faire : « On lui a alors dit de déléguer le pouvoir à un adjoint mais elle a refusé ». Mais n’allez pas supposer que Marie-Claude Bompard soit le moins du monde homophobe : elle n’est pas opposée « à une personne, mais à une loi » ! (source : article de Vauclusematin.com).

Les jeunes femmes ont décidé de s’adresser au préfet du Vaucluse.

Curieusement, la presse ne semble pas avoir repris cette information diffusée par Vaucluse matin, à part Europe 1 qui en a fait un flash.

Les refus de célébrations qu’on redoutait ont finalement été marginaux, et le fait de quelques illuminés seulement. Il y a eu le maire de Mésanger en Loire-Atlantique, celui d’Arcangues (Pyrénées-Atlantiques). Il est bon de rappeler que ce que ces maires baptisent abusivement « objection de conscience » n’est en fait que de la foutaise.

Comme on pouvait l’imaginer, ces mariages vont rapidement être banalisés. Sur son compte tweeter, Jean-Luc Moreno signale :

Déjà 148 #mariagepourtous célébrés a Paris et 558 dossiers déposés – dont le mien ! Qui a dit que les #gays ne veulent pas se marier ?

Quelqu’un pourrait-il signaler à Marie-Claude Bompard qu’elle est maire de Bollène, et non « mère supérieure » ?

 

Boris Le Lay perd son sang froid à l’approche du verdict du tribunal de Paris

Le 24 juin dernier, le tribunal correctionnel de Quimper, saisi de plaintes de personnalités et d’associations, dont la Ligue des droits de l’Homme, a condamné Boris Le Lay, tenancier du site breizatao, à 18 mois de prison avec sursis, et 22.500€ d’amende et dommages intérêts au bénéfice de 7 parties civiles, pour plusieurs délits, dont celui « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une race ou une religion » (lire ici). Ce que, bien entendu, Le Lay et consorts (Nauleau, Ménard…) traduisent par « atteinte à la liberté d’expression ».

Le 13 juillet, c’est le tribunal correctionnel de Paris qui jugeait à nouveau Le Lay. Cette fois, le procureur a requis un an de prison avec sursis et 10.000€ d’amende : le jugement a été mis en délibéré, et il sera rendu au mois d’octobre.

Le Lay a fait appel du premier jugement. Nul doute qu’il ira jusqu’en cassation, ne serait-ce que pour tenter d’asphyxier ses victimes financièrement. D’autant plus que, fort d’un « bienfaiteur » semble-t-il très généreux, il ne semble pas avoir de soucis financiers ! Voir ici la collusion entre breizatao et l’extrême droite américaine (expliquée par breizatao soi-même !). Et, bien entendu, il « dénonce » le complot communiste dont il estime être victime.

Et il continue de s’acharner sur une femme qui a été parmi les premières à dénoncer ses activités, et a initié la constitution par la section de la Ligue des droits de l’Homme de Rennes, d’un dossier particulièrement documenté, ainsi que la plainte qui a été examinée par le tribunal de Paris. Rappelons que Le Lay est sous le coup d’une tripe assignation : apologie de crimes contre l’humanité, provocation à la haine raciale et contestation de crimes contre l’humanité. Toutes choses vérifiables sur le site breizatao.

Françoise Morvan, c’est elle dont il s’agit, sait de quoi elle parle. Elle est l’auteur, parmi de nombreux autres ouvrages, de deux livres qui traitent de la dérive identitaire en Bretagne : « Le monde comme si » (Actes Sud, 2002, puis réédité régulièrement en format poche dans la collection Babel), et « Miliciens contre maquisards » (éditions Ouest-France, 2010), ce dernier étant régulièrement réédité et mis à jour. Cet ouvrage part de « l’histoire d’une rafle qui a eu lieu le 11 juillet 1944 autour de Saint-Nicolas-du-Pélem, un petit bourg en plein centre de la Bretagne, au sud de ce qu’on appelait alors les Côtes-du-Nord », et analyse les rapports singuliers entre certains mouvements bretons et la collaboration.

Il n’en fallait évidemment pas plus pour déclencher la fureur de Le Lay, qui, sur son blog, déverse à longueur d’articles sa haine pour tout ce qui peut toucher de près ou de loin à la démocratie et aux valeurs humanistes. Et depuis son procès, le 13 juillet à Paris, Le Lay publie des articles dont on peut facilement imaginer le degré de vulgarité et de haine, contre Françoise Morvan. Les titres de ces articles à eux seuls en témoignent : le 21 août, « la mère Morvan digère mal », le 30 juillet, « Françoise Morvan et la fin de la pourriture rouge », pour n’en citer que deux.

La lecture des articles que Françoise Morvan consacre, sur son site Internet, à ces affaires, permet de mesurer l’ampleur de la tâche qu’elle a accomplie (et qu’elle poursuit), et par opposition, la triste vacuité de « l’argumentation » ( ???) de Le Lay. On les trouve sous la rubrique « Travaux » de son site, et à cette adresse, la réponse qu’elle fait aux derniers articles de Le Lay. Une visite du site de Françoise Morvan permet par la même occasion de découvrir l’étonnante diversité de ses travaux !

Valeurs actuelles… comme en quarante ?

L’hebdomadaire « valeurs actuelles », qui n’a jamais été un modèle journalistique, ni une référence en matière d’information, s’est fendu, pour son dernier numéro, d’une une abjecte, avec en titre principal, « Roms, l’overdose », et en sous-titres, « le ras-le-bol des Français », puis « assistanat, délinquance : ce qu’on n’a pas le droit de dire ».

Cet hebdomadaire nous a habitués à des une souvent limites, et le site Rue 89 s’est livré à leur analyse depuis le lancement de sa nouvelle formule, en janvier 2013, soit 31 numéros. L’auteur de l’article, le journaliste François Kruq, dresse le prototype de la « bonne une » à la sauce « valeurs actuelles » :

  • « un titre-choc pour hérisser le poil des bien-pensants (« La France barbare » pour lancer la nouvelle formule, « Roms, l’overdose » cette semaine) ;
  • un sous-titre révélant la vérité que ces mêmes bien-pensants veulent ignorer (« Toutes les 24 heures : 13 000 vols, 2 000 agressions, 200 viols » en janvier, un sondage forcément exclusif sur « le ras-le-bol des Français » cette semaine) ;
  • un « appel de une », un de ces petits titres dans un coin de la couverture, évoquant le combat si fédérateur contre le mariage homosexuel (« Vague de fond et mensonge d’Etat » en janvier, « Sur la route avec les Veilleurs » cette semaine). »

(source : l’article de François Kruq, intitulé « ‘Roms, l’overdose’ : imaginez la prochaine couv’ de Valeurs actuelles »)

Puis l’auteur s’efforce de décrypter les 31 unes, d’en analyser le sens profond et d’essayer d’en deviner les motivations : un article passionnant, qui permet de pénétrer à l’intérieur d’un projet politique parfaitement assumé.

Cette une a fort heureusement déclenché une marée de protestations, sur les réseaux sociaux dès mercredi après-midi, puis de la part des appareils politiques et des associations. La Ligue des droits l’Homme a joint sa voix à ce concert de protestation, en publiant en fin d’après-midi, ce jeudi 22 août, le communiqué suivant :

Valeurs actuelles… comme en quarante ?

La Ligue des droits de l’Homme condamne avec la plus grande fermeté l’utilisation par la rédaction de l’hebdomadaire Valeurs actuelles dans la une et le contenu du numéro du 22 août 2013 de termes stigmatisants et injurieux vis-à-vis des Roms. Sous prétexte d’un sondage commandé par le journal à propos des occupations de terrains, Valeurs actuelles s’autorise en première page à stigmatiser l’ensemble des Roms en y accolant les termes « assistanat » et « délinquance ». Elle appelle par ailleurs à une réaction à leur égard puisqu’elle considère leur présence comme provoquant une « overdose ». La rédaction demande au gouvernement une réponse sur cette base. Il s’agit ainsi d’une prise de position raciste, puisque des personnes sont désignées non pas pour ce qu’elles font, mais pour ce qu’elles sont.

Le contenu du journal développe cette idéologie répugnante en qualifiant les Roms de « plaie » et de « fléau », menaçant notre pays d’invasion et justifiant une réaction citoyenne. Par un communiqué de presse, le journal se prétend républicain et soutient défendre avec force les principes fondateurs de notre démocratie. Mais ce cache ne trompera personne. Valeurs actuelles a glissé dans les limbes de l’extrême droite haineuse, appelant à la violence à l’encontre d’individus à raison de leur origine.

 

35 ans de prison pour B. Manning : sale temps pour les lanceurs d’alerte !

Le soldat américain Bradley Manning, qui avait livré des documents classés secret défense de l’armée au site Wikileaks a été condamné à 35 ans de prison. C’est moins que ce qu’avait demandé le procureur (60 ans), mais c’est énorme, pource jeune homme de 25 ans : il ne peut semble-t-il espérer que 112 jours de remise de peine, en raison des conditions scandaleuses de sa détention préventive (il a été plusieurs mois à l’isolement). Additif / correctif : en fait il pourrait, par le jeu des remises de peines, n’effectuer que 8 ou 9 ans de prison. « Il tirera probablement encore huit ou neuf ans et sera libéré sur parole à 33 ou 34 ans. », estime son défenseur, le colonnel Morris Davis (lire ici). Lire également l’article du site de Toulon : http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article5532.

Sale temps pour les lanceurs d’alerte !

Cette condamnation intervient au moment où David Miranda, le compagnon du journaliste britannique Glenn Greenwald, qui travaille pour The Guardian, a été retenu au secret et interrogé pendant neuf heures par la police britannique, qui a fini par le relâcher, mais en confisquant son ordinateur portable, son téléphone, et une clé USB… (lire ici, sur le site de la section de Toulon).

Rappelons également, dans le cadre de cette affaire, que la France a refusé d’accorder l’asile à Edward Snowden, qui a dénoncé et prouvé les pratiques scandaleuses des service secrets américains.

Rappelons enfin qu’il y a un mois, le site Mediapart avait été contraint, par une décision de justice, de faire disparaître toute allusion à la bande magnétique enregistrée par le majordome de Mme Bettencourt.

Une taxe pour les gens du voyage, pas de taxe pour les touristes

Une aired'accueil

Le 8 novembre 2011, la commission des finances de l’Assemblée nationale avait voté à l’unanimité un amendement à la loi de finance 2012, déposé par le député PS Henri Emmanuelli, visant à instaurer une taxe sur les « résidences mobiles terrestres », en clair les mobil homes, utilisés en tant qu’hébergement de loisir.

Henri Emmanuelli justifiait ainsi cette taxe : « Les mobil-homes qui s’entassent dans les zones touristiques, notamment dans les campings, échappent à toutes les règles d’urbanisme et ne sont pas taxés, ce qui pose un vrai problème », déclarait Henri Emmanuelli.

Aussitôt, le lobby de l’hôtellerie de plein air a sorti la grosse artillerie, et ce qui devait arriver arriva : Henri Emmanuelli a retiré son amendement.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là.

Ce qu’il faut savoir, c’est qu’une telle taxe existe déjà. Mais d’une part, elle ne concerne que les caravanes et les camping-cars, et, d’autre part, elle ne s’applique que s’il s’agit de la résidence principale. Par conséquent, les mobil homes et bungalows ne sont pas concernés, ni les touristes qui utilisent caravanes ou camping-cars. Les seules personnes concernées sont donc les « gens du voyage ». Son montant : 150€ pour les RMT de moins de 10 ans, 100€ pour les RMT entre 10 et 15 ans, et gratuit au-delà de 15 ans. La taxe est due pour chacune des résidences mobiles du foyer fiscal : une famille qui aurait deux caravanes devrait payer deux fois la taxe.

Cette taxe discriminatoire s’ajoute évidemment aux « droits de place » que les familles doivent régler pour les aires d’accueil. Le tarif pour l’aire d’accueil de Loudéac :

  • Caution : 100€
  • Droit de place : 2€ / jour (douche + chasse d’eau wc inclus)
  • Eau : 2,70€ / m3
  • Electricité : 0,15€ / kwh

Ces tarifs ne paraissent sans doute pas exagérés. Mais il faut tout de même savoir que la gestion de ces aires est la plupart du temps confiée à des sociétés privées, et dans la majorité des cas il s’agit de la société l’Hacienda, qui est une filiale de la Saur, une grosse compagnie de distribution d’eau (c’est le cas à Loudéac). La gestion de ces aires génère un chiffre d’affaire considérable : il s’agit d’un véritable business. La cour des comptes s’est penchée sur ce problème, et le rapport qu’elle a publié est très critique : au sujet des délégations de gestions, il considère qu’ « il en résulte non seulement un recours inapproprié à la délégation de service public mais aussi un risque que les bénéfices dégagés par certains opérateurs ne soient que partiellement justifiés. Un encadrement de la délégation de la gestion et une implication plus forte de l’État et des collectivités apparaissent en conséquence nécessaires ». Le rapport (téléchargeable ici) préconise enfin « d’encadrer les modalités de gestion :

  • fixer par voie réglementaire des règles communes applicables à l’ensemble des conventions de gestion à travers des clauses-type, pour éviter l’existence de dispositions ou de pratiques de gestion abusives ;
  • harmoniser au niveau départemental les règles applicables en matière de durées de séjour et de tarification ».

Il ne semble pas que les conclusions de ce rapport aient été suivies d’effet.

Les préconisations du rapport du préfet Hubert Derache le seront-elles davantage ? L’anthropologue Marc Bordigoni, spécialiste  des Tziganes, en doute, et il soulève une difficulté qui risque d’interdire toute évolution : les élections municipales auront lieu en 2014, soit avant l’application de la loi interdisant le cumul d’un mandat d’éxécutif local avec un mandat de parlementaire. Or 247 députés et 126 sénateurs sont également maires, et 100 députés et 64 sénateurs également présidents d’EPCI (établissements publics de coopération intercommunale). Le risque est bien entendu que les  « intérêts » de l’élu local dictent leur conduite au parlementaire… (Sources : le site de la section LDH de Toulon, et l’article de Marc Bordigoni dans Libération du 23 juillet dernier).

L’espoir qu’avait fait naître la suppression du carnet de circulation, en octobre 2012, risque de s’évanouir rapidement…

 

France 3, lundi 19 août à 22h55, Liberté, de Tony Gatlif

Le camp de concentration de Tziganes de Montreuil-Bellay (49)

Jacques Sigot s’est battu pendant de longues années pour que le camp d’internement de tziganes de Montreuil-Bellay (49) soit reconnu. C’est aujourd’hui chose faite, et un stèle commémorative y a été érigée. Jacques nous informe que   ce soir, lundi 19 août, France 3 va diffuser le film « Liberté », de Tony Gatlif. Voici ce qu’il en dit :

Ce soir, passe sur France 3, à 22 h 55, un film sur les Tsiganes pendant la Seconde Guerre mondiale. Tony Gatlif, le réalisateur, est parti de 5 lignes d’un témoignage de mon ouvrage sur le camp de Montreuil-Bellay (49) :

Un nomade, chef d’une famille, s’appelait Taloche. C’était un Hongrois, mais il se disait Belge, parce que né en Belgique. Il se procura, lui aussi, un domicile à Cerçay, dans les Deux-Sèvres. Mais il ne s’y installa pas, préférant retourner dans son pays natal. Là, les Allemands l’attrapèrent et l’enfermèrent dans un camp de concentration  où il fut éliminé.

Ça, c’est un témoignage que j’ai recueilli en 1980, publié en 1983 et qu’a utilisé Tony Gatlif. J’ai, par la suite, continué mes recherches et il s’est avéré que le témoignage était assez « fantaisiste », comme souvent les témoignages… J’ai même retrouvé ujne photo de l’homme qui s’appelait en réalité Toloche.

Voici ce que je sais maintenant sur lui après une vingtaine d’années de nouvelles recherches :

http://jacques-sigot.blogspot.fr/2013/06/joseph-toloche-un-interne-du-camp-de.html

Publicité avec extraits du film sur le Net :

http://www.allocine.fr/film/fichefilm-137350/secrets-tournage/

Le film est très très beau !La naissance du projet

Secret de tournage sur Liberté

Tony Gatlif a depuis toujours souhaité évoquer le sort des Roms durant la seconde guerre mondiale : « J’avais envie de faire un film sur l’holocauste des roms depuis que j’ai commencé à faire du cinéma. Mais le sujet me faisait peur. Les Roms que je rencontrais me disaient souvent : « Fais-nous un film sur la déportation des Roms ». Début 2007, participant à un colloque international des Roms à Strasbourg, des jeunes élus roms de la communauté européenne m’ont fait la même demande. Ils me disaient à quel point ils souffraient de ce manque de reconnaissance, de l’ignorance des autres vis-à-vis de leur propre histoire. Je ne voyais pas comment faire ce film, moi qui suis un cinéaste qui aime la liberté de la caméra, comment respecter les règles d’une stricte reconstitution. Et je reculais de peur de mal faire en réalité. Et puis un jour, j’apprends que Jacques Chirac va rendre hommage aux Justes en les réunissant au Panthéon. Je me suis dit : on va enfin savoir si certains Justes ont sauvé des Tsiganes. Malheureusement ils n’étaient pas présents. Je me suis mis à les chercher. J’ai fini par trouver dans un livre de Jacques Sigot, une anecdote de quelques lignes : « Le destin d’un dénommé Tolloche fut particulièrement tragique. Interné à Montreuil-Bellay, il réussit à se faire libérer après avoir acheté, par l’intermédiaire d’un notaire, une petite maison à quelques kilomètres de la ville. Incapable de vivre entre quatre murs, il reprit la route pour retourner dans son pays d’origine, la Belgique. Il fut arrêté dans le Nord et disparut en Pologne avec ses compagnons d’infortune »

 

Il y a 18 mois, Henri Leclerc répondait par anticipation à Valls !

La blogosphère de gauche commence à publier des articles critiques au sujet du ministre de l’intérieur. Le blogueur Juan, par exemple, s’en explique dans un article très intéressant.Cette évolution est réjouissante, et montre que l’exercice de Valls qui consiste à séduire la droite tout en étant plébiscité par la gauche (on se souvient de son succès à l’université d’été du PS à La Rochelle l’an dernier) a peut-être atteint sa limite, l’attaque contre Christiane Taubira étant le déclencheur. Ne rêvons cependant pas trop…

Valls reproche notamment à Christiane Taubira de négliger la récidive, considérant que les mesures de probation sont inefficaces. Un bien mauvais procès, puisque la plupart des mesures de probation ont été petit à petit supprimées par la droite depuis une dizaine d’année , et que les moyens de leur application  diminués au fil des ans.

Il se trouve qu’Henri Leclerc, président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme, a évoqué cette question de la récidive il y a quelques mois, à l’occasion d’une conférence qu’il a donnée à Quimperlé. C’était au moment où Sarkozy mettait en place les « peines plancher ». Ces peines, que de nombreux juristes, avocats et magistrats ont sévèrement critiquées, foulent du pied un principe essentiel, celui de l’individualisation des peines. Mais il n’y a pas que cela. Elles rendent la prison presqu’automatique. Or, on sait parfaitement que la prison engendre la récidive, a fortiori lorsqu’elle est surpeuplée, et c’est le cas dans l’immense majorité des établissements pénitentiaires. La solution simpliste préconisée par Valls consiste évidemment à construire de nouvelles prisons. Henri Leclerc le rappelle dans sa conférence : chaque fois qu’on crée de nouvelles places en prison, on a instantanément une augmentation équivalente, presqu’à l’unité près, du nombre d’incarcérations…

La vidéo de la conférence d’Henri Leclerc est en visible ci-dessous, elle mérite d’être vue ou revue. A lire également l’article consacré à ce sujet sur le site de la section LDH de Toulon, et les liens vers lesquels il dirige.

 httpv://youtu.be/WLuj6sRLdPU

Valls découvre son vrai visage

Manuel Valls nous livre au fil des jours son véritable visage : il est un homme de droite, et il ne s’en cache plus.

Son attaque contre le projet de réforme pénale présenté par le ministère de la justice éclaire tristement cette position. Cette attaque aurait pu être effectuée par Sarkozy et ses ministres de l’intérieur successifs : on y trouve les mêmes fantasmes, les mêmes mensonges (interprétations éhontées de statistiques sorties de leur contexte notamment).

Christiane Taubira a réagi à cette attaque en mettant justement en lumière une des manipulations contenues dans la lettre de Valls à Hollande. Le ministre de l’intérieur se réfère à une étude de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), pour justifier le maintien des « peines plancher » introduites par Sarkozy, et pour faire le procès des mesures de probation, inefficaces selon lui.

Sauf que le président de cet observatoire met lui-même en garde contre une utilisation abusive de ce rapport : il écrit en effet, « Ces données sont inédites, puisqu’elles permettent de déterminer pour toutes les personnes de l’échantillon le type et le nombre d’infractions pour lesquelles elles ont été mises en cause. Leur champ n’en est pas moins restreint dans le temps, dans l’espace mais surtout par rapport à l’ensemble des personnes mises en cause en raison du seuil de cinq infractions qui a été appliqué ».

Évidemment, Valls s’est bien gardé de tenir compte de cet avertissement.

Comme le disait en substance Rebsamen, président du groupe socialiste au Sénat, les jours derniers, le ministre de l’intérieur met un soin particulier à l’entretien de sa popularité… Sauf qu’il le fait en utilisant les mêmes grosses ficelles que la droite : utilisation des tendances xénophobes d’une partie de l’électorat telles que l’islamophobie, la peur de la « délinquance », populisme.

Le plus triste dans l’affaire, c’est que ça fonctionne bien, même très bien, y compris à gauche : rappelons-nous l’ovation que Valls a reçue à l’université d’été du PS en 2012 !

Ce n’est pas un hasard qu’il ait choisi de s’attaquer à Christiane Taubira. Elle représente sans doute ce que Valls déteste le plus : le courage politique. S’il y a dans ce gouvernement un ministre qui a fait preuve, et continue de faire preuve de courage politique, c’est bien Christiane Taubira, qui a été et continue d’être attaquée par la droite, avec des arguments qui peuvent aller jusqu’à la haine raciale, on l’a encore vu récemment.

A lire cet excellent billet :

http://lelab.europe1.fr/t/pour-discrediter-manuel-valls-aupres-de-francois-hollande-christiane-taubira-l-accuse-d-instrumentalisation-des-statistiques-10488

 

 

Des voix s’élèvent contre l’interdiction du foulard à l’Université

Jean Baubérot

Une nouvelle polémique alimente depuis quelques jours les discours xénophobes, racistes et islamophobe : le port du foulard par des jeunes femmes musulmanes à l’Université.

Cette polémique est née à la suite de la publication d’un rapport réalisé par le Haut conseil à l’intégration, un organisme créé par Michel Rocard en 1989. Or ce comité, qui avait une mission « laïcité », n’existe plus : il a été remplacé, en décembre 2012, par l’Observatoire de la laïcité, présidé par l’ancien député Jean-Louis Bianco. Parmi les mesures préconisées par ce rapport, il y a l’interdiction du port du foulard à l’Université.

Comme chaque fois que ce « problème » est abordé, un amalgame est fait entre le foulard, qui ne recouvre que les cheveux, et la burqua, qui « anonymise » celle qui la porte puisqu’elle cache intégralement le visage. La loi qu’avait fait voter Sarkozy en 2010 concernait le port de la burqua dans les espaces publics, pas le voile. Evidemment, cet amalgame n’est pas innocent.

Le ministre de l’intérieur s’est, comme on pouvait s’y attendre, précipité sur cette publication pour dire tout le bien qu’il en pensait. La ministre des universités s’est quant à elle prononcée contre.

Et fort heureusement, d’autres voix se sont élevées pour dénoncer cette mascarade. Et des voix autorisées. À commencer par la Conférence des Universités. Des intellectuels ont également apporté leur éclairage, tout aussi autorisé.

Jean Baubérot (lire ici le compte rendu de sa conférence donnée à Saint-Brieuc en décembre 2012 sur le thème « laïcité et lutte contre les discriminations »), tout d’abord, historien, spécialiste de la laïcité, et membre de l’Observatoire national de la laïcité. Il ne mâche pas ses mots : « On a l’impression », dit-il, « que ce petit lobby n’a de cesse de vouloir exacerber les tensions, faire monter la pression, énerver les musulmans, bref se fabriquer des adversaires pour mieux pouvoir se poser en héros contre l’intégrisme par la suite ». Et il ajoute : « Ce faisant, on fait le lit de l’extrême droite, alors que se profilent des élections, et celui des islamistes intégristes qui deviennent attractifs: ils peuvent entretenir le sentiment de victimisation de musulmans susceptibles de se radicaliser. C’est pain bénit pour eux ». Il revient aussi sur cet amalgame : « L’ennui, c’est que l’amalgame est systématiquement fait entre ce voile intégral qui cache l’identité d’une personne et le foulard qui ne fait que cacher les cheveux, mais permet l’identification. Vous avez même des dessins qui représentent des femmes en niqab, alors qu’on parle du foulard ». Et il conclut : « Que veut-on ? Renforcer l’exclusion de femmes qui peuvent s’épanouir à l’université ? Provincialiser l’université française qui n’est pas la mieux classée au monde ? Faire comme si la France était une île et qu’on ne regarde pas ce qui se passe ailleurs ? ».

Danièle Lochak

Une autre voix s’était exprimée, en décembre 2011 : celle de Danièle Lochak. Cette historienne, membre de la Ligue des droits de l’Homme, publiait alors un article sur le Haut conseil à l’intégration, et elle non plus ne mâche pas ses mots, lorsqu’elle présente un historique des préconisations de cet organisme : «  lorsqu’on examine le contenu des rapports et des avis du Haut Conseil à l’intégration sur une période de vingt ans, ce qui saute aux yeux c’est le nombre de propositions qui ont pour effet — sinon pour objet — de restreindre les droits des étrangers ou de précariser leur situation par des mesures de contrôle toujours plus strictes. Ce faisant, le HCI embraye sur le discours tenu par tous les gouvernements successifs, de droite comme de gauche et se coule dans la problématique imposée depuis plus de trente ans : à savoir que la « maîtrise des flux migratoires », et donc la lutte contre l’immigration irrégulière, sont le préalable à toute politique d’intégration des immigrés résidant légalement en France. Or cette thèse est fallacieuse.

D’abord parce que les mesures répressives engendrent insécurité et précarité, stigmatisent l’ensemble de la population immigrée, encouragent la suspicion et la xénophobie. Elles ont donc des effets désintégrateurs. Ensuite, elles mobilisent les énergies et les crédits et la priorité qui leur est donnée a pour conséquence de repousser toujours à plus tard les initiatives concrètes en faveur de l’intégration. » (source : le site « les mots sont importants, http://lmsi.net/Le-Haut-Conseil-a-la-des). On peut voir ici la vidéo d’une conférence de Danièle Lochak donnée à Lorient en septembre 2011 sur la « généalogie des droits de l’Homme »).

Ces deux articles, passionnants, éclairent de façon très intéressante le sujet : à lire d’urgence !