Congrès du Mans : résolution « Soutenir les droits du peuple palestinien »

Michel Tubiana a défendu la résolution "soutenir les droits du peuple palestien"

Les congrès de la Ligue des droits de l’Homme sont l’occasion de voter des « résolutions », qui sont des textes politiques qui préciseront la ligne que suivra la LDH pendant les deux années qui la séparent du congrès suivant. Au congrès du Mans, les 23,24 et 25 mai 2015, les congressistes ont examiné et adopté quatre résolutions.

La première fait écho aux événements dramatiques qui ont secoué la Palestine l’été 2014. Elle est intitulée « Soutenir les droits du peuple palestinien », et a été adoptée à l’unanimité moins deux abstentions. Elle a été défendue par Michel Tubiana, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme.

En voici le texte.

Le peuple palestinien est victime d’un double déni : celui que lui infligent les autorités israéliennes par leur occupation, et celui que lui inflige la communauté internationale par son refus de reconnaître son droit à l’indépendance.

Aucune organisation de défense des droits de l’Homme ne peut accepter que quiconque s’en prenne à des civils, soit volontairement, soit de manière indiscriminée ou par un recours à la force, la responsabilité des gouvernants successifs d’Israël est, dans le crescendo de violences, écrasante. L’accélération de la colonisation qui n’est rien d’autre que le vol de terres par la puissance occupante, l’impunité légalisée de l’armée israélienne et l’impunité de fait reconnue aux colons, la détention administrative des prisonniers et les juridictions militaires, l’interdiction de tout développement économique de la Cisjordanie, le blocus de Gaza, la rétention des droits de douane dus à l’autorité palestinienne, tout simplement l’empêchement de vivre et l’enfermement que subissent quotidiennement les hommes, les femmes, les enfants de Cisjordanie et de Gaza ne peuvent qu’entraîner une résistance légitime mais aussi générer la violence du désespoir.

En construisant un mur dans lequel elles croient pouvoir enfermer le peuple palestinien, c’est aussi le peuple israélien que les autorités de ce pays enferment. Coupé de son environnement, entretenu dans l’illusion qu’une politique de force pourrait se poursuivre indéfiniment, celui-ci est lui-même atteint par les maux que génère inévitablement la domination d’un peuple par un autre : restrictions démocratiques, attaques contre les voix dissonantes, usage de la torture, injustice sociale, gonflement démesuré du lobby militaro industriel, discrimination à l’égard des Arabes israéliens.

Mais le conflit israélo-palestinien n’aurait pas perduré, ni pris cette ampleur et cette résonance, si la communauté internationale n’avait fait preuve d’une telle partialité. Celle-ci n’a cessé et ne cesse de cautionner la politique israélienne et ce n’est que très récemment que, face à leurs opinions publiques révoltées par le sort réservé au peuple palestinien, plusieurs pays européens ont infléchi leur politique en reconnaissant un Etat palestinien, ou en manifestant leur intention de le faire.

Cela ne suffit pas. Parce que l’Etat d’Israël est un Etat comme un autre, aux mêmes droits et aux mêmes responsabilités, il convient qu’il rende compte de ses actes. Et c’est aux opinions publiques mobilisées qu’il appartient d’exiger de leurs gouvernements que l’ONU fasse respecter ses résolutions, impose des sanctions à l’Etat d’Israël et prenne les mesures nécessaires pour la création d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, l’accès à tous les lieux saints devant être préservé.

La Palestine doit devenir un membre à part entière des Nations unies. La Cour pénale internationale doit se saisir des crimes de guerre commis. Si la communauté internationale doit faciliter le dialogue et la négociation entre les parties, c’est sans oublier qui est l’occupant et qui est l’occupé, et en faisant respecter le droit international sous tous ses aspects.

D’ores et déjà, il convient d’organiser le boycott des produits issus des colonies et des entreprises qui en tirent profit, ainsi que l’arrêt du commerce des armes. La communauté internationale doit s’opposer à la consolidation des faits accomplis illégaux. L’Europe doit  suspendre l’accord d’association qui la lie avec Israël. C’est aussi de cette manière que l’on peut tenter, aux côtés des forces de paix israéliennes auxquelles il faut rendre hommage, de changer les choses en Israël même.

Fidèle à son engagement en faveur d’un droit international respectueux des peuples et des individus, la LDH réaffirme le droit à l’existence de l’Etat d’Israël et renouvelle son plein et entier soutien aux droits du peuple palestinien.

Résolution adoptée à l’unanimité moins 2 abstentions

Dieudonné : les militants pro-palestine de la campagne « boycott – désinvestissement – sanctions » réagissent

Si on avait encore des doutes sur la généalogie de la "quenelle"...

Correction: un lecteur me signale une coquille qui me fait dire l’inverse de ce que je voulais dire : j’ai écrit « Et il ne faudrait pas croire que si Dieudonné cible avant tout Israël, cela n’en fait pas un ami des palestiniens », il fallait naturellement lire « Et il ne faudrait pas croire que si Dieudonné cible avant tout Israël, cela en fait un ami des palestiniens ». Merci, E. D. !

Ajout, à 16h55 : lire aussi l’article de Denis Robert sur sa page Facebook !

Parmi les conséquences de l’affaire Dieudonné, il en est une dont on n’entend pas beaucoup parlé : celle qui concerne le problème palestinien. A tout focaliser sur l’antisémitisme, et il est naturellement légitime et indispensable de le dénoncer, on a fini par presqu’oublier le problème palestinien, qui est pourtant lui aussi essentiel. Et il ne faudrait pas croire que si Dieudonné cible avant tout Israël, cela en fait un ami des palestiniens, ce qui constitue d’ailleurs une des preuves les plus éclatantes qu’il ne combat pas l’Etat israëlien, mais bien les juifs : ce n’est pas de l’antisionisme, c’est uniquement et exclusivement de l’antisémitisme.

Une vidéo circule en ce moment sur Internet : celle d’une interview de Dieudonné par une chaîne de télévision iranienne. On le voit, interrogé par un jeune journaliste iranien très propre sur lui, délirer sur la religion juive et le danger qu’elle représente pour les religions musulmane et chrétienne, pour la civilisation…

Cet aspect du problème est important. Si en effet, quelques extrémistes israéliens taxent volontiers d’antisémitisme tous ceux qui ont le culot de porter un jugement négatif sur la politique israélienne envers la Palestine, en ce moment on ne les entend pas beaucoup : les élucubrations du clown leur seraient-elles utiles, d’une certaine façon ? On peut le penser : elles permettent d’attirer la sympathie vers eux, et en même temps de discréditer la cause palestienne.

C’est pourquoi le communiqué qu’a publié hier lundi 6 janvier la campagne BDS (boycott, désinvestissements sanctions), qui milite contre le blocus imposé par Israël à la Palestine en préconisant des sanctions économiques contre l’Etat Hébreu. Les militants de ce mouvement sont régulièrement accusés d’antisémitisme, alors que leur combat ne concerne que le problème de la Palestine. Ce communiqué permet de recadrer les choses, et de revenir à l’essentiel : Dieudonné n’est pas l’ami de la Palestine, il est simplement raciste et antisémite.

Communiqué de la Campagne BDS France sur Dieudonné et Valls

Depuis une semaine, de nombreux articles de presse et diverses interventions se multiplient pour commenter l’idéologie de Dieudonné et la décision de Valls d’étudier les possibilités d’interdire ses spectacles.

La Campagne BDS France (Boycott Désinvestissements Sanctions contre le régime d’apartheid israélien), tient à faire la déclaration suivante :

1. Depuis sa naissance, le mouvement BDS condamne toute forme de racisme et notamment l’idéologie et les agissements de la « dieudosphère » (Dieudonné, Soral et leurs divers amis), qui se compose de gens ouvertement racistes, antisémites, pour qui le monde est dominé par un « complot juif » qui serait coupable de tous les maux dont sont victimes les peuples, et en particulier le peuple de France.
Ces gens font partie de l’extrême droite, notamment l’extrême droite lepéniste. Contrairement à ce qu’ils prétendent, ils n’ont jamais agi en faveur de la cause du peuple palestinien, ne faisant qu’instrumentaliser celle-ci pour servir leurs délires complotistes. Leurs positions sont incompatibles avec les valeurs de la campagne BDS.

2. Nous condamnons également l’offensive actuelle de Valls, qui vise à amalgamer dans l’opinion publique, avec la bénédiction du CRIF (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France) les antisémites et les militants antiracistes et antisionistes qui s’opposent fermement à la politique coloniale et d’apartheid de l’État d’Israël.

3. La Campagne BDS est un mouvement antiraciste, éthique et citoyen, qui milite pour le respect du droit international et des droits humains. Lancée en 2005 à l’appel de la société civile Palestinienne, elle regroupe de nombreux citoyens et organisations civiles de pays du monde entier, parmi lesquels des citoyens palestiniens comme israéliens. Elle combat fermement l’actuelle politique raciste israélienne au nom de valeurs universelles, exemptes de tout racisme envers qui que ce soit en raison de ses origines.

4. Nous ne sommes pas dupes du contexte de l’opération politique anti-Dieudonné du gouvernement français, qui vise à ancrer un climat politique marqué à la fois par un racisme islamophobe, anti-roms, anti-immigrés, et par une complicité avouée avec la politique israélienne.

5. Face à cette situation, nous poursuivrons sans relâche notre campagne unitaire, qui a au cours de la dernière période remporté d’importants succès internationaux (dont témoigne notre site www.bdsfrance.org) et nous exigeons le retrait de la circulaire Alliot-Marie, qui encourage les parquets à poursuivre les militants qui participent à la campagne BDS.

La Campagne BDS France – www.bdsfrance.org – campagnebdsfrance@yahoo.fr