Boris Le Lay condamné à 6 mois de prison ferme

Le marchand de galettes de Rosporden vient d’être à nouveau condamné, hier, jeudi 28 mai. Cette fois, les juges ont tapé plus fort : outre 8000€ de dommages et intérêts qu’il devra verser à une de ses cibles favorites, le sonneur Yannick Martin, qu’il a insulté et à qui il a proféré menaces et insultes racistes à de multiples reprises, Boris Le Lay a été condamné à 6 mois de prison ferme ( Il a déjà été condamné il y a quelques mois à un mois de prison ferme). Cette somme s’ajoute aux quelques milliers d’euro d’amendes et de dommages et intérêts auxquels la justice l’a condamné au cours des sept procès menés contre lui.

À l’issue d’un de ces procès, le pauvre Boris avait lancé un appel au peuple pour payer ses amendes et ses avocats. Il va pouvoir organiser un nouveau laython ! D’autant plus que d’autres affaires attendent d’être jugées.

Comme d’habitude, le courageux Le Lay n’a pas daigné se présenter à son procès, et curieusement, il n’en dit pas un mot sur son blog, alors que d’habitude il y tire gloire de ses condamnations.

Stop le contrôle au faciès !

On s’y attendait : les attentats de janvier ont aggravé les atteintes aux droits et les discriminations dont sont victimes prioritairement les jeunes, singulièrement les jeunes de couleur. À commencer par les « contrôles au faciès », dénoncés par de nombreuses associations depuis des années, et dont le président de la République avait promis de les supprimer pendant sa campagne électorale. Résultat, le ministre de l’Intérieur du gouvernement Mauroy avait remplacé cette mesure par une prétendue « charte de déontologie » destinée aux policiers, qui, pour résumé, se contentait de faire coudre leur numéro matricule sur leur uniforme aux policiers. C’était encore trop pour eux.

Fort opportunément, le nouveau défenseur des droits, M. Toubon, revient sur cette mesure, et a publié des observations qui démontrent l’urgence de réformer ce système, et que le harcèlement qui découle de cette situation et dont sont victimes les jeunes cesse au plus vite. Ce harcèlement est naturellement contre-productif, et ne peut aboutir qu’à des situations conflictuelles qui peuvent vite dégénérer.

La Ligue des droits de l’Homme, qui se soucie depuis de nombreuses années de ce problème essentiel a publié lundi, avec d’autres associations, un communiqué qui expose clairement quelles devraient être les mesures propres à apaiser les relations jeunes – police.

Contrôles d’identité abusifs et discriminatoires : les observations du Défenseur des droits doivent aboutir à une réforme en profondeur des contrôles d’identité

(Paris – 13 février 2015) Les huit organisations signataires se réjouissent des observations que le Défenseur des droits vient de rendre publiques le 9 février. Elles constituent une contribution essentielle au débat sur les contrôles d’identité en affirmant clairement que, pour respecter ses obligations en matière de droits humains, la France doit en réformer le régime.

C’est ce que réclament, depuis de nombreux mois, nos huit organisations (Graines de France, Groupe d’Information et de Soutien des Immigrés, Human Rights Watch, Ligue des droits de l’Homme, Maison communautaire pour un développement solidaire, Open Society Justice Initiative, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature). C’est pourquoi elles invitent le gouvernement, de toute urgence, à :

  • modifier l’article 78-2 du Code de procédure pénale qui encadre les contrôles ;
  • mettre en place une traçabilité des contrôles – donc un récépissé – assurant un recours effectif en cas de dérive.

Le 9 février 2015, le Défenseur des droits a déclaré dans un communiqué avoir présenté des observations devant la cour d’Appel de Paris, dans la procédure initiée par 13 personnes qui ont intenté une action visant à engager la responsabilité de l’État pour des contrôles d’identité discriminatoires. Son intervention rappelle que l’État français doit prendre des mesures pour lutter de manière efficace contre les contrôles au faciès.

Les observations du Défenseur des droits soulignent que les autorités doivent non seulement éviter toute discrimination, mais également adopter des mesures fermes et concrètes, propres à prévenir et à réprimer de telles pratiques. L’absence de ces mesures constitue un manquement équivalent « à fermer les yeux sur la gravité de tels actes et à les considérer comme des actes ordinaires… ». Il précise qu’il est nécessaire d’encadrer suffisamment les pratiques de contrôles, de sorte que tout contrôle soit basé sur des critères objectifs, et non sur des critères subjectifs, tels que le « ressenti » ou l’ « instinct » » des agents, comme c’est actuellement le cas. En effet, ces critères subjectifs donnent régulièrement lieu à des contrôles d’identité basés sur des critères discriminatoires tels que l’origine ethnique, comme nos organisations l’ont démontré à maintes reprises.

Le Défenseur des droits souligne par ailleurs l’importance de garanties suffisantes contre le risque d’arbitraire, qui impose, en particulier, un aménagement de la charge de la preuve et la garantie d’un contrôle effectif par le juge. Il note à cet égard que : « L’absence de motivation et de procédure écrite, en particulier de toute trace du contrôle effectué (précisant a minima la date et le lieu du contrôle, le nom de l’agent contrôleur et de la personne contrôlée et les raisons ayant  justifié la mesure), […] entrave l’accès au contrôle juridictionnel et peut priver celle-ci de la possibilité de contester utilement la légalité de la mesure et de dénoncer son caractère discriminatoire. »

Au regard de ces observations, nos huit organisations demandent au gouvernement de prendre des initiatives réellement efficaces pour lutter contre ces pratiques discriminatoires, et ainsi a minima :

  • proposer au Parlement de modifier l’article 78-2 du Code de procédure pénale. Cet article définit les circonstances autorisant les contrôles d’identité et les motifs légaux justifiant de tels actes. La généralité et l’imprécision de sa rédaction actuelle favorisent les dérives qui contribuent aux violations graves et répétées des droits fondamentaux. Plusieurs alinéas de cet article devraient être abrogés ou amendés afin de limiter le champ des contrôles aux stricts impératifs de la prévention ou la répression d’actes de délinquance ;
  • instaurer une traçabilité des contrôles qui fournirait à une personne contrôlée des informations sur les raisons ayant motivé son contrôle afin qu’elle puisse, le cas échéant, contester la légalité du contrôle et dénoncer son caractère discriminatoire.

Nos organisations affirment qu’une telle réforme ne réduirait en rien l’efficacité des forces de police, bien au contraire, et rappellent, en ce sens, que les expériences réalisées dans d’autres pays ont clairement démontré la possibilité à la fois de réduire la prévalence des pratiques discriminatoires et d’améliorer l’efficacité des contrôles de police, expériences d’autant plus probantes qu’elles ont associé tous les acteurs concernés : élus locaux, magistrats et avocats, policiers, associations, citoyens, experts.

Le candidat à la Présidence de la République, François Hollande, s’était engagé en 2012 à faire une réforme pour lutter « contre le « délit de faciès » par la mise en place d’une « procédure respectueuse des citoyens ». Cependant, depuis son élection, les différents gouvernements n’ont adopté aucune mesure susceptible de mettre fin aux contrôles d’identité discriminatoires.

Avec ces observations du Défenseur des droits, le gouvernement n’a plus à décider « si » il doit respecter son engagement de reformer les contrôles d’identité, mais seulement « quand » il le fera. Compte tenu des impacts dévastateurs de ces contrôles sur les personnes contrôlées, le sentiment d’injustice et d’humiliation qu’ils alimentent chez des personnes qui se sentent discriminées, nos huit organisations réaffirment fermement que cela doit être fait désormais sans plus tarder.

Steeve Briois honoré par le Trombinoscope : la LDH entend rafraîchir les mémoires !

La distinction attribuée au maire d’Hénin-Beaumont (front national) qui a été nommé « élu local de l’année » par « le Trombinoscope » continue de faire des vagues. Si certains hommes politiques et commentateurs s’en réjouissent, la grande majorité s’en offusque.

Il est utile de rappeler que cette « distinction » doit récompenser notamment « l’action accomplie » par l’élu distingué. En l’occurrence, en seulement quelques mois, M. Briois a certes été actif, mais d’une manière, disons, plutôt négative : expulsion, dès son  élection, de la Ligue de droits de l’Homme du local dont elle disposait depuis des dizaines d’année, arrêté « anti mendicité agressive » (qui a été annulé par le tribunal administrif qui également condamné Briois à 1000€ de dommages et intérêts à verser à la Ligue des droits de l’Homme), organisation en conseil municipal d’une pétition contre une enseignante, interdiction à un élu de l’opposition de participer à une commémoration patriotique…

L’attitude pitoyable des membres du jury de cette mascarade était pathétique : incapable d’assumer leur décision, ils ont fait appel à une salariée de l’entreprise (Le Trombinoscope est une entreprise qui édite chaque année l’annuaire des élus) pour remettre son prix à Briois, qui, de son côté, bien entendu, jubilait, tandis que la petite fille Le Pen proférait des menaces contre un journaliste…

La section de la Ligue des droits de l’Homme d’Hénin-Beaumont a bien entendu réagi à cette mascarade, par la publication d’un communiqué dont voici le texte :

Steeve Briois honoré par le Trombinoscope :

la LDH entend rafraîchir les mémoires !

Ainsi donc le jury du Trombinoscope a décerné à Steeve Briois, maire d’Hénin-Beaumont, Vice-président du FN, le prix de « l’élu local de l’année », destiné en principe à saluer « l’action et le professionnalisme de personnalités politiques qui se sont particulièrement illustrées durant l’année écoulée dans le cadre de leur mandat ou de leur fonction ».

Décision pour le moins surprenante, pour ne pas dire ahurissante, pour nombre d’observateurs. Car il ne s’agit hélas pas d’un canular et même si Arlette Chabot, présidente du jury, a pris la peine de rappeler qu’il s’agit « non pas de récompenser un bilan mais de mettre en évidence la percée du FN et son implantation locale », on ne peut ignorer la portée d’une telle décision.

C’est d’ailleurs bien ainsi que l’a compris le maire d’Hénin-Beaumont.

À cet égard, la section LDH d’Hénin-Carvin tient à saluer la décision de Claude Bartolone, Président de l’Assemblée nationale, de ne pas assister à la cérémonie de remise des prix.

Que Monsieur Briois ait, des années durant, « labouré le terrain », qu’il ait fait en 2014 une campagne « lisse » et banalisée en jouant à fond la carte rassurante de « l’enfant du pays », n’est certes pas niable.

De là à estimer que cela suffise à expliquer son élection est tout de même un peu court.

C’est faire bon ménage du terreau économique et social de la ville mais surtout de l’impensable division des forces démocratiques, des coups bas, des trahisons, des réactions à contre temps, des maladresses impardonnables qui ont permis au FN de conquérir la mairie d’Hénin-Beaumont.

Qui a-t-on ainsi voulu mettre à l’honneur ?

Le maire FN qui, à peine élu, a pris la décision inouïe de chasser de son local la LDH, provoquant une immense onde de choc, jusqu’au-delà de nos frontières ?

Celui qui, après avoir déclaré à la presse qu’il serait respectueux de ses adversaires, dénigre et brocarde systématiquement ses opposants, allant jusqu’à interdire à l’un d’eux d’être physiquement présent lors des manifestations patriotiques ?

Celui qui permet qu’une enseignante fasse l’objet d’une motion en conseil municipal réclamant pour elle des sanctions de l’administration ?

Celui qui prend un arrêté « anti-mendicité agressive, arrêté qui a depuis lors été suspendu par décision de justice, la ville se voyant condamnée à verser 1000 euros à la Ligue des droits de l’Homme ?

Celui qui est Vice-président d’un parti dont le président d’honneur avait osé qualifier les chambres à gaz de « point de détail de l’Histoire » ?

Résultat de l’opération dont Monsieur Briois doit se réjouir : il fait désormais partie de « l’establishment », aux côtés de personnalités du Nord comme Pierre Mauroy ou Jean-Louis Borloo ! Comment le FN pourra-t-il dès lors continuer à dénoncer le système politico-médiatique comme il le fait depuis des années ?

Le 29 janvier 2015

Apologie du terrorisme : « fermeté de signifie pas prison ferme ! »

L’application du nouveau délit « d’apologie du terrorisme » aboutit, depuis la semaine dernière, à des sentences démesurées, qui visent aussi bien des individus vraiment dangereux, que des pauvres types, et même des enfants.

À propos d’enfant, le témoignage d’une éducatrice, qui s’est occupée d’un garçon de 14 ans placé en garde à vue pendant 24h pour avoir dit « ils ont eu raison » (les terroristes ) pendant la minute de silence au collège. Ce qui ne l’a pas empêché de faire cette minute de silence quelque temps plus tard avec son équipe de foot : « c’était bien, on était tous en rond, on se tenait tous par le cou », raconte-t-il. Tout s’emballe : le principal reçoit l’ordre de l’académie de porter plainte : « J’ai porté plainte sur consigne de l’académie mais je croyais que les policiers allaient faire un rappel à la loi, que ça s’arrêterait là. »

Ça ne s’est pas arrêté là : conseil de discipline (le principal demandera une exclusion avec sursis, garde à vue de 24h, menottes… Tout s’emballe. L’éducatrice conclut : «  J’ai peur pour ce petit poisson, pour ses parents. Je suis effrayée par la réaction Vigipirate des institutions de la République, sans plus de raison, de discernement, chacun suivant les directives de sa hiérarchie, démultipliant la rigueur pour mieux exposer aux médias la réaction des institutions. Parce qu’un des arguments pour ces réactions en chaîne, le premier souvent avancé, c’est celui-là : « On est sous le regard des médias, de l’opinion publique. »

Boris Manenti  recense, dans un article publié sur le site Temps réel Le Nouvel observateur, 17 condamnations déjà prononcées. Que constate-t-on ?

  • Que le délit d’apologie du terrorisme accompagne généralement un autre délit : vol, agression, conduite en état d’ébriété…
  • Que les individus sont généralement déjà connus et ont été déjà condamnés (pas forcément pour cela).
  • Qu’il s’agit pratiquement uniquement d’hommes (une jeune fille est en attente de jugement), jeunes (entre 19 et 38 ans, le plus âgé ayant 51 ans).
  • La plupart du temps cela se produit dans des situations de grande tension et d’énervement.

On est quand-même loin du profil des frères Kouachi ! L’apologie du terrorisme n’est en fait qu’une manière d’insulter les forces de l’ordre, exceptées peut-être lorsque les propos sont tenus sur Facebook, cas dans lequel on peut imaginer que la personne est dans son état « normal ».

Le Syndicat de la magistrature a appelé, mardi 20 janvier, « la justice » à faire preuve de « sérénité » et « à résister à l’injonction de la répression immédiate ». Et il ajoute : « Il y a un défaut d’individualisation. Réponse ferme ne veut pas dire prison ferme ».

Le célèbre blogueur Maître Eolas, avocat, dont les avis éclairés sont toujours passionnants, s’élève avec ironie contre cette escalade : « Heureusement, face à la menace terroriste, la justice sait frapper promptement et sévèrement à côté de la cible » ! Et il apporte une explication à cette frénésie judiciaire : « Une enquête terroriste prend beaucoup de temps. L’instruction de l’affaire Merah est, par exemple, toujours en cours. Ici, après les événements tragiques qui se sont produits, pour de pures raisons de communication, il faut donner l’impression de réagir vite. » (Source, Temps réel le Nouvel observateur). Et c’est la raison pour laquelle il conseille à ses collègues avocats de refuser la comparution immédiate, pour reculer le procès dans le temps, en espérant que la sérénité soit revenue.

Pendant ce temps-là, Boris Le Lay, ce fasciste autonomiste breton qui répand son vomi sur son blog « breizato »  à longueur de journées coule des jours heureux chez sa maman. Que fait-il, sinon l’apologie du terrorisme, et ce depuis des années ? Menaces de mort accompagnées de photos de tombe et de poteaux d’éxécution, menaces de viols, toutes adressées nominativement à des militants des droits de l’Homme, propos antisémites et racistes d’une rare violence, projet « politique » ( ?) dont le préalable consiste à « liquider » physiquement les opposants (sa liste est prête)… Le Lay, dont le blog est naturellement hébergé hors de France, ce qui rend sa fermeture difficile, a été condamné à plusieurs reprises, à plusieurs milliers d’euros d’amendes et de dommages et intérêt, à de la prison avec sursis, et tout récemment à de la prison ferme, continue de sévir. Les nouvelles lois vont-elles permettre de mettre cet individu dangereux et ses quelques fidèles hors d’état de nuire ? Il ne faut pas oublier que certains des mouvements qui gravitent autour de Le Lay organisent des stages dans lesquels les sports de combat ont une large place (Le Télégramme).

Alors, les 24h de garde à vue de ce garçon de 14 ans laissent un peu rêveur…

 

 

Combattre le terrorisme, ça n’est pas restreindre les libertés

On pouvait facilement imaginer que l’attentat contre Charlie Hebdo, l’assassinat d’une jeune policière et la prise d’otage dans l’hyper Kacher de la porte de Vincennes allaient susciter une sorte de surenchère sécuritaire, chacun voulant gonfler les biceps un peu plus que l’autre, dans les milieux politiques. On espérait, sans trop y croire, que les formidables marches du week-end, qui ont rassemblé des millions de personnes, allait inciter les hommes politiques à un peu de retenue… perdu ! Le vieux réflexe sécuritaire revient en courant. Toutes ces lois qui se sont entassées les unes par-dessus les autres depuis des années ont pourtant fait la preuve de leur inefficacité… Mais non, on continue.

Pendant ce temps-là, les médias passent beaucoup de temps à parler des minutes de silence perturbées par des élèves dans quelques dizaines de lycées. C’est grave, on est d’accord. Mais les incendies volontaires, les dégradations contre les mosquées, les agressions racistes contre des adolescents arabes, on en parle beaucoup moins… Les discours de haine proférés par les identitaires, encore et toujours, émeuvent eux aussi beaucoup moins que ces incidents dans les lycées. Boris Le Lay continue de déverser son vomi sur son « site ». Les appels à la haine, les menaces de mort, constituent le fonds de commerce de ce pauvre garçon. A-t-il seulement payé les quelques milliers d’euros d’amendes auxquels il a été condamné ?

Jean-Pierre Dubois, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, dans le journal l’Humanité, répondait à un journaliste, avant la conclusion dramatique de l’affaire Charlie Hebdo. On peut résumer son discours, comme le fait le journal, en disant : « L’alternative est simple, c’est soit le politique, soit la guerre. Nous choisissons le politique ». C’est aussi le sens du communiqué que vient de publier la Ligue des droits de l’Homme :

Combattre le terrorisme, ce n’est pas restreindre les libertés

Le peuple de France est descendu dans la rue pour dire non au terrorisme et défendre les libertés. L’un et l’autre. Dans ce qui est devenu une sorte de réflexe pavlovien, la classe politique française souhaite ajouter encore à l’arsenal législatif de nouvelles mesures contre le terrorisme. Alors même que quinze lois ont été adoptées depuis 1986 et que les décrets d’application de la dernière ne sont pas publiés, notre sécurité serait, en effet, mieux assurée par de nouveaux pouvoirs confiés aux forces de l’ordre. Il n’en est rien. C’est un mensonge de prétendre que les dramatiques événements que nous venons de vivre seraient la conséquence d’une insuffisance législative. Il est exact en revanche que la déficience de moyens, les erreurs d’analyse, même si le travail des forces de sécurité française reste remarquable, méritent débat ; mais rien ne justifie les nouvelles dispositions envisagées.

La LDH regrette qu’après l’élan du 11 janvier, ces réponses sécuritaires restent la seule voie empruntée par les pouvoirs publics.

C’est d’une autre ambition dont nous avons besoin : de réponses de fond qui permettent de comprendre comment notre société a pu faire que de tels actes soient commis ; pas pour excuser, encore moins pour absoudre, mais pour éviter réellement qu’ils ne se reproduisent. Nous avons besoin surtout de réponses préventives. Toutes doivent renforcer l’esprit et la lettre de notre démocratie.

La LDH appelle les citoyens à ne pas se laisser enfermer dans le cercle de la peur. Elle les invite à rappeler aux pouvoirs publics, à la représentation politique française qu’à chaque fois que nous avons concédé de nos libertés, il s’en est suivi moins de démocratie, sans pour autant nous assurer plus de sécurité.

La fraternité qui s’est exprimée le 11 janvier exige un autre horizon que celui que l’on nous propose.

 

Cargos « fantôme », refus de sépulture à un bébé Rrom : 2015 commence mal

La mairie de Champlan (source, Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Champlan#mediaviewer/File:ChamplanMairie.JPG

Il est fréquent que le premier article de l’année dans un blog ou un site soit consacré au bilan de l’année passée.

En 2015, au bout de trois jours et demi, on peut déjà en faire un.

Et ça n’est pas brillant.

Deux événements. Le premier très médiatisé, le second commençant à l’être. Allons-y.

Le premier, évidemment, ce sont ces trois cargos dans lesquels étaient entassés dans des conditions scandaleuses des centaines de migrants, venant semble-t-il majoritairement de Syrie, cargos abandonnés par leurs équipages en fuite. Les trois ont été pris en charge par la marine italienne. Une députée européenne était interrogée sur France Inter samedi matin. Son discours était affligeant : le problème apparemment n’est pas l’accueil de ces réfugiés, mais l’étanchéité des « frontières » de l’Europe. Il a fallu attendre la fin de  l’interview pour qu’elle aborde, très rapidement, le problème de la solidarité… et dans Ouest-France dimanche ce matin, l’éditorialiste, Mme Hutin, insiste sur le fait que ces malheureux sont des « réfugiés », pas des « migrants »… On a la compassion sélective…

Second événement : le refus Christian Leclerc, le maire de Champlan, commune de l’Essonne, d’autoriser l’inhumation de la petite Rrom décédée les jours derniers dans le cimetière de la commune. On peut noter la lenteur des réactions des médias à ce sujet : ils n’ont commencé à en parler que samedi, alors que la nouvelle circulait sur les réseaux sociaux depuis au moins24h. On peut noter que le maire de Champlan vient d’être promu chevalier de la légion d’honneur. On comprend que Thomas Piketty l’ait refusé… Valls estimait que les Rroms n’ont pas vocation à s’intégrer en France. Il aurait pu ajouter qu’ils n’ont pas non plus vocation à y mourir.

Le maire de Champlan se justifierait (lire ici) par le manque de place dans le cimetière de la commune et la charge que représente son entretien. Il conclut, dans le Parisien : «  Les concessions sont accordées à un prix symbolique et l’entretien coûte cher alors priorité est donnée à ceux qui paient leurs impôts locaux ». Les pauvres, allez mourir ailleurs ?

Le maire de la commune voisine de Wissoux, Richard Trinquier (UMP), médecin, qui connaît la famille du bébé, lui a proposé une sépulture dans sa commune : « Je suis surpris qu’on ait refusé l’inhumation. J’ai accepté pour ce petit enfant rom comme je l’aurai fait pour n’importe qui, car toute personne a droit à une sépulture décente, confiait hier Richard Trinquier, maire (UMP) de Wissous et médecin. Je connais la mère endeuillée car je l’ai soignée. Il ne faut pas rajouter de la peine inutile à la détresse d’une maman qui perd son bébé, car c’est terrible. »  Ce maire a bien saisi le problème, qui dépasse ceux du racisme et de la xénophobie : il s’agit simplement de reconnaître l’humanité de ces personnes. Des gens comme le maire de Champlan ont l’air d’avoir du mal à seulement imaginer que les Rroms puissent avoir des sentiments, que pour eux la perte d’un enfant n’a pas grande importance…

Elle commence mal, l’année 2015…

Bonne année quand-même !

A lire également le billet de Bembelly sur son blog.

 

Les partisans de breizatao ont le racisme honteux

Boris Le Lay était très en colère, mardi 16 décembre : la pétition raciste qu’il avait mis en ligne pour « exiger » l’expulsion du jeune Malien soutenu par les défenseurs des droits de l’Homme de la région de Concarneau, hébergée par la plate-forme Avaaz avait disparu la veille au soir. À n’en pas douter, encore un effet du complot judéo maçonnique ! sa pétition avait pourtant « déjà » (il aurait pu dire « laborieusement », c’eût été plus pertinent) atteint presque 800 signatures.

Il a donc retroussé ses manches, et mis en ligne une nouvelle pétition, en promettant un résultat instantané fulgurant.

Fulgurance toute relative. Alors que la pétition en faveur de la régularisation de Bourama frôle les 4.000 signatures, la pétition de la haine atteignait péniblement les 384, ce jeudi 19 décembre à 16h19. En une nuit, le nombre de fascistes en Bretagne est passé de 800 à 384 : encore un effort Le Lay !

384 signatures, et  à quel prix !

Parmi les signataires, on relève « Papoubreizh », « sirop », « military », « turbulent », « Breton de souche »…  Chez breizatao, on a le racisme honteux .

Certains noms reviennent plusieurs fois : le dénommé « ACELDY » a signé 6 fois ! On relève aussi dans cette pétition les noms de soutiens à Bourama, qui ont été utilisés abusivement. On relève enfin des noms de soutiens à Bourama déformés : on échange une consomme,  par exemple…

Décisément, chez breizatao on ne semble pas être fier de ses « opinions »…

Un jeune Malien cible de l’extrême droite dans le Finistère

Additif 14/12/2014 18h40

Comme c’est bizarre : Le Lay (qui signe sa pétition Boris L. On a parfois des pudeurs…) a curieusement supprimé son appel aux don pour « financer » son « opération » (lire en fin d’article)… Et quelques heures plus tard, l’article réapparaît, avec une autre illustration…

Par ailleurs, une omission dans ce papier : Le Lay a également lancé une opération baptisée « BDS, boycott, décolonisation, sanction », directement inspirée du mouvement pro-palestinien destiné à boycotter les produits israëliens. Le Lay a lancé cette mascarade pour intimider la personne qui a signé un contrat d’apprentissage à Boumara.

Ça se passe à Concarneau (29) :

« Bourama est un jeune Malien de 17 ans, originaire de Bamako.

Il a quitté le Mali en 2012 après avoir perdu son père, tué par des islamistes. Ces derniers menaçant de tuer tous les jeunes, sa mère a réuni toutes ses économies pour lui faire quitter le pays, vendant sa maison et ses derniers biens dans le but de préserver la vie de son fils.

Après avoir connu les affres d’une vie de clandestin, il est arrivé en Bretagne et recueilli par une association. Il est installé à Concarneau depuis Aout 2014

Il est actuellement en stage dans une boulangerie. Le renouvellement lui a été refusé par la préfecture au motif qu’il n’avait pas effectué ses 6 mois de formation et ce malgré le fait qu’il soit inscrit en contrat d’apprentissage en pâtisserie à Cuzon pour les deux années à venir.

Malgré le soutient de ses patrons et du Président de la Chambre des Métiers, son visa aura expiré à sa majorité (le 14 février prochain)

Il est important de soutenir ce jeune homme et de signer cette pétition pour qu’il puisse, après une vie déjà dure, se projeter et avoir enfin un avenir serein en France ». (Texte de la pétition mise en ligne ici, et qui a déjà recueilli 3658 signatures, le 14 décembre à 15h16. Vous pouvez signer aussi !).

Alors, évidemment, ce mouvement de solidarité agace le petit Boris Le Lay, rédacteur du site breizatao.

Comme il le fait régulièrement depuis quelques semaines, il utilise les moyens qu’utilisaient ses ancêtres de la milice : délation, mise à l’index, appels à boycott du commerce de l’artisan chez qui le jeune homme fait son apprentissage. Ces dernières semaines, il avait déjà lancé des appels à la délation contre les francs-maçons, les membres de la Ligue des droits de l’Homme, et d’autres organisations qui n’ont pas l’heur de lui plaire. A la Ligue, on est plutôt fiers d’être la cible de ce pauvre garçon.

Mais le petit Boris doit se sentir bien seul : ça ne fonctionne pas. En dehors des quelques dizaines d’abrutis qui inondent certaines pages facebook de militants des droits de l’Homme (c’est très facile de se fabriquer plusieurs identités sur Internet, et/ou de générer d’innombrables adresses IP, et l’extrême droite est coutumière du fait, pour donner l’illusion de rassembler des foules), la mayonnaise ne prend pas, et la triste pétition qu’il a lancée rassemble pour le moment 566 signatures (14/12, 15h24), à comparer avec les « près de 40 000 personnes (…)mises au courant de l’affaire » par les réseaux sociaux. Mais ceci n’empêche pas le marchand de galettes de lancer un appel solennel au peuple : le petit Boris a besoin d’argent ! Ayez pitié de lui ! Rendez-vous compte, il a déjà investi « environ 70€ » dans cette opération (lu sur son site) qu’il intitule « remigration » (c’est le mot à la mode chez les fachos en ce moment ; jusqu’ici c’était « le grand remplacement »…). À ce propos il semblerait que ce brave homme ait effectué sa propre « remigration » du Japon : rien ne s’oppose donc plus à ce qu’il aille purger les deux mois de prison ferme, et à payer les quelques milliers d’euros d’amende et de dommages intérêts auxquels il a été condamné ! Donc Boris lance un appel à assistanat. Ça n’est pas bien.

La pétition pour la régularisation de Bourama est toujours en ligne, et il est encore temps de la signer, ne serait-ce que pour énerver la breizhtapo !

70ème anniversaire du massacre de Thiaroye (Sénégal) : la France responsable

André Bokar, un des prisonniers du camp de Trévé.

On commémore cette année le 70ème anniversaire du massacre des Tirailleurs sénégalais, à Thiaroye, près de Dakar (Sénégal).

Ces soldats, qui avaient combattu pour la France pendant la 2ème guerre mondiale, avaient, après la défaite de 1940, été faits prisonniers par les Allemands. Mais les nazis ne voulaient pas les interner chez eux : ils ont donc construit des camps en France. A la libération, la France les a renvoyés chez eux. Mais il y avait un problème : ils n’avaient pas reçu leurs soldes. Et ils ne l’ont pas admis. C’est la principale raison du massacre qui s’est déroulé Thiaroye : pour ne pas verser ces soldes, l’armée française a tiré, massacrant plusieurs centaines de ces soldats africains.

La région de Loudéac est concernée par ce drame, puis qu’une centaine de ces soldats ont été enfermé à Trévé, pendant trois mois. La section LDH Loudéac centre Bretagne a, en 2011, réalisé un travail important sur ce dossier, en collaboration avec l’historienne Armelle Mabon. Ce travail s’est terminé par l’édition d’un livre, « Nous n’avions jamais vu de Noirs » (éditions Récits), recueil de témoignages de Trévéens, et par l’érection, par la municipalité de Trévé, d’une stèle à la mémoire de ces soldats (voir le dossier des témoignages ici, et l’article sur l’inauguration de la stèle de Trévé là). Renseignements sur l’ouvrage « Nous n’avions jamais vu de Noirs » ici.

A l’occasion de ce 70ème anniversaire, la Ligue des droits de l’Homme a publié un communiqué, demandant à la France de reconnaître enfin sa responsabilité dans ce drame.

IL Y A SOIXANTE-DIX ANS, MASSACRE À THIAROYE (SÉNÉGAL) : LA FRANCE DOIT RECONNAÎTRE SES RESPONSABILITÉS

Il y a soixante-dix ans, à Thiaroye, près de Dakar, plusieurs centaines de tirailleurs africains démobilisés qui demandaient le paiement de leur solde de captivité, prévue par les textes en vigueur à leur départ de France, ont été qualifiés de « mutins ». La Ligue des droits de l’Homme demande à la France de reconnaître les faits et d’assumer ses responsabilités.

Ces faits sont établis. Des dizaines de soldats ont été tués et blessés, d’autres condamnés. Ils étaient de retour en Afrique après avoir été appelés en 1940, pour défendre la France, puis détenus sur son territoire par les nazis qui refusaient qu’ils le soient en Allemagne. Le 1erdécembre 1944, ils ont subi une répression brutale qui a fait plusieurs dizaines de morts, suivie d’un procès où trente-quatre d’entre eux ont été lourdement condamnés.

Le silence officiel sur cet événement a commencé à être levé en 2004 par les déclarations de l’ambassadeur spécial, Pierre-André Wiltzer, dépêché à Dakar par le président Chirac pour la première Journée du tirailleur. Puis, par celles du président Hollande qui, avant de se rendre au Sommet de la francophonie de Kinshasa, a regretté à Dakar, le 12 octobre 2012, cette « répression sanglante ». Les recherches récentes des historiens, notamment celles de l’universitaire Armelle Mabon, de l’université de Bretagne-Sud-Lorient, et d’un chercheur auteur d’une thèse à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, Martin Mourre, conduisent à une meilleure connaissance des faits et amènent la Ligue des droits de l’Homme à demander aux autorités françaises de reconnaître clairement les injustices commises.

Plus d’un millier de tirailleurs embarqués à Morlaix, le 5 novembre 1944, sur le « Circassia », et arrivés le 21 novembre, à Dakar, ont été spoliés des trois quarts de leur solde de captivité prévue par les textes officiels. Et quand, le 28 novembre, ils ont demandé à recevoir ce qui leur était dû, ils ont été considérés en état de rébellion. L’armée a ouvert le feu sur eux, et justifié cette répression en prétextant des tirs de leur part.

En réalité, à ces tirailleurs qui avaient passé plus de quatre années en France, lié connaissance avec des Français de métropole, et, pour certains, rejoint des groupes de Résistants après le débarquement de Normandie, il s’agissait de faire comprendre qu’ils devaient réintégrer en Afrique française leur statut d’indigènes. Pour cela, selon le mot du général commandant les troupes coloniales à Dakar, un « coup de bistouri » douloureux était nécessaire. Comme lors des massacres de Sétif et Guelma en Algérie, quelques mois plus tard, il s’agissait d’ôter à ces colonisés toute idée d’émancipation.

Soixante-dix ans après, la LDH estime que la France s’honorerait à reconnaître clairement les faits. A l’occasion du Sommet de la francophonie à Dakar, elle demande aux autorités françaises :

  • de rendre publique la liste nominale des tirailleurs à bord du navire « Circassia » parti de Morlaix, le 5 novembre, et arrivé à Dakar, le 21 novembre 1944 ;
  • de reconnaître la spoliation dont ont été victimes ces tirailleurs des trois quarts de la solde de captivité qui leur était due ;
  • d’exprimer les regrets officiels de la France pour la répression qui les a frappés à Thiaroye, le 1erdécembre 1944 ;
  • de rendre publics les noms des morts et des blessés qu’elle a faits parmi eux ;
  • de s’engager au paiement aux descendants de ces tirailleurs du complément de solde dont ils ont été spoliés ;
  • de transmettre à la Cour de cassation la demande d’annulation sans renvoi des condamnations prononcées en février 1944 par le tribunal de Dakar.

Paris, le 27 novembre 2014

 

Pierre Tartakowsky : « ‘Zemmoureries’ et invitation à occuper le terrain »

Pierre Tartakowsky

Le dernier livre d’Eric Zemmour a fait grand bruit, et serait en passe de battre des records d’édition. Si c’est vrai, ça n’est pas la meilleure nouvelle de l’année.

Invité à un nombre incalculable d’émissions de télévision pour en faire la promotion, Zemmour a la plupart du temps déclenché colère et indignation chez les autres invités, sauf bien sûr ceux qui ont de la sympathie pour l’extrême droite.

La méthode généralement utilisée pour le contredire se résumait en une contestation des chiffres qu’il avance dans son livre, des faits historiques qu’il utilise en les déformant… Méthode qui n’a prouvé que son inefficacité, Zemmour réussissant à s’en sortir par des pirouettes rhétoriques.

Juqu’à ce qu’il soit confronté à Mazarine Pingeot, dans l’émission « Les grandes questions » de Franz-Olivier Giesbert, sur France 5.

Mazarine Pingeot s’est placée sur un tout autre point de vue : la psychanalyse.

Dans l’article qu’il consacre à cette « confrontation », le chroniqueur Bruno Roger-Petit écrit : « avec un culot incroyable, l’écrivaine a défié l’apôtre de la défense du mâle dominant émasculé par la société féminisée héritée de Mai 68 et juillet 1789 et le lobby LGBT sur son propre terreau : la virilité. » (la totalité de l’article est à lire ici, avec la séquence vidéo). Un régal.

Pierre Tartakowsky, président de la Ligue de droits de l’Homme, se place également sur ce plan, dans l’éditorial qu’il consacre à cet ouvrage dans le numéro d’octobre 2014 de l’organe mensuel de la LDH, « LDH Info ». A lire ci-dessous.

« Zemmoureries » et invitation à occuper le terrain

Éditorial de Pierre TARTAKDWSKY, président de la LDH

Pour utiliser avec mesure une litote de pure convenance, on dira que le dernier ouvrage d’Éric Zemmour n’a pas grand intérêt en soi. Plutôt qu’une étude, Le Suicide français fonctionne plutôt comme une incitation a soi-même se suicider, devant l’avalanche combinée de catastrophes et de complots aussi irrémédiables qu’effroyables. Inutile d‘y chercher une élaboration raisonnée, voire même une cohérence : l’auteur va de bar en bar et y délivre des harangues de comptoir, dont les termes, le propos, l’orientation peuvent varier d’un bar à l’autre. Quelques constantes se dégagent pourtant, quasi obsessionnelles, et qui, elles, nous intéressent. Car l’intérêt que cristallise sa démarche, les bulles médiatiques qu‘elle gonfle et qui la gonflent en retour, avec une absence quasi générale de distance critique sont, eux, tout a fait indicatifs d’une période, et de ce qu`elle charrie de peurs et d’impuissance, de périls et d’exigences éthiques.

Dans le monde d’Éric Zemmour, la France se porte mal depuis qu’on a porté atteinte à la figure du père, du mâle, de l’homme. Il ne s‘attarde pas sur la décapitation royale mais c’est pour mieux se focaliser sur le libéralisme ravageur de mai 1968, a qui il impute tout à la fois la chute de De Gaulle, l’émasculation des hommes des générations qui suivent, contraints a singer les femmes qu’ils ne sont pas, le trouble des identités — sexué-es et autres — charrie par un individu triomphant, un féminisme ravageur et des affirmations identitaires dissolvantes.

Dans le monde d’Éric Zemmour, l’histoire n’est qu’une somme de bien-pensances politiquement correctes auxquelles il faut le plus vite possible substituer des masses de bon sens, de préférence bien de chez nous. C’est ainsi que l‘on apprend entre autres que Pétain aurait sauvé des juifs — français – , au prix du sacrifice des autres ; que l‘on renoue avec les assignations à résidence les plus racistes, celles-là mêmes qui l’avaient fait condamner par la justice et applaudir, par le groupe UMP de l’Assemblée nationale, au lendemain de cette condamnation…

Comment expliquer, dans ces conditions, le frémissement incessant qui accompagne son ubiquité médiatique ? Comment expliquer que chaque magazine, chaque chaîne, chaque plateau se fassent un devoir de lui permettre d‘occuper l‘espace de la parole publique ? On peut évidemment y voir la trace d’un fonctionnement très marqué par l’émergence hégémonique des chaines d’info, de complicités incestueuses entre ego et réseaux, d’une attirance trouble pour le scandale et le sulfureux. Mais force est bien de constater que le discours plait, ravit même une partie non négligeable de l’opinion publique, avide de vérités aussi éternelles qu’élémentaires, sans pour autant être organisée dans une structure de l’extrême droite.

En fait, Éric Zemmour surfe sur de grandes et vieilles peurs anthropologiques, qui naissent d’ébranlements d’archaïsmes. Sexualité, famille, filiation et transmission n’ont certes jamais été des catégories historiquement stables ; mais la modernité industrielle, les révolutions bioéthiques, les mouvements de libération des individus, et singulièrement des individus femmes. des collectifs contraints dont ils étaient sujets et non acteurs, tout cela a modifié à grande vitesse et en profondeur les modes a penser et à vivre de centaines de millions de femmes et d’hommes.

Cette révolution des mœurs — dont la rapidité n’a guère de précèdent a l’échelle de l’histoire — s’est combinée à d‘autres révolutions, sociales, productives, économiques, démographiques, chacune avec son potentiel, ses lots de promesses, ses désillusions et ses avenirs désenchantés. Le tour de passe-passe matois auquel s’adonne Le Suicide français est d’attribuer au libéralisme des premières les angoisses nées des dernières. Mais ignorer ces inquiétudes serait évidemment en laisser le monopole de gestion aux artisans locaux de haine globalisée.

C’est d’ailleurs la seule raison pour laquelle on pourrait être tenté de remercier Éric Zemmour. À sa manière, il nous invite, de façon pressante, a « occuper le terrain » face à des résurgences idéologiquement maurassiennes, à une morale et des mœurs directement issues du troisième Empire, a une vision des droits toujours plus exclusive des ayants droit eux-mêmes.

C’est bien dans cet esprit que la LDH se mobilise et mobilise autour d’elle contre les idées d’extrême droite, quelles que soient leurs formes, les terrains qu’elles entendent se soumettre. C’est tout le sens de son investissement et de celui de ses sections dans l’initiative qui se tiendra les 21 et 22 novembre, à l’université Paris 8 et avec le concours de Mediapart. pour rassembler celles et ceux qui, dans les municipalités, a l’école, autour de la formation, dans les entreprises, face au sexisme, au racisme et a l’antisémitisme, entendent défendre résolument — dans le débat d’idées et en pratique — la notion s’égalité et de fraternité. Car, n’en doutons pas, la liberté — qui n’est rien sans liberté  intellectuelle digne de ce nom — est à la clé.