Sale temps pour les demandeurs d’asile et les sans-papiers.
Alors que le ministère de l’intérieur vient d’adresser aux associations habilitées à pénétrer dans les centres de rétention son appel d’offre pour l’année prochaine, l’assemblée vient de voter la « retenue » des étrangers pour vérifier leur identité (le conseil d’Etat avait reconnu illégale la garde à vue).
Les centres de rétention tout d’abord. L’appel d’offre n’est pas public, seules les associations concernées le recevront. Le site Médiapart a cependant réussi à en avoir connaissance, et ça n’est pas triste…
Parmi les nouveautés : un devoir de réserve, ou de discrétion, est imposé aux intervenants, mandatés pour informer et apporter un soutien aux personnes retenues. La violation de ce devoir sera punie d’une amende de 500€…
Lorsqu’une personne retenue voudra déposer un recours, l’intervenant devra prévenir le chef de centre. Les personnes retenues ne pourront être entendues qu’une par une par les avocats ou les intervenants : sauf qu’il arrive qu’un retenu maîtrisant le français pouvait servir d’interprète…
La conclusion de la Cimade est sévère : « Ce régime d’exception risque fort de devenir le nouvel outil des préfectures et de la police. Il s’ajoutera à l’arsenal déjà mis à leur disposition sous l’ère Sarkozy et toujours en vigueur en devenant le premier maillon d’une chaîne visant à enfermer en rétention et expulser au détriment des droits » (lire ici). « La Cimade demande au gouvernement de retirer cet appel d’offre et d’adopter de nouvelles dispositions qui garantissent l’accès effectif aux droits des personnes étrangères enfermées en rétention ainsi que l’indépendance d’associations exerçant un rôle essentiel de vigilance citoyenne, de regard de la société civile sur ces lieux d’enfermement ». En conclusion, l’association considère qu’il s’agit ni plus ni moins d’une « garde à vue bis spéciale étrangers ».
Passons au texte de loi sur la retenue des étrangers. Il avait déjà été adopté par le sénat, et l’Assemblée nationale vient de le finaliser. Première chose, la retenue ne pourra pas excéder 16h : c’est un progrès. C’est bien le seul !
La discussion a été vive à l’Assemblée. La droite a évidemment entamé son refrain xénophobe. Mais c’est de la gauche qu’est venue l’opposition la plus intéressante. Elle a permis notamment d’autoriser la présence d’un avocat, pour un entretien de 30 minutes : « Il est ainsi prévu explicitement que l’étranger peut demander à être assisté par un avocat, que l’avocat peut, dès son arrivée, communiquer pendant trente minutes avec la personne retenue, que l’étranger retenu peut demander que l’avocat assiste à ses auditions au cours desquelles celui-ci peut prendre des notes et qu’à la fin de la retenue l’avocat peut, à sa demande, consulter le procès-verbal de retenue ainsi que le certificat médical annexé. La première audition ne pourra débuter sans la présence de l’avocat avant l’expiration d’un délai d’une heure, sauf si elle porte uniquement sur les éléments d’identité ». Le Monde poursuit : « S’il a reconnu « une avancée extrêmement importante » avec ces amendements, le chef de file des députés radicaux de gauche, Roger-Gérard Schwartzenberg, a pointé avec insistance un traitement moins favorable à ses yeux pour les sans-papiers retenus que pour les gardés à vue, vu la possibilité d’une audition pendant une heure sans présence d’un avocat sur les éléments d’identité, « cœur de cible » à ses yeux des auditions dans le cas de la retenue » (article ici).
Les associations ne pourront qu’être déçues par ces deux nouvelles, qui viennent s’ajouter à plusieurs événements inquiétants : démantèlement des camps de roms sans relogement, renoncement au récépissé pour les contrôles d’identité (Valls s’est contenté d’une « réécriture » du code de déontologie de la police et de la gendarmerie)…
Au ministère de l’intérieur, le changement, ça n’est décidément pas maintenant…
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