Photo Pierre Fénard.
Spartacus et Cassandra le 28 novembre au Cithéa de Plouguenast (22) : vidéos et critiques
« Spartacus et Cassandra » sera projeté samedi 28 novembre au Cithéa, le cinéma associatif de Plouguenast (22), avec qui la section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme a déjà travaillé en partenariat (« La Guerre des boutons » pour le roman de Bertrand Rothé, « Lebrac, 3 mois de prison », en 2011, et « La saga des Contis », de Jérôme Plateau qui avait participé au débat par visio conférence, en 2013). Ioanis Nuguet, réalisateur, sera là pour le débat après le film.
Ce film, qui raconte la vie difficile de deux enfants Rroms, tiraillés entre l’amour pour leurs parents et la difficulté de vivre avec eux, et qui sont sauvés par leur rencontre avec Camille, une jeune artiste trapéziste qui se transforme en éducatrice, a été, à sa sortie, début 2015, salué de façon unanime par la critique. Et il a obtenu de nombreux prix (voir photo plus bas).
Voici un extrait du film (le début), puis l’article de la critique de cinéma Guillemette Odocino (Télérama), et, en fin d’article, une interview de Ianis Nuguet.
Critique de la journaliste Guillemette Odicino, publiée par l’hebdomadaire Télérama :
« A 1 an, je marchais… A 3 ans, mon père était en prison… A 4 ans, je faisais la manche avec ma soeur… A 7 ans, je suis arrivé en France… » La voix de Spartacus ouvre ce documentaire comme le « il était une fois » d’un conte. Aujourd’hui, ce gamin rom a 14 ans. Avec sa soeur cadette, Cassandra, il a trouvé refuge dans un cirque de la banlieue de Paris, sous la protection de Camille qui s’est improvisée éducatrice parce qu’elle refuse qu’il n’y ait pas d’avenir pour ces deux gosses-là. Marcher sur un fil n’est pas qu’un numéro d’équilibriste sous un chapiteau : pour certains enfants, c’est l’histoire d’une vie.
Très vite, Spartacus et Cassandra se retrouvent face à un choix. Rester avec leurs parents : un père alcoolique qui ne rêve que de partir en caravane ailleurs, toujours ailleurs, et une mère un peu folle qui vend du muguet fané sur le trottoir. Ou accepter, comme le juge les y engage, leur placement dans une famille d’accueil. La loi du sang, même toxique, ou l’intégration et ses contraintes : aller à l’école, devenir sédentaires et sages…
De ce dilemme, le réalisateur fait un film de mouvements : caméra à l’épaule, il suit ses merveilleux petits héros dans leurs doutes, leurs colères et ces moments radieux où, en pleine nature, ils abandonnent leur incroyable maturité pour des gestes de l’enfance. Cassandra, petite princesse gitane aux ongles roses, veut voir la France comme un eldorado : dans le poème qu’elle a écrit et qu’elle récite (moment suspendu, bouleversant), une maison, soudain, devient l’inverse d’une cage. Spartacus, petit guerrier insoumis et jeune auteur de rap, hésite encore : a-t-il le droit d’être heureux quand ses parents, eux, restent condamnés à l’errance et usent du chantage affectif ? Le film, douloureux, lumineux, refuse la fatalité de ceux qui sont nés pour n’être chez eux nulle part. Et défend le droit de chaque enfant, même « du voyage », à planter un arbre qu’il pourra voir grandir. — Guillemette Odicino
Pratique. Entrée 4€. Projection organisée dans le cadre du mois du film documentaire. Partenaires, CAC Sud 22, le Cithéa, la section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme.
Interview de Ioanis Nuguet
Attentats : rassemblement à Loudéac (22) ce jeudi 19 novembre à 19h
Un rassemblement et une marche sont organisées ce soir, jeudi 19 novembre, à Loudéac. Le rendez-vous est fixé à 19h, derrière la mairie. Détails dans l’article d’Ouest-France paru ce jeudi 19 novembre, reproduit ci-dessous et lisible ici).
Ligue des droits de l’Homme : « On doit lutter contre le terrorisme sans porter atteinte à nos libertés »
La Ligue des droits de l’Homme continue à mettre en garde les hommes politiques contre les risques qu’un état d’urgence mal maîtrisé et non contrôlé par le parlement peut faire courir à la démocratie. C’est le sens de son dernier communiqué, publié ce matin, jeudi 19 novembre :
Comme on pouvait le craindre, le projet du gouvernement de proroger de trois mois l’état d’urgence pose de graves problèmes de libertés publiques et individuelles.
Pendant trois mois, pour les motifs les plus divers et sans contrôle préalable de la justice, soixante-six millions de personnes pourront :
- voir la police entrer chez elles de jour et de nuit afin de perquisitionner leur lieu de travail ou leur domicile et prendre une copie du contenu de leur ordinateur ou de leur téléphone mobile. Pour cela, il suffit qu’il existe des raisons sérieuses de penser que ce lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue « une menace pour la sécurité et l’ordre public » ;
- être assignées à résidence si leur comportement constitue « une menace pour la sécurité et l’ordre public » et se voir interdire d’être en contact avec d’autres personnes présentant la même menace.
Le vague des motifs qui pourront être invoqués, qui dépassent de beaucoup la prévention et la répression d’actes de terrorisme, permet à tout gouvernement de s’en prendre au mouvement social dans son ensemble.
Les associations seront aussi responsables des actes de leurs membres puisqu’elles pourront être dissoutes en raison de leur comportement.
Ce que le gouvernement veut imposer au Parlement d’adopter à marche forcée illustre bien les craintes déjà exprimées par la LDH : ce qui est ici en cause, ce n’est pas l’indispensable lutte contre le terrorisme, c’est l’extension dangereuse des pouvoirs de l’Etat sans aucune garantie judiciaire.
C’était aussi le sens de l’intervention d’Henri Leclerc, avocat, et président d’honneur de la LDH, dans son intervention à France Inter mardi 17 novembre : « Je voudrais que les gens comprennent que l’état d’urgence, ce n’est pas rien » a-t-il martelé (à écouter ici). C’est également le sens de l’interview que Jean-Pierre Dubois (professeur de droit constitutionnel et lui aussi président d’honneur de la ligue des droits de l’Homme) a accordé jeudi 19 à Jean-Baptite Jacquin, journaliste au Monde : il évoque pour sa part le risque d’une « perte des repères démocratiques » : l’état d’urgence devrait être contrôlé par le Parlement. Tout en reconnaissant que l’état d’urgence est justifié (« Sur le principe, la réponse est oui. On aurait du mal à nier le caractère exceptionnel de la situation »), il s’empresse d’ajouter : « La question est comment on utilise cette possibilité et pour combien de temps. Nous comprenons que l’on prenne des mesures exceptionnelles compte tenu de ce qu’il s’est passé le 13 novembre. Mais la tradition républicaine est la proportionnalité et le contrôle. Les mesures doivent être proportionnelles à la situation. Ce qui me dérange est que le président de la République a d’emblée prévenu que le gouvernement demandera une prolongation de trois mois de l’état d’urgence. Je ne comprends pas que la durée soit aussi longue, même au regard de la gravité de la situation. Pourquoi donnerait-on un blanc-seing aussi long ? ». Il trouve dans l’interdiction des manifestations liées à la réunion de la COP21 (annoncée par le premier ministre) une illustration de ses craintes : « (…) justifier [cette interdiction] en disant que les rassemblements constituent des cibles est aberrant. Tout est une cible : le métro, les musées, les ministères… On ne va pas arrêter la Nation ! Utiliser une situation dramatique pour museler une expression citoyenne est une voie dangereuse. Et on va le faire devant les caméras du monde entier ». L’interview complète de Jean-Pierre Dubois est à lire ici.
Jean-Pierre Dubois : « Nous sommes dans une logique de l’impuissance guerrière ».
A en croire les médias, piller le fonds de commerce idéologique de la droite c’est faire preuve d’une « grande habileté politique ». Si tel est le cas, alors, oui, chapeau bas M. Hollande.
Ce pillage, dont le président de la république avait chargé sa créature, M. Macron, de l’accomplir au niveau social et économique, il l’a assumé lui-même, au niveau des libertés et de la « sécurité » devant le Parlement réuni en congrès à Versailles, lundi. Il avait déjà bien commencé le boulot, avec les lois sécuritaires, il le poursuit aujourd’hui sans vergogne, allant même jusqu’à recycler des propositions de d’Edouard Balladur…
Objectif atteint : Mme Le Pen elle-même salue l’exercice…
Lundi, le congrès, convoqué par le président de la République, s’est réuni à Versailles. « Le Parlement n’est pas encore une Chambre bleu horizon, comme en 1919, puisque la gauche est au pouvoir. Mais il est de toute évidence une Chambre bleue, convertie à la nécessité de la « guerre » et prête à approuver des mesures d’exception », commente Mathieu Magnaudeix dans Médiapart.
Rares sont les voix qui se lèvent pour dénoncer ce que tout le monde aurait dénoncé si cela avait été proposé par la droite.
On en entend cependant quelques-unes. Rafraichissantes. Celle de Jean-Pierre Dubois, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, par exemple. Qui, dans Rue 89, déclare : « nous sommes dans une logique de l’impuissance guerrière ».
Interrogé par Robin Prudent, qui lui rappelle : « Après les attentats de Charlie Hebdo, vous nous mettiez en garde contre une possible « hystérie sécuritaire », Jean-Pierre Dubois répond : « Après les attentats de janvier, on a entendu dans la bouche de certains gouvernants, notamment Manuel Valls et François Hollande, que nous étions en guerre.
C’est exactement ce que l’on entend de nouveau.
Si on est dans une logique de guerre, les mots n’ont pas beaucoup de sens, parce que personne ne sait comment faire la guerre à des gens qui ne sont pas un Etat. Comment fait-on la guerre à des gens qui ouvrent le feu au hasard avec des armes rudimentaires que l’on peut trouver très facilement ?
Surtout, cela signifie que nous allons vers ce qui est le sort des démocraties en guerre : l’état d’exception.
L’état d’urgence a été proclamé. Dans un premier temps, on peut se dire que c’est une situation exceptionnelle et que l’on ne peut pas y répondre autrement que par des mesures exceptionnelles.
Sauf que quand on regarde bien, l’état d’urgence n’ajoute pas grand-chose à ce qui est devenu permanent. Les mesures antiterroristes, les lois sur le renseignement, on les a déjà, et cela ne fonctionne pas ».
Lisez l’interview de Jean-Pierre Dubois du 14 novembre 2015 par Robin Prudent, ici.
Et relisez son interview du 8 janvier 2015 par Xavier Delaporte ici.
Projets du président de la République : l’état d’urgence en permanence
Communiqué de la Ligue des droits de l’Homme publié lundi 16 novembre dans la soirée, après la déclaration de François Hollande devant le congrès réuni à Versailles.
On ne peut qu’être inquiet des projets du président de la République. La logique de guerre qu’il a mise en avant conduit à modifier en profondeur plusieurs aspects de l’Etat de droit : qu’il s’agisse de la Constitution, de la procédure pénale ou des règles de la nationalité, ou d’autres encore.
Ces mesures, loin d’être limitées dans le temps, vont s’inscrire dans la durée comme l’actuel état d’urgence qui va être prorogé pour trois mois, soit au moins jusqu’au mois de février 2016, sans qu’on en comprenne la raison.
Le peu de précisions apportées par le président de la République quant au contenu exact des réformes envisagées et la rapidité avec laquelle le Parlement est sommé de les entériner atteste que le pouvoir exécutif entend imposer sa vision d’une démocratie où ce dernier l’emporte sur les autres pouvoirs et sur les libertés individuelles.
Cette démarche est d’autant plus inquiétante que le président de la République a observé un silence total sur les causes profondes de la situation actuelle, les échecs observés et ne présente qu’une seule alternative : un pouvoir fort ou le terrorisme, sans se préoccuper d’assurer la cohésion sociale et l’égalité des droits.
La LDH exprime son inquiétude face à des projets délibérés sur injonction, dans la précipitation et usant de l’émotion provoquée par les attentats commis.
D’ores et déjà, elle désapprouve la prorogation de l’état d’urgence et souhaite que les pouvoirs publics ne se contentent pas de faire référence au respect de l’Etat de droit mais qu’ils le respectent effectivement.
Refonder la légitimité de la police
Après les attentats à Paris et Saint-Denis, le 13 novembre dernier, la Ligue des droits de l’Homme mettait en garde le gouvernement contre un aggravation des mesures tendant à limiter encore davantage les libertés publiques, qui, depuis de nombreuses années, n’en finissent pas de subir des attaques au nom de la lutte contre le terrorisme. La dernière attaque consiste à introduire une sorte de « présomption de légitime défense », qui autoriserait la police à faire usage d’une arme alors même que la légitime défense n’est pas établie, mais qu’on a affaire à des personnages tels que des tueurs en série ou des terroristes comme ceux de Paris. Ce projet ne fait pas l’unanimité, y compris dans certains syndicats policiers, qui estiment que l’arsenal juridique actuel est suffisant pour que les personnels puissent se défendre.
Françoise Dumont, présidente de la Ligue des droits de l’Homme, revient, dans l’éditorial de LDH info, l’organe mensuel de la LDH, sur deux événements récents, emblématiques de ces menaces sur les libertés :
- Le verdict du procès des policiers impliqués dans le décès des deux jeunes gens dans un site EDF il y a 10 ans ;
- Le décès de Rémy Fraisse en octobre 2014 sur le site du futur barrage de Sivens.
Il ne s’agit évidemment pas de faire le procès de la police. Mais ne pas dénoncer les abus, qui sont le fait d’une minorité de personnes, ne peut que contribuer à ternir l’image de la police, notamment chez les jeunes ; et cette rupture entre police et citoyens peut avoir des conséquences tragiques. Comme le dit Françoise Dumont, « Il y a urgence à refonder la légitimité des services de police ». Dans l’intérêt de tous, y compris des policiers.
Police, l’inquiétant bilan
Editorial de Françoise Dumont, présidente de la Ligue des droits de l’Homme dans le numéro d’octobre de LDH Infos.
Il y a tout juste dix ans, Bouna Traoré et Zyed Benna trouvaient la mort dans un site EDF, et un troisième jeune était grièvement brûlé. Leur crime ? Avoir voulu fuir un contrôle de police. L’annonce de la mort prématurée de ces deux adolescents avait enflammé les banlieues pendant plusieurs semaines. Le procès des deux policiers mis en cause a traîné pendant dix ans, pour aboutir finalement à une décision tragique et scandaleuse : la relaxe définitive.
Ce qui est arrivé le 27 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois renvoie au caractère systémique des contrôles d’identité abusifs et à leur impact dévastateur sur les personnes contrôlées. Ce n’est pas une coïncidence si l’Etat vient de contester cinq arrêts de la cour d’appel de Paris, le condamnant pour « faute lourde » pour cinq contrôles d’identité reconnus comme ayant été effectués « au faciès ». Le gouvernement avait l’opportunité de tirer les conséquences des décisions de la cour d’appel de Paris en introduisant, comme nous le demandons de longue date avec d’autres, un système de récépissé des contrôles et une modification du cadre législatif qui les autorise. Au lieu de cela, il s’est pourvu en cassation. Ce pourvoi était prévisible mais il reflète un choix : celui de laisser perdurer, pire, de légitimer des pratiques policières discriminatoires, au rebours des engagements du candidat Hollande. Il faudra expliquer comment une telle démarche peut être compatible avec la lutte contre le racisme, pourtant proclamée « grande cause nationale » pour 2015.
Dans la nuit du 24 au 25 octobre 2014, il y a tout juste un an, Rémi Fraisse trouvait la mort sur le site du barrage de Sivens. Cette mort ne suscita pas les mêmes explosions de violence que celle de Zyed et Bouna. Alain Finkielkraut n’eut pas l’occasion de parler de « pogrom antirépublicain » ou de « conflit ethnico-religieux », mais on se souvient avec colère des réactions officielles au lendemain du drame. Pourquoi les pouvoirs publics ont-ils tenté de dissimuler, de nier parfois jusqu’à l’évidence, la réalité des faits ? Pourquoi avoir attribué cette mort à la violence « démesurée » des manifestants antibarrage, victime comprise ? La LDH a alors constitué une Commission d’enquête citoyenne visant à faire la lumière, toute la lumière, sur ces événements. Mobilisant une vingtaine de personnes, cette Commission a procédé à une trentaine d’auditions auprès des protagonistes directs ou indirects de ce drame. Ce travail d’investigation a abouti à la rédaction d’un rapport qui dresse un bilan accablant de ce qui s’est passé, mais qui formule aussi un certain nombre de préconisations.
La LDH, en cette affaire, a joué pleinement son rôle de vigile et de contre-pouvoir. Sa démarche, hier comme aujourd’hui, n’est évidemment pas de dresser le procès des forces de police qui accomplissent souvent un travail difficile dans des conditions dégradées. Elle s’est toujours battue pour la mise en place d’une police républicaine qui joue pleinement son rôle de protection de l’ensemble des citoyens. Force est pourtant de constater qu’on en est loin. On le mesure à voir ces images de forces de l’ordre repoussant violemment les avocats du palais de justice de Lille, ou lorsque les syndicats de policiers appellent à manifester sous les fenêtres de la garde des Sceaux, au prétexte que la politique pénale serait laxiste et la justice hors des réalités.
Il y a urgence à refonder la légitimité des services de police. Il y a urgence à instaurer un débat public avec la population sur les conditions démocratiques de la sécurité. Car la dégradation du climat est bien celle de la démocratie elle-même. Les déclarations martiales et autres bombements de torse à l’Assemblée nationale ne sont pas à cet égard de bon augure.
Ils pourraient n’être que pathétiques ; au vu du bilan et des enjeux, ils sont inquiétants.
Des identitaires bretons tabassent un homme d’origine maghrébine à Pontivy
La Bretagne – le saviez-vous ?- est menacée par « l’arrivée massive d’immigrés en provenance de Syrie, mais aussi d’Afrique et d’Asie » (au fait, la Syrie, c’est dans quel continent ?).
Mais rassurez-vous, ADSAV, le « parti politique breton », veille au grain, a va lever une armée pour bouter ces importuns hors de Bretagne. C’est ainsi qu’était annoncée sur son site, le 29 octobre, la manifestation organisée par ce groupuscule d’extrême droite à Pontivy, manifestation intitulée « Breton, ouvre les yeux, ferme ta frontière ». Article illustrée par une photo de l’agence Reuters de réfugiés escortés par la police en Hongrie.
Donc samedi 14 novembre, quelques heures après les massacres de Paris et Saint-Denis, les braves petits soldats d’adsav sont arrivés à Pontivy. Mais moins nombreux que prévu (150 d’après Ouest-France et France 3, 300 d’après la presse identitaire…), semble-t-il.
Un groupe de militants antifascistes était là également, mais beaucoup moins nombreux.
Les identitaires d’adsav se sont alors déchaînés. Le récit qu’en fait une commerçante de Pontivy qui a assisté à la scène dans l’article publié sur son site par France Bleu est édifiant : « non loin de notre magasin, un monsieur d’origine maghrébine a été pris par le col. 6 personnes l’ont mis à terre. C’était un défoulement sur lui. C’était déchirant, on ne pouvait pas lui porter assistance. Plus loin c’était exactement pareil. C’était de la violence et de la haine (…) ».
Voilà ce que sont et ce que font les militants de l’extrême droite bretonne.
Ils ne gagneront pas, parce que #NousSommesTousUnis
Les attentats qui ont frappé Paris et Saint-Denis vendredi 13 novembre sont évidemment pain bénit pour les extrémistes de tous poils, qui n’ont pas tardé à distiller leur venin. Le front « national » en tête, évidemment, bien dans son rôle, accompagné par quelques excités tels que Wauquiez (pardon à René Vautier d’avoir confondu son nom avec celui de cet individu !… Erreur corrigée !), Morano et Ciotti, rejoint par leur chef de meute, l’ancien président de la République pour réclamer davantage de mesures sécuritaires. #NousSommesTousUnis, oui, mais pas avec n’importe qui.
La Ligue des droits de l’Homme, et la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme ont publié, ce samedi 14 novembre en début d’après midi, des communiqués qui mettent en garde contre d’éventuelles dérives prétendues sécuritaires, qui ont largement et depuis longtemps prouvé leur totale inefficacité. Nous les reproduisons ci-dessous.
Communiqué de la Ligue de droits de l’Homme
Ils ne gagneront pas
L’assassinat de plus de 120 personnes à Paris dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015 restera comme un des pires outrages infligé aux habitants de ce pays. Ces actes provoquent horreur et révolte.
C’est d’abord aux victimes et à leurs familles que la LDH pense en toute solidarité et avec émotion.
Parce que notre démocratie a le droit et le devoir de se défendre, l’adoption de mesures exceptionnelles peut répondre à l’urgence du moment.
Ces mesures qui s’ajoutent aux possibilités déjà très larges ouvertes par la législation antiterroriste ne peuvent être appliquées que pour une période limitée et doivent l’être sans aucune stigmatisation.
C’est ensemble, tous ensemble, que nous devons répondre à l’immense défi qui nous est lancé. C’est par une réaction citoyenne que nous devons réaffirmer notre volonté de vivre ensemble et de protéger notre démocratie et nos libertés parce que nous refusons la peur et parce que les assassins
ne gagneront pas.
Communiqué commun de la Ligue des droits de l’Homme et de la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH)
#NousSommesTousUnis
La FIDH et son affiliée française la LDH (Ligue des droits de l’Homme et du citoyen) condamnent avec la plus grande fermeté les actes terroristes intervenus dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015 à Paris et à Saint-Denis.
Nous exprimons nos sincères condoléances aux familles des victimes décédées ainsi que notre solidarité et nos vœux de rétablissement aux nombreux blessés. Nous témoignons de la solidarité exprimée ces dernières heures par de nombreuses organisations membres et défenseurs des droits de l’Homme à travers le monde. C’est l’humanité qui est visée par ces attaques ignobles.
Nous soulignons que les mesures exceptionnelles adoptées, si elles peuvent répondre à l’urgence du moment, ne doivent être appliquées que pour une période limitée et sans aucune stigmatisation.
Nous nous joignons aux appels à l’union citoyenne contre la peur, pour protéger les libertés, la démocratie et notre volonté de vivre ensemble.
« Spartacus et Cassandra », samedi 28 novembre, 20h30, au Cithéa de Plouguenast
Samedi 28 novembre, à 20h30, la section Loudéac centre Bretagne projettera le film Spartacus et Cassandra, de Yoanis Nuguet, dans le cadre du mois du film documentaire, au cinéma Le Cithéa de Plouguenast. Cette projection est organisée en partenariat avec CAC Sud 22, et avec le cinéma Le Cithéa, avec lequel nous avons déjà travaillé, notamment pour les projections de « La Guerre des boutons », avec un débat animé par Bertrand Rothé, auteur du roman « Lebrac, trois mois de prison » (lire ici), et « La saga des Contis », film de Jérôme Palteau, avec qui nous avions organisé un débat par vidéo conférence (lire ici).
Les deux héros du film, Spartacus et Cassandra , lui donnent leur nom. Deux enfants Rroms, qui vivent dans la rue avec un père alcoolique et une mère souffrant de graves problèmes psychiatriques. Ils sont tiraillés par leur amour pour leurs parents, et la nécessité pour eux de se libérer de cette situation qui risque de les broyer. Et une sorte de fée, Camille, une jeune trapéziste, arrive, et s’occupe des deux enfants.
Ce film est un chef d’œuvre. Il ne s’agit pas d’un film de plus sur les Rroms. C’est un film sur deux enfants, et une jeune adulte, qui mêlent leurs destins, et se construisent ensemble. Ioanis Nuguet, réalisateur, explique sa démarche : « Spartacus & Cassandra ne pouvait être un prétexte à observer la vie des Rroms dans les bidonvilles en France. Ce n`est pas le film que je voulais faire ».
Le résultat est une sorte de conte de fée, mais sans mièvrerie, sans misérabilisme, et, pour utiliser une formule à la mode, « sans pathos ». On en sort ragaillardi. La personnalité des trois protagonistes principaux, Spartacus, Cassandra et Camille y sont pour beaucoup. Cassandra, qui a présenté le film au festival Tyfilms de Mellionnec, est aujourd’hui une jeune fille épanouie, d’une maturité incroyable. Et le plus impressionnant, c’est que cette maturité ne lui a en rien ôté sa fraîcheur et sa spontanéité.
Ce film, c’est encore son réalisateur, Ioanis Nuguet, qui en parle le mieux. Voici ce qu’il en dit :
Je voulais faire un film à « hauteur d’enfants ». Il me fallait une forme dans laquelle leurs regards, leurs sentiments, leurs pensées allaient pouvoir prendre temps et images, s’entrechoquer. S’incarner poétiquement. J’ai cherché la forme littéraire qui s’approchait le plus de ce point de vue, là où la question de l’enfant en tant qu’être déjà porteur de sa propre destinée était la plus prégnante. Les contes des Frères Grimm ne parlent que de ça: un enfant, pour qui sa famille ne peut plus rien, porté devant un choix impossible pour tout autre que lui. Mieux encore, le conte opère un renversement des rôles traditionnels attribués habituellement au père et à la mère: c’est maintenant l’enfant qui a charge de sauver sa famille, de subvenir à ses besoins ou d’empêcher sa décrépitude. Grossièrement, dans le conte, les enfants doivent devenir les parents de leurs propres parents.
Spartacus & Cassandra a donc, naturellement, pris la forme d’un conte. D’un conte qui serait aussi un anti-conte ou un conte inversé : il ne s’agirait pas pour eux de sauver leurs parents, tâche qu`ils tentaient déjà d’accomplir, mais de se sauver eux-mêmes. Avec le rêve qu`ils pourraient un jour, leur situation faite, revenir pour leurs parents (comme dans Hansel et Gretel ou Le Petit Poucet).
J’al volontairement limité le nombre de personnages pour concentrer toute l’attention sur leur chemin initiatique. Chaque rencontre. Chaque rencontre, chaque être est une nouvelle épreuve, un moment charnière de leur vie. Camille les accompagne comme une bonne fée, une marraine dont la présence reste relativement mystérieuse tout au long du film. On ne saura jamais véritablement d’où elle vient ni ce que sont ses intentions profondes. C’est toujours à travers les questionnements des enfants, leurs inquiétudes, leur amour, qu’elle nous apparaît. Cet angle mort, ce point aveugle, était absolument nécessaire à la construction du conte : au fond, ce sont les enfants qui décident du sort de Camille et de la place qu’elle va prendre dans leur vie. Ils peuvent à tout moment faire choix de ne pas la suivre, de refuser son aide. Comme dans les contes. la fée – ou plus souvent la sorcière – est un personnage ambigu, dont les protagonistes se méfient car elle peut les faire tomber dans un malheur plus grand s`ils échouent à l’épreuve qu’elle propose.
Ioanis Nuguet
Pratique : samedi 28 novembre à 20h30, cinéma Le Cithé, Plouguenast. Entrée, 4€.
La leçon de morale donnée à Mme Morano par un jeune Français d’origine sénégalaise
Seydi Diamil Niane est un jeune Français d’origine sénégalais, doctorant en islamologie à l’université de Strasbourg. Les propos infâme prononcés par Mme Morano dans l’émission « On n’est pas couché », la semaine dernière, l’ont profondément choqué. Il a donc écrit une lettre ouverte à la femme politique qui nous a depuis longtemps habitués à ses saillies composées essentiellement d’inepties, de grossièretés, de mensonges, le plus souvent teintés de xénophobie et de racisme, et toujours d’une vulgarité inégalable. On peut lire le texte d’intégral de sa lettre ici.
Un passage de cette lettre nous interpelle particulièrement à la veille du bistrot de l’histoire consacré au massacre de tirailleurs sénégalais par l’armée française, en 1945 à Thiaroye : Seydi Diamil Niane met en parallèle ce drame dont la France peine à reconnaître la responsabilité et les propos de Mme Morano. Les voici :
« (…) Moi aussi je peux vous parler des centaines de Charlie Hebdo. Je ne vous parlerai ni de Sétif, ni du bombardement de Haiphong en décembre 1946, ni des massacres en Côte d’ivoire entre 1949 et 1950 (mais vous pouvez vous référer à l’ouvrage de Yves Benot, Massacres coloniaux.). Non madame, je vais vous parler d’un petit fait divers que vous pourrez lire à la page 77 de l’ouvrage de Benot que je viens de citer : « Il s’agissait là de tirailleurs sénégalais libérés des camps de prisonniers de guerre allemands, et démobilisés. Débarqués le 21 novembre à Dakar, ils avaient été rassemblés au camp de Thiaroy, à quelques kilomètres de la capitale. Mais ils attendaient de recevoir les arriérés de leur solde et de pouvoir échanger leurs marks. En France, malgré leurs réclamations, on leur a refusé sous divers prétextes […] C’en était trop. Les tirailleurs protestèrent, manifestèrent sans doute. Aussitôt l’armée française intervint et ouvrit le feu. Combien de morts ? 25, 30, 60, ou plus ? En tout cas, encore un massacre, aisé de surplus puisque les tirailleurs n’avaient pas d’armes »
Si je vous fais part de cette petite histoire, ce n’est pas pour banaliser le drame qu’a connu Charlie Hebdo. Mais je tenais juste à vous dire que de la même façon qu’aucun descendant des tirailleurs ne fait d’amalgame entre le peuple français et l’armée qui a massacré leurs ancêtres, ayez cette même intelligence et arrêtez de perpétuer votre amalgame insupportable. (…) ».
En quelques phrases, Sydi Diamil Niane montre l’actualité de ce drame, et l’importance qu’il y à à empêcher qu’il sombre dans l’oubli. Raison de plus pour assister au Bistrot de l’histoire, ce vendredi 2 octobre à partir de 18h à la salle des fêtes de Trévé ! Lire ici pour en savoir plus.
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