Sécurité publique : l’absurde politique du chiffre

Le quotidien régional Le Télégramme a publie dans son édition du 31 octobre un dossier remarquable et courageux intitulé « sécurité publique : l’absurde politique du chiffre ». Hervé Chambonnière, son auteur, passe en revue les dérives de cette politique, qui dans le domaine de la sécurité tout comme ceux de la santé ou de l’éducation, peut avoir des effets parfois comiques, mais hélas plus souvent dévastateurs. Ainsi, pour 2011, les policiers de Pau devaient attendre 51 « refus d’obtempérer » : «Comment fait-on? s’agaçait l’un d’eux. On provoque les automobilistes? On les laisse partir et on les course ensuite? C’est n’importe quoi et surtout, ce n’est pas ça notre boulot». Ou encore cet autre policier qui explique que, ses collègues et lui consacrent les quatre ou cinq premiers jours du mois à on tâche d’atteindre les objectifs fixés par la hiérarchie, et, ainsi, à partir du 6ème, ils peuvent travailler normalement…

Cette politique aboutit aussi à une manipulation grossière des statistiques : on veut améliorer les taux d’élucidation ? on refuse d’enregistrer certains types de plaintes délicates, et on privilégie la chasse aux étrangers ou aux petits trafiquants de drogue.

Pour son enquête, Hervé Chambonnière a fait appel à deux personnes qui font autorité dans le domaine de la sécurité : Laurent Mucchielli, sociologue, spécialiste des questions de délinquance et directeur de recherche au CNRS, et Jean-Jacques Urvoas, député du Finistère et responsable de ce dossier au parti socialiste.

En conclusion l’auteur de l’article cite Laurent Mucchielli : «La politique du chiffre (…) a tout perverti. Elle ne consiste pas à faire baisser la délinquance mais à ne pas déplaire au ministre…».