L’été est dur pour les Roms et les gens du voyage

Le camp de concentration de Tziganes de Montreuil-Bellay (49)

L’été n’est pas une bonne saison pour les gens du voyage et les roms. Il y avait eu le « discours » de Grenoble. Cette année, il y a eu la saillie de Bourdouleix qui regrette qu’Hitler n’en ait pas tué suffisamment. Il y a eu le « guide pratique d’expulsion » d’Estrosi. Et maintenant on a, dans le désordre, la coupure d’eau effectuée par un maire socialiste, et le projet de loi d’Accoyer, qui veut durcir les sanctions.

La coupure d’eau, c’est à Régis Roy-Chevalier, maire PS de Wissoux, dans l’Essonne, qu’on la doit. Elle concerne un camp de Rroms, qui doivent maintenant marcher un kilomètre pour s’approvisionner. « On n’a jamais privé un être humain d’eau. C’est une valeur universelle. La droite, la gauche, personne n’y touche. Le maire veut élargir son assiette électorale en allant vers l’extrême droite et en coupant l’eau, faire en sorte que ces gens s’en aillent », s’insurge Eve Desjardin, d’Europe Ecologie les Verts. Le maire quant à lui n’estime pas prendre une mesure scandaleuse, et renvoie la responsabilité à l’Europe qui ne gère pas le problème.

Bernard Accoyer, recordman de France de distribution de réserve parlementaire, veut faciliter les mesures d’expulsion des gens du voyage, en raccourcissant les délais et en assouplissant les conditions. Au moins veut-il faire cela par la loi. Parce que son petit copain Estrosi ne s’embarrasse pas de la loi : il demande que les maires puissent faire la loi avec leur police municipale, et qu’ils aient le droit de saisir « les belles voitures et les belles caravanes » (ceci revient en boucle chez Estrosi), sans intervention de la justice ! On ne va quand-même pas se laisser enquiquiner par l’Etat de droit !

Noël Mamère, sur son blog, conclut un bel article intitulé « Les Roms ou la nouvelle question juive » par ceci : « Si les élus et les médiateurs de toutes sortes ont un rôle, c’est justement celui de permettre la coexistence de modes de vie, d’habitat et de consommation différents. La communauté nationale ne se différencie pas en fonction de l’origine, du sexe, du milieu social, du type d’habitat, de ses choix de vie… L’égalité suppose la reconnaissance des différences ».

Deux enfants de 2 et 3 ans en rétention au centre de Rennes Saint-Jacques (35)

Programme du vendredi 26 juillet, Rennes.

9h30 : 9 référés logement pour des demandeurs d’asile

10h : Rendez-vous avec le juge des libertés et de la détention pour la famille Mejidov .

14h : recours contre placement en rétention pour Mohamed Y. , demandeur d’asile syrien.

14h30 : recours contre placement en rétention pour Hamest C, mère de famille géorgienne, dont un fils est scolarisé au lycée V.H Bash.

Le cas de la famille Mejidov est particulièrement éloquent. Voici le récit de leur parcours, par le Réseau éducation sans frontière.

La famille Mejidov, un couple tchétchène et ses deux  enfants, Ramyi, 2,5 ans et Riyad 3,5 ans, est arrivée à Nantes en février 2013 pour demander l’asile en France.

Comme de nombreux demandeurs d’asile, cette famille a connu pendant plusieurs semaines l’errance entre la rue et le 115. Un hébergement stable obtenu en avril 2013 dans un hôtel, a permis la scolarisation du fils aîné à l’école maternelle La Fontaine de Saint Sébastien Sur Loire.

Sous le coup d’une réadmission vers la Pologne (les demandeurs d’asile doivent normalement faire leur demande dans le premier pays européens par lequel ils entrent dans l’UE), la famille Mejidov a été convoquée le 2 juillet à la préfecture de Nantes. Un vol leur a été annoncé pour le 11 juillet et une assignation à résidence leur a été notifiée. Craignant un retour forcé en Pologne, la famille ne s’est pas présentée le 11 juillet. La préfecture a alors mis fin à leur hébergement.  

Après avoir fait le recours contre la réadmission, la famille Mejidov a regagné l’hôtel avec l’accord de la préfecture, qui a renouvelé le contrat pour l’hébergement jusqu’au 24 juillet. 

Dimanche 21 juillet à 7h, une vingtaine de policiers ont fait intrusion dans la chambre d’hôtel, alors que la famille dormait encore…Réveil brutal pour le couple et leurs deux jeunes garçons embarqués vers le commissariat de Nantes, puis vers le CRA de Rennes, où ils sont arrivés vers 14h. 

Lundi matin à 4h, nouveau réveil brutal pour cette famille par les policiers du CRA pour les conduire à l’aéroport. Le père a crié pendant 1/4 h son refus de partir. Les policiers ont finalement renoncé, après les menaces habituelles « la prochaine fois, on utilisera la force ».

Le tribunal administratif de Rennes a confirmé le 24 juillet le placement en rétention de la famille Mejidov. Selon la circulaire du 6 juillet 2012, le juge a estimé que l’enfermement de ces 2 jeunes enfants était légal, puisque leurs parents n’avaient pas respecté l’assignation à résidence et avaient fait 2 refus d’embarquement.

Rien ne peut justifier l’enfermement des enfants. Après avoir subi 2 intrusions policières traumatisantes, les 2 jeunes garçons souffrent de cette privation de liberté et présentent des troubles du sommeil et de l’appétit.

RESF 35 demande la libération immédiate de cette famille et que leur demande d’asile soit examinée en France, où plusieurs membres de leur famille vivent depuis plusieurs années après avoir obtenu le statut de réfugié (la sœur de Madame Mejidov a la nationalité française).

Après un bref et approximatif décompte, Riyad et Ramyi ont le triste privilège d’être les 10ème  et 11ème enfants enfermés en rétention depuis la circulaire du 6 juillet 2012. Notre décompte est sans doute très sous-estimé. Mais le cabinet du ministre, lui, tient des comptes rigoureux : qu’il publie le nombre, le nom et l’âge des enfants qu’il a emprisonnés depuis qu’il s’est engagé à ne plus enfermer d’enfants.

Pour mémoire : communiqué du Parti socialiste du 23 septembre 2009

Le Parti socialiste, lors de la réunion de son Secrétariat national du 23 septembre, a décidé de signer l’appel lancé par le Réseau Education Sans Frontières « Pour le respect par l’Etat des droits de l’enfant et de sa famille. » Qu’il s’agisse de démembrement des familles lorsqu’un des deux parents est expulsé, ou de la mise en rétention des enfants avec leurs parents menacés d’expulsion en centre de rétention administrative, les droits des enfants sont mis à mal par la politique actuelle du gouvernement. Pour le Parti socialiste, l’intérêt supérieur de l’enfant doit rester au premier plan. Le maintien de l’unité familiale doit devenir la règle, mais ne doit plus servir de prétexte à l’enfermement d’enfants.

Communiqué qu’on peut retrouver sur le site du parti socialiste à cette adresse :

http://www.parti-socialiste.fr/communiques/le-parti-socialiste-signe-lappel-resf-pour-le-respect-par-letat-des-droits-de-lenfant-et

A noter que la situation est tout aussi grave à Saint-Brieuc, dans les Côtes d’Armor…

Bourdouleix : dernier avatar d’un climat délétère

Copie d'écran de la page Facebook du forum police-info

Me Patrick Baudouin, avocat de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme souhaite que le député maire de Cholet, qui a tenu des propos que le préfet du Maine-et-Loire a qualifiés « d’apologie de crime contre l’humanité », fasse l’objet d’une sanction exemplaire (vidéo à voir ici). Il estime que l’élu sera vraisemblablement condamné à une amende, mais il préférerait, compte-tenu de « l’énormité » des propos, qu’une peine de prison, au moins avec sursis, soit prononcée.

Outre l’énormité des propos, l’avocat évoque la banalisation de ces propos. Et il rappelle ceux qu’a tenus le maire de Nice, M. Estrosi, il y a quelques jours. Cette banalisation prend cet été des proportions inquiétantes. Elle ne se limite pas au monde politique. Deux exemples.

La page Facebook du forum police-info.com, utilisée à la fois par des fonctionnaires de la police nationale et des polices municipales, vient de retirer une page, sur Facebook, où certains de ses membres tenaient des propos ouvertement racistes, accompagnés de menaces de violence. Il a quand même fallu que cette page soit découverte par des internautes pour qu’elle soit effacée. Une enquête a été ouverte pour vérifier si ces propos étaient tenus par des policiers, et si c’est le cas, des sanctions seront évident sanctionnés. Les recherches faites par le site « Copwatch », qui surveille les activités policières et dénonce les abus et les bavures, semblent accréditer cette thèse : le site aurait identifié certains policiers. Ce site publie également des copies d’écran des propos qui ont disparu de la page facebook (article du Monde à lire ici).

Deuxième exemple : la presse. Elle de façon quasi unanime condamné les propos du député maire de Cholet. Mais le journal Le Point a tout de même cru bon de publier, sur son site, un sondage incroyable, dont voici la copie d’écran.

Le site du journal a finalement retiré ce sondage de son site, et s’est livré à quelques explications.

Décidément, l’été aura été chaud, y compris pour la démocratie… et le titre de l’édition 2013, parue en mai dernier, du rapport de la Ligue des droits de l’Homme sur l’état des droits en France exprime parfaitement la situation : « la République en souffrance ».

Gens du voyage : les lignes vont-elles enfin bouger ?

Hubert Derache, préfet, a présenté son rapport sur les gens du voyage.

Les lignes seraient-elles en train de bouger concernant les « gens du voyage » ?

Quelques indices très positifs peuvent le laisser espérer.

Il y a eu tout d’abord la publication du projet de loi de Dominique Raimbourg, député de Loire-Atlantique, qui, parmi d’autres mesures, aggrave les sanctions financières contre les communes qui ne respectent pas l’obligation d’avoir une aire d’accueil lorsqu’elles ont plus de 5000 habitants, et contre les départements qui ne prévoient pas d’aires de « grands passages », qui ont généralement lieu l’été.

Il y a eu ensuite le rapport de l’ancien préfet de Mayotte, Hubert Derache, intitulé « Appui à la définition d’une stratégie interministérielle renouvelée concernant la situation des gens du voyage », et téléchargeable ici. Dans son introduction, il regrette que les gens du voyage « ont longtemps été considérés comme des Français entièrement à part, et non comme des Français à part entière, en raison de leur style de vie fondée sur la tradition culturelle du voyage ». Ce rapport étudie précisément la situation de cette population, les difficultés qu’elle rencontre, et les discriminations dont elle est victime. Et il fait des propositions précises.

Il y a eu enfin, mercredi 17 juillet, le colloque des députés socialistes sur le thèmes des gens du voyage, au cours duquel Dominique Raimbourg a présenté son travail, et, surtout, au cours duquel le ministre de l’intérieur a déclaré être favorable à l’aggravation des sanctions financières évoquée plus haut. Ça ne semblait pas aussi évident que cela dans les récentes déclarations du ministre.

Enfin, bonne nouvelle : le maire de Nice, Estrosi, qui s’est fait remarquer par ses déclarations aussi stupides que nauséabondes et mensongères, et Le Pen, qui apporte un démenti violent à la prétende évolution positive de son parti en qualifiant la présence de Roms à Marseille d’  « urticante » et « odorante », sont poursuivis par le Forum européen des Roms et des gens du voyage, une ONG soutenue par le Conseil de l’Europe, qui a porté plainte contre ces deux personnages. « De tels propos xénophobes et discriminatoires vont clairement à l’encontre des valeurs républicaines de la France ainsi que des principes directeurs de l’action contre le racisme engagée par la garde des Sceaux », affirme son président, Rudko Kawczynski,

Un député veut sanctionner le refus des villes d’accueillir les gens du voyage

Dominique Raimbourg

Le député socialiste de Loire-Atlantique, Dominique Raimbourg (qui est par ailleurs le fils de Bourvil), rapporteur d’un projet de loi sur les gens du voyage, souhaite traiter avec davantage de sévérité les communes qui refusent d’appliquer les obligations légales sur l’implantation d’aires d’accueil.

La loi actuelle fait obligation aux communes de plus de 5000 habitants d’aménager des aires d’accueil.  Dominique Raimbourg propose tout simplement de mettre en place un dispositif équivalent à celui qui existe pour le logement social (amendes si le quota n’est pas respecté) : « Ce que je propose, c’est qu’il y ait un mécanisme coercitif, un peu sur le modèle de la loi sur la construction des HLM, qui vise à ce qu’on puisse prendre  l’argent à la commune qui refuse absolument », a-t-il déclaré sur Europe 1. Même proposition concernant les aires de grands passages (généralement des regroupements religieux), en visant cette fois les départements : elles « doivent être prévues dans le schéma départemental », rappelle le député.

L’application stricte de la loi entraînera évidemment une « réciprocité » : dans tous les cas où une aire existe, les campements sauvages ne seront pas tolérés : en cas d’occupation illicite d’un terrain, dès lors que la commune a rempli ses obligations et qu’il existe une aire de stationnement régulier dans un périmètre de 20 km à la ronde, M. Raimbourg propose « qu’on étende cette procédure d’évacuation plus rapide pour des gens qui n’ont pas respecté la loi ». « En cas d’occupation illicite d’un terrain, dès lors que la commune a rempli ses obligations et qu’il existe une aire de stationnement régulier dans un périmètre de 20 km à la ronde, M. Raimbourg propose « qu’on étende cette procédure d’évacuation plus rapide pour des gens qui n’ont pas respecté la loi » », rapporte le journal Le Monde.

Reste à savoir comment cette proposition sera accueillie. Par le ministre de l’intérieur d’abord, qui ne semble pas porter aux gens du voyage une affection excessive, lui qui a récemment soutenu ce maire de Loire-Atlantique qui avait menacé de démissionner après l’occupation dans sa commune d’un terrain de sports. Par les parlementaires ensuite : on imagine mal des gens comme Estrosi changer d’attitude sur ce sujet. La gauche étant majoritaire au parlement, on peut quand-même espérer qu’une majorité pourra se dégager facilement…

Saint-Brieuc (22) : alerte, mineurs en danger !

Photo Unicef.

Le Réseau éducation sans frontière, l’Union syndicale Solidaires 22 – Sud Education 22 se sont  associés pour mettre en ligne la pétition sur la situation inquiétante des mineurs étrangers isolés à Saint-Brieuc. Elle peut être signée à cette adresse :

http://www.mesopinions.com/petition/politique/saint-brieuc-22-alerte-mineurs-danger/10419

En voici, ci-dessous, le texte. Elle sera remise au président du conseil général, Claudy Lebreton.

 

RESF 22

LDH Section de Saint-Brieuc

Union Syndicale Solidaires 22 – Sud-Education 22

 

 

ALERTE : MINEURS EN DANGER

 

Depuis quelques mois, nous constatons un acharnement sur les mineurs étrangers relevant du Conseil Général des Côtes d’Armor.

 

Monsieur le Président, par la loi du 5 mars 2007, vous devez

–          « prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille »

–          et « assurer leur prise en charge ». Et ce, quelle que soit leur nationalité. L’accueil des mineurs isolés étrangers rentre dans ce cadre.

 

En tant que Président de l’Assemblée des Départements de France vous n’êtes pas sans savoir qu’un groupe de travail de votre assemblée, piloté par Jean-Louis Tourenne, président (PS) du conseil général d’Ille-et-Vilaine a fait des propositions au ministère de la justice afin de mieux encadrer l’aspect financier de cette mission obligatoire du Conseil général. Ce rapport de l’ADF met un point d’honneur à ce que les mineurs français et étrangers soient traités de la même façon et en fonction de leurs besoins.

 

Nous ne comprenons pas la différence entre les positions tenues à Paris et les actions mises en œuvre dans notre département.

 

Le 1er août, 28 mineurs risquent de se retrouver à la rue.

 

Le Conseil Général les a déclaré majeurs, mais, dans la plupart des cas, sans que le procureur ni le Juge des enfants aient été saisis.

Nous considérons donc qu’en l’absence de décision du Juge la levée des tutelles par le Conseil Général est un acte irrégulier.

A plusieurs reprises, le Conseil général a demandé des tests osseux. Non contents d’être fortement critiqués par le Comité consultatif national d’éthique, ceux-ci ne sont pas totalement fiables et devraient être utilisés en dernier recours. A notre sens, ils ne peuvent, à eux seuls, tenir lieu de preuve pour définir l’âge des jeunes.

 

Les mineurs étrangers isolés sont triplements vulnérables. Parce que mineurs, ils sont de potentielles victimes. Parce que mineurs isolés, ils ne peuvent bénéficier de la protection de leurs parents. Parce qu’étrangers, ils sont traités comme potentiels majeurs étrangers en situation irrégulière, et alors la tentation de les rejeter des dispositifs de protection de l’enfance est grande.

 

C’est pourquoi nous vous demandons instamment, Monsieur Claudy Lebreton, président du Conseil Général des Côtes d’Armor :

 

–          De ne plus faire pratiquer les tests osseux,

–          Un moratoire sur les expulsions (arrêts de prise en charge) du 1er août, à venir et un retour sur celles déjà arrêtées.

–          De permettre aux jeunes qui le souhaitent de demander l’asile

–          Un hébergement digne pour ces jeunes mineurs et majeurs

–          La possibilité de poursuivre leurs études alors qu’ils ont tous un projet et/ou une orientation

 

 

 

 

Gens du voyage : les maires ont vocation à respecter la loi !

Après les insanités d’Estrosi sur les gens du voyage le maire de Guérande démissionne à cause de l’installation de nombreuses caravanes dans sa commune. Ne voulant sans doute pas être en reste, le maire socialiste de Quimper, Bernard Poignant, s’y met aussi (il s’était déjà fait remarquer par son opposition au mariage ouvert aux personnes de même sexe).

Y aurait-il un problème avec ceux qu’on appelle « les gens du voyage » ?

Il y a un problème. Mais ce n’est pas avec eux qu’il y a problème. Eux, ils demandent l’application de la loi. Et la loi prévoit des aires d’accueil adaptées et équipées. Elle prévoit également des aires destinées aux « grands passages » (regroupements importants généralement liés à des événements religieux).

Dans une interview qu’il a accordée au Nouvel Observateur, Laurent El Ghozi, président de la Fédération nationale des associations d’actions solidaires avec les Tziganes et les gens du voyage (FNASAT) rappelle de façon claire et précise quelles sont les obligations des maires en la matière. Et, prenant l’exemple d’Estrosi, montre que ce donneur de leçons ( !) est hors la loi. Rappelant ce que préconise ce qu’Estrosi appelle la « circulaire Valls », parue l’été 2012, et qui est en fait (et ce détail a une grande importance) une circulaire interministérielle, Laurent El Ghozi indique : « Ceux contre lesquels Christian Estrosi part en guerre sont des citoyens français vivant en caravane et voyageant, comme la Constitution et la loi leur donne parfaitement le droit. Ils ont la liberté d’aller et venir, de circuler, de s’arrêter, et les collectivités et les pouvoirs publics (préfet, conseil général, conseil régional et commune) ont l’obligation de leur assurer des conditions de stationnement. »  Et si ces conditions ne sont pas remplies, dans une commune ou un département, la faute en incombe à la collectivité locale et aux services de l’Etat. »

Rappelant que le MRAP a porté plainte contre Estrosi pour  ses propos, et que la Fnasat envisage de saisir le défenseur des droits, Laurent El Ghozi estime qu’on peut lui reprocher de ne pas avoir aménagé une aire de grand passage : « On peut lui reprocher collectivement, en tant que maire de la plus grande ville du département, parlementaire de surcroît, qui ne peut ignorer la loi. S’il n’est pas seul responsable de l’absence d’aire de « grand passage », il est seul responsable, en revanche, de ses propos. En l’occurrence, la situation à Nice a finalement été réglée en 24 heures. C’est bien la preuve que c’est possible. Il faut simplement de la bonne volonté de la part des collectivités territoriales et des services de l’Etat. Mais s’il n’est pas seul responsable de l’absence d’aire de « grand passage », il est seul responsable, en revanche, de ses propos. »

 

 

Rroms : de plus en plus d’évacuations forcées

Trois ans après le triste « discours de Grenoble » qui marquait une déclaration de guerre du président de la République de l’époque à toute une partie de la population, les Rroms et les gens du voyage, il y a eu changement de majorité. Mais pas de changement politique sur ce sujet. Pour preuve, les statistiques d’évacuations forcées des Rroms au cours du 2ème trimestre 2013 : 5482 personnes évacuées, deux fois plus qu’au premier trimestre. Des résultats à faire pâlir de jalousie les Hortefeux, Besson et Guéant. Et à faire rugir de plaisir M. Estrosi, qui s’est fait remarquer ce week-end par des déclarations qui donnent la nausée

La parution de ces statistiques a été l’occasion pour l’ERRC (European Roma Rights center) et la Ligue des droits de l’Homme de publier un communiqué commun dans lequel les deux associations les commentent. On peut télécharger le dossier statistique complet ici. Lire également l’article paru dans le journal l’Humanité.

Les Roms étrangers évacués de force durant le deuxième trimestre de l’année 2013 ont été plus nombreux que durant le premier trimestre. Ces nouvelles données délivrées par la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et le European Roma Rights Centre (ERRC) viennent d’être publiées dans le recensement des évacuations forcées du deuxième trimestre 2013.

Un total de 5 482 personnes ont été évacuées de force par les autorités durant le deuxième trimestre, comparé à 2 883 durant le premier trimestre de 2013.

La plus forte augmentation du nombre d’évacuations forcées a été observée en Ile-de-France. Dans les autres régions (incluant Paca, Rhône-Alpes et le Nord), les évacuations forcées ont perduré à un rythme stable.

Trois personnes, dont un enfant, sont décédées dans un incendie d’un squat à Lyon, le 13 mai. Ce serait une bougie d’éclairage qui aurait causé l’incendie après que l’électricité a été coupée quelques jours auparavant. En tout, le nombre de personnes forcées d’évacuer leurs lieux de vie à cause d’un incendie, d’une inondation ou d’une agression, a diminué (530 contre 1 007).

Durant le deuxième trimestre 2013, les évacuations forcées ont continué à un rythme élevé et, dans la plupart des cas, sans solution alternative crédible de relogement ni d’accompagnement social. Dans la pratique, la mise en application de la circulaire interministérielle du 26 août 20121 « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites » reste rare, hétérogène ou est généralement très rapide et superficielle. Elle s’apparente souvent plutôt à un recensement des populations qu’à un réel et durable travail social d’insertion. Malgré le fait qu’aucune expulsion du territoire ne soit rapportée durant le deuxième trimestre, le recensement montre qu’il y a eu 8 distributions massives d’obligations de quitter le territoire français (OQTF), attribuées à 424 personnes.

Les autorités françaises continuent dans la réalité à violer impunément les lois européennes et plusieurs traités internationaux, notamment la Charte sociale européenne révisée. Ceci se perpétue tout en développant un discours gouvernemental ambigu, se traduisant dans les faits par la même violence qu’antérieurement. Les traumatismes faisant suite aux évacuations forcées continuent de provoquer une précarité de plus en plus grande : rupture d’accompagnement social, déscolarisation des enfants, rupture de soins, instabilité, pertes de biens personnels… sans évoquer les traumatismes psychologiques.

Ce n’est pas en souhaitant leur retour dans leur pays d’origine que l’on va réussir à insérer, en France, ces populations vivant dans les bidonvilles. Ce n’est pas une solution à long terme durable pour la France.

Nous demandons l’arrêt immédiat de cette politique de rejet : les évacuations forcées ne peuvent se perpétuer au mépris des traités internationaux et européens. Au-delà de l’application concrète de la circulaire du 26 août, nous demandons par ailleurs qu’une véritable politique d’insertion pour ces personnes en grande précarité soit mise en place. Cette politique devra dépasser celle qui « anticipe et accompagne » leurs expulsions ou leurs évacuations forcées.

 

Estrosi se lâche sur les gens du voyage et l’Islam

Photo Europe 1

On croit rêver. Mais alors ça serait un cauchemar.

M. Estrosi s’est surpassé pendant l’émission « Le grand rendez-vous », sur Europe 1, à laquelle il était invité. Il s’y est naturellement exprimé sur la décision du Conseil constitutionnel qui a rejeté les comptes de campagnes de M. Sarkozy. Mais il s’est aussi exprimé sur les gens du voyage.

Et là, le maire de Nice a pratiquement appelé les maires de France à engager une chasse aux gens du voyage et aux Rroms : « j’appelle les maires de France à la révolte quelque part et à utiliser le mode d’emploi qui est le mien », a-t-il déclaré, avant d’expliquer en quoi consiste son « mode d’emploi ».

Il est simple. Il repose sur cette première affirmation du maire de Nice : « j’en ai maté d’autres, je  vous materai ». Phrase qu’il indique avoir prononcé à l’adresse de gens du voyage qui s’étaient installés sur un terrain de football de Nice. Notons déjà que s’ils se sont installés là, c’est  faute d’autre lieu d’accueil, or, la loi fait obligation aux communes d’une certaine importance de prévoir des aires d’accueil.

Mais passons. Le mode d’emploi :

  • Installation de caméras « partout, pour surveiller vos faits et gestes dans les heures qui viennent. On va noter ceux qui rentrent, ceux qui sortent, à quelle minute, à quel moment et ce que vous allez faire partout, dans la ville, dans la métropole, etc ».
  • Relevé des immatriculations
  • Référé devant le tribunal à titre conservatoire, pour pouvoir saisir les véhicules, « vous savez ces belles et grosses voitures avec lesquelles ils tirent leurs belles et grosses caravanes pour lesquelles les Français, il (leur) faudrait quelquefois toute une vie pour se payer la même (…) »
  • Faire payer aux gens du voyage les dégâts que le maire les accuse d’avoir provoqués : « non seulement vous allez partir, mais avant, vous allez payer. Si vous ne payez pas, OK, saisie des véhicules (…) pour pouvoir rembourser ce que les contribuables de Nice n’ont pas à payer. »

C’est assez savoureux que M. Estrosi parle de « rembourser ce que les contribuables n’ont pas à payer ». La décision du Conseil constitutionnel de refuser les comptes de campagne de l’ancien président de la République a pour conséquence que l’Etat ne remboursera pas l’UMP de ses frais de campagne. L’UMP lance donc une souscription. Mais ce que l’UMP ne dit pas, c’est que les souscripteurs qui verseront leur aumône par chèque auront la possibilité de déclarer cette somme au fisc, ce qui leur permettra d’obtenir une réduction (réduction, pas déduction !) d’impôt égale à 66% de la somme versée. M. Estrosi affirme que l’UMP a déjà collecté 2 millions d’Euros. Les contribuables vont dont payer 1,320 million d’euros pour rembourser les généreux donateurs. Pour rembourser une amende, en fait. Ceci n’empêche pas M. Estrosi de considérer qu’il s’agit d’un « impôt sur l’opposition »…

Et M. Estrosi ne s’est pas arrêté là. Après les gens du voyage et les Rroms, il s’en est pris à l’Islam, « incompatible avec la démocratie »

N’en jetez plus, la coupe est pleine.

 

L’Etat poursuivi par treize victimes de contrôle au faciès

Pour la première fois, l’Etat est poursuivi par des personnes qui estiment avoir été contrôlées abusivement par la police sur la voie publique, en d’autres mots, avoir été victimes de « contrôles au faciès ». Treize personnes au total étaient à la barre, pour dénoncer cette pratique humiliante, qui ressemble parfois à du harcèlement.

Il faut savoir que, d’après une étude menée en 2009 par l’Open society justice initiative avec le centre national de la recherche scientifique, « un Noir a de 3 à 11 fois plus de risques d’être contrôlé qu’un Blanc, et un Maghrébin 2 à 15 fois plus ». Les plaignants ? des étudiants, des salariés, des Noirs, des Arabes, âgés de 18 à 35 ans. Autre caractéristique, qui ajoute de la forces à leur témoignages : ce ne sont pas des militants. Ils ont simplement signalé leur histoire au Collectif contre le contrôle au faciès, qui travaille en relation étroite avec la Ligue des droits de l’Homme, et qui a publié de nombreuses vidéos édifiantes de témoignages de victimes de ces contrôles.

Le ministre de l’Intérieur, ça n’est pas une surprise, est évidemment opposé à la délivrance d’un récépissé à chaque contrôle, ce qui, pour les plaignants et le collectif serait une solution efficace pour lutter contre cette pratique abusive. Ce récépissé est déjà utilisé dans certains pays, à la satisfaction des victimes comme des forces de l’ordre : il permet d’améliorer sensiblement les relations entre les forces de l’ordre et le public.

Le jugement a été mis en délibéré pour le mois de septembre.

Lire aussi :

http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/07/03/l-etat-attaque-en-justice-pour-la-premiere-fois-pour-des-controles-au-facies_3441054_3224.html

http://www.marianne.net/Controle-au-facies-l-Etat-sur-le-banc-des-accuses_a230018.html

Enfin, voici un témoignage publié sur son site par le collectif « Stop le contrôle au faciès ».

Chaque année, nous sommes des dizaines de milliers à subir l’humiliation et la violence des contrôles d’identité abusifs. Perte de temps dans le meilleur des cas, ces contrôles mènent bien trop souvent à des accusations d’outrage et rébellion, à des coups ou à la mort. Derrière ces injustices, un déclencheur : le contrôle au faciès, moyen d’intimidation, pratique discriminatoire qui se fonde uniquement sur l’apparence physique des individus. Ces abus constituent une violation de nos droits les plus fondamentaux et du pacte républicain.
Aujourd’hui, pour la première fois, le Ministère de l’Intérieur doit répondre de ces pratiques devant les tribunaux, dans le cadre des premières actions en justice contre l’État pour contrôles au faciès. A cette audience historique, nous y serons… pour écouter le gouvernement tenter de nous expliquer pourquoi.
Pourquoi un jeune noir a six fois plus de chances d’être contrôlé qu’un jeune blanc ?
Ma dignité vaut-elle moins que celle d’un autre ?
Pourquoi mon sexe me protège-t-il des contrôles d’identité ?
Pourquoi François Hollande qui est censé être le Président de tous les français tolère-t-il que les valeurs républicaines soient bafouées alors qu’il déclarait pendant la campagne présidentielle que la voie qu’il nous proposait était celle de l’espérance en la promesse républicaine ?
Pourquoi ma couleur de peau est-elle moins suspecte qu’une autre ?
Pourquoi tant de morts lors des contrôles d’identité ?
Nos vies valent-elles moins que celle des autres ?
Pourquoi suis-je moins suspecte qu’un autre ?