Nouvelle circulaire Valls sur l’immigration : toujours plus, pour expulser plus

Le ministre de l’intérieur a publié le 11 mars 2024  une nouvelle circulaire dans laquelle il définit ses priorités pour l’année 2014 dans la « lutte contre l’immigration irrégulière ». Il s’agit en fait d’un plan destiné à accélérer les reconduites à la frontière, et à augmenter encore le nombre des « éloignements forcés ».

La Ligue des droits de l’Homme, et 23 associations de défense des demandeurs d’asile et des droits des étrangers dénoncent cette circulaire, et exigent son retrait, dans un communiqué commun qui vient d’être publié.

Les associations exigent le retrait du texte

La circulaire du ministère de l’Intérieur, datée du 11 mars 2014, relative aux priorités pour l’année 2014 dans la « lutte contre l’immigration irrégulière », met à jour le double discours de Manuel Valls qui, devant la presse, se targue de rompre avec la « politique du chiffre » pour mieux se féliciter, dans ce texte, de ce que « le niveau total des éloignements forcés atteint son plus haut niveau depuis 2006 », et élaborer un plan destiné, à tous les échelons, à accélérer les reconduites.

En effet, ce texte encourage les préfets à user de tous les moyens de coercition, avec le concours de la police : contrôles d’identité ciblés, interpellations des personnes à leur domicile ou dans les foyers où elles sont hébergées, enfermements en rétention, assignations à résidence avec obligation de pointage, retours « volontaires » fortement incités, placements en garde à vue, condamnations pénales des récalcitrants. Les associations et les travailleurs sociaux sont poussés à participer à la localisation et au contrôle des personnes, alors que leur rôle est de les accompagner et de leur porter assistance.

Avant tout perçus comme des fraudeurs ou des indésirables, tous les étrangers sont visés, y compris les plus vulnérables, qui peuvent être éloignés rapidement en dépit de leur situation de santé ou humanitaire.

Les demandeurs d’asile sont particulièrement ciblés. Aussitôt leur demande rejetée, les préfets devront les expulser au plus vite, au détriment de leurs droits à un recours effectif, et sans considération pour leur situation personnelle et leurs attaches en France. Ils sont alors exclus du dispositif d’hébergement d’urgence de droit commun, pour être assignés à résidence et étroitement surveillés. Le principe fort de l’accueil inconditionnel de toute personne à la rue en situation de détresse est ainsi remis en cause, alors qu’il est garanti par le Code de l’action sociale et des familles.

Au prétexte d’efficacité, le ministère compromet leur sécurité et celle de leurs proches, en imposant à l’Ofpra de communiquer des documents afin d’obtenir des laissez-passer pour l’expulsion. Ce rôle assigné à l’Ofpra va à l’encontre de la confidentialité des demandes d’asile et démontre l’incompatibilité de sa mission avec la tutelle exercée par le ministère de l’Intérieur.

Cette circulaire encourage les expulsions vers le pays d’origine plutôt que vers un autre Etat Schengen, où plus de dix mille personnes étaient pourtant légalement admissibles en 2013. Cette politique vise donc à gonfler ces expulsions hors UE, en violation des droits des personnes concernées dont les attaches se trouvent en Europe (famille, travail, logement, droit au séjour).

Les associations et syndicats défendant les droits des étrangers dénoncent cette circulaire attentatoire aux droits les plus fondamentaux des migrants, et les pratiques scandaleuses auxquelles elle incite les préfectures. Ce signal est extrêmement inquiétant, à quelques semaines de la discussion sur le projet de loi portant sur la réforme de l’asile en France.

Liste des signataires :

  1. Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat),
  2. Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE),
  3. Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et transsexuelles à l’immigration et au séjour (Ardhis),
  4. Comité d’aide aux réfugiés (Caar),
  5. Centre d’action social protestant (CASP),
  6. Comité pour la santé des exilés (Comede),
  7. Centre Primo Lévi,
  8. Dom’Asile,
  9. Espace-accueil aux étrangers,
  10. Fédération des associations de solidarité avec les travailleur-euse-s immigré-e-s (Fasti),
  11. Fédération de l’entraide protestante (Fep),
  12. Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars),
  13. Groupe accueil et solidarité (Gas),
  14. Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti),
  15. Jesuit refugee service (JRS France),
  16. Cimade,
  17. Ligue des droits de l’Homme (LDH),
  18. Médecins du monde (MDM),
  19. Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap),
  20. Observatoire citoyen du Cra de Palaiseau,
  21. Réseau chrétien immigrés (RCI),
  22. Réseau éducation sans frontières (RESF),
  23. Syndicat des avocats de France (Saf),
  24. Syndicat de la magistrature (SM).

 

 

Contrôle au faciès abusifs pour expulser les étrangers à Montreuil-sous-Bois

Photo Meigneux/Sipa, Métronews, http://www.metronews.fr/info/montreuil-seine-saint-denis-des-controles-abusifs-de-sans-papiers-devant-le-tribunal/mncf!oM7ghH0o69fBU/

L’aire Sarkozy nous avait habitués à des arrestations déloyales de personnes sans-papier à la sortie des restos du cœur, du secours populaire… Valls innove, en allant directement à la source : la police contrôle les personnes autour du tribunal administratif de Montreuil-sous-Bois. Mais pas toutes : uniquement celles qui sont de type africain ou maghrébin. Et qui sont la plupart du temps à cet endroit parce qu’ils ont répondu à une convocation à l’audience qui doit statuer sur leur sort. La police n’attend pas la décision du tribunal : si une obligation de quitter le territoire français est en cours, direction le centre de rétention, y compris si le tribunal doit juger un recours contre cette OQTF. C’est la raison pour laquelle la Ligue des droits de l’Homme a écrit aux deux ministres concernés, la garde des sceaux et le ministre de l’intérieur, pour dénoncer ces pratiques. Cette lettre est cossignée par plusieurs associations : SAF, Syndicat de la magistrature, Avocats pour la Défense des Droits des Etrangers, GISTI, et MRAP.

 Paris, le 4 mars 2014

Madame Christiane TAUBIRA

Garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur Manuel VALLS

Ministre de l’intérieur

Madame la ministre,

Monsieur le ministre,

Depuis plusieurs semaines, des contrôles d’identité, fondés sur des réquisitions du procureur de la République selon les fonctionnaires de police, sont opérés aux abords du tribunal administratif de Montreuil-sous-Bois, à la sortie de la station de métro Robespierre. Ces contrôles ont généralement lieu en matinée, aux heures mêmes où se tiennent les audiences du tribunal administratif. Plusieurs témoins ont en outre constaté que seules les personnes de type africain ou maghrébin étaient la cible de ces contrôles.

Ces faits révèlent de graves dysfonctionnements au regard tant des conditions dans lesquelles les réquisitions du procureur de la République sont délivrées que des conditions dans lesquelles elles sont exécutées.

Sur le premier point, le procureur de la République n’ignore évidemment pas que de nombreuses audiences du tribunal administratif de Montreuil sont dédiées au contentieux des obligations de quitter le territoire français (OQTF). Il va de soi que les audiences sont publiques et il est évidemment fortement conseillé aux requérants d’y être présents si bien que de nombreuses personnes, alors en situation irrégulière, s’y présentent quotidiennement, en empruntant notamment le métro. Or, si elles ont fait l’objet d’une OQTF notifiée depuis plus d’un mois, ces personnes peuvent être retenues pour vérification de situation et faire l’objet d’un placement en rétention alors même qu’elles ont formé un recours sur lequel le tribunal doit précisément statuer. Les contrôles aux abords du tribunal les menacent ainsi directement et ne peuvent que les dissuader de se présenter aux audiences où il est pourtant de leur intérêt légitime d’être entendues. Cette pratique constitue une entrave grave et intolérable à l’accès au juge.

En incluant le tribunal administratif et ses abords immédiats dans le champ de ses réquisitions, le procureur de la République fait donc preuve, à tout le moins, d’un manque de discernement particulièrement fâcheux s’agissant d’une autorité chargée de veiller au respect tant des libertés fondamentales que de la loi pénale.

D’autre part, le comportement des fonctionnaires qui exécutent ces réquisitions est également inacceptable et ce à un double titre :

  • d’abord au regard des principes qui gouvernent les contrôles d’identité, lesquels ne sauraient être sélectifs et ciblés sur la base de l’origine réelle ou supposée des personnes (C. const. 13 août 1993, n° 93-325, C. cass. Civ 1re, 38 mars 2012, n° 11-11099) ; alors que le périmètre défini par les réquisitions leur permettrait de les exécuter en tout autre lieu que les abords du tribunal, le choix de cibler ce lieu révèle la volonté de viser spécifiquement les étrangers en situation irrégulière, comme de nombreux témoins l’ont constaté ;
  • ensuite parce que les interpellations auxquelles les services de police cherchent à procéder par le moyen de ces contrôles d’identité ne sont rendues possibles que par un véritable détournement de l’objet de ces réquisitions : alors même, en effet, qu’elles ne sont délivrées qu’aux fins de recherche et de poursuite d’infractions qu’elles précisent, l’interpellation des étrangers dépourvus d’autorisations de séjour ne tend, en pratique, qu’à permettre la mise en œuvre de procédures administratives d’éloignement.

Il est au demeurant pour le moins surprenant que le Procureur de la République ne soit pas, là encore, plus attentif à l’usage qui est fait de ses réquisitions aux fins de recherche d’infractions pénales. Le laxisme dont il fait preuve à cet égard entretient évidemment le soupçon qu’il n’est pas dupe tant du ciblage que des détournements ainsi opérés, à moins qu’il ne les encourage volontairement.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous vous demandons instamment qu’il soit immédiatement mis fin à de telles pratiques.

Nous souhaitons avoir une réponse rapide à ce courrier que, compte tenu de l’importance des enjeux, nous entendons rendre public et, dans cette attente, nous vous prions de croire, Madame la ministre, Monsieur le ministre, à l’assurance de notre parfaite considération.

Tentative ratée d’expulsion d’une deuxième famille par avion privé

Le ministre de l’intérieur semble prendre goût à la location d’avions privés pour expulsé les familles étrangères. Il craint peut-être les réactions des passagers des avions de ligne ?

Ça a commencé dans les Côtes d’Armor avec la famille Lungolo, le 22 janvier. Les policiers belges, à l’arrivée de la famille à Bruxelles, étaient stupéfaits : « vous êtes des criminels ? » ont-ils demandé à Cérif Lungolo, le père.

Ça a continué en Île et Vilaine, le 18 février. Mais là, ça pris une autre dimension. Dans l’ignoble d’abord, si tant est qu’on puisse établir une échelle : une famille de cinq enfants, dont un bébé de 10 mois, né en France… Dans le burlesque ensuite : la famille, qui a résisté à son embarquement, et pour qui les associations se sont mobilisées instantanément, a été libérée à Paris, alors que l’objectif était de les envoyer en Russie, sans doute aux jeux olympiques…

La section Loudéac de la Ligue des droits de l’Homme s’est associée à celle de Rennes, pour cosigner un texte rédigé par le MRAP 35, RESF 35, Ensemble, CADTM, et le PCF et publié ci-dessous.

Plus jamais ça ! Plus jamais d’enfants expulsés !

APPEL  À MANIFESTER

SAMEDI 1ER MARS à 15h 

Place de la Mairie à RENNES

Le 18 février, sur ordre de la Préfecture de Rennes, on a connu l’inacceptable : la gendarmerie est allée chercher au petit matin une famille de 5 enfants dont un bébé de 10 mois. Une première en Ille et Vilaine !

Destination pour cette famille déboutée du Droit d’asile, dont le dernier recours n’était pas encore jugé ? l’aéroport de St Jacques de la Lande et un avion affrété spécialement pour les conduire à Roissy où ils devaient embarquer dans un autre avion. Destination finale pour cette famille ingouche ? Moscou où nul ne savait ce qui les attendait. Mais, Jeux olympiques aidant, on veut sans doute croire que la République de Tchétchénie-Ingouchie est un havre de paix et que la Russie de Poutine est la patrie des Droits de l’Homme.

Et si l’on parlait un peu des Droits de l’enfant en France ?

Ces enfants qui vivent en France, depuis plus de 6 ans… qui vont à l’école ou au collège… Le dernier est né en France…

Que dit la Convention des Droits de l’Enfant que la France a ratifiée ?

  • Article 2-1. Les Etats parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant.
  • Article 3-1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.

On y trouve aussi le droit inaliénable à l’éducation pour tous les enfants. Et on en affiche une version simplifiée dans toutes les écoles.

Peut-on dire que la Préfecture d‘Ille et Vilaine a respecté l’article 3, comme la France s’y est engagée ? Et le traumatisme de cet arrachement, l’interruption de leur scolarité, est-ce l’intérêt supérieur de ces enfants ?

On avait déjà connu en France dans les années 2000 de tels actes. La condamnation des associations et des citoyens avait obligé le pouvoir d’alors à y renoncer.

On se souvient que de telles pratiques avaient été condamnées par des élu-e-s. Des engagements avaient été pris qu’elles ne se reproduiraient plus, par ceux-là même qui les ordonnent ou les cautionnent aujourd’hui.

La mobilisation des associations a permis cette fois-ci encore que ce mauvais coup n’aboutisse pas. Cette famille est libre, mais pour combien de temps ?

Et combien d’autres sont promises au même sort ? Déjà, le 22 janvier, une famille congolaise avec deux enfants de 10 et 11 ans, assignée à résidence à Dinan (22), avait été expulsée par avion privé au départ de l’aéroport de Rennes Saint-Jacques vers la Belgique.

Les organisations signataires, associations, syndicats, partis, vous appellent à venir dire haut et fort

PLUS JAMAIS D’ENFANTS RAFLÉS AU PETIT MATIN ET EXPULSÉS !

HONTE À CEUX QUI ORDONNENT DE TELS ACTES !

Organisations signataires de l’appel : MRAP Ille et Vilaine, RESF 35, Ensemble, CADTM, PCF, Ligue des droits de l’Homme, sections de Rennes et Loudéac centre Bretagne.

 

Famille Lungolo : une pétition pour demander leur régularisation

Dany et Dieu, demandeursd'asile

Le comité de soutien à la famille Lungolo se met en place progressivement, et la pétition qu’il a lancée est désormais en ligne sur le site du Réseau éducation sans frontière (RESF) à l’adresse http://resf.info/P2661: allez vite la signer ! le texte, que nous reproduisons ci-dessous, peut être téléchargé ici. Les pétitions remplies doivent être scannées et adresser à ldhloudeac@orange.fr, ou remises au cours des réunions du comité de soutien. La prochaine aura lieu jeudi 27 février à l’école Hoche, où sont scolarisés Dany et Dieu : le comité de soutien y tiendra une permanence de 16h30 à 18h30 à l’intention des parents d’élèves des écoles maternelle et élémentaire, et projettera le film « Dany et Dieu, demandeurs d’asile ».  (visible ici et ).

La pétition

LA FAMILLE DE DIEU ET DE DANNY, SCOLARISES A SAINT-BRIEUC, DOIT POUVOIR RESTER EN FRANCE.

SOUTENONS LEUR DEMANDE DE REGULARISATION.

 

Monsieur et Madame Lungolo et leurs deux enfants, Dieu 11 ans et Danny 10 ans, ont quitté le Nord-Kivu (RDC) en 2011, au plus fort des émeutes. Cerif, 40 ans, ancien agent du ministère de l’intérieur congolais, y a dénoncé des viols. Menacé de mort, il choisit de mettre sa famille à l’abri en lui faisant quitter le pays.  Les parents et les enfants gagnent  la Belgique, l’ancienne puissance coloniale. La Belgique leur ayant refusé l’asile, ils fuient vers la France et arrivent à Saint-Brieuc en juin 2013.

Ils vivent dans la rue mais scolarisent leurs enfants. Danny suit des cours de dessin à l’école des Beaux-Arts et fait du foot avec son frère dans un club briochin. Deux assignations en référé à l’issue favorable contraignent la préfecture des Côtes d’Armor à loger la famille qui arrive dans un hôtel de Loudéac le 18 novembre 2013. Les enfants sont scolarisés sur place et ont d’excellents résultats.  Mais le 15 janvier 2014 la famille doit partir pour un hôtel à Dinan, après avoir été accusée mensongèrement de « dégradations » dans l’hôtel de Loudéac. Le 17 janvier, des gendarmes signifient à M. et Mme Lungolo qu’ils sont assignés à résidence. Les enfants prennent le chemin d’une troisième école.

Mais le mercredi 22 janvier, à 5h30, 8 gendarmes arrivent à l’hôtel. La famille, affolée, est conduite à l’aéroport de Rennes Saint-Jacques, d’où un avion privé de location la conduit en Belgique, accompagnée de 6 policiers. Arrivée en Belgique elle passe sa première nuit dans un Samu social.

Puis, prise en charge par des militants de RESF bruxellois, elle revient à Saint-Brieuc.

Sans ressources, M. et Mme Lungolo sont toujours sans papiers et risquent une nouvelle expulsion.

Qu’adviendra-t-il à Cérif et aux siens s’ils devaient être expulsés vers la RDC ? Les errances et les souffrances endurées n’ont que trop duré et la famille Lungolo doit être régularisée.

Premiers signataires :  Des parents d’élèves des écoles Hoche et Guébriant, RESF, La Cimade,  Ligue des Droits de l’Homme, Sud Education 22.

 

« Sans papier, t’es mort » : le témoignage de Dany et Dieu Lungolo, demandeurs d’asile

Dany et Dieu, demandeursd'asile

Les deux enfants de Cérif et Judith Lungolo, Dany, 10 ans, et Dieu, 11 ans, ont accepté de témoigner de leur vie de demandeurs d’asiles et de sans-papiers dans une vidéo que vous pouvez regarder en cliquant sur la miniature ci-dessous.. Ils racontent aussi l’expulsion vers la Belgique dont ils ont été victimes avec leurs parents il y a quelques jours. « Sans papier t’est mort » : c’est le sentiment qu’éprouve Dieu depuis le début des trois années d’errances qu’il a vécues.

Un comité de soutien s’est constitué pour leur venir en aide, à Saint-Brieuc (22), où ils sont revenus après leur expulsion. Vous pouvez le rejoindre, en écrivant à l’adresse resf22@googlegroups.com, ou à ldhloudeac@orange.fr.

Une pétition va être rapidement mise en ligne pour exiger la régularisation de la famille, nous vous en tiendrons informés. Pétition et vidéo vont être également mises en ligne sur le site de RESF dès que possible .

httpv://youtu.be/HeVHOKjNtcM

Famille Lungolo : création d’un comité de soutien

L'expulsion par avion privé de la famille Lungolo avait coûté autour de 20.000€.

Mardi 11 février à Saint-Brieuc, un comité de soutien à la famille Lungolo, a été constitué. Il regroupe, autour du réseau Education sans frontière, des membres d’associations (Cimade, Ligue des droits de l’Homme…) et des citoyens.

Originaire du Congo Kinshasa, la famille Lungolo est arrivée à Saint-Brieuc en août 2013. Elle venait de Belgique, qui lui avait refusé le droit d’asile.

Après une année difficile en Belgique, la galère a recommencé en France. Ils vivent dans la rue, à Saint-Brieuc, pendant plus de deux mois, les enfants étant scolarisés.

Il aura fallu deux référés gagnés pour que la préfecture les loge de façon « pérenne ».

Ils arrivent à Loudéac le 18 novembre 2013, où ils sont logés à « Couett’hôtel », jusqu’au 15 janvier 2015, date à laquelle ils sont expédiés dans un hôtel à Dinan, après avoir été accusés mensongèrement de « dégradations » dans l’hôtel : ceci est absolument, faux, des militants qui leur y rendaient régulièrement visite peuvent en témoigner.

Le vendredi 17 février, la famille reçoit la visite des gendarmes, qui leur signifient leur assignation à résidence, qui les contraint à pointer quotidiennement à la gendarmerie. Les enfants reprennent l’école le lundi 20 janvier (3ème école différente depuis la rentrée scolaire).

Mercredi 22 janvier, à 5h30, 8 gendarmes arrivent à l’hôtel. La famille, affolée, fait ses bagages. Ils sont conduits à la brigade de gendarmerie, puis à l’aéroport de Rennes Saint-Jacques, d’où un avion privé de location les conduit en Belgique, accompagnés de 6 policiers.

C’est la première fois qu’une telle expulsion se produit dans le département des Côtes d’Armor.

Arrivés en Belgique, ils ne sont pas remis aux autorités. Ils passent leur première nuit dans un Samu social.

Rester en Belgique signifiait pour la famille le retour au Congo où la vie de Cérif, le papa, est menacée.

La famille, prise en charge à Bruxelles par des militants de RESF, revient en France le mercredi 29 janvier. À Paris, ils sont reçus par le député Noël Mamère.

Ils sont de retour à Saint-Brieuc le soir même, et la situation est encore plus difficile pour eux, puisqu’ils n’ont plus ni ATA (ils en avaient bénéficié du 1er décembre au jour de l’expulsion), ni logement. Les enfants ont pu retrouver l’école qu’ils fréquentaient en septembre 2013.

À l’heure où le gouvernement rogne sur tous les budgets pour réaliser des économies, quel gâchis : à elle seule l’expulsion, qui a mobilisé 8 gendarmes puis 6 policiers et un avion de location,  a coûté au moins 20.000€. Et quel gâchis humain ! Comment la devise de la France, Liberté, Egalité, Fraternité, peut-elle résonner dans la tête des enfants, Dieu et Dany ?

Cérif et Judith, les parents, Dieu et Dany, les enfants, ont marqué et impressionné toutes les personnes qui les ont rencontrés par leur gentillesse, malgré les épreuves qu’ils subissent depuis tant de mois.

Le comité de soutien va se réunir à nouveau la semaine prochaine pour définir les actions à mettre en route.

A noter que la famille Lungolo est depuis quelque temps la cible de sites d’extrême droite (dont breizhinfo, proche du breizhatao du fuyard Le Lay).

Si vous souhaitez rejoindre ce comité de soutien, vous pouvez nous envoyer un message à l’adresse ldhloudeac@orange.fr.

L’expulsion de la famille Lungolo : Valls reconnaît indirectement qu’elle a été « peu efficace »…

C’est Manuel Valls qui l’a dit lui-même, en présentant son rapport sur l’immigration : l’expulsion d’étrangers vers des pays de l’Union européenne est peu efficace. Il reconnaît donc que l’expulsion de la famille Lungolo vers la Belgique a été « peu efficace ». Mais alors, pourquoi les avoir expulsés, puisqu’il savait très bien qu’ils seraient revenus rapidement en France ? Peu efficaces, ces expulsions seraient moins coûteuses : l’exemple de la famille Lungolo ne semble pas confirmer cette déclaration, et c’est un euphémisme !

Tiraillé entre son désir de draguer les électeurs de droite, et de continuer à faire malgré tout illusion à gauche, le ministre de l’intérieur a été contraint à faire des contorsions en présentant ce rapport, qui, quoiqu’il en dise, est peu flatteur.

En présentant ce rapport, le ministre a annoncé qu’une réforme du droit d’asile allait être proposée au conseil des ministres, avant l’été. Les associations vont devoir être attentives, et le fait que cette loi soit présentée par le ministère de l’intérieur n’incite pas à l’optimisme…

La famille Lungolo est revenue en France : « une expulsion brutale, ruineuse et inutile »

L’heure est aux économies dans les dépenses publiques : le gouvernement traque les dépenses inutiles pour tenter de réduire le déficit public.

Une preuve de cette chasse impitoyable au gaspi ?
Ça se passe à Dinan, mercredi 22 janvier. A 6h, une escouade de 8 policiers frappent à la porte d’une chambre dans un hôtel : la chambre de Mme et M. Lungolo, couple de Congolais dont la demande d’asile a été refusée en Belgique, et qui se sont réfugiés en France l’été 2013. On vient les arrêter, eux et leurs deux fils de 10 et 11 ans. On les conduit à l’aéroport de Rennes Saint-Jacques, sans leur préciser leur destinations : Belgique, puisqu’ils relèvent du statut « Dublin 2 », ou au Congo ? Ce sera la Belgique, et on sait que s’ils retournent en Belgique, ils risquent d’être expulsés au Congo.

C’est là qu’on mesure l’effort du gouvernement pour faire des économies. Mercredi 22 janvier, il y avait un avion de ligne, qui partait de Rennes à 11h30 environ, pour Bruxelles. C’est cher, mais bon… Et ben non : ils n’ont pas été mis dans l’avion de ligne ! Sans doute soucieux de leur confort, le ministre de l’intérieur a préféré louer un avion.

Tapez location avion Rennes Bruxelles sur Google, vous arrivez à cette page : http://www.jetbox.fr/location-jet-prive/prix-location-jet-prive.html

Tapez la ville de départ, la ville d’arrivée (Brussels, et non Bruxelles), et vous avez le prix : pour 10 personnes (la famille, 4 personnes et ils étaient accompagnés, d’après l’AFP,  d’un escorte de 6 policier), premier prix, 14.100€, hors taxe et hors impôt (taxe d’aéroport), soit, TTC, 16.920€. Ajouter les taxes d’aéroport. On vous a dit « économies »…

Arrivés à Bruxelles, la famille a, au bout de quelques heures, réussi à reprendre contact avec ses soutiens à Loudéac et Saint-Brieuc, et des représentants de RESF Belgique les ont pris en charge.

Ça, c’était mercredi 22 janvier.

Mardi 25 janvier, la famille Lungolo donnait, en compagnie de responsables de RESF (Réseau éducation sans frontière) une conférence de presse, devant l’Assemblée nationale, à Paris…

Ils vont maintenant, avec leur avocat, tenter d’obtenir un réexamen de leur demande d’asile.

La dépêche AFP raconte qu’un représentant du cabinet du ministre de l’intérieur s’est étonné : « La Belgique offre des garanties similaires à la France en matière d’asile. Pourquoi ne veulent-ils pas y rester ? Ce n’est pas une dictature quand-même… ». Certes. Sauf que la Belgique a la fâcheuse habitude de renvoyer les demandeurs d’asile dans leur pays aussi facilement que la France, dès lors que la demande d’asile a été refusée. Et au Congo, la vie de la famille est menacée. La dépêche de l’AFP l’explique :

« Pour eux, pas question de repartir en RDC. Cérif Lungolo assure y « être en danger de mort ». Ancien employé du ministère de l’Intérieur, il dit s’être créé des ennemis en dénonçant des exactions commises dans la province instable du Kivu (est).

Alors que Manuel Valls doit présenter cette semaine le bilan 2013 de sa politique migratoire, le cas de la famille Lungolo révèle « l’absurdité » du système, selon le RESF.

« Leur expulsion a coûté au moins 20.000 euros, entre les heures supplémentaires des gendarmes, l’avion et l’escorte », estime Richard Moyon, porte-parole du réseau. « C’est une politique brutale, ruineuse et inutile. Le seul avantage: ils ont fait quatre expulsions d’un coup. Du point de vue des chiffres, c’est excellent ».

Même analyse du député écologiste Noël Mamère, qui soutient une régularisation des Lungolo: « On veut mener des politiques d’affichage qui sont inutiles et ne font que contribuer à mettre une famille dans une grande vulnérabilité ». Ce que réfute bien entendu le ministère.

 

 

Évacuations de Roms : des niveaux intolérables, injustifiables, inutiles et coûteux !

Absurde. C’est le mot qui vient à l’esprit lorsqu’on découvre le rapport établi par l’European Roma right center, le Centre européen du droit des Rroms (ERRC). Un seul exemple. On estime (on n’a pas de chiffres précis) à 16.949 le nombre de personnes qui vivent dans des bidonvilles ou des squats, en France. La majorité d’entre elles sont des Rroms, mais il y a aussi des personnes sans-papiers, ou simplement sans logement. La population Rrom ainsi logée est donc inférieur à ce nombre.

Et, en 2013, le nombre de personnes évacuées de ces lieux par la force a atteint… 21.537. Ce qui signifie, si on estime que les 16.949 personnes citées plus haut sont toutes des Rroms, que chacun d’entre eux a été chassée de son lieu de vie plus d’une fois cette année : on atteint le taux de 1,27…

Joli record, M. le ministre de l’intérieur. C’est mieux que sous Sarkozy, jusqu’ici champion toutes catégories de romophobie. Que ce record soit battu par un gouvernement de gauche, voilà qui laisse un goût amer.

Le rapport publié par la Ligue des droits de l’Homme et l’ERRC est sans appel. Trois qualificatifs s’imposent : intolérables, injustifiables, inutiles et coûteux. « Cette politique de rejet est inefficace, coûteuse et inutile puisque rien n’a changé à la suite de ces évacuations », comme l’affirme Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme. « Les Roms vivent toujours en France, dans des campements qu’ils ont reconstruits un peu plus loin, mais ils se retrouvent de plus en plus précarisés. Cette augmentation des expulsions en cours ouvre la voie à l’expression des extrémismes et du racisme anti-Roms.»

Le rapport complet peut être téléchargé ici.

Évacuations de Roms : des niveaux intolérables, injustifiables, inutiles et coûteux !

Les évacuations forcées des Roms étrangers durant l’année 2013 atteignent le chiffre de 21 537. Ceci représente plus de la totalité de la population habitant en bidonvilles ou en squats en France, évaluée à 16 949[1], en majorité des Roms étrangers.

Autrement dit, l’ensemble de la population rom vivant en bidonvilles et squats en France aurait été évacuée de force au moins une fois durant l’année 2013. En tout, il y a eu 165 évacuations perpétrées par les forces de l’ordre, concernant 19 380 personnes, et 22 évacuations suite à un incendie, affectant 2 157 personnes. Ces chiffres sont largement supérieurs à ceux recensés les années précédentes, puisque nous avions recensé 9 404 personnes évacuées de force par les autorités de leurs lieux de vie en 2012, et 8 455 en 2011.

Il y a eu 118 évacuations forcées faisant suite à une assignation par les propriétaires des terrains ou des squats devant les tribunaux de grande instance (TGI) ou les tribunaux administratifs (TA), 34 faisant suite à un arrêté d’insalubrité ou de péril pris par la mairie ou le préfet, et 13 abandons des bidonvilles par les personnes elles-mêmes, dans la très grande majorité des cas sous la menace d’une évacuation forcée imminente. Nous rappelons que près des deux tiers des sites sont situés sur des terrains publics1. Ce sont donc des entités publiques qui assignent dans les deux tiers des cas les occupants à quitter ces sites.

On observe une nette recrudescence des évacuations forcées organisées par les forces de l’ordre durant la période estivale. Elles perdurent malheureusement au quatrième trimestre à un rythme presqu’aussi élevé, malgré une météo hivernale.

Le plus grand nombre d’évacuations forcées a été observé en Ile-de-France, comptant pour 57 % de leur total, le triste record étant détenu par le département de Seine-Saint-Denis. 39 % des évacuations ont eu lieu dans les quatre régions du Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Aquitaine.

On a observé d’autre part un nombre croissant de bidonvilles abandonnés par les habitants avant l’intervention des forces de l’ordre, pour éviter les traumatismes et la perte de leurs biens.

Les évacuations forcées ont continué pratiquement, partout sans solution alternative crédible de relogement ni d’accompagnement social. Les ONG impliquées ainsi que différentes institutions (comme le Défenseur des droits) reconnaissent que la mise en application de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites » reste rare, disparate et généralement superficielle. Elle s’apparente souvent à un recensement des populations plutôt qu’à un réel et durable travail social d’insertion.

Ces évacuations forcées sont l’expression d’une politique de rejet stigmatisant les Roms comme boucs émissaires. Les autorités ne souhaitent qu’une seule chose : leur retour dans leur pays d’origine.

« Cette politique de rejet est inefficace, coûteuse et inutile puisque rien n’a changé à la suite de ces évacuations », comme l’affirme Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme. « Les Roms vivent toujours en France, dans des campements qu’ils ont reconstruits un peu plus loin, mais ils se retrouvent de plus en plus précarisés. Cette augmentation des expulsions en cours ouvre la voie à l’expression des extrémismes et du racisme anti-Roms.»

« Nous demandons une nouvelle fois l’arrêt immédiat de cette politique : les évacuations forcées ne peuvent se perpétuer au mépris des traités internationaux et européens »,  indique Dezideriu Gergely, directeur du ERRC. « Nous demandons par ailleurs qu’une véritable politique d’insertion pour ces personnes en grande précarité soit mise en place. Cette politique devra clairement dépasser celle qui “anticipe et accompagne” leurs expulsions ou leurs évacuations forcées.»

Avant son élection, l’actuel Président avait dénoncé la politique d’évacuations forcées menée sous Nicolas Sarkozy. Il est extrêmement regrettable de voir que la situation a empiré.

Remarque :

Ce recensement a été établi en collaboration avec le Collectif national droits de l’Homme Romeurope et est le fruit d’un travail commun entre la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et le European Roma Rights Centre (ERRC). Sans avoir la prétention à l’exhaustivité de la situation étant donné le manque de données officielles disponibles, ce recensement voudrait cependant en être l’expression la plus objective possible.

[1] Vade-mecum à l’usage des correspondants « points de contact départementaux » de la Mission relative à l’anticipation et l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, version du 10 décembre 2013, Dihal.


Intégration des Rroms : des villes trouvent des solutions

Le maire de Loudéac avait mis la ville d’Aubervilliers au-devant de la scène de sinistre façon, lors du conseil municipal du 14 novembre dernier, en comparant les sépultures des Gens du voyage au « cimetière pour chiens » de cette ville.

Première chose, et renseignements pris ce matin auprès de la mairie, il n’y a pas de cimetière pour chiens à Aubervilliers.

En revanche, et c’est une information beaucoup plus intéressante, il y  a à Aubervilliers un « village d’intégration » destiné aux Rroms. Le journal Ouest-France lui consacre un article très intéressant dans son édition du 2 janvier.

Ce village a été créé en 2006. Il est vrai que la ville avait une vieille tradition d’accueil des populations migrantes : dans les années 1960, avec notamment des Italiens et des Portugais, qui, à l’époque, vivaient dans des bidonvilles comparables aux camps où s’installent aujourd’hui les Rroms. Le maire d’Aubervilliers, Pierre Salvator, n’a pas accepté cette situation : le passé de la ville « nous rend intransigeants sur l’éradication de ces bidonvilles », explique-t-il. Mais contrairement aux « démantèlements de camps » que pratique le ministre de l’Intérieur, l’éradication des bidonvilles s’accompagne, à Aubervilliers, de la mise en place de solutions alternatives pérennes. C’est ainsi qu’est né « le village d’intégration », en 2007. Il accueille, nous indique Ouest-France, une vingtaine de familles, soit une centaine de personnes, dans des logements préfabriqués. Et le logement s’accompagne d’un accompagnement social et éducatif. Résultat : « 33 adultes et 34 enfants on bénéficié du dispositif, trouvé un travail dans l’hôtellerie, le bâtiment… un logement, passé un BEP, un bac… ». Et le maire projette de doubler la capacité d’accueil du village, en l’ouvrant à d’autres populations.
La ville d’Aubervilliers n’est pas, heureusement, la seule à mettre en place de telles solutions ; la ville d’Indre, par exemple, a mené une action remarquable, détaillée dans le film de Sophie Averty, « cause commune ».

Une bonne nouvelle en ce début d’année !