Mars 2012 : le printemps du service public ?

Communiqué des États généraux du service public, dont la Ligue des droits de l’Homme est membre.

Depuis  des années on cherche à nous imposer l’idée que « l’État n’est pas la solution mais le problème » vis-à-vis des difficultés socio-économiques qui s’amoncellent. Est visé bien sûr l’État « social » ou « providence » comme on l’appelait à l’issue de ces «Trente glorieuses»  qui ont vu les rapports entre capital et travail s’améliorer relativement et temporairement au profit du deuxième. Dans cette logique s’est construite une Europe néolibérale fondée sur la concurrence « libre et non faussée ».

De cette offensive idéologique et politique menée avec une grande cohérence et dans la durée, le Service public est la grande victime. L’État néolibéral, pas du tout affaibli, lui mène la vie dure : la santé, l’éducation, la justice, l’emploi, le logement, les transports, l’énergie, l’environnement, les communications, l’information, la culture, le sport … tout est soumis à la concurrence, au management, à la marchandisation, à l’austérité pour un service minimum garanti.

Ces politiques ont produit les crises financières, économiques, écologiques et sociales que nous subissons aujourd’hui ! Les dégâts « collatéraux » en sont des régressions sociales et idéologiques qui se traduisent partout dans le monde et particulièrement en Europe, par la montée de la pauvreté, des inégalités, des violences et des replis communautaires.

Face à l’ampleur du désastre, on nous parle aujourd’hui du nécessaire retour de l’État, de la nécessité de soigner une Europe qui devient chaque jour un peu plus, le problème. Mais c’est un État gendarme, autoritaire, agent très actif pour imposer toujours plus d’austérité, avec la menace de replis nationalistes, voire xénophobes, face à la « mondialisation » qui n’est plus «heureuse» du tout. C’est une Europe qui au mépris de la démocratie conduit des pays à la ruine, comme la Grèce en est la dramatique et scandaleuse démonstration.

On nous vend la « compétitivité ». Où il est toujours question que beaucoup perdent pour que quelques-un-es gagnent. C’est l’aberrant exemple des huit « initiatives d’excellence» (Idex) qui vont se répartir plusieurs milliards d’euros pendant que toutes les autres universités vont végéter. Qu’importe, si « nous » réussissons enfin à monter sur le podium de Shanghai !  Voilà donc les États, les régions, les départements, les communes, les « pôles métropolitains » engagés dans la lutte pour « l’excellence ». Non pas pour que toutes et tous soient excellent(e)s, mais pour gagner contre son voisin au tirage d’un loto évidemment anti-solidaire et anti-égalitaire, dans lequel seuls quelques « heureux » gagnent alors que des millions d’autres ont perdu. Logique folle et destructrice à laquelle il faudrait nous plier au nom de la dette et de nos dépenses publiques insupportables.

En France les effets de la RGPP – Révision Générale des Politiques Publiques – sont pourtant malheureusement connus, en terme de dégradation des services publics – voire de disparition –, en terme de délitement de la solidarité et enfin en terme de souffrance au travail pour toutes celles et tous ceux qui en ont encore. La réforme des collectivités locales, l’offensive contre les associations viennent compléter l’offensive.

Partout des résistances, parfois momentanément victorieuses, mais toujours vouées à reprendre, se mènent. Mais surtout partout des collectifs se mettent en place pour élaborer des alternatives et proposer de nouvelles pistes pour reconstruire de façon plus démocratique et plus efficace des services publics à partir des besoins des populations et des territoires.

Mars 2012 peut et doit être le début du « Printemps du Service Public ».

  • Le 3 mars à Clermont-Ferrand à l’appel de la Convergence du rail
  • du 14 au 17 mars à Marseille pour le Forum alternatif mondial de l’eau
  • le 24 mars à Aubagne pour la Coordination Nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité
  • le 31 mars dans toutes les villes de France à l’appel du collectif « Libérons les élections », du « Collectif pour un audit citoyen de la dette publique » et de celui « Pour un Pôle public financier au service des Droits ! »
  • et tout au long de ces semaines avec les parents d’élèves et les personnels contre les fermetures de classes et des RASED
  • partout avec les usagers, les personnels concernés et les élu-es pour les services publics locaux.

Ce printemps du Service Public doit préparer un nouvel été. Nulle nostalgie, ni retour à un passé idéalisé. Nous voulons construire, développer et améliorer un Service Public, démocratiquement géré et piloté. Logement, petite enfance, dépendance, finances, information… de nouveaux Services Publics doivent être construits.  Aménagement égalitaire du territoire, développement durable, épanouissement de tous et toutes. Le Service Public que nous voulons contribue fondamentalement à faire que notre société réponde aux besoins économiques, sociaux, culturels et sanitaires… du plus grand nombre, avec une autre répartition des richesses et des moyens.

Nous partageons l’idée que le Service Public est seul capable de répondre à une définition et gestion démocratique des biens communs, d’assurer la satisfaction des besoins fondamentaux de chacun(e) sans discrimination d’aucune sorte, genre, origine, croyances, et opinions philosophiques. L’élaboration et la mise en œuvre de l’intérêt général, la redistribution des richesses qu’il induit, la solidarité qu’il nécessite et mobilise, l’implication populaire qu’il exige, participent de la construction d’une société démocratique et durable, tant pour les humains que pour les ressources de la planète.

C’est pourquoi nous vous appelons à rejoindre, participer et développer ces combats d’avenir. Nous demandons aux candidat-es aux différentes élections qui viennent de s’engager résolument pour le Service Public, ce « patrimoine de ceux qui n’en ont pas ».

DREVON Jean-Michel coordinateur national des États Généraux du Service Public – EGSP

NAY Françoise et ANTONY Michel vice-présidente et président de la Coordination nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité

DEFAIX Bernard président de la Convergence nationale de défense et développement des SP

MENARD Pierre secrétaire de la Convergence Nationale du RAIL

Samedi 28, Ploufragan : parrainage républicain

Le comité de soutien à Maria

vous invite au

PARRAINAGE RÉPUBLICAIN

de Maria, Otar, Leila et Danial

enfants de notre commune.

SAMEDI 28 JANVIER 2012 À 15H00

À LA MAIRIE DE PLOUFRAGAN

  • Maria, 8 ans, est scolarisée à l’école élémentaire des Villes-Moisan de Ploufragan,
  • Otar, son frère, 14 ans, est au collège Anatole-Le-Braz à Saint-Brieuc,
  • LeiIa, 4 ans, est à l’école maternelle Anne-Frank de Ploufragan, et
  • Danial, son petit frère, a 10 mois.

Scolarisés dès leur arrivée de Géorgie et du Daghestan, bien intégrés, ils ont noué des relations et participent à des activités associatives. Mais leurs familles, demandeuses d’asile, sont menacées d’expulsion. I.es enfants vivent dans la crainte d’une interpellation car ils risquent d’être arrachés à leur classe, séparés de leurs amis, privés du droit à l’éducation et à une existence normale avec leurs familles.

Ils seront parrainés par des parents d’élèves et des enseignants.

Nous invitons toutes celles et ceux qui, attachés aux valeurs d’égalité et de fraternité, veulent manifester leur solidarité pour ces enfants.

Des élus, des enseignants et des parents d’élèves, des représentants de la FCPE et du Réseau Éducation Sans Frontières seront présents.

Venez nombreux nous rejoindre pour cette action de soutien !

Le parrainage sera suivi d’un goûter à la salle Le Tremplin.

Guéant en tournée électorale dans le département : le collectif contre le racisme et pour la solidarité réagit

Le ministre de l’intérieur sera cet après-midi dans la région : à Merdrignac pour la pose de la première pierre de la future gendarmerie, à Loudéac où il rencontrera des élus, et à Saint-Thélo où il s’est invité à la cérémonie des vœux de la municipalité.

Le collectif briochin contre le racisme et pour la solidarité (qui regroupe des associations telles que la Cimade, RESF, la Ligue des droits de l’Homme, des syndicats et des partis politiques), a lutté pendant des mois pour que la préfecture applique simplement la loi, c’est à dire loge les demandeurs d’asile en errance à Saint-Brieuc et dans le département, réagit à cette visite par un communiqué qu’il a adressé aux journaux. (Télécharger le communiqué).

Monsieur le Ministre de l’Intérieur et de l’Immigration peut s’enorgueillir de battre des records : davantage d’expulsions (32.922 en 2011) et moins d’entrées sur le territoire (182.595) – voir les journaux du 11 janvier – la seule question qui vaille est la suivante : est-ce que ces résultats sont bons pour la France ?

Assurément NON. L’image de « patrie des Droits de l’Homme » de notre pays en souffre beaucoup ; on se souvient de l’épisode récent des étudiants étrangers diplômés ne pouvant travailler chez nous ! Dans son histoire, la France a eu besoin des Étrangers (pendant la 2e guerre notamment) ; elle en aura besoin dans un avenir proche, c’est ce que disent tous les démographes. Nous ne pouvons pas continuer à considérer, par principe, que tous les Étrangers sont des tricheurs qui viennent chez nous bénéficier des avantages sociaux. Il y a aussi d’authentiques Réfugiés qui demandent protection. Ils ne peuvent être monnaie d’échange politicienne avec les voix du Front National.

Derrière vos chiffres, Monsieur le Ministre, il y a des détresses humaines réelles et graves. Pour s’en tenir aux Côtes d’Armor en 2011, l’État, c’est à dire vous en première ligne, a mis plus de six mois à respecter les lois de l’asile pour une bonne vingtaine de personnes (dont un 1/3 d’enfants). Les associations du Collectif ont dû vous harceler, forcer un peu la main au SDIS (syndicat départemental d’incendie et de secours) et au Conseil Général pour mettre à l’abri ces personnes pourtant en règle.

Peut-on admettre que c’est « justice » de mettre en rétention une mère sino-mongole et son bébé de 3 mois, comme à Rennes la semaine dernière ? Il n’y a pas de quoi être fier de vos chiffres, c’était la 12e famille placée au centre de rétention de Rennes depuis juillet dernier (soit 23 enfants de 3 mois à 17 ans). Et que dire de cette citation d’un policier du commissariat de Tours à propos de la traque des Sans Papiers, «  on se croirait revenu à l’époque de la seconde guerre mondiale, ça me révulse… » (Voir la Nouvelle République du 30/12/2011).

Voilà l’envers de vos chiffres, M. le Ministre, pour nous, vous trahissez l’humanité et la France que nous voulons et que nous aimons.

Concarneau : planté samedi, l’arbre de la laïcité vandalisé dimanche

Depuis trois ans, le mouvement laïc commémore l’anniversaire de la séparation de l’église et de l’Etat en plantant des arbres de la laïcité le 9 décembre. Un tradition naissante, inspirée des arbres de la liberté qui datent de la révolution française.

C’est ce qu’a fait l’amicale laïque de Concarneau, samedi 10 décembre, en plantant un arbre, square des Filets-bleus. Sur les branches de l’arbre, les participants avaient accroché des textes sur la laïcité.  Et lundi matin, l’arbre a été retrouvé vandalisé, les textes ayant été arrachés. Ce qui réjouit bien entendu les nazillons de Breiz atao, qui titrent sur le site : « Divine surprise à Concarneau » et conclut : « En terre chouanne, il y a encore de l’honneur chez les Concarnois pour ne pas se laisser embrigader d’une façon aussi grossière par des nostalgiques de 1793 ».

Pierre Bleuzen, président de l’Amicale laïque de Concarneau, ne comprend pas ce geste.

Ce vandalisme ridicule apporte une nouvelle preuve de l’actualité de la défense de la laïcité, attaquée de toute part, y compris au sommet de l’Etat. Les gesticulations des catholiques intégristes contre des pièces de théâtre participent de cet acharnement contre ce pilier de la République qu’est la laïcité.

On ne s’étonne donc pas que la Ligue des droits de l’Homme participe à ce combat. Ci-dessous, vous pouvez lire le discours de Michelle Dalloz, présidente de la section LDH « Françoise-Bosser » de Concarneau lu qu’a lu Jean-Paul Guyader pendant la cérémonie. Le site « Laïcité aujourd’hui » vous fait découvrir les textes qui avaient été accrochés à l’arbre.

Fête de la laïcité, samedi 10 décembre 2011, Concarneau

Un temps oubliée, ringardisée, la laïcité se retrouve aujourd’hui propulsée sur le devant de la scène.

Toilettée, relookée, affublée d’adjectifs ( ouverte, plurielle, positive…) qui, loin  d’en rehausser l’éclat  en affaiblissent la portée, elle effectue un « come back » des plus décevants,  devient, en quelque sorte  la valeur à la mode non pour  le meilleur, sinon   rarement, mais si l’on n’y prend pas garde, pour le pire…

De tout côté, y compris  et surtout du côté des plus extrêmes, Front National et Droite dite Populaire, on la revendique, on  la brandit tels le pieu et la gousse d’ail,  à l’encontre de Musulmans systématiquement  identifiés à la forme la plus intégriste de leur religion,  devenus,  en quelque sorte, les vampires des temps modernes.

Respectueuse de la laïcité pour ce qu’elle est, c’est à dire  valeur d’intégration et non de division ou d’exclusion, valeur fondatrice des conditions du vivre ensemble, la Ligue des Droits de l’Homme refuse de se laisser enfermer dans le pseudo débat d’une lutte d’influence entre République et Islam.

Ce qui la préoccupe, c’est,  accompagnant la  montée de la crise,  la poussée de l’intolérance, qui n’est pas le fait de l’Islam exclusivement, on a pu s’en rendre compte récemment :

  • avec la destruction du siège de Charlie Hebdo dont les auteurs ne sont pas ,à ce jour,  identifiés,
  • les obstructions violentes apportées par des intégristes catholiques aux représentations de la pièce de Castellucci dans un Etat où le blasphème n’est , cependant, heureusement pas un délit,
  • les déclarations de Christine Boutin pour que l’enseignement du genre soit retiré des programmes de l’enseignement secondaire, « posant à la fois le problème du statut et de la scientificité des savoirs à l’école et celui de  leur indépendance par rapport à l’appareil d’État » ( Alain Bondeelle).

Atteintes successives à la liberté d’expression et de conscience, replis identitaires, promotion démagogique , à des fins électoralistes, d’une laïcité de combat,… Pour la LDH, ce qui est en cause dans les débats actuels, ce n’est pas la religion- qu’on la prône ou qu’on la rejette, dans un paysage social aujourd’hui fortement sécularisé-, mais la démocratie et en particulier, les tentatives d’empiétement du religieux sur l’espace politique, en réaction à l’abandon progressif par l’Etat, de ses missions sociales.

« L’Etat  n’aurait plus autant  d’argent dans  ce qui pourtant concerne  tous les citoyens : santé publique, école publique, culture de haut niveau pour chacun, logements décents pour tous,énergie et communication accessibles à tous, humanisation des espaces urbains, s’étonnait déjà H. Pena-Ruiz en 2006, avant de conclure :   «  c’est en solidarisant l’affirmation de l’idéal laïque et celle d’un Etat promoteur de la justice sociale qu’on rendra crédible la dimension émancipatrice de la République ».

La question de la laïcité est pour la LDH inséparable de la question de la fragmentation sociale.

C’est pourquoi nous emprunterons aujourd’hui notre conclusion à Jean Jaurès en rappelant que le principe laïque n’ayant pas à être un dogme, mais une dynamique conduisant vers la liberté, il doit être prolongé par l’émancipation sociale.

La question reste de savoir si nous sommes tous prêts, dans un pacte social renouvelé,  à réaffirmer le lien entre République laïque et République sociale.

Non à Bigeard aux Invalides : signez la pétition !

Déjà plus 2600 signatures : la pétition contre le transfert des cendres du général Bigeard aux Invalides connaît un beau succès, mais cela ne suffit pas pour que les pouvoirs publics entendent l’appel. Il faut donc la diffuser, la faire connaître, et amplifier rapidement la campagne de signature. Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme, fait partie des premiers signataires, en compagnie de nombreuses autres personnalités, choquées par cette initiative scandaleuse, qui revient, comme le dit le site de la section de Toulon, à justifier le recours à la torture. Avec la légion d’honneur attribuée à Hélie Denoix de Saint-Marc, qui avait été condamné en 1964 à la 10 ans de réclusion pour sa participation au « putsch des généraux », puis amnistié en 1968, ça commence à faire beaucoup !

(article corrigé de ses erreurs le 4 décembre 2011).

Des articles pour vous informer : sur le site de Toulon, sur le site Loudéac centre Bretagne. Article à propos d’Hélie Denoix de Saint-Marc.

La pétition se trouve à cette adresse.

Sihem Souid et Gérard Gatineau : l’honneur de la police

De gauche à droite, Gérard Gatineau, Philippe Coulaud, et Sihem Souid, entourés des responsables du comité de soutien à Sihem.

Deux époques différentes, deux démarches différentes, un même combat. Sihem Souid est entrée dans la police par vocation, elle vient d’en être exclue (provisoirement ?) parce qu’elle a dénoncé les pratiques inadmissibles qu’elle y a constatées : racisme, homophobie, corruption… Gérard Gatineau y est entré un peu par hasard, dans les années 80, et lui aussi a constaté les mêmes errements, et ne les a pas supportés : sa carrière s’est résumée à « 30 ans de bitume », titre du livre qu’il a signé.

Lundi soir à Paimpol, les deux policiers étaient invités par la section de la Ligue des droits de l’Homme de Paimpol, à un débat animé par le président de la section, Philippe Coulaud. Sihem et Gérard ont raconté leurs deux parcours dans la police, et on se rend compte qu’à 20 ou 30 ans d’intervalle, il n’y a pas eu grand changement. Sihem espère toujours être réintégrée (elle n’a été « que » suspendue pour 6 mois…), et de toute façon, elle ne baisse pas les bras. La solution ? elle la voit dans la création d’un « comité national d’éthique et de la sécurité ». « La Commission nationale de déontologie de la sécurité, qui, de toute façon, a disparu, absorbée avec la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations) dans le nouveau « défenseur des droits », n’était pas une commission indépendante, puisqu’elle était composée de policiers, et de représentants nommés par le gouvernement ». Le « comité national d’éthique » proposé par Sihem serait lui totalement indépendant, de la police et du pouvoir, et, contrairement à la CNDS, doté d’un pouvoir de saisie et d’injonction (la CNDS, par exemple, ne pouvait être saisie que par l’intermédiaire d’un parlementaire). Elle a rédigé un projet de loi, qui a été déposé par un groupe de députés au bureau de l’assemblée nationale, sans grand espoir pour le moment… A lire ou à télécharger ci-dessous.

A noter qu’une équipe de télévision a filmé le débat. Le reportage sera diffusé courant janvier sur France 2 dans l’émission « Envoyé spécial ».

Voir l’article du Télégramme et la vidéo d’Armelle Menguy.

Gérard Gatineau est l’auteur de « 30 ans de bitume », aux éditions L’Harmattan.

Sihem Souid est l’auteure de « Omerta dans la police » aux éditions du Cherche Midi.

Télécharger la proposition de loi.

La proposition de loi.

N° 3166

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 février 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à créer un comité national d’éthique de la sécurité,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Marie-George BUFFET, Marie-Hélène AMIABLE, François ASENSI, Martine BILLARD, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jean-Jacques CANDELIER, André CHASSAIGNE, Jacques DESALLANGRE, Marc DOLEZ, Jacqueline FRAYSSE, André GERIN, Pierre GOSNAT, Jean-Paul LECOQ, Roland MUZEAU, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER et Michel VAXÈS,

député-e-s.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans un récent ouvrage-témoignage intitulé Omerta dans la Police, Mademoiselle Sihem Souid, fonctionnaire de police, soulève d’importantes questions relatives à la déontologie et à l’éthique au sein des forces de sécurité intérieure. Ces questions sont d’une brûlante actualité, au moment où le projet de loi instaurant un Défenseur des droits est discuté au Parlement.

Des faits de racisme, de sexisme, d’homophobie, des atteintes à la dignité humaine, des abus de pouvoir, des situations de déni de droit, des procédures bâclées ou faussées sont décrits avec une grande précision.

Ces atteintes, quoique minoritaires, créent un sentiment de méfiance à l’égard des forces de sécurité publique. Alors que celles-ci ont été établies pour faire appliquer les lois décidées par le peuple et veiller à la protection des droits et libertés de tous et de toutes, elles apparaissent à de nombreux citoyens comme les garantes de l’impunité de ceux qui les enfreignent.

Les droits et libertés ne peuvent être considérés comme garantis de manière satisfaisante si l’atteinte à un seul d’entre eux est tolérée pour une seule personne. Aussi, il est indispensable que la puissance publique se dote d’institutions veillant à ce que les forces chargées de protéger les droits et libertés le fassent d’une manière compatible avec celles-ci, dans le plus grand respect de l’état de droit.

Un Code de déontologie de la police nationale a été instauré par le décret n° 86-592 du 18 mars 1986. Rappelant les devoirs d’exemplarité, de respect absolu de la personne et de la loi, ce code est un outil appréciable de régulation interne. Afin de vérifier sa bonne application ainsi que celle de la loi, des instances de contrôle interne ont été mises en place, à l’instar de l’Inspection générale des services (IGS) et de l’inspection générale de la police nationale (IGPN).

En complément de ce dispositif, la loi du 6 juin 2000 a créé une autorité indépendante, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), compétente en matière de contrôle des droits et libertés pour l’ensemble des forces de sécurité publiques et privées. Son apport est considérable, tant en matière d’aide à la résolution de situations particulières qu’en matière de recommandations plus générales. Usage du Taser, recours au menottage, conditions des fouilles et de la garde à vue : la CNDS est en pointe des débats concernant le respect des droits fondamentaux de la personne.

Plusieurs autres autorités indépendantes oeuvrent pour conforter l’action de la CNDS dans des domaines particuliers et connexes : la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, ou encore la commission nationale des libertés informatiques ou la commission administrative d’accès aux documents administratifs.

Malgré cela, certaines atteintes aux droits et libertés ne sont jamais révélées et n’aboutissent pas à une saisine car il existe de nombreuses barrières psychologiques ou systémiques à la révélation de crimes et délits. Sont en cause notamment l’autorité du pouvoir hiérarchique et ses conséquences sur la carrière des individus concernés, ainsi qu’une interprétation parfois trop étroite du devoir de réserve au détriment de l’obligation pour tout fonctionnaire de révéler à l’autorité judiciaire les crimes et délits dont il a connaissance.

De plus, le dispositif décrit ci-dessus connaît de nombreuses limites. La CNDS ne dispose pas des moyens humains et financiers dont elle a besoin pour mener à bien ses missions. Son rôle purement consultatif et le caractère limité de ses pouvoirs aboutissent à ce que ses avis et recommandations soient peu suivis par l’État. Les complémentarités avec les autres autorités ne sont pas assez approfondies et les conditions permettant à celles-ci d’être plus efficaces et plus indépendantes ne sont elles-mêmes pas toujours réunies.

Enfin, la fusion de la Halde, de la CNDS, du contrôleur général des lieux de privation de liberté, du Défenseur des enfants et du Médiateur au sein d’un Défenseur des droits risque d’aggraver considérablement ce constat au regard du projet de loi organique issu de la première lecture à l’Assemblée nationale (n° 2991). Non seulement ce projet s’inscrit dans les logiques d’économies de la révision générale des politiques publiques, mais en outre, la confusion des missions de médiation et de contrôle des différentes autorités indépendantes pourrait se faire au détriment des missions de contrôle des droits et libertés. Cela est d’autant plus problématique que la qualité de l’exercice de ces missions sera tributaire de la personnalité et de la volonté d’indépendance du Défenseur, autorité nommée par le Président de la République et dont les adjoints seront nommés par le Premier ministre.

La protection des libertés est un combat permanent. Aussi, il est indispensable, à côté du futur Défenseur des droits, de mettre en place une autorité publique non gouvernementale de contrôle de l’éthique de la sécurité totalement dédiée à cette mission, réellement indépendante, accessible à tous et à toutes et dotée de pouvoirs importants.

Tel est l’objet de cette proposition de loi visant à instituer un comité national d’éthique de la sécurité doté de pouvoirs accrus par rapport à l’actuelle CNDS, dont la disparition est envisagée, et de garanties d’indépendance plus solides que le futur Défenseur des droits.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le comité national d’éthique de la sécurité, autorité non gouvernementale neutre et indépendante, est chargée, sans préjudice des prérogatives que la loi attribue, notamment en matière de direction et de contrôle de la police judiciaire, à l’autorité judiciaire, de veiller au respect de la déontologie et de l’éthique des personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République française.

Article 2

Les membres du comité national d’éthique de la sécurité sont nommés comme suit pour une durée de trois ans non renouvelable :

– le président, élu parmi ses membres ;

– un député membre de chaque groupe politique et désigné en son sein et un député représentant les élus non inscrits et désigné par ceux-ci ;

– un sénateur membre de chaque groupe politique et désigné en son sein et un sénateur représentant les élus non inscrits et désigné par ceux-ci ;

– un conseiller d’État, désigné par le vice-président du Conseil d’État ;

– un magistrat hors hiérarchie de la Cour de cassation, désigné conjointement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général de ladite cour ;

– un conseiller maître, désigné par le premier président de la Cour des comptes ;

– six personnalités qualifiées de la société civile, désignées par les autres membres du comité national d’éthique de la sécurité notamment au regard de leurs expériences et compétences en matière de lutte contre les discriminations envers les personnes physiques et de toute autre atteinte aux droits et libertés.

Les membres du comité national d’éthique de la sécurité sont renouvelés par tiers tous les ans.

La qualité de membre du comité national d’éthique de la sécurité est incompatible avec l’exercice d’activités, à titre principal, dans le domaine de la sécurité.

Les parlementaires membres du comité national d’éthique de la sécurité cessent d’y exercer leurs fonctions lorsqu’ils cessent d’appartenir à l’assemblée au titre de laquelle ils ont été désignés. Le mandat des députés prend fin automatiquement avec la législature au titre de laquelle ils ont été élus.

Si, en cours de mandat, un membre du comité national d’éthique de la sécurité cesse d’exercer ses fonctions, le mandat de son successeur est limité à la période restant à courir.

Lors de la première constitution du comité national d’éthique de la sécurité suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, sont désignés par tirage au sort le tiers des membres, à l’exclusion du président, dont les mandats prendront fin à l’issue d’un délai d’un an.

Article 3

Le comité national d’éthique de la sécurité établit son règlement intérieur. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante.

Article 4

Le comité national d’éthique de la sécurité peut se saisir de toute situation relative à un manquement aux règles de l’éthique ou de la déontologie, et de toute situation dans laquelle il estime que les droits et libertés garantis par la constitution et par la loi sont mis en danger par l’une au moins des personnes mentionnées à l’article 1er.

Toute personne qui a été victime ou témoin de faits dont elle estime qu’ils constituent un manquement aux règles de l’éthique ou de la déontologie, commis par une ou plusieurs des personnes mentionnées à l’article 1er, peut, par réclamation individuelle, porter directement ces faits à la connaissance du comité national d’éthique de la sécurité ou demander à ce qu’ils le soient. Ce droit appartient également aux ayants droit des victimes.

Le Premier ministre, un député, un sénateur ou toute personne morale ou autorité administrative indépendante compétente en matière de protection des droits et libertés peut en outre saisir de son propre chef le comité national d’éthique de la sécurité de faits mentionnés au premier alinéa.

Le comité national d’éthique de la sécurité ne peut être saisi par les parlementaires qui en sont membres. Aucune autorité administrative, judiciaire, ou d’État ne peut s’opposer à la saisine du comité national d’éthique de la sécurité.

Pour être recevable, la réclamation doit être transmise au comité national d’éthique de la sécurité dans les deux années qui suivent les faits. Elle est gratuite et aucune règle formelle ne peut lui être opposée. Le comité national d’éthique de la sécurité adresse un accusé de réception à l’auteur de la saisine et, lorsque la saisine est indirecte, à la personne qui fait l’objet de la saisine ou l’a demandée. Toute décision de rejet doit être dûment motivée et accompagnée, le cas échéant, d’une indication des démarches à suivre pour que l’auteur de la saisine soit en mesure de faire valoir ses droits.

Une réclamation portée devant le comité national d’éthique de la sécurité n’interrompt pas les délais relatifs à la prescription des actions en matière civile et pénale et aux recours administratifs et contentieux.

Un commissaire du Gouvernement peut être appelé, sur demande du comité national d’éthique de la sécurité, à assister, avec une voix consultative, aux travaux et enquêtes du comité national d’éthique de la sécurité afin de lui apporter tous éléments utiles à l’exercice de ses missions.

Article 5

Le comité national d’éthique de la sécurité recueille sur les faits portés à sa connaissance toute information utile.

Les autorités publiques doivent prendre toutes mesures pour faciliter la tâche du comité national d’éthique de la sécurité. Elles ne peuvent s’y opposer. Elles communiquent à celle-ci, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission telle qu’elle est définie à l’article 1er.

Le comité national d’éthique de la sécurité peut demander dans les mêmes conditions aux ministres compétents de saisir les corps de contrôle en vue de faire des études, des vérifications ou des enquêtes relevant de leurs attributions. Les ministres informent le comité des suites données à ces demandes dans un délai raisonnable et motivent tout refus d’y accéder.

Les personnes privées exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République et leurs préposés communiquent au comité national d’éthique de la sécurité, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission.

Les agents publics ainsi que les dirigeants des personnes mentionnées au précédent alinéa et leurs préposés sont tenus de déférer aux convocations du comité national d’éthique de la sécurité et de répondre à ses questions. Les convocations mentionnent l’objet de l’audition.

Les personnes convoquées par application de l’alinéa précédent peuvent se faire assister du conseil de leur choix. Un procès-verbal contradictoire de l’audition est dressé à la suite de celle-ci et remis à l’intéressé.

Lorsque ses demandes ne sont pas suivies d’effet, le comité national d’éthique de la sécurité peut mettre en demeure les personnes intéressées de lui répondre dans un délai qu’il fixe. Lorsque la mise en demeure n’est pas suivie d’effet, il peut saisir le juge des référés d’une demande motivée aux fins d’ordonner toute mesure que ce dernier juge utile. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures.

Le comité national d’éthique de la sécurité peut consulter toute personne physique ou morale dont le concours lui paraît utile. Il peut demander au vice-président du Conseil d’État et au premier président de la Cour de cassation de faire procéder à toutes études. Lorsque le comité est saisi d’une réclamation, non soumise à une autorité juridictionnelle, qui soulève une question touchant à l’interprétation ou à la portée d’une disposition législative ou réglementaire, il peut consulter le Conseil d’État. L’avis du Conseil d’État est rendu public.

Le caractère secret des informations et pièces dont il demande communication ne peut lui être opposé sauf en matière de secret concernant la défense nationale, la sûreté de l’État ou la politique extérieure. Les informations couvertes par le secret médical et le secret professionnel applicable aux relations entre un avocat et son client ne peuvent lui être communiquées qu’à la demande expresse de la personne concernée, sauf lorsqu’elles sont relatives à des privations, sévices et violences physiques, sexuelles ou psychiques commis sur un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique.

Toute personne physique ou morale ayant saisi le comité national d’éthique de la sécurité ne peut faire l’objet ni de poursuites judiciaires ni de poursuites administratives sur les faits qu’elle porte à connaissance. En l’espèce, toute personne physique ou morale en acquiert ainsi la protection pour les mêmes raisons pendant toute la durée nécessaire à l’accomplissement de la mission engagée par le comité national d’éthique de la sécurité.

Article 6

Le comité national d’éthique de la sécurité peut charger un ou plusieurs de ses membres de procéder à des vérifications sur place. Ces vérifications ne peuvent s’exercer que dans les lieux publics et les locaux professionnels, après un préavis adressé aux agents intéressés et aux personnes ayant autorité sur eux, ou pour le compte desquelles l’activité de sécurité en cause était exercée, afin de leur permettre d’être présents.

L’accès aux lieux mentionnés au précédent alinéa ne peut être refusé.

Le comité national d’éthique de la sécurité peut décider de procéder à une vérification sans préavis si elle estime que la présence des agents intéressés ou des personnes ayant autorité sur eux n’est pas nécessaire ou constituerait une entrave à ses missions ou ses décisions à venir.

Lors de ses vérifications sur place et de ses visites, le comité national d’éthique de la sécurité peut entendre toute personne susceptible de fournir des informations. Il doit pouvoir s’entretenir avec toute personne dont le concours lui paraît utile dans des conditions assurant la confidentialité de leurs échanges.

Article 7

Le comité national d’éthique de la sécurité adresse aux autorités publiques et aux dirigeants des personnes privées mentionnées à l’article premier intéressés tout avis ou recommandation visant à remédier aux manquements constatés ou à en prévenir le renouvellement.

Les mêmes autorités ou personnes concernées sont tenues, dans un délai fixé par le comité national d’éthique de la sécurité, de rendre compte à celui-ci de la suite donnée à ces avis ou recommandations.

En l’absence d’un tel compte rendu ou s’il estime, au vu du compte rendu qui lui est communiqué, que son avis ou sa recommandation n’a pas été suivi d’effet, le comité national d’éthique de la sécurité peut établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel de la République française.

Le comité national d’éthique de la sécurité dispose d’un pouvoir d’injonction. Il peut donner force contraignante à un avis ou à une recommandation, ou à une ou plusieurs dispositions d’un avis ou d’une recommandation. Lorsqu’il n’est pas donné suite à un telle injonction dans un délai déterminé par le comité national d’éthique de la sécurité, ce dernier peut saisir le juge compétent d’une demande motivée aux fins d’ordonner toute mesure que ce dernier juge utile.

Article 8

Le comité national d’éthique de la sécurité peut intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction.

Lorsque le comité national d’éthique de la sécurité est saisi de faits donnant lieu à une enquête judiciaire ou pour lesquels une information judiciaire est ouverte ou des poursuites judiciaires sont en cours, il doit recueillir l’accord préalable des juridictions saisies ou du procureur de la République, selon le cas, pour la mise en oeuvre des dispositions de l’article 5 relatives à la communication des pièces et des dispositions de l’article 6. La décision des juridictions saisies ou du procureur de la République doit intervenir dans un délai compatible avec les objectifs du comité national d’éthique de la sécurité.

Si le comité national d’éthique de la sécurité estime que les faits mentionnés dans la saisine laissent présumer l’existence d’une infraction pénale, elle les porte sans délai à la connaissance du procureur de la République, conformément aux dispositions de l’article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale.

Le procureur de la République informe le comité national d’éthique de la sécurité de la suite donnée aux transmissions faites en application de l’alinéa précédent. Toute décision de rejet doit être dûment motivée au regard des objectifs particuliers et de la mission générale du comité national d’éthique de la sécurité.

Article 9

Sans préjudice des dispositions des articles 7 et 8, le comité national d’éthique de la sécurité porte sans délai à la connaissance des autorités ou des personnes investies du pouvoir disciplinaire les faits de nature à entraîner des poursuites disciplinaires. Ces autorités ou personnes informent le comité national d’éthique de la sécurité de la suite donnée aux transmissions effectuées en application du présent article et, en cas de refus, des raisons de sa décision.

À défaut d’information dans le délai qu’il a fixé ou s’il estime, au vu des informations reçues, que sa saisine n’a pas été suivie des mesures nécessaires, le Comité national d’éthique de la sécurité peut établir un rapport spécial qui est communiqué à l’autorité mentionnée au premier alinéa. Il rend public au Journal officiel ce rapport et la réponse de cette autorité.

Article 10

Le comité national d’éthique de la sécurité tient informé chaque personne physique ou morale l’ayant saisi de l’ensemble des actions qu’il engage pour sa défense.

Article 11

Le comité national d’éthique de la sécurité peut proposer au Gouvernement et au Parlement toute modification de la législation ou de la réglementation dans les domaines de sa compétence.

Article 12

Le comité national d’éthique de la sécurité remet chaque année au Président de la République et au Parlement un rapport portant sur les conditions d’exercice et sur les résultats de son activité. Ce rapport comprend une appréciation qualitative du respect des droits et libertés par les forces de sécurité publiques et privées au regard de la Constitution, du droit européen et du droit international. Ce rapport est rendu public.

Article 13

Les membres du comité national d’éthique de la sécurité, ainsi que les personnes que le comité consulte par application du sixième alinéa de l’article 5, sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments nécessaires à l’établissement des rapports prévus aux articles 7 et 12.

Article 14

Au deuxième alinéa de l’article 6 de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, après les mots : « Médiateur de la République », sont insérés les mots : « et, lorsque cela comporte un risque pour les personnes auteures de la saisine ou ayant témoigné dans le cadre de l’instruction, à ceux adressés au comité national d’éthique de la sécurité, »

Article 15

Les crédits nécessaires au comité national d’éthique de la sécurité pour l’accomplissement de sa mission sont inscrits dans un programme spécifique de la mission « pouvoirs publics » de l’État. Le président du comité national d’éthique de la sécurité élabore le budget selon les principes applicables à l’Assemblée nationale et au Sénat en vue de garantir leur indépendance. Il est ordonnateur des dépenses du comité national d’éthique de la sécurité. Il nomme ses agents et a autorité sur ses services.

Article 16

Est puni d’une amende de 25 000 € le fait de ne pas communiquer au comité national d’éthique de la sécurité, dans les conditions prévues à l’article 5, les informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission ou de ne pas déférer, dans les conditions prévues au même article, à ses convocations ou d’empêcher les membres de la commission d’accéder, dans les conditions prévues à l’article 6, aux locaux professionnels.

Les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :

1° L’interdiction des droits civils, civiques et de famille, suivant les modalités prévues par l’article 131-26 du code pénal ;

2° L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal.

Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, du délit défini au premier alinéa. Les peines encourues par les personnes morales sont :

1° l’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du code pénal ;

2° l’exclusion des marchés publics, suivant les modalités prévues par le 5° de l’article 131-39 du code pénal ;

3° l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée, suivant les modalités prévues par le 9° de l’article 131-39 du code pénal.

Article 17

La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte. Elle ne s’applique pas aux agents de la Polynésie française, du territoire des îles Wallis-et-Futuna, de la Nouvelle-Calédonie et des provinces de la Nouvelle-Calédonie.

Article 18

Les charges qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par le relèvement du taux mentionné au premier alinéa de l’article 1er du code général des impôts ainsi que par le relèvement du taux de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu prévu à l’article 197 du même code.

Intégrismes religieux : la Ligue des droits de l’Homme se mobilise

Face aux attaques insupportables des intégrismes religieux, islamistes ou christianistes, la Ligue des droits de l’Homme appelle à participer au rassemblement prévu dimanche 6 novembre à Paris, et publie, avec d’autres associations, organisations et partis politiques, le communiqué suivant :

Attachés à la démocratie, à la laïcité et au vivre ensemble, nous disons « non » aux intégrismes religieux

Ces dernières semaines ont été marquées par une offensive des extrémismes religieux dans notre pays. Depuis le 20 octobre, le Théâtre de la Ville à Paris a ainsi vu les représentations d’une pièce de l’Italien Roméo Castellucci (« Sur le concept du visage du fils de Dieu ») être fortement perturbées par des manifestations appelées par la mouvance catholique intégriste qui jugeait cette pièce blasphématoire. Les associations à la manœuvre (Civitas, l’AGRIF,… qui appartiennent à l’extrême droite traditionnelle) essaient de poursuivre cette offensive en suscitant ou en proférant des menaces à l’encontre d’une pièce qui sera prochainement donnée au Théâtre Garonne à Toulouse (« Golgota Picnic » de l’Argentin Rodrigo Garcia). Volontiers matinées d’antisémitisme et de haine des étrangers, les manifestations, déclarations et menaces qui se sont succédé sont des attaques contre le vivre ensemble auquel nous sommes attachés.

Ces derniers jours, la sortie du numéro de Charlie Hebdo en date du 2 novembre, représentant Mahomet et rebaptisé « Charia Hebdo », a été l’occasion de nouveaux appels à la haine et à la violence (site du journal hacké par des réseaux vraisemblablement islamistes, messages de menaces en cascade visant à remettre en cause le droit au blasphème,…). Ce 2 novembre, l’incendie criminel des locaux de Charlie Hebdo montrent qu’un palier a été franchi. Cet acte, qui n’est pas sans rappeler les sinistres autodafés, vise à faire taire un hebdomadaire au ton incisif et provocateur, c’est-à-dire une presse dont on connaît l’importance pour la vitalité de la démocratie. Qu’il soit le fait de personnes mues par une vision islamiste de la société ou qu’il relève d’une provocation de l’extrême droite, cet acte renvoie à une certitude : leurs auteurs sont, à l’instar des catholiques intégristes, des ennemis du vivre ensemble puisque l’effet, sinon le but, de leur acte favorise les tensions entre les citoyens, appelés à rejoindre, chacun avec sa religion en bandoulière, le camp de la haine, de l’intolérance et de la stigmatisation.

Les intégrismes religieux ont montré avec éclat ces dernières semaines à quel point ils étaient les ennemis de trois combats qui sont les nôtres :

  • Le combat pour la démocratie, cette dernière étant indissociable du droit absolu au blasphème, c’est-à-dire le droit de critiquer les dogmes sacrés. Si ces dogmes devaient régler la vie sociale, l’espace de la libre discussion démocratique serait en effet tout bonnement impossible.
  • Le combat pour la laïcité qui ne peut se marier avec le partage de l’espace public entre les différents dogmes et qui, au contraire, nécessite le refus de voir les religions être manipulées à des fins politiques.
  • Le combat pour le vivre ensemble, incompatible avec les combats visant à intimer à chacun le devoir et l’ordre de rejoindre des communautés religieuses fermées et vivant de la haine de la religion ou de l’athéisme de l’autre.

Bien loin de nous intimider ou de nous faire vaciller sur nos convictions, les actes de ces dernières semaines ne font que renforcer notre détermination à poursuivre avec force et ténacité ces  trois combats essentiels dans notre République.

Nous appelons tous les citoyens attachés comme nous à la démocratie, à la laïcité et au vivre ensemble à se rassembler ce dimanche 6 novembre à 15h00 sur le Parvis de l’Hôtel de Ville de Paris.

Premier signataires : LDH et  SOS Racisme la CGT, la FSU, l’Unsa Educ, la FIDL, la Confédération Etudiante, Cap 21, le PCF, le PG, le MRAP, les JRG, NPNS, l’UEJF

Passeport biométrique : le conseil d’Etat corrige

Pas de chance, Claude Guéant : le conseil d’Etat vient d’annuler partiellement l’article 5 du décret du 4 mai 2008, qui institue le passeport biométrique. Cet article autorisait la conservation de huit empreintes digitales dans la base de données « titres électroniques sécurisés » (TES), encore un fichier… Le journal Le Monde, dans son édition du 1er novembre (lire ici) explique : « Reprenant à son compte les arguments développés par la CNIL dès la fin de l’année 2007, la plus haute juridiction administrative considère en effet qu’enregistrer une telle quantité d’empreintes dans cette base apparaît inadéquat au regard de la finalité officiellement mise en avant pour en justifier la nécessité : sécuriser la procédure de délivrance de ce document. Elle rappelle en outre qu’une telle initiative ne respecte pas les recommandations formulées par le règlement européen  du 13 décembre 2004 ne prévoyant que le stockage de deux empreintes digitales également insérées dans la puce que contient cette nouvelle forme de passeport. »

C’est devenu une habitude : le gouvernement essaye de passer en force des articles de loi, des amendements, des décrets, liberticides, et le texte se trouve au final retoqué, soit par le conseil constitutionnel (c’est rare), par le conseil d’Etat (ça n’est pas fréquent), ou la cour de justice européenne (ça arrive de plus en plus souvent). Qu’importe, il continue : l’effet d’annonce aura fonctionné, et la publicité faite à ces « retoquages » est en général bien discrète !

Le même problème va se poser avec le projet de nouvelle carte d’identité, qui est en cours d’examen à l’Assemblée nationale et au Sénat, avec cette fois une difficulté supplémentaire : le Sénat va sans doute refuser de voter ce texte. Ce qui ne l’empêchera pas de passer, mais on aura gagné du temps !

11 novembre à Trévé : inauguration de la stèle à la mémoire des tirailleurs sénagalais

La plaque de bronze réalisée par Annie Lagadec

Le 11 novembre 2011, à 11h, Joseph Collet, maire de Trévé, inaugurera la stèle réalisée par Annie Lagadec à la mémoire des tirailleurs sénégalais internés dans un camp de novembre 1944 à février 1945. Ce sera l’épilogue d’une longue aventure, qui a mobilisé la section de la Ligue des droits de l’Homme Loudéac centre Bretagne de janvier à avril 2011.

Tout est parti d’un courrier électronique d’Armelle Mabon, historienne, spécialiste des combattants étrangers de l’armée française  pendant la deuxième guerre mondiale. Elle prend contact avec la section en octobre 2010, et nous signale l’existence, à Trévé, d’un camp où avaient été internés 400 tirailleurs sénégalais de novembre 1944 à février 1945. Ces hommes avaient été faits prisonniers par les Allemands au début de la guerre. Mais les nazis redoutant les maladies et surtout le mélange des races, ces hommes (on estime leur nombre à 70 000) ont été enfermés dans des « frontstallags », installés en France. A la Libération, nombre d’entre eux ont refusé de retourner chez eux : on ne leur avait pas réglé leur solde. Pour beaucoup, l’affaire s’est terminée dans le sang, avec notamment le massacre de Thiarroye, près de Dakar, au cours duquel il y a eu des dizaines de morts. Une partie de ceux qui étaient au frontstallag de Morlaix ont été transférés au camp de Trévé.

La section a alors décidé de faire revivre la mémoire de ces événements, et de janvier à mars 2011, Annie et Noël Lagadec et Jérôme Lucas se sont mis à la recherche de témoins de cette époque. Une trentaine de Trévéennes et Trévéens ont ainsi témoigné de ce qu’ils avaient vécu (lire les témoignages et voir les vidéos ici), et le nombre de témoignages a permis de se faire une idée assez précise de ces événements. Ils ont été rassemblés dans un recueil, intitulé « Nous n’avions jamais vu de Noirs », publié aux éditions Récits.

La conclusion de ce travail a été, outre la publication de ce recueil, l’organisation d’une manifestation publique au cours de laquelle a été projeté le film écrit par Armelle Mabon, « Oubliés et trahis, les prisonniers de guerre coloniaux et nord-arfricains ». A cette occasion, Joseph Collet, maire de Trévé, a proposé l’érection, à l’emplacement du camp, d’une stèle à la mémoire de ces soldats. Annie Lagadec, sculpteur, membre de la section, a réalisé la plaque de bronze (vidéo ici) qui sera fixée sur la stèle.

Le texte de la plaque : « De novembre 1944 à janvier 1945, plus de 300 ex-prisonniers de guerre africains ont été internés en ce lieu. Ne percevant pas leur solde, ils ont refusé d’embarquer à Morlaix pour rejoindre leur pays. Le 1er décembre 1944, leurs frères d’armes étant arrivés au Sénégal sur le Circassia furent victimes de la tragédie de Traroye. La population de Trévé se souvient. »

Le monument sera inauguré vendredi 11 novembre, à Trévé, par Joseph Collet, maire, Ronan Kerdraon, sénateur, et en présence d’Armelle Mabon, historienne, et d’Annie Lagadec.