C’est une grande victoire que vient de remporter la Ligue des droits de l’Homme : à sa demande, le conseil d’État vient de juger que les associations nationales – c’est le cas de la LDH – sont « recevables à contester les décisions locales liberticides ». Une décision d’une importance majeure, qui va permettre à de nombreuses associations de défense des droits d’agir avec davantage d’efficacité.
Depuis quelque temps, les tribunaux administratifs avaient considéré, dans différentes affaires concernant notamment des communes, les décisions contestées n’entraient pas dans le champ d’action de la Ligue, puisqu’elle est une association nationale, et qu’elle attaquait une décision à portée locale. Les tribunaux ne jugeaient donc pas les affaires concernées sur le fond, mais uniquement sur la forme. Ce qui équivalait à rendre impossible toute action de la Ligue contre un arrêté municipal liberticide par exemple. Ou alors, la Ligue aurait dû revoir ses statuts, et se transformer en confédération de sections ayant chacune statut d’association et personnalité juridique, ce qui était impossible. Les sections de la Ligue ont une autonomie d’action, mais n’ont pas le statut d’association relevant de la loi de 1901.
Voici le communiqué que la Ligue a publié ce mardi 24 novembre pour annoncer cette décision, qui ne concerne évidemment pas qu’elle : toutes les associations de défense des droits étaient concernées par cette interprétation contestable du droit.
LES ASSOCIATIONS NATIONALES JUGÉES RECEVABLES À CONTESTER LES DÉCISIONS LOCALES LIBERTICIDES
Par un arrêt rendu le 4 novembre 2015, la haute juridiction administrative, tout en rappelant le principe selon lequel une association ayant un ressort national n’a pas intérêt à agir à l’encontre d’une décision ayant un champ d’application uniquement local, y apporte une importante exception lorsque la décision contestée comporte des implications, notamment dans le domaine des libertés publiques (CE Sect., 4 nov. 2015, « Association « Ligue des droits de l’Homme » » n° 375178).
Cette décision fait suite à un long contentieux, opposant la LDH au maire de La Madeleine qui avait répandu, dans la presse locale, son souhait de chasser les personnes d’origine rom de la commune et avait cru bon interdire la mendicité puis la fouille de poubelles. La commune avait opposé en défense l’irrecevabilité de la LDH, association nationale, à contester une décision n’ayant d’effets que purement locaux, et avait été suivie par la cour administrative d’appel de Douai.
La LDH, représentée par maître Paul Mathonnet (cabinet Roger-Sevaux-Mathonnet), a porté ce contentieux devant le Conseil d’Etat, qui a donc fait droit à son pourvoi.
Cette importante décision va conforter l’action des associations nationales en lutte contre les mesures liberticides, prises notamment par de nombreux élus municipaux, en leur permettant de contester utilement toutes décisions ayant une incidence sur les libertés, au premier rang desquelles celles visant à exclure de la cité les personnes en situation de grande précarité.
Paris, le 24 novembre 2015