On se souvient du projet de l’ancien ministre de la défense, Gérard Longuet, de transférer les cendres du général Marcel Bigeard aux Invalides : il avait provoqué une joli tollé, de la part de ceux qui trouvent scandaleux qu’on puisse honorer la mémoire d’un homme qui considérait que la torture avait été un « mal nécessaire » pendant la guerre d’Algérie. Une pétition avait recueilli près de 10 000 signatures, et le projet semblait avoir été enterré.
Voici qu’aujourd’hui le maire d’Aix-les-Bains, Dominique Dor, offre à Bigeard un lot de consolation : le général a désormais son « esplanade » dans la ville. L’inauguration a eu lieu samedi 23 juin, sous haute surveillance : le maire, nous indique le site Aixlesbains.info faisant semblant de craindre des incidents.
La députée européenne d’Europe écologie les verts, Malika Benarab-Atou a publié un communiqué, qui a été rapidement repris par de nombreux sites, notamment celui de L’Association Nationale des Pieds Noirs Progressistes et leurs amis, et celui de la section de Toulon de la Ligue des droits de l’Homme. Il est reproduit ci-dessous.
Communiqué de presse
Bruxelles, le 19 juin 2012
Bigeard : « la torture en Algérie était un mal nécessaire »
Le Dauphiné Libéré nous apprend dans son édition du 15.06.2012 que le maire UMP d’Aix-les-Bains Dominique Dord inaugure, le 23 juin, un square portant le nom du général Bigeard.
Attribuer le nom de Bigeard à un square n’est pas un évènement anodin en cette 50ème année de l’indépendance de l’Algérie. Alors que ce cinquantenaire doit être le moment opportun pour rapprocher les peuples Français et Algérien, de cicatriser les blessures de cette période, la municipalité d’Aix-les-Bains ravive la douleur des victimes de Bigeard et la colère de celles et ceux qui en France se sont opposés à ses méthodes.
Rappelons pour mémoire que Bigeard a été l’un des protagonistes de la bataille d’Alger en 1957. Il se livra à la torture, une pratique qu’il qualifia en juillet 2000 de « mal nécessaire ». Le recours fréquent à la torture – supplice de la baignoire et utilisation de la gégène (décharges électriques) – avait été dénoncé en France par les intellectuels puis par quelques rares militaires, comme le général Jacques Pâris de la Bollardière, Compagnon de la Libération. Mais contrairement à Massu, qui a regretté l’usage de la torture, Bigeard n’avait émis aucun remord. « Je ne regrette rien ! » avait-il déclaré en 2007 à un quotidien Suisse.
Dans ces conditions, attribuer le nom de Bigeard à un square et diffuser l’information 2 jours avant les élections législatives, auxquelles Monsieur Dord était candidat, sonne comme un signal aux tenants de l’Algérie française et de l’extrême droite. Cela constitue une provocation à l’endroit des défenseurs des droits de l’homme et du principe des peuples à disposer d’eux-mêmes. Aix-les-Bains mérite mieux que cela, ville de Savoie, région qui fut un haut lieu de résistance et de défense des valeurs de la République. Monsieur Dord se serait distingué en honorant une femme ou un homme de Paix. Je déplore qu’il ait préféré un tortionnaire.
Malika Benarab-Attou
Eurodéputée Les Verts/ALE
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