Une vague blanche pour la Syrie

La Ligue des droits de l’Homme et la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme, en association avec  l’ordre des avocats de Paris, ont lancé un mouvement de solidarité avec le peuple syrien, intitulé « Un vague blanche pour la Syrie ». Pour de plus amples renseignements, se rendre sur le site http://www.vagueblanchepourlasyrie.org/?cat=3, ou sur la page Facebook https://www.facebook.com/pages/Vague-Blanche-pour-la-Syrie/148989415227675.

Voici, ci-dessous, l’explication de la démarche, et l’appel qui a été lancé et déjà signé par un grand nombre de personnalités.

Chaque jour, depuis plus d’un an, radios et télévision nous distillent la même information: cinquante ou cent morts en Syrie, des enfants torturés, des blessés et des médecins torturés dans les hôpitaux, les médicaments détruits dans les pharmacies.

Que faire face à l’impuissance mondiale ?

Au minimum, briser le silence  et faire savoir au peuple syrien qu’il n’est pas seul.

« Une vague blanche pour la Syrie » est née d’une idée simple et évidente : Que le monde entier sorte dans la rue en même temps  pour dire Stop, halte aux massacres .
Il s’agit d’impulser, à travers les réseaux sociaux et les médias, une manifestation internationale géante intitulée : « Une vague blanche pour la Syrie », avec pour principe de demander à chacun de sortir  de chez soi, un tissu blanc à la main, le mot « Stop » écrit dessus.  Et de déclencher ainsi au fil des fuseaux horaires, une gigantesque «ola » mondiale de protestation, une marée humaine constituant une immense vague blanche.

Pour cela nous souhaitons faire appel aux initiatives individuelles, à la société civile, à l’imagination de chacun, pour que, de la petite à la plus grande manifestation, les tissus blancs fleurissent partout dans le monde, en une action solidaire libre de toute influence politique, étatique ou partisane.

Une manifestation de  préfiguration de cette vague a été réalisée à Paris, Parvis des Libertés et des droits de l’homme, le 17 Avril 2012, jour anniversaire de l’Indépendance de la Syrie, en même temps que dans plusieurs villes et villages de France dont les mairies ont pavoisé en blanc.A Paris, Bertrand Delanoë, Marie de Paris, a conduit la vague, qui fut relayée par toutes les chaines de télévision et les radios françaises, ainsi que par de nombreuses chaines arabes.

Plus de 500 personnalités ont rallié le mouvement en moins de quinze jours.
Des milliers de photos ont été envoyées sur le site  vagueblanchepourlasyrie.org
La preuve a été faite que, en moins de trois semaines, et sans aucun moyen, la mobilisation était possible. La vague internationale peut être lancée.

Pour la faire exister, il faut maintenant des relais dans les différents pays du monde, l’intervention d’une ou plusieurs grandes agence de publicité, le soutien des têtes de réseaux sociaux, les Villes jumelées, les carnets d’adresses et murs facebook de personnalités de renom international.

L’Appel

Le peuple syrien vit une tragédie depuis vingt mois. Ayant osé s’exprimer massivement et pacifiquement pour la liberté, la démocratie, les revendications sociales contre la dictature de Bachar Al-Assad, celui-ci a répondu en tirant au revolver, au fusil, à la mitrailleuse, au canon, de ses chars, ses hélicoptères, ses avions, ses navires, sans oublier l’arme blanche et les terribles bombes à fragmentations, tout cela visant les hommes et les femmes jusqu’aux enfants. L’arithmétique de la mort atteint les 40 000 personnes, 100 000 autres arrêtées, torturées, disparues, des centaines de milliers de déplacés, 450 000 ont gagné l’étranger. C’est une guerre contre les civils, une horrible tempête détruisant les maisons, les outils de travail à la ville et à la campagne, les services publics.

Le peuple syrien s’affronte à « l’ensauvagement » de sa vie par un bourreau haineux et dominateur qui recourt à des crimes contre l’humanité. Le droit de vivre en Syrie est un devoir d’humanité pour chacun de nous. Là-bas, c’est ici, là-bas agissent des compagnons simples et lumineux, ici nous devons clamer notre colère.

Chacun doit se dire : « si je ne dis pas, ne serait-ce qu’un mot, alors qui ? Si je ne le dis pas tout de suite, alors quand ? » Là-bas se trouve un peuple souffleur de conscience refusant l’intimidation et surmontant la peur, ici peut et doit se trouver un peuple qui se compromette avec la dignité, la liberté des Syriens en décidant de dire et de faire une solidarité intrépide et courageuse en direction de tous les détenteurs d’autorité en France, en Europe et dans le monde qui se font surtout remarquer par leur défaillance. Bachar Al-Assad brutalise à l’extrême la Syrie, les manifestants pacifiques la civilisent. Bachar Al-Assad et son clan ont perdu leur légitimité mais persistent dans la répression d’une société pleine d’êtres enfermés de naissance contre laquelle l’Armée syrienne libre se trouve en première ligne.

Le monde ne fait même pas le minimum. L’ONU est aphone, impuissante, incapable de la moindre réaction humaine efficace. Le Conseil de sécurité, dans sa forme actuelle, bafoue sa « responsabilité de protéger «  les civils de tous âges pris pour cible. Il se limite à enregistrer régulièrement les vetos inexcusables de la Russie et de la Chine qui, par ailleurs, contribuent à armer Bachar Al-Assad. En attendant une réforme de l’ONU, pourquoi ignorer que, lorsque le Conseil de sécurité est bloqué par un veto, il est possible de saisir l’Assemblée générale qui bénéficie alors d’un large pouvoir ? Elle peut, dans ce cadre, prendre des initiatives appropriées à la situation tragique du peuple syrien. Sans oublier la saisine de la Cour pénale internationale.

L’Europe a certes décrété des sanctions mais leur réussite est mise en cause par les diverses livraisons de la Russie et de l’Iran. L’Europe ne devrait pas oublier le conseil de Walter Benjamin : « Laisser aller le cours des choses, voilà la catastrophe. »

La France a une parole généreuse, mais qui s’est trop longtemps évanouie dans une posture velléitaire, réclamant une démocratie à l’occidentale ignorant la grande diversité ethnique et confessionnelle du peuple syrien et le travail inouï que représente son rassemblement pour lequel milite notamment un mouvement laïc très ancien. La Syrie continue de connaître des centaines de manifestations pacifiques avec un mot d’ordre d’unité : « Un, un, un, le peuple syrien est un. » C’est « sa belle manière d’être avec les autres » dirait Eluard.

Vendredi dernier, 9 novembre, les mots d’ordre des manifestations pacifiques à Alep étaient : « Non au confessionnalisme, oui à l’unité nationale », « Non à la défiguration de notre révolution syrienne », « La Syrie est pour les Syriens », « Un seul pays pour un seul peuple », « L’unité nationale est notre boussole », « Le confessionnalisme est une balle contre notre révolution », « On va reconstruire, fils de martyrs, ta mère, la patrie », « Je suis un Arabe mais je défendrai les droits de mes frères kurdes et je salue la fraternité entre Arabes et Kurdes »… Chacun peut en avoir la preuve en consultant les sites des comités de coordination de la révolution syrienne.

La France doit s’engager concrètement et ardemment aux côtés de la société civile, des réseaux sociaux, des comités locaux dans les quartiers populaires et les villages, de la coordination nationale entre le mouvement insurrectionnel et la continuation de la société civile. Les Syriens ont besoin de nourriture, de médicaments et de matériel hospitalier, de fournitures scolaires, de matelas, de couvertures contre le tout proche hiver, très froid en Syrie.

La France, l’Europe, le monde doivent apporter la bonne réponse à l’agitation de l’épouvantail djihadiste, si précieux pour Bachar Al-Assad. La présence djihadiste encore marginale en nombre est un danger réel si le peuple syrien est abandonné à lui-même. Ne pas céder à la peur est la meilleure arme contre l’islam radical. Les journalistes courageux qui sont allés là-bas le confirment. Bien meilleure encore est l’arme d’un appui à tous ceux dont nous approuvons la lutte, celle de leur liberté contre un régime tortionnaire.

Ne laissons pas détruire ce pays dont l’histoire a été si précieuse pour toute l’humanité. C’est là qu’a été construite la première maison, qu’est apparu le premier alphabet, qu’ont été construits des édifices classés par l’Unesco Trésor de l’Humanité. Le peuple syrien, traditionnellement si hospitalier et pacifique, réclame et espère un appui rapide, efficace, sur place et dans les camps de réfugiés, une aide logistique et financière, et la reconnaissance de sa capacité à se créer un avenir de paix, de justice et de liberté.

Ajoutons qu’aujourd’hui, l’opposition syrienne évolue en se structurant mieux et en améliorant sa coordination. L’élection à la présidence du Conseil national syrien de Georges Sabra, figure historique de la résistance, qui a passé huit ans dans les prisons du régime, ainsi que la création d’une coalition  réunissant  d’autres formations et de grands résistants de l’intérieur, tels Riadh Seif, marquent une étape importante qui pourrait précipiter la chute du régime de Bachar Al-Assad. Dès lors qu’une bonne partie de la communauté internationale aura considéré, à l’instar de la France,  cette coalition nationale comme seule représentante légitime du peuple syrien, tous les moyens doivent lui être fournis pour assurer sa protection.

Il y a un an, beaucoup d’entre nous étaient au  Théâtre de l’Odéon, archi plein, dans une première action de solidarité avec le peuple syrien. Nous n’avons cessé depuis d’exprimer cette solidarité. Aujourd’hui, notre devoir est de continuer et de faire plus.