En Thaïlande des milliers de manifestants exigent plus de vaccins, les libertés démocratiques et la fin de la dictature

La troisième vague de la pandémie qui a fait depuis avril 5 569 morts contre 94 les treize mois précédents met clairement à jour l’incurie et l’irresponsabilité de la dictature en matière de stratégie vaccinale. La répression devient la seule réponse face l’exigence des vaccins pour tous et des droits et libertés démocratiques.

A Bangkok, plusieurs milliers de manifestants défilent en voiture contre le gouvernement

Publié sur courrierinternational.com avec AFP

Des manifestants défilent à Bangkok pour demander la démission du Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, le 15 août 2021 en Thaïlande – AFP

Plusieurs milliers de manifestants défilent dimanche en voiture à Bangkok pour demander la démission du Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, de plus en plus critiqué pour sa gestion de la crise du coronavirus et ses impacts sur l’économie.

Des centaines de voitures et de deux roues engorgeaient certains axes du centre de la capitale thaïlandaise dans un concert de klaxons, de nombreux piétons faisant, sur leur passage, le salut à trois doigts en signe de résistance aux autorités.

« Nous demandons la démission immédiate de Prayut Chan-O-Cha. Il n’a aucune capacité à administrer ce pays », a lancé Nattawut Saikua, un homme politique qui fût proche de l’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra, bête noire du gouvernement actuel.

Les organisateurs ont appelé à d’autres rassemblements en voiture dans la station balnéaire de Pattaya et à Chiang Mai, dans le nord du pays.

Le mouvement pro-démocratie porté par la jeunesse thaïlandaise a poussé des dizaines de milliers de personnes dans les rues en 2020 pour demander le départ de Prayut Chan-O-Cha, au pouvoir depuis le coup d’Etat de 2014, et une réforme de la monarchie, un sujet tabou auparavant dans le pays.

La contestation avait faibli ces derniers mois à cause des restrictions liées au Covid-19 et des poursuites judiciaires engagées contre des dizaines de protestataires.

Mais le mouvement a repris de la vigueur depuis une semaine avec des manifestations quasi-quotidiennes à Bangkok.

En cause, la flambée de Covid-19, avec plus de 20.000 nouveaux cas quotidiens, la lenteur de la campagne vaccinale et l’impact économique des restrictions.

« Le gouvernement a montré clairement qu’il ne voulait pas être tenu pour responsable pour toutes les pertes engendrées (…) il doit démissionner », a lancé Nattawut Saikua.

Les derniers rassemblements ont donné lieu à des affrontements, la police faisant usage de canons à eau, de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc pour les disperser.

Au moins trois manifestants ont été blessés vendredi, dont un grièvement à l’oeil.

AFPDes manifestants défilent à Bangkok pour demander la démission du Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, le 15 août 2021 en Thaïlande

Accusée de faire preuve d’une trop grande fermeté, la police a déclaré que le recours à la force était nécessaire pour maintenir l’ordre public.

« J’insiste sur le fait que nous nous appuyons sur les normes internationales », a déclaré dimanche Suwat Jangyodsuk le chef de la police nationale.

« Les rassemblements sont interdits à Bangkok car ils pourraient propager la pandémie ».

Pass sanitaire : CGT, Solidaires et FSU s’associent à la saisine des Sages

COVID-19 Ces organisations estiment que la loi, qui prévoit notamment l’extension controversée du pass sanitaire et l’obligation vaccinale pour les soignants, « s’attaque à plusieurs grands principes constitutionnels »

Publié le 03/08/21 par TC avec AFP

La CGT, Solidaires et la FSU ont annoncé mardi s’être associés à la saisine du Conseil constitutionnel sur la loi relative à la gestion de la crise sanitaire, pour «la défense des droits fondamentaux» des travailleurs. «Plusieurs organisations dont la CGT, Solidaires, et la FSU ont déposé [mardi] auprès du Conseil constitutionnel une contribution extérieure» sur ce texte, adopté le 25 juillet au Parlement, écrivent les trois organisations dans un communiqué commun.

Elles estiment que la loi, qui prévoit notamment l’extension controversée du pass sanitaire et l’obligation vaccinale pour les soignants, «s’attaque à plusieurs grands principes constitutionnels: le droit à l’emploi, l’égalité et l’interdiction de discrimination, le respect de la vie privée et le droit à la protection sociale et de la santé publique».

Procédure de suspension du contrat de travail

Les syndicats considèrent notamment qu’avec le pass requis pour les personnes fréquentant certains lieux et les salariés y travaillant, «la loi va notamment renforcer la subordination des salariés en octroyant aux employeurs des nouvelles dispositions disciplinaires non encadrées et ne pouvant être contrôlées ni par l’inspection du travail ni par la médecine du travail».

«Elle va créer ou accentuer anticonstitutionnellement de nouvelles discriminations entre salarié(s), en fonction de la nature de leur contrat de travail, du poste occupé ou de la branche professionnelle et du lieu dans lesquels ils exercent leur profession», poursuivent les syndicats.

Faute de pass ou en cas de non respect de l’obligation vaccinale pour les salariés concernés, la loi prévoit notamment une procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération, qui prend fin lorsque le salarié produit «les justificatifs requis». Le texte ajoute qu’un CDD pourra être rompu «avant l’échéance du terme», sans dommages et intérêt, les contrats d’intérim pouvant aussi prendre fin prématurément.

«Inconstitutionnalité de la loi»

Aux yeux des syndicats, le Conseil constitutionnel, qui doit rendre sa décision jeudi, après sa saisine par Matignon et des parlementaires de gauche, «ne peut que déclarer l’inconstitutionnalité de la loi et invalider les dispositions discriminatoires qui portent atteinte (aux) droits fondamentaux».

«Si la vaccination a fait ses preuves depuis des années, elle ne peut se faire dans n’importe quelles conditions et à n’importe quel prix. C’est par l’information, la pédagogie, le débat que les doutes peuvent être levés et non par la menace et la contrainte», estiment-ils.

Depuis le 21 juillet, le pass – test Covid négatif, attestation de vaccination ou certificat de rétablissement – est déjà obligatoire dans certains lieux de loisirs et de culture (cinémas, musées…). Il doit être étendu le 9 août, notamment aux cafés-restaurants ou aux trains grande ligne.

PASSE SANITAIRE: UN MAUVAIS COUP

Communiqué de la LDH

La lutte contre une pandémie est une nécessité qui n’implique ni déni du débat démocratique ni manifestations d’autoritarisme pas plus que le recours à la violence ou à une démagogie complotiste ou nauséabonde.

Le coup de force parlementaire auquel se livre le gouvernement présente tous les risques d’un système illisible, contradictoire et susceptible de provoquer plus de tensions que de bénéfices sanitaires alors qu’en même temps il porte lourdement atteinte aux libertés individuelles.

De la même manière que le gouvernement considérait le port du masque comme inutile quand les stocks de ceux-ci étaient insuffisants, aller vers une vaccination quasi obligatoire qui ne devait jamais l’être suppose que, pour le moins, tout le monde puisse avoir accès au vaccin.

En faisant primer la contrainte sans même s’être assuré de la capacité de vacciner à marche forcée la totalité ou presque de la population, le gouvernement renonce à toute pédagogie, pourtant indispensable, et inverse les priorités.

Ce seront, une nouvelle fois, les plus fragiles qui en supporteront les pires conséquences, notamment en raison de la suppression annoncée de la gratuité des tests PCR.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) déplore que dans le domaine si précieux de la protection de la vie, le gouvernement ait adopté la voie d’un autoritarisme qui est devenue sa marque de fabrique. 

Paris, le 22 juillet 2021