Le soutien français aux artistes Afghans

Publié sur toutelaculture.com le 18 AOÛT 2021

Alors que les talibans prennent possession de Kaboul, la population civile, outre les artistes, fuit l’Afghanistan. Aujourd’hui, une partie du monde de la culture se mobilise pour les aider.  

Un contexte difficile

Cette toute nouvelle prise de pouvoir par les talibans fait trembler la capitale, le pays ainsi que la communauté internationale ; leur occupation de pouvoir précédente, de 1996 jusqu’en 2001, avait été marquée par une application violente de ce qu’ils disent être la loi islamique, dans sa vision la plus perverse et radicale.  

Pendant ce temps-là, en France, une trentaine d’institutions culturelles, dont des centres dramatiques nationaux,  ont remis aux mains des autorités une liste de cinquante-deux artistes à qui il faudrait venir en aide. Qui consisterait tout à la fois à l’accès aux billets d’avion, aux visas et aux logements. Des avions militaires ont par ailleurs été affrétés par le gouvernement français, puisque les vols commerciaux ont été interrompus. Le problème reste cependant l’accès des populations à l’aéroport, rendue difficile en raison du contexte actuel. Pour le moment, la France a exfiltré des diplomates ou Afghans ayant collaboré avec le pays. 

L’investissement des institutions et établissements culturels…

Le niveau de danger pour les artistes est pris en considération, notamment pour les femmes qui pourraient pâtir de la dureté d’un tel régime imposé par les talibans. Les artistes sont explicitement visés par ce groupe, qui nourrit une haine à l’égard de la culture et les exècrent. Ils ont d’ailleurs déjà proféré des menaces à leur égard, tout à la fois dans le passé et récemment, quand les créateurs ne sont pas physiquement attaqués ou tués. Il faut rappeler le cas de Khasha Zwan, humoriste et acteur de la région de Kandahar, visé car il aimait caricaturer les talibans. Celui-ci a été tué par lynchage fin juillet. Il est déjà devenu un symbole de la folie du nouveau régime à l’encontre des artistes. 

Maria Carmela Mini, directrice du festival Latitudes Contemporaines de Lille, a expliqué auprès de l’AFP « Nous avons établi une liste des artistes les plus en danger, en particulier des femmes qui font du théâtre. » Cette liste compte en tout et pour tout soixante-dix personnes, en incluant les familles desdits artistes. Carmela Mini mène d’une main de fer ce projet, plaide cette cause auprès du ministère de la Culture pour les aider à quitter l’Afghanistan mais aussi à s’insérer au sein de la société française. Selon ses dires, les ministères qui étaient présents lors d’une réunion organisée pour l’occasion, ont accepté de mettre en place une procédure de visa accéléré.

… de longue date

Des structures accueillent depuis longtemps les artistes exilés de tous horizons, dont des Afghans d’origine, en danger avant même l’arrivée des talibans. C’est notamment le cas de l’association L’atelier des artistes en exil, qui accueille essentiellement les artistes liés aux arts visuels, dont beaucoup de femmes afghanes artistes. Cette aide consiste en un accompagnement, une réinsertion, notamment à l’aide d’une résidence d’artistes installée dans Paris. Logés, pouvant créer librement, suivant des cours de français et aidés sur le plan juridique, psychologique et social, ils ont alors la possibilité de reprendre une vie normale sur notre territoire. Le MUCEM de Marseille a toujours travaillé sur l’accueil d’artistes en exil venant du monde entier. Ils ont lancé une mobilisation pour cette situation d’urgence, et soutiennent aujourd’hui l’Atelier des artistes en exil. Ils ont lancé un appel aux dons pour fournir des billets d’avions aux artistes fuyant les talibans. La campagne est en ce moment efficiente sur le site d’Helloasso. A l’heure où nous écrivons, il leur manque 30% de dons. D’autres établissements culturels se sont mobilisés et ont suivi ce mouvement d’aide : on y compte entre autres le FRAC, les Beaux-Arts de Marseille, l’ENSP d’Arles, le Centre photographique à Marseille. 

D’autres aides politiques

La maire de Lille a quant à elle souhaité accueillir des réfugiés afghans. Elle a réquisitionné des logements sur la ville qui seront mis à disposition des futurs arrivants, et a elle aussi alerté le ministère sur l’urgence de la situation. 

Un appel aux dons a par ailleurs été lancé par la ville. « La Ville de Lille et la Fondation de Lille lancent un appel aux dons ‘Accueil Afghans en danger’, dont les fonds permettront de prendre en charge les frais de rapatriement ainsi que les frais de vie quotidienne« , a adressé Aubry dans un communiqué le lundi 17 août. 

.@lillefrance est engagée pour l’accueil d’Afghans actuellement en danger dans leur pays. Je vous invite à répondre à l’appel aux dons de la @fondationlille : https://t.co/AvDzIJo5ce pic.twitter.com/9Raw7PICLd

— Martine Aubry (@MartineAubry) August 9, 2021

Elle a également interpelé Macron pour mettre en lumière l’urgence de la situation : « Monsieur le Président de la République. Que fait la France pour accueillir les Afghans en danger, au-delà du rapatriement réalisé de ceux qui avaient travaillé pour la France ? « 

Révoltes dans les centres de rétention : le gouvernement jette de l’huile sur le feu

Paris, le 3 août 2021

OEE – Observatoire de l’enfermement des étrangers

Le mouvement de révolte qui a éclaté ces derniers jours au CRA (centre de rétention administrative) du Mesnil Amelot met une nouvelle fois en lumière les conditions désastreuses dans lesquelles des personnes étrangères, à qui on reproche seulement d’être dépourvues de documents de séjour, sont enfermées dans ces lieux de privation de liberté. Des conditions qui ont empiré avec la crise sanitaire, notamment depuis l’automne 2020. La seule réponse à la légitime révolte de ces personnes a été une répression violente par les forces de police.

Les tensions se sont encore aggravées depuis que l’administration oblige les personnes en instance d’éloignement à subir un test PCR afin de pouvoir les expulser vers les pays qui exigent un test négatif pour entrer sur leur territoire. Celles qui refusent sont placées en garde à vue à la fin de la période de rétention et souvent condamnées à de lourdes peines de prison pour avoir fait obstacle à leur propre expulsion. Après avoir purgé leur peine, elles sont renvoyées en CRA et un cycle infernal CRA/prison/CRA/… s’engage alors pour nombre d’entre elles. Pourtant, ces condamnations sont contraires à la loi.

En effet, comme l’ont souligné les associations rassemblées dans l’Observatoire de l’enfermement des étrangers (OEE) dès le mois de septembre 2020, « le refus de se faire tester n’entre pas dans la définition du délit décrit et sanctionné par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers (Ceseda) » et le Code civil comme le Code de la santé publique interdisent « qu’un acte médical, a fortiori invasif comme c’est le cas des tests Covid, soit pratiqué sans le consentement de la personne ». [1]

La contrôleuse des lieux de privation de liberté vient de le rappeler, « il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale. Toute personne, quelle que soit sa situation, peut librement s’opposer à un acte médical. L’exercice d’une liberté fondamentale ne saurait être qualifiée de délit, ni faire l’objet de poursuites et d’emprisonnement ferme. »

Or, les personnes retenues n’ont pas réellement d’alternative puisqu’elles doivent choisir entre deux risques tout aussi insupportables pour elles : être poursuivies pénalement si elles refusent le test ou être expulsées si elles l’acceptent.

Bien plus, le gouvernement vient de faire voter à la sauvette, dans le cadre du projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire, un amendement tendant à contourner les décisions rendues par plusieurs tribunaux qui, sur la base de ces principes, ont refusé de condamner les personnes poursuivies pour ces refus de tests. Si elle n’est pas censurée par le Conseil constitutionnel, cette disposition complétera l’article 824-9 du Ceseda en permettant de condamner à une peine de trois ans de prison tout étranger refusant « de se soumettre aux obligations sanitaires nécessaires à l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet ».

Les associations rassemblées dans l’OEE dénoncent cette manœuvre, dont les conséquences ne pourront qu’accroître la tension qui prévaut dans les CRA. Elles demandent la fermeture de tous les lieux de détention administrative des personnes étrangères.

Paris, le 3 août 2021

Organisations membres de l’OEE :

ACAT-France, ANAFE, Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), COMEDE, Droits d’urgence, FASTI, Genepi, GISTI, La Cimade, Le Paria, Ligue des droits de l’homme, MRAP, Observatoire citoyen du CRA de Palaiseau, Syndicat de la magistrature (SM), Syndicat des avocats de France (SAF)

SOS MEDITERRANEE : UNE MER DE HONTE (Non assistance des Etats face à la détresse des migrants)

NEWSLETTER – n°56 • 12 mai 2021

ÉDITO
Une mer de honte. Loin des radars, le drame évitable des naufrages en Méditerranée se poursuit et nous en sommes les premiers témoins.

Témoins du drame, lorsque nos équipes à bord de l’Ocean Viking, sillonnant désespérément la mer à la recherche de survivants, découvrent le 22 avril les restes d’une embarcation retournée et une douzaine de corps.

Témoins de la non-assistance des États, lorsque malgré les appels de détresse répétés de cette embarcation dès le 21 avril, aucun centre de coordination des secours maritimes n’a assumé sa responsabilité, aucune opération de recherche n’a été lancée par les marines nationales.

Témoins du silence mortel enfin. Pour ces 130 personnes disparues, point d’éditions spéciales, point de discours des dirigeant.e.s politiques, seule une homélie du pape qualifiant cette énième tragédie de « moment de la honte » et quelques communiqués.

Bénévoles, équipes en mer ou à terre, citoyen.ne.s mobilisé.e.s, nous ne nous résignons pas à cette indifférence et restons déterminé.e.s à agir.

Pour les 236 personnes secourues le 27 avril par nos équipes et les autres à venir, nous nous engageons à poursuivre notre action vitale de sauvetage en mer et notre interpellation des États européens.

Merci pour votre soutien en ces circonstances difficiles.

L’équipe de SOS MEDITERRANEE