IMPUNITÉ POLICIÈRE : POUR LE CONSEIL D’ETAT, LES FORCES DE L’ORDRE DOIVENT ÊTRE MIEUX IDENTIFIÉES

Communiqué LDH et ACAT-France 11.10.2023

Une victoire décisive. Le Conseil d’Etat a finalement donné raison à l’ACAT-France et à la LDH (Ligue des droits de l’Homme). Ce 11 octobre, il a reconnu des failles dans l’identification des forces de l’ordre, préjudiciables en cas de poursuites contre un agent suspecté d’abus, et ordonné au ministère de l’Intérieur de revoir le numéro RIO, ce fameux matricule qui a été jugé insuffisant.

C’est une décision attendue depuis un an : après une fin de non-recevoir de la part du ministère de l’Intérieur, l’ACAT-France, la LDH et Jérôme Graefe, de l’observatoire parisien des libertés publiques, s’étaient tournés vers la justice en septembre 2022 pour que les forces de l’ordre soient mieux identifiées.

En cause : le numéro RIO, pour référentiel des identités et de l’organisation, ce matricule à sept chiffres rendu obligatoire en 2013 pour permettre une meilleure identification des agents sur le terrain. Un moyen nécessaire en cas de poursuites contre un agent, en vertu du principe constitutionnel selon lequel l’administration doit pouvoir rendre compte à ses administrés.

Mais trop petit, souvent couvert voire masqué, quand il n’est pas carrément absent, l’intérêt du RIO est limité. Conséquence, les poursuites contre les agents soupçonnés de violences illégales sont rares ou infructueuses. Le but de ce recours en justice était donc double : faire reconnaître que le non-port du RIO était un phénomène d’ampleur, et contraindre le ministère de l’Intérieur à améliorer la lisibilité de ce matricule.

Dans une décision sans équivoque rendue en assemblée du contentieux, sa formation la plus solennelle, le Conseil d’Etat nous donne raison sur ces deux points. Concernant le port du RIO, pourtant obligatoire, la plus haute juridiction administrative parle d’une « carence » du ministère de l’Intérieur « à faire assurer son respect par ses agents ». Elle enjoint donc le ministère à garantir cette obligation.

Le Conseil d’Etat inflige enfin un second revers : il ordonne de rendre le RIO plus lisible.

Sur ce point, nos associations apportent une solution qui permettrait au ministère de l’Intérieur de se conformer à la justice. Nous proposons que le RIO soit écrit en plus gros, dans le dos, sur les épaules voire le casque, sur une matière réfléchissante pour être visible de jour comme de nuit, et plus facilement mémorisable.

Ces mesures simples – un simple arrêté ministériel suffit – contribueraient à renforcer l’Etat de droit et restaurer la relation entre la police et la population, abimée par un sentiment d’impunité auquel le (non) port du RIO contribuait largement.

Paris, le 11 octobre 2023

Des observateurs de la LDH encore réprimés par les forces de l’ordre à Toulouse

Publié sur le site huffingtonpost.fr

À Toulouse, des observateurs de la LDH pris à partie par des policiers

« Je vous emmerde la LDH, vous nous pétez les couilles », a lancé un policier aux observateurs de la Ligue des Droits de l’homme, lors de l’acte 46 des gilets jaunes. L’un d’entre eux a été blessé.

VIOLENCES POLICIÈRES – L’acte 46 des gilets jaunes ce samedi 28 septembre à Toulouse a été marqué par des échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre. Mais ces dernières sont également accusées d’avoir pris à partie des observateurs de la Ligue des Droits de l’Homme, qui a dénoncé une situation récurrente selon eux.

Dans une vidéo, filmée par un journaliste de RT France, on aperçoit des policiers frappant des personnes vêtues d’un gilet jaune et bleu avec l’inscription “Observateur LDH Copernic Syndicat d’avocat de France”et un casque bleu. Un autre extrait plus long montre ensuite une conversation entre un policier et un des observateurs: “Je vous emmerde la LDH. Vous nous pétez les couilles”, lance un des policiers, avant de sommer les observateurs de se disperser.

Contactée par Le HuffPost, la LDH de Toulouse a confirmé que les personnes prises à partie faisaient bien partie d’un groupe de cinq observateurs de l’Observatoire des Pratiques Policières (OPP).

Trois observateurs ont été touchés, deux ayant reçus des coups de matraque et l’un souffrant de “contusions et d’une côte fêlée” selon les précisions communiquées par la LDH de Toulouse au HuffPost. Les observateurs “ont été insultés, menacés, gazés, frappés et matraqués alors qu’ils ne faisaient que remplir leur mission. (…) Pierre, un des observateurs, vient d’être pris en charge par les pompiers après cette nouvelle agression”, dénonce l’organisme.

L’Observatoire des Pratiques Policières a vu le jour à Toulouse en mars 2017, après plusieurs affaires qui ont relancé le débat sur les violences policières: les manifestations contre la loi travail, le projet contesté d’un centre commercial mais aussi l’affaire Théo. Créé sous la houlette de la Ligue des Droits de l’Homme, de la Fondation Copernic et du Syndicat des Avocats de France, l’OPP a déployé à partir du mois de septembre 2017 des observateurs sur toutes les manifestations déclarées, rapporte France3 Régions.

Le premier rapport a été rendu public en avril 2019 -après le pic de la crise des gilets jaunes– et pointe “les initiatives agressives des policiers en poste ainsi que l’usage disproportionné des outils de maintien de l’ordre”.

Toutefois, le rapport dénonce également “le traitement particulier qui est fait par les policiers et gendarmes en charge du maintien de l’ordre” aux observateurs de l’OPP. Dans une lettre adressée le 25 septembre au préfet de la Haute-Garonne et au directeur départemental de la Sécurité Publique et envoyée au HuffPost, l’OPP estime qu’il y a eu “près de 25 atteintes physiques” des policiers contre ses représentants, avec une nette augmentation après la publication du rapport.

Mi-septembre, un premier membre de l’OPP avait porté plainte, affirmant avoir été blessé au cours d’une charge de police.

Dans son communiqué publié ce samedi, l’OPP s’interroge sur les raisons de ces prises à partie, et n’hésite pas à évoquer l’hypothèse d’un ordre donné par la hiérarchie. “Soit le Préfet et le DDSP ont donné des ordres pour faire des observateurs des ‘persona non grata’ (…) soit les unités de police sur le terrain font ce qu’elles veulent, mènent une sorte de ‘guerre privée’ aux observateurs de l’OPP en échappant à tout contrôle de leur hiérarchie”, écrivent les responsables de l’Observatoire, qui promettent de ne pas en rester là.

Environ un millier de personnes ont battu le pavé à Toulouse ce vendredi et la police a, à plusieurs reprises, fait usage de gaz lacrymogènes et d’un canon à eau, a constaté l’AFP.  Les forces de l’ordre ont été la cible de “projectiles, d’outrages et d’injures” et ont procédé à cinq interpellations, selon un communiqué de la préfecture.

Communiqué de la section de Montpellier de la Ligue des droits de l’Homme

Maintien de l’ordre, OUI
Mutilations, NON
La Ligue des droits de l’Homme Section Montpellier publie ce jeudi 26 septembre 2019 un rapport glaçant sur les agissements des forces du maintien de l’ordre lors de la manifestation des Gilets Jaunes du 7 septembre 2019 qui a eu lieu à Montpellier suite à un appel national.
Loin de constituer des actions involontaires ou une méconnaissance des procédures, les faits contenus dans ce rapport semblent au contraire caractériser une intention volontaire de blesser voire de mutiler les manifestants afin de sanctionner leurs actions.
Il est d’autant plus inquiétant que ces pratiques semblent tolérées voire parfois encouragées, aucun responsable d’unité ni collègue policier situé à proximité du lanceur/tireur ne semblant relever l’usage dangereux qui est fait de l’armement utilisé.
Nous demandons que le Préfet de l’Hérault prenne la mesure de la gravité de ces faits et adopte les mesures nécessaires pour qu’elles ne se reproduisent pas lors des manifestations prévues les 28 et 29 septembre 2019 à Montpellier ni lors de toute autre manifestation ultérieure.
Ce rapport s’inscrit dans la continuité des quatre rapports précédents publiés par la section montpelliéraine de la Ligue des droits de l’Homme. Ils dénonçaient un usage disproportionné de la force publique face aux manifestants avec notamment huit personnes gravement blessées au visage par LBD40, des pressions graves et continues sur les observateurs LDH, les photographes et les vidéastes ainsi que la violence institutionnelle déployée par le tribunal correctionnel de Montpellier dans le traitement des dossiers relatifs aux Gilets Jaunes. A la veille du premier anniversaire du mouvement des gilets jaunes, le présent rapport indique que la proportion et le discernement font toujours défaut dans l’usage de la force publique.

La LDH Section Montpellier tient à souligner que, dans un Etat de Droit, la sanction relève de la justice pénale et non des forces du maintien de l’ordre et qu’en aucun cas cette sanction saurait être de nature physique. La France peut-elle encore être qualifiée d’Etat de Droit ?

 
Le jeudi 26 septembre 2019,
Ligue des droits de l’Homme Section Montpellier