Grèves et thatchérisme de retour en Grande-Bretagne

Depuis plusieurs mois se développe en Grande Bretagne un vaste mouvement social touchant tous les secteurs pour défendre les salaires contre une hausse vertigineuse du coût de la vie. En face un gouvernement aux accents thatchériens menace les grévistes. Pendant ce temps la City augmente les salaires des patrons des cent plus gosses entreprisses de près de 40%! C’est le retour du néolibéralisme brutal, destructeur des services publics et des droits des salariés. La LDH 66 affirme sa solidarité avec les mouvements sociaux en France comme ailleurs en défense de leurs droits, les droits sociaux faisant partie intégrante des droits humains.

Publié sur radiofrance.fr/franceinter le 23 août 2022

Jamais depuis plus de 30 ans la Grande-Bretagne n’avait connu de tels mouvements sociaux. Dans le même temps, la campagne conservatrice semble rejouer les années Tchatcher.

Les grèves se multiplient en Grande-Bretagne…

C’est du jamais vu depuis 30, voire 40 ans pour certains secteurs comme le train ou le métro. Londres était paralysée le week-end dernier et devrait encore l’être jeudi et samedi. Les postiers sont aussi partants pour un large mouvement social. Et c’est loin d’être fini !

Si British Airways a conclu un accord salarial de dernière minute qui permet d’éviter le pire à l’heure où les Britanniques reviennent de vacances, ce n’est pas le cas des enseignants et des personnels de santé, qui menacent eux-aussi d’arrêter le travail massivement.

D’abord, permettez-moi un rien de shadenfreude : j’ai tellement lu de commentaires ironiques de la presse britannique sur la moindre grève en France, qu’un mouvement social massif dans le cœur battant du thatcherisme est une sorte de plaisir coupable.

Margaret Tchatcher a quitté le pouvoir il y a plus de 30 ans !!!

En est-on bien certain ? Parce que la campagne qui vise à départager les deux leaders conservateurs Liz Truss et Rishi Sunak s’achève dans quelques jours et, de l’aveu même des commentateurs, s’est faite sur des thèmes et des solutions typiquement thatchériens.

Elle verra probablement dans moins de deux semaines maintenant, le 5 septembre, l’élection de l’actuelle ministre des Affaires étrangères, Liz Truss, entrer à Downing Street. Or Liz Truss se présente elle-même comme une réincarnation de Maggie.

On lui doit des déclarations particulièrement dures contre les ouvriers britanniques qui, selon elles, ne « travailleraient pas assez ». On lui doit aussi une volonté dogmatique d’aller au clash avec l’Union européenne sur le Brexit et l’Irlande du Nord.

On lui doit même des propositions plus vengeresses les unes que les autres contre les mouvements de grève et les syndicats, promettant de durcir encore les conditions d’exercice de ce qui reste dans le monde un droit social fondamental.

Les conservateurs seraient en partie responsables de ces grèves ?

Disons que les conservateurs n’ont pas donné d’eux-mêmes une image de bienveillance vis-à-vis d’un corps social brutalisé par une inflation stratosphérique qui devrait, selon la banque Citigroup, atteindre 18% d’ici la fin de l’année.

Prenez Boris Johnson, par exemple. Le Premier ministre sortant n’a rien de trouvé de mieux – alors que les mouvements de grève s’accumulent – de partir en vacances à grand frais et en famille en Grèce, laissant l’administration gérer les affaires courantes.

Dans le même temps, les Britanniques apprenaient que leur facture énergétique annuelle pourrait grimper de 80% pour atteindre 4 200 €, voire 6 300 € dans la seconde moitié de l’année prochaine. Les 500 € d’aide gouvernementales semblent dérisoires.

Par ailleurs, la City n’a pas trouvé mieux dans ce contexte que d’augmenter les salaires des patrons ! Les 100 plus grosses entreprises britanniques ont augmenté la rémunération de leurs PDG de… 39%, soit un salaire ce 4 millions d’euros annuels, en moyenne.

La Grande-Bretagne n’est pas seule à subir cette inflation en Europe

Certes, mais elle est seule à subir deux chocs économiques simultané : l’inflation qui est bien sûr mondiale et qui est due à la hausse des coûts de l’énergie, mais aussi au Brexit qui crée partout en Grande-Bretagne des difficultés à l’exportation et à l’importation.

Un Brexit que Liz Truss promet de gérer à la hussarde, faisant de la Grande-Bretagne une sorte de nation-pirate du commerce mondial. Mais on sera loin des Caraïbes et c’est le pire des scénarios pour « little England », les Britanniques d’en-bas dirait-on en France.

Face aux attaques en cours de l’extrême droite le Planning familial continue d’agir et appelle à le soutenir

La LDH apporte son soutien au Planning familial, engagé depuis toujours pour la défense des droits sexuels et reproductifs de toutes et tous, face aux attaques dont il fait l’objet. Elle rappelle son rôle essentiel pour l’accueil inconditionnel des personnes, quelle que soit leur identité de genre. (lire le communiqué)

  • 19.08.2022 – Communiqué de presse – Le Planning Familial

Oui, notre accueil est inconditionnel. Oui, les personnes trans ont leur place dans notre mouvement.

Le Planning familial, organisation féministe et d’éducation populaire, ses militant·es et ses responsables font depuis le 18 août 2022 l’objet d’une attaque extrêmement violente sur Twitter et sur d’autres réseaux sociaux, de la part de personnalités d’extrême-droite et de leurs sympathisant·es. Ces attaques prennent prétexte d’une affiche présentant une personne trans pour appeler à notre désubventionnement, pour questionner notre légitimité en tant qu’association de défense des droits des femmes et de lutte pour le droit à l’avortement.

Association agissant depuis plus de 65 ans, le Planning familial pratique un accueil inconditionnel des personnes, quelle que soit leur identité de genre. Parmi les plus de 300.000 personnes que nous rencontrons tous les ans lors de nos accueils, de nos animations et de nos actions, des personnes trans nous demandent conseil pour la contraception, l’avortement, le suivi médical de leur transition. Il nous appartient de les accueillir. Il nous appartient de faire en sorte qu’elles se sentent les bienvenues. Nous, féministes, n’accepterons pas de voir le Planning familial faire l’objet d’une campagne de dénigrement sur le dos des minorités de genre. Oui, notre accueil est inconditionnel. Oui, les personnes trans ont leur place dans notre mouvement. Rien ne peut justifier la violence des propos tenus depuis plusieurs jours à l’encontre de notre organisation et des personnes concernées.

Rien sauf la haine. Et cette haine, nous la combattrons sans faillir. Nous consultons nos conseils juridiques pour poursuivre ces instigateurs de haine, qui sont parfois des élu·es de la République. Les droits sexuels et reproductifs sont un tout : au Planning nous ne les hiérarchisons pas, nous nous battons tout autant pour l’avortement que pour la santé sexuelle des personnes trans ou encore pour l’accès des jeunes à l’éducation à la sexualité. Seule cette cohérence est efficace contre les antichoix. Nous appelons l’ensemble des organisations féministes, organisations politiques, syndicats, associations progressistes, allié·es à affirmer publiquement leur soutien au Planning familial, à ses militant·es, à ses valeurs, à ses combats, à ses actions quotidiennes auprès des publics.

Cela fait 15 ans que le blocus d’Israël détruit le système de santé de Gaza

Une situation d’injustice criminelle dont la responsabilité incombe entièrement aux autorités de l’état d’Israël et son gouvernement avec un blocus depuis 15 ans qui conduit à une forte mortalité infantile et un état sanitaire catastrophique et explique une espérance de vie parmi les plus basses du Moyen-Orient (elle est inférieure de presque dix ans à celle des Israéliens). La LDH 66 est totalement solidaire de la population de Gaza. Elle par ailleurs en train de constituer une exposition publique réactualisée sur la nakba (la grande catastrophe) du peuple palestinien.

Par Yara M. Asi, le 19 août 2022

Les attaques récentes contre Gaza, qui ont tué 49 personnes, ont exacerbé la crise sanitaire déjà existante dans la Bande. Yara M. Asi explique de quelle façon le blocus d’Israël, qui a affaibli le système de soins, tue des Palestiniens depuis plus de 15 ans.

Dans la Bande de Gaza, un cessez-le-feu précaire se met de nouveau en place. Les familles des morts suite aux récentes attaques israéliennes contre la Bande, au nombre de 49 au moins (dont 17 enfants), essaient maintenant de se représenter comment vivre sans eux. Les professionnels de santé de Gaza, auxiliaires paramédicaux, médecins, personnel infirmier, s’efforcent de trouver un peu de temps pour se reposer, tout en dispensant des soins qui peuvent sauver la vie des blessés alors que le matériel et le personnel manquent. Quant aux jeunes de Gaza, ils arpentent les rues avec des balais et des sacs poubelles, ramassant les gravats et les vestiges des destructions.

Encore une série de bombardements qui s’ajoutent à tous ceux des quinze dernières années, même si cette offensive a duré moins longtemps que celle de mai 2021, qui a tué 261 Palestiniens. Comme d’habitude, ces images spectaculaires de violence et de dévastation ont figuré dans les actualités mondiales – ce sont les rares occasions où les souffrances des Palestiniens font l’objet d’un débat public.

Le sujet est difficile à éviter, quand les médias sociaux diffusent largement des photos et des vidéos d’enfants morts et de familles désespérées. Le grand public mondial est sensible aux images de morts subites et violentes. Mais les gens de Gaza, y compris les enfants, meurent de façon plus lente, plus insidieuse, depuis des décennies, et surtout depuis l’instauration du blocus il y a plus de 15 ans.

Le 2 août, quelques jours avant le premier bombardement, Gaza traversait déjà une situation terrible qui n’a pas suscité beaucoup d’attention dans le monde, à l’exception de quelques communiqués de presse publiés par des organisations de défense des droits humains.

Israël, qui contrôle presque toute la circulation à l’entrée et à la sortie de la Bande de Gaza, avait fermé tous les points de passage avec Gaza, y compris Erez, lieu de sortie pour les patients ayant besoin de soins médicaux urgents et d’autres personnes nécessitant des services humanitaires, et Kerem Shalom, par lequel transitent les produits dont Gaza a besoin, notamment le combustible nécessaire au fonctionnement de la seule centrale électrique de Gaza. Dans ces conditions, les habitants avaient au plus 4 heures de courant régulier par jour.

Ce n’est que l’exemple le plus récent du châtiment collectif infligé aux habitants de Gaza, qui débouche sur des conséquences déplorables en termes de santé physique et mentale sans rapport avec les bombardements occasionnels subis par ces habitants. En raison du stress et des traumatismes constants, de l’insécurité élevée en ce qui concerne la nourriture et l’eau, et des conséquences durables de la violence des bombes et snipers israéliens, notamment des milliers d’amputations, la situation sanitaire à Gaza est mauvaise à tout point de vue, même en comparaison avec celle des Palestiniens de Cisjordanie occupée.

Le contrôle israélien de tous les biens entrant dans Gaza, en particulier les marchandises relevant des restrictions relatives aux « biens à double usage », a rendu le système de santé totalement incapable de répondre à ces défis. En raison des restrictions relatives au béton et aux canalisations, certaines installations sanitaires bombardées ne seront pas reconstruites. Les pénuries de matériel élémentaire comme les poches à perfusion et la gaze sont fréquentes.

Comme les traitements de pointe pour des maladies chroniques comme le cancer n’existent pas du tout dans le territoire, il faut un permis accordé par Israël pour quitter Gaza et recevoir les soins nécessaires en Israël ou à Jérusalem-Est—et ce permis est souvent refusé de façon arbitraire, ou retardé jusqu’au moment où les patients manquent des rendez-vous difficiles à obtenir. Un médecin n’est pas certain d’avoir du courant électrique pour la durée de son tour de garde.

Le résultat de ces politiques n’a donc rien d’étonnant. L’espérance de vie compte parmi les plus basses du Moyen-Orient (elle est inférieure de presque dix ans à celle des Israéliens), la mortalité infantile et maternelle est élevée, et la malnutrition est fréquente, avec un taux élevé de retards de croissance et de carences en fer chez les enfants.

Le recours à la vaccination contre la Covid-19  s’est déclenché très lentement, en grande partie parce qu’Israël, non content d’ignorer ses propres obligations de puissance occupante, bloquait de surcroît les efforts palestiniens et extérieurs pour mener ce combat. En date du 2 février 2022, 30% seulement des habitants de Gaza étaient complètement vaccinés.

De la part des groupes de défense des droits humains et de certaines personnalités politiques progressistes, il y a eu des condamnations fermes de nombreuses déclarations gouvernementales en lien avec les bombardements récents, qui répètent, dans leur quasi-totalité, des formules recyclées sur le droit d’Israël à se défendre. Et pourtant, il existe d’innombrables preuves montrant qu’aucune norme n’autorise à considérer ces décennies de châtiment collectif des Palestiniens comme une réponse légitime d’Israël en termes de sécurité. Rares ont été ceux à mentionner les Palestiniens tués au nom de cette prétendue autodéfense, et notamment les nombreux enfants. Il est vrai que ces  déclarations partiales, historiquement fausses et excluant toute critique méritent d’être dénoncées.

Mais que dire des jours, des semaines, des mois qui s’écoulent entre les bombardements, pendant lesquels les gens de Gaza, dont plus de la moitié sont des enfants, continuent à vivre dans un territoire dont la clôture est effective, tandis que leurs souffrances sont largement oubliées par le reste du monde ou, pire encore, justifiées ? Les condamnations doivent continuer jusqu’à ce que ce blocus injuste et illégal soit levé.

Aucun pays ne peut se définir comme un défenseur des droits humains tout en continuant à ignorer et à rendre possible ce qui est infligé à cette population civile, tout particulièrement après des mois de platitudes sur l’immoralité et l’illégalité des attaques des Russes contre l’Ukraine et de leurs tentatives d’entraver l’approvisionnement alimentaire. Il ne devrait plus être acceptable que l’on fasse référence au Hamas ou à d’autres groupes armés palestiniens pour répondre aux questions sur le bombardement de familles dans leurs propres maisons. Et cette réponse n’est pas plus acceptable pour justifier que l’on empêche des patients atteints d’un cancer de recevoir leur traitement, des enfants de bénéficier d’une alimentation correcte, et des médecins de disposer du matériel nécessaire pour sauver la vie de leurs patients.

Yara M. Asi, PhD, est Professeure assistante de gestion et d’informatique sanitaires globales à  University of Central Florida, chercheure invité à FXB Center for Health and Human Rights à Harvard University, et US Fulbright Scholar en Cisjordanie.

Source : Al araby

Traduction SM pour l’Agence média Palestine