EN APPUYANT SUR UN BOUTON : crise sanitaire et contrôle social…

Nous reprenons l’article publié sur le site de nos ami.e.s et camarades de la LDH de la section de Nice.

Lors de l’émission « C Politique » diffusée sur la 5 samedi 7 mai, il a été diffusé un reportage sur la gestion de la pandémie par la Chine avec les méthodes techno-policières que l’on connait. Ci dessous, un extrait de 7 minutes :(cliquez sur le triangle en bas à gauche)

Dans ce bref extrait, on voit les policiers chinois utiliser toute une gamme d’objets technologiques et de procédures qui existent aussi en France, même s’ils ne sont pas généralisés, systématisés et poussés à leur paroxysme comme en Chine : vidéosurveillance généralisée, reconnaissance faciale, géolocalisation, Pass, drones pour surveiller et  invectiver la population ; nous n’avons pas encore ces effrayants cloportes-robots développés sur le modèle de ceux de Boston Dynamics et munis de hauts parleurs.

Pas de ça chez nous ?

La première réaction est de penser que tout cela ne peut se produire en France, parce que nous sommes une démocratie, même autoritaire et avec de très forts penchants policiers, même très friande d’états d’urgence prolongés et « régimes transitoires ». Mis à part quelques représentants du tout sécuritaire tels qu’Estrosi et autres Rebsamen, on imagine volontiers la réponse de la majorité des élus : pas de ça chez nous !

Le « Crisis data hub »

 Toutefois, on ne peut s’empêcher de penser à quelques-unes des propositions contenues dans le rapport produit en juin 2021 par nos braves et paisibles sénateurs de la « Délégation sénatoriale à la prospective »  [   ICI   ] dont nous avons extrait quelques propositions :

« Quarantaine obligatoire pour les seules personnes positives, strictement contrôlée grâce à des outils numériques (géolocalisation en temps réel avec alerte des autorités » « Dans les cas les plus extrêmes […] toute violation de quarantaine pourrait conduire à une information en temps réel des forces de l’ordre, à une désactivation du titre de transport, ou encore à une amende prélevée automatiquement sur son compte bancaire »

Mais la proposition phare est celle de la création d’un « Crisis data hub » plateforme de collecte, de concentration de données personnelles (comme par exemple les données médicales) croisées avec celles produites par des tiers (opérateurs télécoms (géolocalisation), entreprises dites « technologiques » , transports, banques, etc. Le tout à mettre en œuvre uniquement en « cas de crise sanitaire ou autre ».

En appuyant sur le bouton

Les sénateurs se placent dans l’hypothèse d’une « situation de crise sanitaire ou autre » pour s’autoriser à « croiser, entre autres, des données médicales avec des données de géolocalisation » ; c’est exactement ce que fait actuellement le gouvernement chinois.

Le très vague et inquiétant « ou autre » devrait alerter tous les défenseurs et défenseuses de l’Etat de droit ; c’est la porte ouverte à tous les abus et à toutes les tyrannies. Que se passera-t-il si un jour est déclenchée dans notre pays une grève générale illimitée et qu’elle dure plusieurs semaines ? Qui est en mesure de garantir que ce dispositif ne sera pas détourné pour surveiller ou entraver les mouvements des syndicalistes, des journalistes ou de simples militants ?

L’expérience montre que lorsqu’un dispositif techno est disponible, son utilisation finit toujours par être dévoyée et utilisée à d’autres fins que celles prévues à l’origine, dans un premier temps illégalement, puis ensuite avalisé par la loi, Cf par exemple : la reconnaissance faciale sur les fichiers du TAJ, les valises IMSI Catcher, l’utilisation policière des drones.  

Les sénateurs  font preuve d’une certaine candeur s’ils pensent qu’ils vont pouvoir venir à bout d’une pandémie « ou autre » « en appuyant sur le bouton » ;  leurs propositions sont très inquiétantes, car « en appuyant sur un bouton » il serait alors possible de porter un coup fatal à l’Etat de droit.  

64 ORGANISATIONS CONTRE LA LOI « DRONE 2 »

La LDH66 soutient l’appel.

Publié le 19 octobre 2021 sur laquadrature.net

Lettre ouverte contre la loi « Drone 2 »

Le gouvernement est de retour pour autoriser les systèmes de surveillance qui, d’abord prévus dans la loi Sécurité globale, avaient été censurés par le Conseil constitutionnel en mai 2021. Cette nouvelle loi « relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure », a déjà été adoptée par l’Assemblée nationale le 23 septembre dernier. Le Sénat l’examinera le 18 octobre. Il doit la rejeter : contrairement à ce que prétend le gouvernement, ces systèmes de surveillance nuiront tant à notre liberté qu’à notre sécurité, dès lors qu’ils organisent l’escalade technologique des violences policières.

Les articles 8 et 9 autoriseront la surveillance par drone, hélicoptère et voiture. Depuis plus d’un an, la police déploie illégalement des drones pour nous surveiller, malgré deux interdictions du Conseil d’État, une sanction de la CNIL et une censure du Conseil constitutionnel. Les drones sont inutiles aux actions de médiation, d’apaisement et de dialogue avec la population. Ce sont des outils démultipliant les capacités de surveillance et de contrôle, qui facilitent avant tout les interventions violentes de la police, notamment en manifestation afin de dissuader les militant·es d’exercer leurs libertés de réunion et d’expression politique.

L’article 7 autorisera la vidéosurveillance des cellules de garde-à-vue. Le gouvernement prétend agir pour « diminuer les risques de suicide, d’automutilation, d’agression », comme s’il se souciait soudainement du bien-être des personnes qu’il réprime. Plutôt que de protéger les personnes arrêtées, il s’agira de renforcer les pressions et violences psychologiques causées contre elles par l’enfermement et une surveillance de chaque instant sans aucune garantie ni limitation sérieuse.

L’article 16 autorisera la police à recourir à la violence physique pour obtenir les empreintes digitales et la photographie des personnes suspectées d’avoir commis une infraction punissable d’au moins trois ans de prison. Cette violence pourra s’exercer contre des enfants de 13 ans, pour peu que la police les suspecte d’avoir commis une infraction punissable de cinq ans de prison. Les empreintes et photos ainsi obtenues pourront être recoupées avec les fichiers de police existants, notamment par reconnaissance faciale.

Cette loi organise un monde où les développements technologiques renforcent et justifient les violences que la police peut exercer contre la population. Cette escalade de la violence ne repose sur aucun besoin objectif qui serait soutenu par des études ou des chiffres concrets. Elle ne semble viser qu’au développement d’un État policier qui, une fois en place, ne s’encombrera pas des limites que le droit aurait tenté de lui poser (les quatre interdictions rendue l’an dernier n’ont pas empêché la police de déployer des drones, encore aujourd’hui1).

Pour ces raisons, l’ensemble de ces mesures doivent être rejetées.

Ces dispositifs de surveillance ne sont pas les seuls dans cette loi susceptible de poser bien d’autres problèmes, pour aller plus loin :

Liste des signataires

APPLICATION « STOP COVID » : NON AU TRAÇAGE NUMÉRIQUE !

Communiqué commun : LDH, SNJ, SNJ CGT, Union syndicale Solidaires

A partir de ce mardi 28 avril, les parlementaires vont être amenés à examiner un texte permettant la mise en œuvre d’une application de traçage numérique dénommée « StopCovid ». Cette application anti-coronavirus, présentée comme l’outil idéal du déconfinement, porte en elle un ensemble de dispositions gravement attentatoires aux libertés individuelles et collectives, et totalement contraires à la Constitution française et à toutes les conventions internationales.

Développée par le gouvernement français par le biais de l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria), avec divers partenaires européens, cette appli permettrait à chacun de savoir, via une alerte sur son smartphone, si une personne croisée récemment était testée positive au Covid-19. Chaque utilisateur serait référencé dans une base de données centrale, sous la forme d’un identifiant unique anonyme.

‪Un dispositif très centralisé, qui n’est aucunement une garantie contre un possible contrôle de l’outil et de ces milliards de données personnelles par son propriétaire : un « Big brother » d’Etat ou les Gafa.‬ Basé sur le consentement ou le volontariat, ce qui peut paradoxalement freiner son efficacité, et sur l’utilisation généralisée du smartphone, dont 44% des plus de 70 ans ne sont pas équipés, cet outil n’a pas convaincu nombre d’experts quant à sa fiabilité.

‪Dans un avis rendu public dimanche 26 avril, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) souhaite ainsi que « certaines garanties supplémentaires » soient apportées par le gouvernement et met en garde contre « le solutionnisme  technologique ».

‪D’apparence presque ludique, cette appli ressemble plus à un projet politique destiné à faire oublier les mensonges et les approximations du gouvernement, l’impuissance des autorités ligotées par des années de destruction du service public de santé, les défaillances d’Etat largement documentées par la presse (pas de masques, pas de tests…) dans la préparation et la gestion de la pandémie.

‪« StopCovid » s’annonce comme un véritable bracelet électronique passé « volontairement » au poignet des Français. Sur la base d’une forme de chantage liant ce « volontariat » à la réussite du déconfinement et à la protection de la santé des citoyens.‬

‪Cette application et le stockage des données seraient « temporaires », selon le gouvernement. Mais temporaires jusqu’à quand ? Qui est capable de prédire la fin de cette crise sanitaire inédite ? La fin de la pandémie étant plus qu’incertaine, ces dispositions portent en elles le risque d’une accoutumance à une surveillance généralisée, banalisée et pérenne.

‪A l’image de ce qui se passe dans le cadre du droit du travail, le contexte exceptionnel d’aujourd’hui est propice aux dérogations provisoires, amenées à durer. Dans un passé très récent, ce sont déjà des situations exceptionnelles qui avaient permis d’installer dans la durée des dispositions liberticides, comme celles de la loi Renseignement de 2015 et bien d’autres lois de circonstance, qui attaquent les libertés fondamentales et transforment les citoyens en suspects possibles permanents.‬

‪Le Syndicat national des journalistes (SNJ), le Syndicat national des journalistes CGT (SNJ-CGT), la Ligue des droits de l’homme (LDH) et l’Union syndicale Solidaires appellent tous les parlementaires à voter contre cette fausse solution miracle, véritable danger pour les libertés publiques et les droits de l’Homme.

Paris, le 27 avril 2020‬

Signataires : LDH, SNJ, SNJ CGT, Union syndicale Solidaires