Migrants en Guadeloupe, Guyane et Mayotte : la France à nouveau condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme

La Cour européenne des droits de l’Homme vient de condamner une nouvelle fois la France, pour les expulsions de migrants auxquelles elle procède en Guyane, Guadeloupe et Mayotte. Ces territoires ressemblent désespérément à des zones de non droit, et le jugement de la Cour, qui a été adopté à l’unanimité, dans sa formation la plus solennelle, a réaffirmé que la législation d’exceptions qui y est appliquée viole le droit à un recours effectif garanti par la Convention européenne des droits de l’Homme. Le collectif Migrants Outre-mer analyse cet arrêt dans un communiqué.
Arrêt de Souza Ribeiro c. France, 13 décembre 2012, n° 22689/07
Chaque année plusieurs dizaines de milliers de mesures d’éloignement sont exécutées à partir de la Guyane, la Guadeloupe et Mayotte (ainsi que Saint-Martin et Saint-Barthélemy) sans aucun contrôle juridictionnel, en dérogation au droit commun applicable en France métropolitaine qui prévoit le caractère suspensif du recours contre les mesures administratives d’éloignement.
À l’unanimité, la Cour européenne des droits de l’Homme réunie en sa formation la plus solennelle, vient d’affirmer que cette législation d’exception violait le droit à un recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention : en l’espèce, le requérant 1 – un ressortissant brésilien – avait été reconduit à la frontière de Guyane avant que le tribunal administratif de Cayenne ait pu se prononcer sur le recours qu’il avait formé et dans lequel il invoquait la violation du droit au respect de sa vie familiale.
La Cour de Strasbourg réunie en section ayant rejeté cette requête par quatre voix contre trois (CourEDH, 31 juin 2011, n° 22689 07, De Souza Ribeiro c. France), l’affaire a été renvoyée devant la Grande chambre ; la Cimade, le Gisti et la LDH étaient tiers intervenants. La décision prise le 13 décembre 2012 renverse la précédente.
La Cour estime en effet que l’article 13 combiné avec l’article 8 de la Convention « exige que l’État fournisse à la personne concernée une possibilité effective de contester la décision d’expulsion ou de refus d’un permis de séjour et d’obtenir un examen suffisamment approfondi et offrant des garanties procédurales adéquates des questions pertinentes par une instance interne compétente fournissant des gages suffisants d’indépendance et d’impartialité ».
En citant abondamment la tierce intervention, la Cour relève les pratiques expéditives que dénotent les circonstances de l’affaire et balaie de surcroît les arguments rituels justifiant un droit d’exception en outre-mer.
« […], interpellé le matin du 25 janvier 2007, le requérant fit l’objet d’un APRF (arrêté préfectoral de reconduite à la frontière) et fut placé en rétention administrative le même jour à 10 heures, pour être ensuite éloigné le lendemain à 16 heures. Il a donc été éloigné de Guyane moins de trente-six heures après son interpellation », sur la base d’un arrêté motivé de façon succincte et stéréotypée qui atteste « le caractère superficiel de l’examen de la situation du requérant effectué par l’autorité préfectorale ».
Tout en se disant « consciente de la nécessité pour les États de lutter contre l’immigration clandestine et de disposer des moyens nécessaires pour faire face à de tels phénomènes », la Cour estime que cette nécessité ne justifie pas « de dénier au requérant la possibilité de disposer en pratique des garanties procédurales minimales adéquates visant à le protéger contre une décision d’éloignement arbitraire ».
Cette atteinte au droit au recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’Homme combiné avec le droit au respect de leur vie privée et familiale concerne de très nombreuses personnes interpellées et reconduites de manière expéditive depuis l’outre-mer.
Pour la seconde fois en 20122, la Cour condamne la France sur une question relative à l’effectivité des procédures nationales de recours en matière d’immigration et à leur fonctionnement. L’État français doit mettre fin aux procédures condamnées par la Cour notamment aux régimes d’exceptions applicables aux étrangers en outre-mer incompatibles avec le respect des droits de l’Homme garantis par la Convention européenne sur tous les territoires de la République française.
Collectif migrants outre-mer (MOM) :
ADDE : avocats pour la défense des droits des étrangers ; AIDES ; CCFD : Comité catholique contre la faim et pour le développement ; Cimade : service œcuménique d’entraide ; Collectif Haïti de France ; Comede : comité médical pour les exilés ; Gisti : groupe d’information et de soutien des immigrés ; Elena : les avocats pour le droit d’asile ; LDH : Ligue des droits de l’homme ; Médecins du monde ; Mrap : mouvement français contre le racisme et pour l’amitié entre les peuple ; OIP : Observatoire international des prisons ; Secours Catholique.

Récépissé de contrôle d’identité : huit associations reçues au ministère

Le ministre de l’intérieur a annoncé, il y a quelque temps, qu’il n’envisageait pas de mettre en place un « récépissé » délivré par les policiers et les gendarmes aux personnes contrôlées, lors des contrôles d’identité. Peu de temps après, le ministère a publié un nouveau « code de déontologie » destiné aux policiers et aux gendarmes. Ce nouveau code évoque les contrôles d’identité, mais de façon très vague. Il se contente de rappeler les règles qui existent déjà dans la loi actuelle, et, surtout, il « ne répond pas non plus au manque de transparence sur les contrôles ».

Le collectif « Stop le contrôle au faciès », animé essentiellement par des jeunes de banlieue qui savent de quoi ils parlent, milite activement pour la mise en place de ce récépissé, avec des outils originaux, tels que cette série de vidéos intitulée « mon premier contrôle au faciès dans lesquelles des personnalités connues ou pas racontent leur premier contrôle.

Enfin, huit associations nationales, dont la Ligue des droits de l’Homme, qui collabore activement avec Stop le contrôle au faciès, vont être reçues, à leur demande, au ministère de l’intérieur, demain mercredi 19 décembre. À cette occasion, elles viennent de publier un communiqué dans lequel elles rappellent leurs exigences.

Communiqué commun LDH, Gisti, Graines de France, Human Rights Watch, Maison pour un développement solidaire, Open Society Justice Initiative, Saf, Syndicat de la magistrature.

Paris, le 18 décembre 2012

Contrôles au faciès : huit organisations appellent à une vraie concertation et considèrent le projet de réforme du code de déontologie tout à fait insuffisant

Reçues à leur demande le 19 décembre prochain par le cabinet du ministre de l’Intérieur, elles rappelleront la nature de la réforme qu’elles préconisent.

Le 19 décembre huit organisations nationales et internationales (GISTI, Graines de France, Human Rights Watch, la Ligue des Droits de l’Homme, la Maison pour un Développement Solidaire, Open Society Justice Initiative, le Syndicat des Avocats de France et le Syndicat de la Magistrature) seront reçues à leur demande au ministère de l’Intérieur. Elles présenteront un document préconisant les mesures clefs qu’elles estiment indispensables pour respecter la proposition n° 30 du programme de François Hollande de « lutter contre le délit de faciès » dans les contrôles d’identité « grâce à une procédure respectueuse des citoyens ».

Les organisations ont pris connaissance du projet de modification du Code de Déontologie de la police nationale et de la gendarmerie, communiqué par le ministère de l’Intérieur aux syndicats de policiers. Ce projet qui rappelle aux forces de l’ordre de procéder aux contrôles et palpations de sécurité avec discernement, n’est pas de nature à modifier la situation sur le terrain. Il se borne en effet à donner des instructions quant à l’application du texte de loi existant, mais continue d’accorder beaucoup de latitudes aux forces de l’ordre pour pratiquer les contrôles d’identité. Le projet du ministre de l’Intérieur ne répond pas non plus au manque de transparence sur les contrôles. En effet, si ce projet prévoit bien une cartographie des contrôles d’identité, elle est limitée à ceux réalisés sur réquisition du procureur, alors que cette forme de contrôle n’est qu’une des quatre cas prévus par la loi.

Les huit organisations déplorent toujours le manque de concertation à ce jour des divers acteurs concernés : associations, experts, élus locaux, magistrats et avocats, sur cette question. Fondée sur la situation française, ainsi que sur les expériences réalisées dans d’autres pays, nous préconisons un ensemble de mesures afin de lutter contre les dérives des contrôles tout en améliorant la sécurité et la relation citoyens-police :

  • Réformer l’article 78-2 du Code de procédure pénale : la lutte contre ces dérives passe nécessairement par la limitation du champ des contrôles d’identité aux stricts impératifs de prévention et de lutte contre la délinquance. Un contrôle d’identité, quelle que soit l’autorité requérante, ne doit pouvoir être effectué qu’en présence d’un soupçon raisonnable, en respectant les motifs des arrêts de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (Gillan et Quinton c/ Royaume-Uni et Berktay c/Turquie).
  • Encadrer juridiquement la pratique des palpations de sécurité : il est nécessaire de limiter de manière explicite par voie législative (et non seulement dans le Code de Déontologie) les pouvoirs conférés aux forces de l’ordre pour procéder à des contrôles physiques tels que des palpations, sources d’atteintes à la vie privée et d’humiliations.
  • Remettre un récépissé : une garantie pour la personne contrôlée et pour le policier. La loi doit prévoit que, lors de chaque contrôle d’identité, les agents remplissent un formulaire, dont un volet est remis à la personne contrôlée, et un volet est conservé par le service de police. Ce document, conçu pour éviter tout fichage, rendra plus transparente la façon dont les contrôles sont effectués et permettra un suivi et une évaluation de la mise en œuvre de ce pouvoir. Il s’agit, pour les huit organisations, d’une étape nécessaire pour créer des réponses adaptées et recréer la confiance.

Cette mesure devra faire l’objet d’une mise en place progressive dans le cadre d’une expérimentation dans quelques sites pilotes conformément à l’art. 37-1 de la Constitution et être accompagnée d’une évaluation incluant des experts indépendants, avant sa généralisation progressive à tout le territoire. Cette approche permettrait de perfectionner le dispositif et d’obtenir une meilleure compréhension de son intérêt par les policiers. Plusieurs municipalités, dont Paris, sont prêtes à participer à cette expérimentation.

  • Organiser un dialogue entre police et population sur la pratique des contrôles d’identité : pour assurer la réussite d’une réforme des contrôles d’identité, il est indispensable d’organiser des rencontres régulières entre citoyens/habitants, policiers/gendarmes et élus pour discuter des questions locales de sécurité et notamment des pratiques qui mettent en contact les forces de l’ordre et la population. Ces discussions devront être alimentées par des données quantitatives et qualitatives permettant de mieux cerner les pratiques policières, telles que les données issues des formulaires de contrôle.
  • Renforcer la formation des policiers : pour réussir, un fort engagement politique ainsi qu’un ensemble de mesures sont nécessaires. La formation initiale et continue des fonctionnaires de police doit être largement renforcée et permettre la mise en pratique des règles déontologiques dans l’accomplissement des tâches quotidiennes.
  • Modifier les critères d’évaluation et de promotion des policiers : ces critères devront prendre en compte le respect de la déontologie et la capacité à créer du lien social, et ne plus être principalement fondés sur des objectifs chiffrés. Il faut également limiter l’actuelle rotation trop rapide des personnels en encourageant des policiers expérimentés à rester dans des quartiers populaires, grâce à des conditions humaines et matérielles incitatives.

Dans ce contexte, les organisations appellent à une consultation large des acteurs, telle que promise par le gouvernement en juin 2012. Elles demandent au gouvernement et au Parlement de se saisir de ce problème qui ne peut être réglé par une simple mise à jour du code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie. 

Les intégristes anti IVG s’éclatent sur le mariage pour tous

Cliquer sur la photo pour voir la vidéo qui se trouve en fin d'article du site Yagg.

Alors que la passionaria de l’anti mariage-pour-tous essaye désespérément de faire en sorte que les slogans homophobes n’aient pas droit de citer dans la manifestation du 13 janvier, que les excités de civitas promettent d’être là avec leurs slogans et leurs nervis, les anti IVG étendent le domaine de leur lutte au projet de loi. Et ils le font sous la protection de la police, qui chasse sans ménagement les citoyennes et citoyens qui ont le culot de ne pas supporter ces « prières de rue ». Tiens, mais au fait, qu’en pense riposte laïque ? on aurait la riposte sélective ?

La vidéo réalisée par Télébocal, et mise en ligne par le site Yagg est impressionnante. Tournée le 24 novembre dernier, elle montre une bande d’illuminés prier et cracher leur venin devant l’hôpital Tenon, dont le service d’Interruption volontaire de grossesse vient de rouvrir. On apprend aussi que ce type de manifestation a lieu régulièrement (une habitante du quartier parle de toutes les trois semaines), et que les clients du marché sont priés d’accepter ces agression sans réagir : la police protège les intégristes. « Ils ont même un espace dédié et un affichage sauvage toléré », s’indigne une cliente du marché.

Leurs discours ? Quelques échantillons suffisent : «Quand un enfant naît avec deux hommes, qu’un des parents part travailler, le deuxième monsieur (qui est lui-même homosexuel) peut abuser de l’enfant et l’enfant peut être violé » (une manifestante). «Deux homos pourquoi ils se marient? Qu’ils s’enculent tranquillement dans leur chambre, y a pas besoin d’un acte d’état civil pour s’enculer!» (un vieillard).

Il faut absolument regarder cette vidéo, et la regarder jusqu’à la fin  Cliquer sur la photo pour voir la vidéo, qui se trouve en bas de l’article.

Pas de prime de Noël pour les Musulmans : la pétition annulée

L’auteur présumé de la pétition raciste visant à supprimer la prime de Noël pour les familles musulmanes a finalement battu en retraite : mise en ligne début novembre, elle a été fermée le 20 novembre. Avec un succès très relatif : il n’aura finalement recueilli que 1446 signatures… Un peu léger pour une pétition nationale, qui avait pourtant été relayée par quelques médias.

L’explication de cette fermeture ? elle est savoureuse. Voici ce qu’on peut lire sur la page d’accueil :

Avis pétition annulée

Merci pour votre courage et joyeux Noël.

Je suis informé que la caisse des allocations familiales ne peut revenir sur les conditions d’attribution de la prime de Noël 2012.

L’administration précise que cette prime est un droit qui ne peut être abrogé.

En effet les Français musulmans et autres religions ont droit au versement de la prime de Noël 2012, il suffit de remplir les conditions de ressources pour que l’argent soit versé directement sur les comptes en banque.

En conséquence cette pétition est annulée à partir de ce jour mardi 20 novembre 2012.

http://www.caf.fr/actualites/2012/prime-de-noel-2012

J’ai lancé cette pétition sur internet pour la suppression du versement de la prime de Noël aux Musulmans.

Ce n’était pas une initiative raciste (l’islam n’est pas une race) mais tout simplement un acte de bon sens.

La loi contre le racisme n’interdit pas expressément la critique des croyances, des opinions, des philosophies.

Dette de la France

Nous avons 1800 milliards à rembourser auprès des banques et c’est pas fini qui va payer?

pauvre France

(Bien entendu, orthographe, syntaxe et typographie respectées).

Juste un dernier point : quand on est élu, ce qui semble être le cas de l’auteur de cette pétition, qui pourrait être conseiller régional, la moindre des choses, avant de lancer une telle pétition, ça ne serait pas, par hasard de vérifier sa légalité ?

Enfin, l’auteur écrit : « La loi contre le racisme n’interdit pas expressément (ndlr : elle l’interdit un peu, quand même ?) la critique des croyances, des opinions, des philosophies ». Peut-être. Mais la loi interdit la discrimination.

Devant tant d’âneries, on pourrait rire. Mais ça n’est pas risible. Simplement pitoyable.

 

 

Journée des migrants : rassemblement devant la préfecture de Saint-Brieuc

Demain mardi 18 décembre, journée internationale des migrants, le collectif contre le racisme et pour la solidarité, auquel collabore la Ligue des droits de l’Homme, organise un rassemblement devant la préfecture de Saint-Brieuc, à 12h15. Voici le tract qui sera distribué et que vous pouvez télécharger ici.

A noter qu’un rassemblement est également prévu place de la maire, à Rennes, à 18h.

JOURNEE INTERNATIONALE DES MIGRANTS

18 décembre2012

LE COLLECTIF CONTRE LE RACISME ET POUR LA SOLIDARITE

dénonce  la poursuite de la politique xénophobe de l’Etat qui se traduit en Côtes d’Armor par :

  • des conditions d’accueil des Etrangers ne permettant pas un accès normal au droit d’asile. Est-il juste que des personnes en demande d’asile soient contraintes d’occuper durablement des places précaires de l’hébergement d’urgence (le 115) ? Les délais d’attente pour accéder à la préfecture de région sont de plus en plus longs.
  • une précarité quotidienne qui ne crée pas des conditions humainement acceptables pour une demande d’asile, tout en perturbant la scolarisation des enfants.
  • des différences de traitement totalement injustes, un matraquage fiscal pour les régularisations.

dénonce la circulaire VALLS qui entretient la misère, la peur du lendemain en n’ouvrant pas suffisamment les possibilités de régularisation. Elle va continuer à créer des Sans Papiers.

demande

  • le respect du droit d’asile,
  • l’accès à des logements adaptés
  • une régularisation élargie et l’arrêt des expulsions,
  • la suppression des taxes monstrueuses pour les régularisations
  • la fermeture des CRA,
  • l’égalité des droits entre Français et Etrangers,
  • le droit de vote aux élections locales

Lettre ouverte au président de la République à l’occasion de son voyage en Algérie

La Ligue des droits de l’Homme adresse, avec huit autres associations, une lettre ouverte au président de la République, à l’occasion du voyage qu’il va effectuer en Algérie, une lettre ouverte dans laquelle les signataires attirent l’attention du président sur « l’état des droits de l’Homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, et aux libertés fondamentales dans le cadre des relations entre la France et l’Algérie ». La liste des associations signataires figure en bas de la lettre.

Lettre ouverte à M. le Président de la République Française à l’occasion de sa visite officielle en Algérie

Paris, le 17 décembre 2012

À l’attention de: M. François Hollande, Président de la République Française

Objet : Lettre ouverte à l’occasion de la visite officielle du Président de la République Française en Algérie

Monsieur le Président de la République,

Vous vous apprêtez à effectuer une visite officielle en Algérie – visite qui a pour ambition de « rétablir une relation politique de confiance à la hauteur des ambitions de nos deux peuples et tournée vers l’avenir ». À cette occasion, nous, organisations signataires, souhaitons attirer votre attention sur les questions relatives aux droits de l’Homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, et aux libertés fondamentales dans le cadre des relations entre la France et l’Algérie.

Nous tenons, tout d’abord, à saluer votre décision de reconnaître le massacre, le 17 octobre 1961, de manifestants algériens, en plein cœur de Paris. Cette décision, nous l’espérons, sera suivie d’une dénonciation du système colonial et des crimes qu’il a engendrés alors, afin de permettre notamment un travail de mémoire conjoint et apaisé sur l’Histoire commune, une plus grande capacité des nouvelles générations d’origine algérienne à assumer leur citoyenneté française ainsi que l’établissement de relations normalisées entre la France et l’Algérie. Nous sommes également convaincus que le droit de vote aux élections locales accordé aux étrangers établis en France, ce qui concerne donc les Algériens y vivant, devrait contribuer positivement à cette évolution.

Monsieur le Président, parmi les « 60 engagements » de votre projet présidentiel, vous vous promettez de « [développer] la relation de la France avec les pays de la rive sud de la Méditerranée sur la base d’un projet économique, démocratique et culturel […] en proposant une relation fondée sur l’égalité, la confiance et la solidarité ». Cette visite officielle en est une première étape. Nos organisations croient que cette « relation de confiance » que vous souhaitez développer pendant votre présidence avec les autorités algériennes doit se faire au bénéfice de certains progrès en matière de droits de l’Homme et des libertés démocratiques, ainsi que de tous les acteurs de la société civile indépendante en Algérie.

Or, depuis l’annonce des réformes politiques en avril 2011, la répression à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme et des militants syndicaux n’a fait que s’amplifier en Algérie. En contradiction avec la Constitution du pays et les conventions internationales que l’Algérie a ratifiées, le harcèlement judiciaire à l’égard de défenseurs des droits de l’homme et de militants syndicaux, la répression policière, l’interdiction injustifiée de manifestations et réunions publiques, le recours à des pratiques administratives abusives entravant la création et le fonctionnement des associations et des syndicats autonomes élèvent des obstacles considérables à l’action de la société civile algérienne. Plusieurs lois promulguées en janvier 2012 et présentées comme des ‘réformes démocratiques’ sont en réalité une régression des libertés publiques, en particulier la loi n° 12-06 qui rend plus difficile la création, le financement et le fonctionnement quotidien des associations et la loi n° 12-05 sur l’information qui entrave l’indépendance des journalistes et la liberté d’opinion et de publication. Par ailleurs, plusieurs demandes de création de nouveaux syndicats autonomes dans différents secteurs se heurtent à un refus d’enregistrement non motivé. De plus, l’impunité des auteurs de disparitions forcées et d’autres violations graves et massives des droits de l’Homme commises durant les années 90 reste toujours de mise, malgré les nombreuses condamnations formulées par différents organes du Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies.  

À l’occasion de votre visite, nos organisations vous demandent d’inclure en priorité, dans toute négociation avec les autorités algériennes, la question du respect et de l’application réelle des conventions internationales relatives aux droits de l’Homme ainsi que des conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), ratifiées par l’Algérie. À cet égard, nous tenons également à vous faire part des obstacles à la délivrance de visas que nos organisations comme d’autres organisations internationales des droits de l’Homme ou syndicats étrangers rencontrent et qui ont pour effet d’entraver le travail sur le terrain avec les organisations algériennes.

Nous croyons, par ailleurs, que la France serait mieux entendue si elle cessait de pratiquer une politique entravant la liberté de circulation des algériens à l’intérieur de ses frontières, comme dans les autres pays européens. Ces entraves qui touchent tous les secteurs de la population sont ressenties comme autant de manifestations de mépris.

Enfin, nos organisations vous invitent, Monsieur le Président, à saisir l’occasion de votre visite pour rencontrer la société civile afin d’entendre l’intense aspiration démocratique des Algériennes et des Algériens. Nous espérons que celle-ci sera en outre l’occasion de mettre en place des mécanismes qui permettent de consulter et d’associer la société civile indépendante des deux pays au renouveau de la coopération entre la France et l’Algérie.

Confiants de l’attention que vous voudrez bien porter à notre requête, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération.

Signataires :

  • M. Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH)
  • Mme Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)
  • M. Michel Tubiana, président du Réseau Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH)
  • M. Halim Derbal pour le Bureau de l’association Agir pour le Changement Démocratique en Algérie (ACDA)
  • Mme Nassera Dutour, porte-parole du Collectif des familles des disparu(e)s en Algérie (CFDA)
  • M. François Della Sudda, président du Comité International de Soutien au Syndicalisme Autonome Algérien (CISA)
  • Me Noureddine Benissad, président de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH)
  • M. Rachid Malaoui, président du Syndicat National Autonome du Personnel de l’Administration Publique (SNAPAP)
  • Me Amine Sidhoum, coordinateur du Réseau des Avocats pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDH)

 

Petit cours de droit à l’usage des dirigeants de la FFF qui en auraient bien besoin

Depuis 2009, la Fédération française de football (FFF) s’obstine à appliquer, de manière erronée, les dispositions de l’article 19 du Règlement de la Fédération internationale de football association (Fifa), qui porte sur le statut et le transfert des joueurs et la lutte contre le trafic des jeunes joueurs dans le monde.

La FFF adapte cet article à la réglementation française, de manière discriminatoire. Elle exige de tout enfant non français qu’il justifie de l’identité et de la nationalité de ses parents, de ses liens de filiation avec ceux-ci et de leur résidence en France, ainsi qu’une attestation de sa présence continuelle en France lors des cinq années précédentes. Cette règle absurde bloque des centaines de licences. Un enfant sans papiers n’existe pas. Il y a simplement des enfants : la Convention internationale des droits de l’enfant rappelle que l’intérêt supérieur de l’enfant prime sur toute autre considération.

La Ligue des droits de l’Homme, qui a contribué à révéler les discriminations qui se cachent (mal) dans certains milieux du sport, a poursuivi cette année son action contre le refus de délivrance, par la Fédération française de football (FFF), de licences à des enfants qui veulent pratiquer ce sport. La raison ? Ils sont, disent-ils, étrangers.

Dans une lettre adressée à la LDH, la FFF tente de se justifier. Cette lettre montre que s’il advenait que ses dirigeants aient besoin d’une formation, ce serait bien en droit ! Le directeur général adjoint attaque vivement la LDH pour avoir déclenché une campagne médiatique défavorable. Et de s’en indigner… et de tenter ainsi un retournement en réponse aux accusations de discriminations, en l’occurrence celles que subissent certains mineurs parce que leurs parents sont étrangers, dans leur demande de délivrance d’une première licence. C’est une défense classique mais dérisoire que celle qui consiste à s’offusquer d’être critiqué, alors que le fondement de la critique est avéré. La FFF refuse de délivrer des licences à des jeunes enfants au vu de leur nationalité, et cela porte un nom déplorable, cela s’appelle une discrimination, et aboutit, pour une entité sociale, à se donner le droit de créer son propre droit au mépris de la loi.

La situation ainsi créée montre un curieux paradoxe. Il apparaît que dans le cas de jeunes joueurs dont les clubs souhaitent s’attacher les talents alors qu’ils viennent de l’étranger, l’intervention auprès de la Fifa consiste à lever le blocage de la licence. Autrement dit, la circulaire Fifa et sa déclinaison nationale ne s’appliquent pas lorsqu’elles le devraient, et s’appliquent lorsqu’elles ne le devraient pas. En ce qui concerne la protection des mineurs provenant de certains pays et trompés par de faux agents qui les abandonnent par la suite, si une solution protectrice doit être trouvée, elle ne peut consister à refuser une première licence de football à ceux qui en font la demande. C’est en effet une dérive dangereuse pour les libertés que celle qui consiste à incriminer tout un groupe au prétexte de sanctionner un délit. A la pratique de la discrimination, la FFF ajoute l’ignorance des règles fondamentales et habituelles du droit.

Si la LDH critique la réglementation et la pratique administrative de la FFF, c’est parce que la démonstration est faite qu’elle invente des actes administratifs dans un sens défavorable aux personnes, qu’elle les différencie en fonction de leur origine supposée ou réelle. Appliquées aux enfants, ces règles sont une violation de la Convention internationale des droits de l’enfant, qui dit qu’en toute situation c’est « l’intérêt supérieur de l’enfant » qui s’impose à toute autre disposition. La solution qui consiste à construire la protection de certains jeunes joueurs, venus de l’étranger, sur la stigmatisation d’enfants d’étrangers vivant en France ne garantit pas l’égalité de traitement de tous.

En ce qui concerne la pratique de ses services, le directeur général adjoint mentionne un examen au « cas par cas des dossiers », dans une sorte de reconnaissance honteuse qu’il y a bien problème. S’agit-il d’actionner une baguette magique, qui, bien agitée, rétablirait dans le bon sens une mauvaise situation d’arbitraire ? Dans un maintien dans l’ignorance des demandeurs, la FFF adapte soit les critères généraux, soit la situation de la personne. Quant à la demande d’une attestation de résidence, si elle voit sa durée de cinq ans réduite à trois ans, c’est sans mettre en cause la présentation d’un acte administratif qui n’existe pas. Par ailleurs la mention « attestation de cinq ans » figure dans la réglementation à l’annexe 1, et le secret est bien gardé sur les détails du logiciel employé.

La FFF aurait renoncé, dit-elle, à un certain nombre d’exigences à fournir. Rappelons que lorsqu’il s’agit d’un enfant, il s’agit d’une illégalité, puisqu’il n’existe pas d’enfants sans papiers, mais juste des enfants. Cette analyse est corroborée par la demande de présentation d’une preuve de résidence des parents, ce qui revient à dire que pour avoir le droit de pratiquer le football, il ne faut pas être fils ou fille de SDF, il ne faut pas être fille ou fils de sans-papiers et, absolument éviter d’être fils ou fille de sans-papiers SDF…

En outre, alors que la FFF affirme que les demandes ne sont pas cumulatives, on peut constater que l’ensemble des réponses flottent dans un flou général, au point que la FFF s’empêtre dans sa démonstration et reconnaît qu’il y a bien des discriminations, mais qu’elles ne sont pas intentionnelles, mais exceptionnelles comme si le fait qu’elles soient telles les rendait moins condamnables.

La FFF prétend n’établir un contrôle effectif qu’à partir de l’âge des U13. Cette assertion est fausse. De nombreux enfants dès l’âge de 6 ans, même nés en France, ont subi un refus de délivrance de licence en début de saison et ont bénéficié d’un déblocage uniquement grâce à l’intervention volontariste des responsables de clubs. Un certain nombre d’entre eux seraient tellement lassés par ce travail de bénévoles accompli à longueur de temps, qu’ils renoncent à inscrire désormais de jeunes mineurs étrangers signant leur première licence. Ainsi à la perte de temps s’ajoute une aggravation et un enracinement dans la pratique, et plus seulement dans la réglementation, de la discrimination. Dès lors, la LDH se sent confortée dans son rappel à l’ordre de la Convention internationale des droits des enfants, un jeune est « enfant » jusqu’à l’âge de 18 ans, et aucune différence ne devrait être faite pour tout mineur qui doit avoir le droit de s’inscrire dans le sport qu’il désire pratiquer.

Centres de rétention : pas de droits pour les personnes, pas de liberté pour les associations ?

La Ligue des droits de l’Homme prend à son tour position contre l’appel d’offre que vient de lancer le ministère de l’intérieur aux associations qui interviennent dans les centres de rétention administrative. Dans un communiqué, elle dénonce les mesures qu’elle estime inacceptables, et demande le retrait pur et simple de cet appel d’offre et l’arrêt de l’enfermement des étrangers sans papiers.

La Ligue des droits de l’Homme a eu connaissance des nouvelles dispositions que le gouvernement a prises en ce qui concerne les centres de rétention administrative. Les conditions dans lesquelles les associations concernées vont devoir répondre au nouvel appel  d’offre sont inacceptables : liberté d’action limitée, droit à investigation dénié, limitation du droit des personnes à bénéficier d’une aide. Au lieu d’une amélioration des conditions de fonctionnement et du respect des personnes, le gouvernement accentue les mesures restrictives.

Alors qu’aucune diminution du nombre de personnes retenues dans les centres de rétention n’est attendue, compte tenu du chiffrage du nombre d’expulsés d’ores et déjà annoncé par le ministère de l’Intérieur,  l’intervention des associations contractantes est rendue plus difficile, en recourant à un contrôle étroit de leurs activités.

Ainsi, elles devront par exemple prévenir les chefs des centres de rétention, dès qu’une des personnes enfermées qu’elles accompagnent osera déposer un recours, et les personnes étrangères enfermées ne pourront plus s’entretenir avec les associations accompagnées d’un co-retenu de leur choix, ce qu’elles souhaitent pourtant très fréquemment.

Enfin, en matière de liberté d’information, les associations seront soumises à un « devoir de réserve » et une « obligation de discrétion », et devront exprimer « de manière mesurée, des opinions dans le domaine des politiques publiques relatives à l’immigration ».

L’empilement de ces mesures de restriction signifie que le regard critique et de dénonciation que portaient les associations est largement mis en cause. Ainsi, tout affichage dans leurs bureaux est soumis à l’autorisation préalable du chef du centre de rétention. De même, le prêt de moyens de communication vers l’extérieur est interdit, mettant ainsi en cause le droit de correspondre pour se  défendre. 

Enfin le texte de l’appel prévoit des sanctions, des pénalités financières, l’interdiction définitive pour les salariés d’accéder au centre de rétention, voire la résiliation des contrats des associations. Ces sanctions seront prononcées par la police ou le ministère de l’Intérieur, sans moyen de recours compte tenu de la liberté d’appréciation qui leur est laissée.

En matière de rétention des étrangers, l’orientation va donc dans le sens de la répression : expulsions collectives, absence d’amélioration du traitement des étrangers malades, création, après l’arrêt du conseil d’État sur la garde à vue, d’une nouvelle disposition de retenue, au mépris du droit commun, poursuite de l’enfermement d’enfants dans le centre de rétention de Pamandzi à Mayotte, mise à l’écart des Cra de Mayotte et de Martinique du marché public. Ce faisant, les mesures d’assouplissement de la politique antérieure sont noyées dans un ensemble défavorable.

La Ligue des droits de l’Homme se prononce pour la fin de la politique d’enfermement des étrangers sans papiers, et pour le retrait de l’appel d’offre du marché  public de la rétention, tel qu’il est proposé  aux associations intervenant dans les centres de rétention.

 

Vers la réhabilitation d’un résistant victime d’une rumeur dramatique

René Huguen (photo Ouest-France)

Une des grandes luttes de la Ligue des droits de l’Homme, lutte qui n’est d’ailleurs pas terminée, est la réhabilitation des soldats « fusillés par l’exemple » pendant la 1ère guerre mondiale.

La section LDH de Saint-Brieuc s’est engagée dans un combat un peu similaire, mais qui concerne la seconde guerre mondiale. Il s’agit d’un résistant, qui a été fusillé par ses camarades, à la Libération, victime d’une rumeur qui le désignait comme coupable d’une trahison qui avait abouti à l’arrestation des « lycéens martyrs », ces jeunes briochins exécutés pour certains, déportés pour d’autres.

Ces jeunes gens avaient été arrêtés par la Gestapo à partir d’une liste qui lui avait été fournie. Bien entendu, à la Libération, on s’est demandé qui avait fourni cette liste. Et la rumeur désigna Georges Fischer. Très vite le jugement tombe : Georges Fischer doit être exécuté. (Lire aussi l’article d’Ouest-France).

On sait aujourd’hui, non seulement que Georges Fischer n’avait pas trahi, mais qui l’avait fait : il s’agissait, comme c’est presque la règle dans ces histoires en Bretagne, d’un militant du parti national breton, tristement célèbre pour sa collaboration avec les Allemands.

Voici le récit que donne de ce drame René Huguen, lui-même ancien résistant, et doyen du Conseil des anciens élèves du Lycée Anatole Le Bras.

Au soir de ce 14 juillet 1944, trois résistants désignés pour accomplir l’exécution se présentent chez Hélène Le Cor, née Fischer, qui héberge son frère Georges, à La Ville Ginglin. Georges les voit, révolver au poing. Il comprend : « Je n’ai pas trahi, je vous le jure », clame-t-il, alors qu’une première décharge vient de l’atteindre, suivie de quatre autres tirées à bout portant par chacun des trois hommes. La scène se passe devant la sœur et ses enfants, dont Marilou Le Cor, alors âgée de 9 ans, Marilou, qui gardera toute une vie la vision d’un drame atroce.

La Libération est là. Des procès sont conduits par la justice républicaine. On découvre alors le véritable dénonciateur des lycéens : Michel Plessix, un jeune du PNB (Parti national breton) qui s’est mis au service de la Gestapo. Il a obtenu une liste d’un malheureux lycéen, Paul Cadran, sous prétexte de constituer un groupe de jeunes susceptibles d’être armés contre l’occupant. Le procès public devant la Cour de Justice le 4 mai 1945 se traduit par une peine de travaux forcés à perpétuité. De mise de peine en remise de peine, Plessix s’en tirera avec 10 ans de prison l

Quelle clémence ! Cadran, victime d’une fatale illusion, sera soumis à 6 mois de prison. Il nous a confié par la suite que ce fut pour lui un soulagement que de voir enfin «  l’abcès se vider » .

Louis Le Faucheur, rentre de déportation, juste après le procès, déclare ; « Cette double trahison a pris la dimension d’une tragédie pour le lycée ».

Oui, double trahison. Mais alors on avait accuse un innocent. On avait exécuté Georges Fischer comme étant le coupable. Terrible erreur ! Peut-on l‘oublier ? Peut-on faire qu’il soit toujours considéré comme ayant trahi ? Sa nièce, Marilou, Madame Le Cor, ne baisse pas les bras. Elle veut, elle exige ce qu’il faut bien appeler une réhabilitation. Avec nous, elle s’appuie sur la Ligue des Droits de l‘Homme. Les représentants de la Ligue participent à cette cérémonie avec le président, Monsieur Xavier Palson. Nous les assurons de notre soutien pour obtenir gain de cause, et faire que le dossier ne reste pas fermé pendant 100 ans après les faits comme le prescrit pourtant la loi. Les pièces essentielles sont en nos mains quoi qu’il en soit ».

Il va maintenant falloir que cette erreur dramatique soit officiellement reconnue.

« Garde à vue bis » pour les étrangers, centres de rétention : pour Valls, le changement, ça n’est pas maintenant !

Sale temps pour les demandeurs d’asile et les sans-papiers.

Alors que le ministère de l’intérieur vient d’adresser aux associations habilitées à pénétrer dans les centres de rétention son appel d’offre pour l’année prochaine, l’assemblée vient de voter la « retenue » des étrangers pour vérifier leur identité (le conseil d’Etat avait reconnu illégale la garde à vue).

Les centres de rétention tout d’abord. L’appel d’offre n’est pas public, seules les associations concernées le recevront. Le site Médiapart a cependant réussi à en avoir connaissance, et ça n’est pas triste…

Parmi les nouveautés : un devoir de réserve, ou de discrétion, est imposé aux intervenants, mandatés pour informer et apporter un soutien aux personnes retenues. La violation de ce devoir sera punie d’une amende de 500€…

Lorsqu’une personne retenue voudra déposer un recours, l’intervenant devra prévenir le chef de centre. Les personnes retenues ne pourront être entendues qu’une par une par les avocats ou les intervenants : sauf qu’il arrive qu’un retenu maîtrisant le français pouvait servir d’interprète…

La conclusion de la Cimade est sévère : « Ce régime d’exception risque fort de devenir le nouvel outil des préfectures et de la police. Il s’ajoutera à l’arsenal déjà mis à leur disposition sous l’ère Sarkozy et toujours en vigueur en devenant le premier maillon d’une chaîne visant à enfermer en rétention et expulser au détriment des droits » (lire ici). « La Cimade demande au gouvernement de retirer cet appel d’offre et d’adopter de nouvelles dispositions qui garantissent l’accès effectif aux droits des personnes étrangères enfermées en rétention ainsi que l’indépendance d’associations exerçant un rôle essentiel de vigilance citoyenne, de regard de la société civile  sur ces lieux d’enfermement ». En conclusion, l’association considère qu’il s’agit ni plus ni moins d’une « garde à vue bis spéciale étrangers ».

Passons au texte de loi sur la retenue des étrangers. Il avait déjà été adopté par le sénat, et l’Assemblée nationale vient de le finaliser. Première chose, la retenue ne pourra pas excéder 16h : c’est un progrès. C’est bien le seul !

La discussion a été vive à l’Assemblée. La droite a évidemment entamé son refrain xénophobe. Mais c’est de la gauche qu’est venue l’opposition la plus intéressante. Elle a permis notamment d’autoriser la présence d’un avocat, pour un entretien de 30 minutes : « Il est ainsi prévu explicitement que l’étranger peut demander à être assisté par un avocat, que l’avocat peut, dès son arrivée, communiquer pendant trente minutes avec la personne retenue, que l’étranger retenu peut demander que l’avocat assiste à ses auditions au cours desquelles celui-ci peut prendre des notes et qu’à la fin de la retenue l’avocat peut, à sa demande, consulter le procès-verbal de retenue ainsi que le certificat médical annexé. La première audition ne pourra débuter sans la présence de l’avocat avant l’expiration d’un délai d’une heure, sauf si elle porte uniquement sur les éléments d’identité ». Le Monde poursuit : « S’il a reconnu « une avancée extrêmement importante » avec ces amendements, le chef de file des députés radicaux de gauche, Roger-Gérard Schwartzenberg, a pointé avec insistance un traitement moins favorable à ses yeux pour les sans-papiers retenus que pour les gardés à vue, vu la possibilité d’une audition pendant une heure sans présence d’un avocat sur les éléments d’identité, « cœur de cible » à ses yeux des auditions dans le cas de la retenue » (article ici).

Les associations ne pourront qu’être déçues par ces deux nouvelles, qui viennent s’ajouter à plusieurs événements inquiétants : démantèlement des camps de roms sans relogement, renoncement au récépissé pour les contrôles d’identité (Valls s’est contenté d’une « réécriture » du code de déontologie de la police et de la gendarmerie)…

Au ministère de l’intérieur, le changement, ça n’est décidément pas maintenant…

|1| |57| |58| |59| |60| |61| |125|