Colère sociale au Chili contre la hausse du prix du ticket de métro et répression du pouvoir par l’état d’urgence

Publié sur le site information.tv5monde.com

19 OCT 2019   Séraphine Charpentier

État d’urgence au Chili : la hausse du prix du ticket de métro déchaîne la colère

Le président chilien Sebastián Piñera a décrété vendredi 19 octobre l’état d’urgence dans la capitale Santiago. Des manifestations ont débouché sur des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. Les sièges de la seconde banque du pays, ainsi que la compagnie d’électricité Enel, ont été incendiés. Suite à des dégradations, l’ensemble du réseau métropolitain a été bouclé. Les Chiliens protestent contre une nouvelle hausse du prix du titre de transport. Le ticket de métro vaut désormais plus d’un euro (830 pesos) en heures de pointe.

Publié sur francais.rt.com

Chili : l’état d’urgence après des manifestations violemment réprimées

Incendies, dégradations, affrontements, la situation a brutalement dégénéré à Santiago, au Chili, après qu’une augmentation du prix des tickets de métro a entraîné d’importantes manifestations. Le président a décrété l’état d’urgence.

Des manifestations de protestation contre l’augmentation des prix des transports ont rapidement dégénéré de manière spectaculaire à Santiago, au Chili, le 18 octobre.

Le président du pays, Sebastián Piñera, a décrété l’état d’urgence et fait appel à l’armée dès la fin de journée face au chaos qui s’est abattu sur la capitale. Il a annoncé à cet égard avoir nommé un général de division à la tête de la défense nationale.

La violence des affrontements a conduit à la fermeture de toutes les stations de métro. «L’ensemble du réseau est fermé en raison des émeutes et des destructions qui empêchent les conditions minimales de sécurité pour les passagers et les travailleurs», a annoncé sur Twitter le gestionnaire du métro, après des attaques contre presque l’intégralité des 164 stations, où beaucoup de barrières et tourniquets ont été détruits.

Avant que les stations de métro ne soient bouclées, des appels à monter dans les trains sans billet avaient circulé pour protester contre l’augmentation du prix des tickets de métro, passé de 800 à 830 pesos (1,04 euro) aux heures de pointe, après une première augmentation de 20 pesos en janvier dernier. Des photos publiées par Reuters et l’AFP montrent des stations de métro en proie aux flammes.

A travers Santiago, des manifestants ont érigé des barricades et se sont heurtés à la police, qui a fait usage de canons à eau et de gaz lacrymogènes, des scènes de bataille de rue plus vues depuis longtemps dans la capitale chilienne.

Des images circulant sur les réseaux sociaux attestent en effet de destructions et de violences. Plus grave : Erika Ortega Sanoja, journaliste vénézuélienne pour RT en espagnol, a publié des vidéos montrant des images très choquantes d’une jeune femme qui semble perdre beaucoup de sang et qu’elle présente comme venant d’être blessée par balle pendant les manifestations.

Dans une autre vidéo postée un peu plus tard par la même journaliste, on peut voir du sang par terre et une personne allongée à laquelle d’autres apportent des soins. Il s’agirait a priori de la même jeune femme, selon la journaliste de RT en espagnol.

Les affrontements se sont multipliés à la tombée de la nuit et le bâtiment de la compagnie d’électricité Enel ainsi qu’une succursale de Banco Chile, tous deux dans le centre-ville, ont été incendiés. Les pompiers ont cependant indiqué après environ une heure d’efforts que le sinistre était en phase de contrôle, et aucun employé n’a été blessé.

Un supermarché tout proche a aussi été pillé et plusieurs stations de métro ont été attaquées à coup de cocktails molotov. Le 17 octobre, 133 personnes avaient été arrêtées pour des dégradations dans les stations de métro, où les dommages ont été évalués par le gestionnaire entre 400 et 500 millions de pesos (entre 500 000 et 630 000 euros).

Les transports en commun sont très utilisés à Santiago, une ville très polluée et congestionnée. Le métro de Santiago, le plus étendu (140 km) et le plus moderne d’Amérique du Sud, par lequel transitent environ 3 millions de passagers par jour, devrait rester clos ce week-end et pourrait rouvrir progressivement la semaine prochaine. Beaucoup d’habitants de Santiago ont ainsi dû rentrer chez eux à pied, parcourant parfois de longues distances, ce qui a provoqué des scènes de chaos et de désespoir.

Le président Sebastián Piñera a déclaré que «la hausse des prix des tickets de métro obéit au mandat de la loi, répond à la hausse du dollar et du pétrole et a été déterminée par un panel d’experts». Devant la situation chaotique, il a toutefois annoncé que le gouvernement organiserait dans les prochains jours un «dialogue intersectoriel» afin de tout mettre en œuvre pour atténuer et alléger la situation des citoyens touchés par la hausse.

Grand mouvement social au Liban contre la hausse des taxes et la corruption du pouvoir

Publié sur france24.com

Troisième journée de manifestations contre le pouvoir au Liban

Des milliers de Libanais sont descendus dans la rue, samedi, en cette troisième journée consécutive de manifestations, pour protester contre une classe politique qu’ils jugent corrompue.

Un mouvement inédit paralyse le Liban. Des milliers de manifestants se sont rassemblés, samedi 19 octobre, pour une troisième journée de manifestations contre l’incapacité d’une classe politique accusée de corruption à s’attaquer à la crise économique.

En dépit d’une intervention des forces de l’ordre pour disperser dans la nuit la foule devant le siège du gouvernement à Beyrouth et des dizaines d’arrestations, les manifestants se sont mobilisés à nouveau dans la capitale ainsi que dans d’autres villes du pays. Le matin, l’armée a rouvert des autoroutes en enlevant les barricades dressées par des manifestants, qui n’ont pas tardé à en installer d’autres.

Des volontaires nettoyaient le centre-ville de Beyrouth qui ressemblait à un champ de bataille avec de la fumée se dégageant de pneus et de bennes à ordures incendiés la nuit. Des débris de verre brisé des vitrines de magasins et de banques jonchaient le sol.

70 personnes arrêtées pour « actes de sabotage »

Les services de sécurité ont fait état de « l’arrestation de 70 personnes pour actes de sabotage, incendies et cambriolage dans le centre-ville ». Lors des manifestations déclenchées jeudi par l’annonce d’une nouvelle taxe – depuis annulée –, les manifestants conspuent l’ensemble des dirigeants dans leurs fiefs les appelant « voleurs » et déchirant leurs portraits.

Un manifestant a affirmé à un média local, dans un fief du puissant Hezbollah chiite : « Notre combat est contre le confessionnalisme. Nous souffrons depuis 30 ans à cause de la classe politique. Ils essaient de nous présenter comme des canailles, mais tout ce qu’on fait c’est réclamer nos droits ».

À Tyr, dans le sud du pays, où le puissant chef du Parlement, Nabih Berri, a été accusé d’escroquerie la veille par les manifestants, des dizaines de ses partisans s’en sont pris samedi aux protestataires, selon un témoin. À Tripoli, située dans le nord du pays, une manifestante, Hoda Sayyour, la cinquantaine, a accusé la classe politique d’avoir « pris nos droits les plus fondamentaux (…) ». « Nous sommes en train de mourir aux portes des hôpitaux ! », dénonce-t-elle. « Je resterai dans la rue (…) Ils nous exploitent et ne font rien pour améliorer les services. »

Corruption et népotisme

Alors que plus du quart de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon la Banque Mondiale, la classe politique, quasi inchangée depuis la guerre civile (1975-1990), est accusée de corruption et de népotisme, cherchant à privilégier les mesures fiscales qui ne compromettent pas ses intérêts.

Elle est aussi accusée d’affairisme dans un pays aux infrastructures en déliquescence (pénuries chroniques d’électricité et d’eau potable) et où la vie est chère. Vendredi, écoles, universités, banques et institutions publiques avaient fermé. Les banques sont restées fermées samedi.

Le Premier ministre, Saad Hariri, a défendu vendredi les réformes qu’il veut faire adopter, en accusant des membres de sa coalition gouvernementale d’entraver ses efforts. Il leur a donné jusqu’à lundi pour se prononcer clairement en faveur des réformes. Il a aussi insinué qu’il n’avait aucun problème à céder sa place à quiconque proposerait une autre solution.

« Deux grands dangers »

Avant lui, le chef de la diplomatie, Gebran Bassil, gendre du président Michel Aoun, a dit être opposé à une démission du gouvernement, qui pourrait « aggraver » la situation.

Dans un discours, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, poids lourd de la politique libanaise, a accusé, sans les nommer, des responsables de tenter de jeter « la responsabilité sur les autres », semblant rétorquer à Saad Hariri. Il a appelé « à répondre au message retentissant » des manifestants, en saluant « un mouvement populaire (…) qui dépasse les appartenances confessionnelles, régionales ou politiques ».

Mais il a affirmé « ne pas soutenir une démission du gouvernement », ainsi que son refus de l’imposition de nouvelles taxes. Le pays fait face à « deux grands dangers : le premier serait l’effondrement financier et économique (…) et le second, une explosion populaire », a-t-il averti.

Avec AFP

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