UNE RÉFORME DE L’ASSURANCE CHÔMAGE INACCEPTABLE ET PARTIELLEMENT SUSPENDUE EN RÉFÉRÉ

Communiqué de la LDH

Une réforme de l’assurance chômage devait entrer en vigueur en juillet. Le juge des référés du Conseil d’Etat a suspendu ces nouvelles règles de calcul des indemnités pour chômage.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) se réjouit de la décision du conseil d’Etat suspendant essentiellement le nouveau mode de calcul du salaire journalier de référence, base de l’allocation. En effet, en aggravant la prise en compte des périodes non travaillées, si elle était mise en application, cette réforme détériorerait l’indemnisation des demandeurs d’emplois qui enchaînent des contrats courts. Cette réforme entraînerait une baisse d’allocations pour 800 000 à 1,15 million de personnes sur 2,8 millions de nouveaux bénéficiaires. Contrairement à ce qui a été annoncé, cette réforme appauvrirait nombre de demandeurs d’emploi aggravant ainsi les inégalités en général.

Par ailleurs, cette réforme prévoit que les droits seraient liés à l’activité économique. Si elle est considérée comme mauvaise, les demandeurs d’emploi devront avoir travaillé quatre mois sur vingt-huit pour pouvoir être indemnisés. Dès lors que l’activité reprend, ils devront avoir travaillé six mois sur vingt-quatre. Même schéma pour la dégressivité, les cadres subiront un abattement de 30 % de leur allocation à partir du neuvième mois d’indemnisation et si la période devient plus faste, ce sera au septième mois.

Comme le dit le juge des référés, « il ne résulte pas de l’instruction d’éléments suffisants permettant de considérer que les conditions du marché du travail sont à ce jour réunies pour atteindre l’objectif d’intérêt général poursuivi ».

Effectivement, pour la LDH, il n’est pas pertinent de mettre en œuvre une telle réforme de l’assurance chômage en ce moment. Personne ne sait comment l’activité économique va évoluer et quelles seront les incidences sur l’emploi dans les mois à venir.

Par-delà, pour la LDH, il n’est pas acceptable que les travailleurs privés d’emploi et de travail soient contraints de payer le prix de la crise et de faire dépendre de l’activité économique le montant des allocations chômage.

« Tout être humain qui, en raison (… ) de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence » dit le préambule de la Constitution de 1946. Comme tous les autres droits, ces droits ne sont pas conditionnés.

Réaffirmons l’indivisibilité des droits ; les droits sociaux sont partie intégrante du combat pour l’égalité et la liberté de toutes et de tous.

Avec cette réforme, l’Etat cherche une nouvelle fois à réduire la place des « partenaires sociaux » dans la gestion, nommée paritarisme, de nombre d’organismes de protection des salariés affaiblissant ainsi la complémentarité entre la démocratie socio-économique el la démocratie politique. 

Pour la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion ce texte était censé inciter les demandeurs d’emploi à retrouver au plus vite le chemin du travail et destiné à « lutter contre la précarité ». Il faut une nouvelle fois affirmer le caractère fallacieux de l’affirmation selon laquelle la baisse de l’indemnisation du chômage inciterait les travailleurs sans emploi à en chercher un. Les travailleurs sans emploi ne sont pas les responsables de leur situation.

L’ensemble des organisations syndicales refusent cette réforme. La LDH demande l’abandon complet de cette réforme et la réouverture de négociations sur le système d’assurance chômage.

Paris, le 24 juin 2021

Colombie : de nouvelles manifestations au 15e jour de la crise sociale

Au moins 41 morts parmi la population et les manifestants et des centaines de civils blessés victimes des forces de répression de ce gouvernement autoritaire et criminel. Cette terrible répression, la pire dans l’histoire de la Colombie, avec de nombreux viols et actes de torture, fait suite à un vaste mouvement social pacifique avec la jeunesse à sa tête. Les manifestants réclament une politique plus sociale et demandent le retrait de la réforme de la santé, qui vise à restreindre l’accès universel à des soins de qualité. Ils souhaitent également des aides pour les entreprises qui ont souffert de la crise sanitaire, ou encore l’accès à une éducation gratuite pour tous. Ils dénoncent aussi  les abus des forces de l’ordre, accusées de recourir à la violence envers les manifestants.

Publié sur francetvinfo.fr le 13 mai 2021 avec AFP

Cette mobilisation est marquée par des violences meurtrières dans ce pays dont l’économie s’est détériorée avec la pandémie de Covid-19.

La colère ne faiblit pas. Des milliers de personnes manifestaient à nouveau en Colombie, mercredi 12 mai, au 15e jour d’une forte mobilisation sociale contre le gouvernement. Ce mouvement est marqué par des violences meurtrières dans ce pays dont l’économie s’est détériorée avec la pandémie de Covid-19.

Le président de droite Ivan Duque a rencontré, mercredi, des représentants des jeunes, qui sont en première ligne de la protestation, après avoir promis pour les plus modestes la gratuité des frais d’inscription à l’entrée dans les universités publiques.

« Je vais mettre toute mon énergie, toute ma capacité et toute l’équipe gouvernementale pour que ce processus [de négociation] se passe bien », a déclaré le président lors de cette rencontre avec des étudiants à Bogota.

Au moins 42 morts

Les affrontements, qui ont marqué certaines de ces journées depuis le 28 avril, ont fait au moins 42 morts, dont un membre des forces de l’ordre, selon le Défenseur du peuple, entité publique de protection des droits humains.

De son côté, le ministère de la Défense, dont relève la police en Colombie, maintient un chiffre de 849 agents blessés, dont douze par armes à feu, et 716 civils mais sans préciser le nombre de ceux blessés par balles.

Il s’agit des manifestations les plus sanglantes qu’ait jamais connues ce pays de 50 millions d’habitants, appauvri par la pandémie, qui a fait près de 79 000 morts. La Colombie est également confrontée à une recrudescence de la violence des groupes armés financés par le narco-trafic.

Colombie. Les disparitions forcées et violences sexuelles dont des manifestant·e s ont été victimes

Publié par Amnesty International sur amnesty.org

7 mai 2021, 13:08 UTC

En dépit de l’indignation croissante suscitée au niveau national et international, l’intervention militarisée et la répression policière déployées face à des manifestations très majoritairement pacifiques se poursuivent dans différentes villes de Colombie. La police a recouru à la force de manière disproportionnée et sans discernement, et le nombre de signalements de violences sexuelles et de disparitions forcées est alarmant, a déclaré Amnesty International vendredi 7 mai. Les disparitions forcées et les violences sexuelles imputées aux autorités sont des crimes de droit international pour lesquels n’importe quel État est habilité à mener une enquête et lancer des poursuites.

« Les autorités colombiennes doivent garantir le droit de réunion pacifique et s’abstenir de pointer du doigt et de réprimer les manifestations ayant lieu à travers le pays depuis le 28 avril. La garantie du droit à la vie et du droit à l’intégrité physique des personnes qui manifestent de manière pacifique doit être au cœur de l’action des autorités, conformément aux normes internationales relatives aux droits humains », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International.

Amnesty International a précédemment dénoncé certains agissements, comme par exemple lorsque les forces de sécurité ont employé des armes létales et à létalité réduite sans discernement. Malgré le tollé international provoqué par ces événements, l’organisation continue à recenser des cas graves de recours excessif à la force contre des manifestant·e·s. Après la vérification et l’analyse de séquences audiovisuelles, l’organisation a, par exemple, pu établir que des membres de l’unité antiémeutes de la police (ESMAD) ont tiré des grenades de gaz lacrymogène très près des manifestant·e·s à Cali. Dans un autre cas confirmé par Amnesty International, la police de Bogotá a utilisé une arme à feu contre une personne tandis que celle-ci fuyait. L’organisation a également reçu des signalements selon lesquels, le soir du 4 mai, dans le quartier Siloé de Cali, des manifestant·e·s ont été directement visés par des tirs d’arme à feu, et ont été victimes de menaces et d’actes de torture.

La garantie du droit à la vie et du droit à l’intégrité physique des personnes qui manifestent de manière pacifique doit être au cœur de l’action des autorités, conformément aux normes internationales relatives aux droits humains. 

Erika Guevara Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International

…/… (la suite sur le site)

Répression du pouvoir au Nigéria: au moins 18 morts et des centaines de blessés par la police qui tire à balles réelles

Au Nigéria un vaste mouvement de contestation traverse le pays depuis plusieurs semaines. La jeunesse (60% de la population) réclame la justice et la fin de la corruption et des violences policières. Un régime autoritaire a été mis en place depuis longtemps dans le cadre d’une politique néolibérale. La LDH dénonce la répression sanguinaire du pouvoir.

Publié sur lemonde.fr le 22 octobre 2020

Nigeria : une juste révolte contre l’impunité

Editorial. Des manifestations agitent le pays depuis deux semaines. Déclenché par des violences policières, ce mouvement est une devenu une contestation plus globale d’un pouvoir abusif et discrédité.

Editorial du « Monde ». 

Première puissance économique du continent africain, pays connu pour son dynamisme et sa créativité, mais aussi pour sa corruption et ses inégalités abyssales, le Nigeria est en proie à une révolte inédite de sa jeunesse. Depuis deux semaines, des manifestations secouent le pays non seulement à Lagos, mégalopole de vingt millions d’habitants et capitale économique du pays, mais dans plusieurs autres villes, dont Abuja, sa capitale fédérale. Déclenchée par une vidéo montrant des policiers abattant un homme de sang-froid, la révolte contre les violences policières s’est muée en une contestation globale du régime revendiquant la démission du président, Muhammadu Buhari. Le soulèvement de la jeunesse urbaine se nourrit aussi de l’exaspération après un confinement anti-Covid-19 levé cet été, mais qui a asphyxié l’économie.

Au moins dix-huit personnes sont mortes dans ces affrontements avec la police avant même le « mardi sanglant », ce 20 octobre, au cours duquel un millier de manifestants rassemblés à un péage de Lagos ont été dispersés par des tirs à balles réelles. La police et l’armée sont mises en cause, mais aussi des voyous stipendiés pour jeter le discrédit sur le mouvement. Depuis lors, des jeunes continuent de braver le couvre-feu instauré pour tenter de stopper leur révolte. La promesse du président de dissoudre la brigade spéciale de la police nigériane, accusée de tortures et d’exécutions sommaires par Amnesty international, convainc d’autant moins les manifestants qu’elle a déjà été formulée, en vain, par le passé.

Vieux militaires brutaux

La jeunesse du Nigeria – 60 % de ses 200 millions d’habitants ont moins de 24 ans – ne supporte plus d’être exclue par un système politique incapable de réduire l’extrême pauvreté et dont la violence est couverte par une totale impunité. Le président Buhari, 77 ans, ancien général putschiste finalement élu en 2015, focalise le mécontentement : taiseux, claquemuré à Abuja, impuissant à vaincre l’insurrection islamiste de Boko Haram au nord-est, tout comme le grand banditisme, qui met en coupe réglée la région pétrolière du delta du Niger, il personnifie un pouvoir de vieux militaires du Nord, brutaux et incapables d’écouter la population. Son armée se caractérise par sa propension à commettre des exactions sur des civils réduits au silence – y compris numérique – loin des grandes villes. En dépit de la manne pétrolière, le revenu moyen nigérien ne dépasse pas 5 dollars (4,20 €) par jour, et l’espérance de vie plafonne à 52 ans.

L’impunité qui protège les responsables des violences au Nigeria est inacceptable. L’Union européenne et l’ONU réclament, à juste titre, qu’ils soient « traduits en justice » et que les abus policiers cessent. Locomotive de l’Afrique de l’Ouest, ce pays qui fait rêver tant d’Africains devrait se montrer exemplaire. Cela passe en tout premier lieu par la nécessité d’écouter les revendications d’une jeunesse qui réclame la justice, la fin de l’arbitraire des forces armées et la redistribution des richesses. Un programme ambitieux, qui, soixante ans après les indépendances, pourrait être celui de bien des pays du continent.

Le Monde