LDH-66 – Pyrénées Orientales

Soigner n’est pas ficher – L’éthique des médecins n’est pas à vendre – Communiqué du Syndicat de la Médecine Générale

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Soigner n’est pas ficher – L’éthique des médecins n’est pas à vendre

En préparation du post-confinement, l’Assurance maladie demande aux médecins généralistes de collecter des données personnelles sur leurs patient·e·s atteint·e·s du coronavirus, mais également sur leurs proches et les personnes avec lesquelles ils et elles sont en contact1. Contrairement à ce qui est avancé, ce n’est pas de la santé publique et si les médecins suivent, ils.elles trahiront leur éthique professionnelle.

Les médecins devront transmettre ces données (coordonnées complètes, résultats des tests) sur des plateformes numériques dénommées « contact Covid ». Le projet de « loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire » qui doit être adopté cette semaine2 prévoit que ces données pourront « être partagées, le cas échéant sans le consentement des personnes intéressées ». 

Les contours juridiques restent flous, un décret et des ordonnances sont annoncés dans le projet de loi. Les premiers éléments connus dessinent un système portant atteinte aux libertés et au secret médical. Et les questions restent nombreuses et inquiétantes :

– Qui aura accès à ces informations très sensibles ? La Caisse nationale d’Assurance maladie mentionne des plateformes départementales formées de personnels médicaux et administratifs des Caisses primaires d’Assurance maladie pouvant être appuyées par des « structures extérieures volontaires ».

– Quelle utilisation sera faite de ces informations ? Le but est d’identifier toutes les personnes potentiellement en contact d’une personne malade et de les confiner chez elles, donc de les priver de liberté. Le gouvernement semble toutefois, vu le tollé suscité, avoir renoncé à faire appliquer cet isolement par la contrainte.

– Comment seront conservées ces données sensibles ? Le projet prévoit une conservation des données a priori de un an, ce qui est déjà extrêmement long pour une maladie évoluant sur quelques semaines. De plus, ces données pourraient venir alimenter le Health Data Hub dont la mise en œuvre pose des problèmes de sécurisation des données3.

Nulle part, il n’est fait mention de la question du secret médical qui est donc allègrement bafoué. 

Comment considérer qu’une politique de santé publique puisse être efficace sans respecter l’éthique ? Sans le secret médical et la confiance qui en découle entre la personne soignée et le/la soignant·e ? Comment imaginer que les personnes concernées feront confiance aux professionnel·le·s de santé si elles savent que les informations qu’elles donnent seront divulguées, sans savoir à qui ?

Mépriser et infantiliser, contraindre et sanctionner n’améliorent par les conditions sanitaires. Au contraire, l’efficacité de la réduction des risques a été prouvée grâce à des pratiques d’information, de dépistage, de mise à disposition de matériel et d’autonomisation des personnes (cf. par exemple l’histoire des luttes contre le VIH ou le VHC).

Soigner n’est pas ficher, soigner n’est pas contraindre ! « contact Covid » serait un précédent très dangereux de contrôle sanitaire des populations exercé par l’intermédiaire des soignant·e·s. Les médecins ne sont pas des enquêteur·trice·s, des contrôleur·euse·s. 

L’éthique des soignant·e·s n’est pas à vendre ! Pourtant l’Assurance maladie promet, pour s’assurer de la participation des médecins, une rémunération supplémentaire en échange de ces données : majoration de 30 € de la (télé)consultation auxquels s’ajouteront 2 €, voire 4 € pour tout cas contact supplémentaire renseigné ! 

Nous, Syndicat de la médecine générale, appelons, les professionnel·le·s mais aussi les patient·e·s, et tous les citoyen·ne·s, 

– à refuser cette pratique de fichage indigne qui porte atteinte à l’éthique professionnelle et qui, en dégradant la confiance qui existe entre les soigné·e·s et les soignant·e·s, risque d’aggraver la situation sanitaire au lieu de l’améliorer.

– à promouvoir, dans le cadre de cette épidémie de Covid, une véritable politique de santé publique respectueuse de l’éthique professionnelle et s’appuyant sur la capacité des citoyen·ne·s à prendre en charge leur santé. Cela signifie la mise en place d’actions de prévention efficaces car adaptées aux territoires et fondées sur la coopération entre toutes les personnes et structures concernées, mais aussi et surtout sur les compétences et les savoirs des usager·ère·s, des professionnel·le·s et des nombreuses structures associatives et/ou militantes de terrain.

Contacts : 

Mathilde Boursier : 06.74.21.60.57

Camille Gendry : 06.76.71.39.08

Catherine Schmitt : 06.03.56.32.24

1. https://stats.info.ameli.fr/m//MDEwMDk1OTU2MzMyOTswMVAxMjY1NzM5NzU1O3N0ZXBoYW5lLmFuZHJpZXVAaWNsb3VkLmNvbTswOzIwMjAtMDQtMzBUMTc6NTI6MjQrMDI6MDA_a63HLvTUB9HPjL52nMmBTIHr98

2. https://fr.scribd.com/document/459488341/Projet-de-loi-prorogeant-l-etat-d-urgence-sanitaire-et-completant-ses-dispositions#from_embed

3. https://www.april.org/tribune-pour-des-donnees-de-sante-au-service-des-patients

Syndicat de la Médecine Général

52 rue Gallieni, 92240 Malakoff

Tél/Fax: 01 46 57 85 85

syndmedgen@free.fr – www.smg-pratiques.info

Déclaration de l’ORDL 66 (Observatoire pour le respect des droits et libertés 66) AVRIL 2020

Déclaration de l’ORDL 66 – AVRIL 2020

L’Observatoire pour le respect des droits et libertés 66 (ORDL 66) (*) reconnaît l’urgence de véritables mesures sanitaires et de solidarité populaire face à la pandémie actuelle mais appelle à la vigilance face aux dérives autoritaires (attaquant aussi bien les droits sociaux que les droits démocratiques), justifiées par les pouvoirs en place au nom d’une « guerre » contre le coronavirus.

Il souligne également que la crise sanitaire et le confinement frappent plus durement les plus vulnérables d’entre nous – les personnes âgées, les précaires, les sans-abri, les migrant.es (dont nous demandons la régularisation immédiate), les handicapé.es, les isolé.es, les prisonniers et que peu de choses ont été mises en place pour elles.

Par contre, la loi d’urgence permet à l’exécutif de concentrer encore plus le pouvoir et de gouverner par ordonnances et décrets, hors de tout contrôle démocratique, dont celui du Conseil Constitutionnel. Le gouvernement porte la responsabilité de la gestion calamiteuse de la crise sanitaire. Mais il tente de faire de la gestion de la pandémie une responsabilité individuelle de chacune et chacun, alors que c’est lui qui a minimisé la crise, refusé de prendre à temps des mesures sanitaires, donné des consignes confuses et contradictoires.

L’ORDL constate que dans les Pyr.-Orientales, le préfet, avec l’aval du maire de Perpignan, a mis en place un couvre-feu totalement injustifié, appelé chaque soir par une sinistre et stressante sirène et qui, tout particulièrement, stigmatise et vise les habitants des quartiers populaires. Les autorités ont également fait appel à la CRS de Toulouse, à la BAC et même à l’armée avec une unité militaire de l’opération « Résilience ». Les sanctions peuvent être surdimensionnées, et il est même envisagée une surveillance généralisée : le « tracking » qui permet de nous géolocaliser grâce à la puce GPS de notre smartphone, et contrôler tous nos faits et gestes…

L’ORDL 66 est conscient de la nécessité de mesures pour faire face à la pandémie, mais aussi :

  • Conscient des remises en cause des droits non seulement démocratiques mais également sociaux : allongement du temps de travail hebdomadaire à 60 heures maximum, remise en cause des congés payés, obligation de prendre des RTT…
  • Conscient du danger que les mesures d’exception (ordonnances antisociales et liberticides) présentées comme provisoires par le gouvernement, pourraient demain, la crise sanitaire enfin passée, devenir la norme. On l’a vu avec l’état d’urgence pérennisé dans le droit commun.

PROPOSITIONS

L‘ORDL 66 s’engage plus que jamais à jouer son rôle d’alerte en défense des droits et libertés, à impulser des actions unitaires et déterminées, et propose aux acteurs et actrices de la Sté Civile :

    • De nous informer de tous les cas d’atteintes à nos libertés et à nos droits sociaux à l’adresse :   observatoirelibertes66@laposte.net. Nous déciderons ensuite collectivement des suites à y donner.
    • De rejoindre l’Observatoire pour que l’unité indispensable fasse notre force, et pour préparer ensemble la sortie de cette crise humaine mais aussi démocratique.

(*) L’ORDL 66, a été constitué en 2015 en réaction aux mesures liberticides de l’état d’urgence, et est composée de : AFPS – AGAUREPS-Prométhée – ASTI66 – UD CGT66 – Collectif anti-ogm – « En commun » 66 – F.A Pierre Ruff – Femmes Solidaires – FSU – Génération.s – Ligue des droits de l’Homme – MJCF – MRAP – NPA66 – PG66 – Groupes d’action France Insoumise – PCF-66 – Syndicats SOLIDAIRES 66 – Syndicat de la Médecine Générale.

Un récent décret autorise le fichage des données politique, syndicale, ethnique, … de toute personne en cas de « nécessité absolue »

Après la loi anti-casseurs le gouvernement continue dans sa politique liberticide et répressive: il a pris, le 20 février, un décret autorisant le fichage des données « relatives à la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, à l’appartenance syndicale, à la santé ou à la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle » de toute personne en cas de « nécessité absolue ». (décret Décret n° 2020-151 du 20 février 2020, article 2 point 2).  La LDH fait un recours au niveau national ainsi que des avocats et magistrats.

Publié sur liberation.fr Par Anaïs Condomines 27 février 2020 

La gendarmerie nationale va se doter d’une application numérique de prise de notes, «GendNotes», qui suscite des inquiétudes. Consultée, la Cnil a donné son feu vert.

Question posée par Marc le 25/02/2020

Bonjour,

Votre question fait référence au décret n°2020 151 publié le 22 février dernier au Journal officiel. Signé par le Premier ministre, Edouard Philippe, et le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, il autorise la mise en place d’un «traitement de données à caractère personnel dénommé « application mobile de prise de notes »». En clair : une sorte de bureau mobile, qui s’appelle «GendNotes» et qui permet de dématérialiser la prise de notes des gendarmes. Dans le but, précise le décret, de «faciliter le recueil et la conservation […] d’informations collectées par les militaires de la gendarmerie nationale à l’occasion d’actions de prévention, d’investigations nécessaires à l’exercice des missions de polices judiciaire et administrative» et de «faciliter la transmission de comptes rendus aux autorités judiciaires».

Mais depuis l’entrée en vigueur de ce texte, des inquiétudes se font entendre. Le journal Initiative communiste dénonce par exemple «une nouvelle escalade dans la fascisation et la construction d’un régime autoritaire». Et d’affirmer que le gouvernement permet «à la gendarmerie non seulement de constituer un fichier de police politique de l’ensemble de la population, mais également de le partager directement avec les autorités politiques, préfets et maires !»

Qu’en est-il vraiment ? Tout l’enjeu se cristallise autour de l’article 2 du décret, qui précise le type de données pouvant être enregistrées dans cette application. Est donc désormais autorisé l’enregistrement d’informations dites «sensibles». Dans une zone de commentaires libres – et uniquement à cet endroit –, pourront ainsi être consignées des données relatives «à la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, à l’appartenance syndicale, à la santé ou à la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle». L’article 4 précise qui pourra avoir ensuite accès aux informations récoltées : à savoir le gendarme qui rédige la note et ceux de son unité, «sauf s’il s’y oppose», les gendarmes d’une autre unité qu’il peut désigner. Les autorités judiciaires, le préfet, le sous-préfet, le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, et enfin le maire de la commune concernée

D’emblée, le décret précise dans quelles conditions ces informations pourront être recueillies. On peut lire que la collecte et le traitement de ces données sensibles «ne sont possibles qu’en cas de nécessité absolue pour les seules fins et dans le strict respect des conditions définies au présent décret, dans les limites des nécessités de la mission au titre de laquelle elles sont collectées». Le texte souligne aussi qu’il est par ailleurs «interdit de sélectionner une catégorie particulière de personnes à partir de ces seules informations».

Feu vert de la Cnil

Ce qui, à première vue, semble convenir à la Cnil. La Commission nationale de l’informatique et des libertés a en effet été consultée, comme le veut la loi dans ces circonstances. Dans sa délibération du 3 octobre, elle s’attarde sur ces fameux «champs libres», zone de commentaires où pourront figurer donc les données sensibles. La Cnil rappelle à leur égard que «les données traitées doivent être pertinentes, adéquates et non excessives au regard de la finalité poursuivie». Elle précise aussi ce que le ministère a déjà noté dans le décret : c’est-à-dire que «le traitement de telles données n’est possible qu’en cas de nécessité absolue, sous réserve des garanties appropriées pour les droits et libertés de la personne concernée». Pour le reste, la Cnil prend acte des garanties apportées par le gouvernement«à savoir que les informations enregistrées dans ces champs libres ne pourront pas alimenter d’autres traitements et qu’elles seront uniquement accessibles via l’application».

La gendarmerie nationale, contactée par CheckNews, se veut rassurante sur ce point : selon un porte-parole, les informations sensibles, portant sur la prétendue origine raciale, les opinions politiques, religieuses ou syndicales, la santéla vie sexuelle ou l’orientation sexuelle «ne sont transférées dans aucun autre fichier» et «ne peuvent être automatiquement transposées ailleurs», contrairement aux autres données portant sur l’identité complète de la personne concernée (nom, prénom, filiation…), qui elles sont transmises automatiquement sur le logiciel de rédaction des procédures (LRPGN). Du point de vue de la gendarmerie, cette section de commentaires libres fait office de «pense-bête» pour la rédaction d’éventuels procès-verbaux par la suite.

Une autre inquiétude est soulevée, cette fois par l’association de la Quadrature du Net. Dans un article, on peut ainsi lire que GendNotes facilite la collecte de photos, leur «transfert dans des fichiers extérieurs» et, in fine, la reconnaissance faciale. Outre les informations dites sensibles citées plus haut, GendNotes permet effectivement la collecte de photographies de la personne. La Cnil rappelle que ce nouveau calepin virtuel n’est pas en mesure d’effectuer une reconnaissance faciale. L’option est-elle pour autant complètement balayée ? Pas tout à fait. La gendarmerie nationale nous indique en effet que ces clichés, intégrés dans GendNotes, ne font pas partie des éléments automatiquement transférés dans le logiciel de rédaction des procédures. «Mais si le gendarme en a besoin dans sa procédure, il peut effectivement la transférer.» Dans un second temps, une ouverture de procédure pourra permettre de relier ce logiciel au fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ) qui, lui, procède à de la reconnaissance faciale.

«Effets potentiellement délétères»

Des précisions qui ne sont pas de nature à rassurer la pénaliste Virginie Gautron. Pour elle, «l’un des problèmes est la fusion dans un même fichier de finalités judiciaires et administratives, de sorte que le champ d’application vise toutes les missions de la gendarmerie, explique-t-elle à CheckNewsHabituellement, chaque fichier de police définit ses cibles. Par exemple, les personnes au sujet desquelles existent des indices graves ou concordants, des témoins, des personnes susceptibles de présenter une menace etc. Certes, le texte limite l’enregistrement aux informations « nécessaires, adéquates et proportionnées », mais comme aucune cible n’est précisée, les gendarmes sont totalement maîtres de la décision et de l’interprétation des critères de nécessité.»

Elle poursuit : «Un cadre plus précis éviterait les collectes de précaution, « au cas où cela pourrait servir », une tentation qu’on retrouve dans toutes les institutions.» Plus généralement, la pénaliste estime que «le sujet est totalement dépolitisé sans prise en compte d’effets potentiellement délétères».

De son côté, la gendarmerie nationale rejette toute idée de «fichage» : «Il n’y a aucun fichage de la population, qu’il soit politique, religieux, syndical ou sur les orientations sexuelles. GendNotes est un outil qui permet la prise de notes dématérialisées (elle était jusqu’à présent manuscrite) des gendarmes dans le cadre de leurs interventions. Dans certains cas, la prétendue origine raciale, les croyances religieuses, etc. sont directement liées à l’intervention, les gendarmes doivent être spécifiquement autorisés à collecter ce type de données.»

Cordialement,

Anaïs Condomines

Lire aussi l’article paru dans lemonde.fr

Faut-il s’inquiéter de « Gendnotes », le nouveau fichier de la gendarmerie ?

« Avec cette application, les gendarmes pourront saisir des données ethniques, religieuses ou politiques si elles sont « strictement nécessaires », mais des questions persistent… »