En dix ans, plus de 1 700 activistes écolos ont été tués dans le monde

Suite à la manifestation anti-bassines à Ste Soline, le ministre de l’intérieur a osé dénoncer l’écoterrorisme d’une partie des manifestants ! Rappelons au ministre que plus de 1700 militants écologistes ont été tués entre 2012 et 2021. Voilà de quel côté se trouve le terrorisme, du côté des bandes criminelles de multinationales et des gouvernements à leur solde.

Publié sur Reporterre le 4/10/2022

Plus de 1 700 militants écologistes ont été tués entre 2012 et 2021, selon un nouveau rapport de Global Witness. Et seulement 0,9% de ces crimes ont été résolus, alerte l’ONG.

Des portraits de Berta Cáceres durant une manifestation en avril 2016. L’activiste écologiste a été tuée dans la nuit du 2 mars 2016, au Honduras. – Flickr/CC BY 2.0/Daniel Cima/CIDH/Comisión Interamericana de Derechos Humanos

Deux ou trois morts par semaine, un meurtre tous les deux jours environ pendant dix ans. Plus de 1 733 défenseurs de la terre et de l’environnement ont été tués entre 2012 et 2021, selon les chiffres du rapport 2022 de Global Witness. Assassinés par des tueurs à gages mandatés par des groupes criminels organisés ou leurs propres gouvernements. Tués par balles. Tabassés. Torturés parfois. Attaqués chez eux, devant leurs familles, ou endormis dans leur lit. Marchant sur un chemin ou conduisant leur voiture. Retrouvés abandonnés au bord d’une route, ou en morceaux dans une poubelle.

Les pays les plus meurtriers pour les militants écologistes sont le Brésil (342 meurtres), la Colombie (322), les Philippines (270), le Mexique (154) et le Honduras (117).

Comme l’écrit Vandana Shiva dans son introduction au rapport, «ces chiffres ne deviennent réels que lorsque l’on entend les noms de ceux qui sont morts. Marcelo Chaves Ferreira. Sidinei Floriano Da Silva. José Santos López. Chacun d’entre eux était une personne vivante, aimée par sa famille, ses amis, sa communauté. Jair Adán Roldán Morales. Efrén España. Eric Kibanja Bashekere sacrifié au nom du profit. Regilson Choc Cac. Ursa Bhima. Angel Rivas. Tous morts en défendant non seulement leurs propres territoires précieux, mais aussi la santé de la planète que nous partageons tous». Cette année l’ONG publie donc aussi la liste intégrale (voir ci-dessous) des noms de ces activistes à l’avant-garde de la mobilisation qui voudrait protéger et préserver la nature nourricière.

De sombres records

C’est le 25 avril 2012, jour du meurtre de Chut Wutty, écologiste cambodgien qui enquêtait sur l’exploitation forestière illégale et travaillait avec Mike Davis, actuel directeur général de Global Witness, que l’ONG s’est lancée dans la publication annuelle de son rapport sur les assassinats des défenseurs de la terre et de l’environnement dans le monde. Global Witness compte les morts, enfin ceux qu’elle a réussi à repérer, car il y en a évidemment bien d’autres, trop pauvres et trop isolés pour que leurs vies, leurs combats et leurs morts soient connus.

Ces meurtres ont atteint le chiffre record de 227 en 2020, malgré la pandémie, et 200 en 2021. Avec plus de 40% des meurtres contre les membres de peuples autochtones, qui ne représentent pourtant que 5% de la population mondiale, la disproportion des agressions continue, au Mexique, en Colombie, au Nicaragua, au Pérou et aux Philippines. L’exploitation minière reste le secteur le plus meurtrier avec vingt-sept cas, la majorité des attaques ayant eu lieu au Mexique (15), aux Philippines (6), au Venezuela (4), au Nicaragua (1) et en Équateur (1).

94% des crimes ne sont pas signalés

C’est toujours la même histoire, dit Global Witness : une entreprise avide d’exploiter, un système politique qui aliène les biens communs planétaires situés dans le pays au profit de quelques industriels et d’un réseau de connivences. Et ceux qui résistent, mains nues contre les bulldozers, ceux qui tentent de défendre leurs arbres, leur rivière, leur lac, leur terre, contre les agresseurs venus voler, polluer et accaparer, ceux qui se dressent contre les industriels corrupteurs et les politiciens achetés, ceux qui dérangent vraiment, grains de sable enrayant la machine, à ceux-là, les exploiteurs envoient leurs tueurs à gages.

Et l’impunité reste généralisée, plus de 94% des crimes n’étant pas signalés et seulement 0,9% étant résolus. Rares sont les condamnations.

En plus des meurtres, les activistes sont la cible de harcèlements de toutes sortes, fausses accusations, disparitions forcées, emprisonnement abusif et criminalisation. Les poursuites bâillons sont une des stratégies de plus en plus utilisées par les autorités pour entraver et délégitimer le travail des défenseurs aux yeux de leurs communautés. Le but de ce type de poursuites n’est pas de gagner, mais de créer un effet dissuasif et de les faire taire en les inondant de procédures judiciaires longues et coûteuses, et aussi de les obliger à transmettre à l’entreprise qui les attaque, des communications privées y compris de documents internes sur les campagnes de résistance en cours.

Le rapport de Global Witness appelle les gouvernements à voter des lois qui protègent efficacement les défenseurs de l’environnement et à responsabiliser pénalement les entreprises, afin de garantir une tolérance zéro en matière de violence contre les activistes.

Les défenseurs et défenseuses de l’environnement assassinés en 2021

Au moins 212 défenseurs de l’environnement ont été tués en 2019

Publié sur francetvinfo.fr

La moitié des meurtres se sont produits dans seulement deux pays : la Colombie et les Philippines.

Au prix de leur vie, un peu partout dans le monde, ils se battent contre la déforestation, les mines ou des projets agro-industriels : au moins 212 défenseurs de l’environnement ont été tués en 2019, selon Global Witness. « A une période où nous avons particulièrement besoin de protéger la planète contre les industries destructrices et émettrices de CO2, les meurtres de défenseurs de l’environnement et des terres n’ont jamais été aussi nombreux » depuis le début du décompte en 2012, constate l’ONG britannique.

Leaders autochtones, rangers chargés de protéger la nature ou militants… Le bilan annuel publié mercredi 29 juillet surpasse le précédent record de 2017 où 207 morts avaient été enregistrées. Comme chaque année, « nos chiffres sont presque certainement sous-évalués », avertit Global Witness.

La Colombie et les Philippines en tête

En 2019,  à elle seule, l’Amérique latine représente deux tiers de ce décompte macabre. Mais la moitié des meurtres se sont produits dans seulement deux pays : la Colombie, avec 64 victimes, et les Philippines, avec 43 morts. Dans les deux pays, comme dans le reste du monde, les représentants des peuples autochtones (40% des tués en 2019) qui vivent au plus près de la nature « subissent un risque disproportionné de représailles » lorsqu’ils se battent pour défendre « leurs terres ancestrales ». 

Par exemple aux Philippines, Datu Kaylo Bontolan, leader du peuple Manobo, a été tué lors d’un bombardement aérien en avril 2019 alors qu’il luttait avec sa communauté contre un projet minier. Les mines sont d’ailleurs le secteur le plus meurtrier pour les défenseurs de l’environnement (50 morts). L’agro-industrie arrive ensuite, avec 34 militants tués en s’opposant à des exploitations d’huile de palme, de sucre ou de fruits tropicaux, en grande partie en Asie.

Global Witness note d’ailleurs que 33 militants ont été tués en Amazonie (en grande majorité au Brésil), luttant contre la déforestation entraînée notamment par des grands projets miniers et agricoles. Défendre la forêt peut aussi coûter sa vie en Europe, continent pourtant le moins touché par les meurtres de défenseurs de l’environnement. Ainsi en Roumanie, où l’une des plus importantes forêts primaires d’Europe est victime d’exploitation sauvage, le garde-forestier Liviu Pop a été abattu en octobre après avoir surpris des bucherons illégaux. Un mois plus tôt, un autre était tué d’un coup de hache à la tête.


La déforestation, comme ici au Brésil en août 2019, fait partie des combats pour lesquels le plus de défenseurs de l’environnement se sont fait tuer en 2019. (JOAO LAET / AFP)