Les droits et libertés à Metz et en Moselle

Les principes de liberté, d’égalité et de justice sont posés dès 1789 dans la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.

Il reste encore pas mal de travail pour leur mise en œuvre.

La LDH combat l’injustice, les racismes et les discriminations, les atteintes à la dignité et à la liberté.

Elle défend les droits politiques fondamentaux, les droits économiques et sociaux, les droits environnementaux.

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Le droit doit aussi s’appliquer sur les campus universitaires- communiqué

Les faits

Une intervention de la police nationale a eu lieu le 8 septembre sur le domaine universitaire du Saulcy à Metz.

Les policiers ont procédé à un contrôle d’identité d’étudiant.es qui étaient en train de tenir un stand aux couleurs d’un collectif, en présence de membres d’une organisation représentative étudiante.

Un drapeau palestinien a été retiré par la police, arguant du « contexte géopolitique ». A ce sujet, la LDH rappelle qu’exprimer sa solidarité avec le peuple palestinien n’est ni un délit ni une menace, c’est un droit.

Cette intervention policière ne semble pas avoir été  réalisée dans le cadre d’une réquisition de la présidence de l’Université, ni dans le cadre de circonstances permettant une action des forces de l’ordre sans réquisition, comme cela peut être le cas en situation de flagrant délit.

Position de la LDH

Les universités sont des institutions particulières qui jouent un rôle central dans la formation des citoyens et qui mettent à leur disposition des connaissances nécessaires au  débat public. 

La liberté d’expression des étudiants, au même titre que les libertés académiques, constitue un fondement essentiel de leur rôle démocratique.

Cela est- confirmé par le Code de l’Education Article L.811-1 : « Les usagers du service public de l’enseignement supérieur […] disposent de la liberté d’information et d’expression à l’égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels. Ils exercent cette liberté à titre individuel et collectif, dans des conditions qui ne portent pas atteinte aux activités d’enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l’ordre public. »

La LDH Metz- Moselle apporte son soutien à la présidence de l’université de lorraine qui s’est positionnée contre  cette violation manifeste des franchises universitaires sur le campus du Saulcy.

La LDH rappelle que c’est la Présidence de l’Université qui a la responsabilité légale d’assurer les libertés d’expression et de réunion des étudiant.es sur le campus. La Présidente est la personne garante de l’exercice effectif de ces droits.

La LDH rappelle que les étudiant.es bénéficient de la liberté d’organiser des réunions, débats, ou autres événements liés à des sujets politiques, sociaux, culturels ou universitaires.

Toute mesure visant à limiter la liberté d’expression des étudiant.es doit être justifiée, nécessaire et adaptée à la situation. Une simple distribution de tracts sur le campus du Saulcy ce 8 septembre ne justifiait nullement l’intervention de la police.

La LDH Metz- Moselle apporte son soutien plein et entier aux étudiant.es , dont la liberté d’expression ne saurait être mise en cause, lorsque celle – ci s’exerce dans le respect des procédures de l’établissement.

A propos d’un label : lettre au Maire de Metz

Fêtes de la Mirabelle, lettre ouverte à Monsieur le Maire de Metz

Monsieur le Maire, les fêtes de la Mirabelle ont obtenu le label « Les Plus Belles Fêtes de France ».

Cela peut paraitre flatteur et vous vous en réjouissez. « Nous avons reçu un label que nous n’avons pas demandé, qui ne nous a pas coûté d’argent. Je me moque de savoir s’il s’agit de gens d’extrême gauche ou d’extrême droite, s’ils trouvent que les Fêtes de la Mirabelle sont très bien. » (RL du 19/08)

Mais il me vient aussitôt à l’esprit cette morale de la fable :

« Mon bon Monsieur, apprenez que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ».

Cette valorisation des Fêtes de la Mirabelle n’a pas couté d’argent, mais cela ne signifie pas qu’elle n’a pas un coût. Ce coût est symbolique et politique. Cette labellisation s’inscrit dans une stratégie de l’extrême droite qui consiste à porter un message culturel identitaire sous couvert de valorisation des terroirs.

Les flatteurs, ce sont ceux qui portent le projet Péricles dont le but est d’ organiser la victoire de l’extrême-droite  en 2027.

Nous tenons à vous faire part de notre défiance vis-à-vis de ce Label .

Nous aurions davantage de plaisir à participer aux fêtes de la Mirabelle, si comme beaucoup d’autres, vous refusiez ce cadeau empoisonné.

UN LABEL EST-IL NEUTRE?

Fêtes de la Mirabelle, lettre ouverte à Monsieur le Maire de Metz

Monsieur le Maire, les fêtes de la Mirabelle ont obtenu le label « Les Plus Belles Fêtes de France ».

Cela peut paraitre flatteur et vous vous en réjouissez. « Nous avons reçu un label que nous n’avons pas demandé, qui ne nous a pas coûté d’argent. Je me moque de savoir s’il s’agit de gens d’extrême gauche ou d’extrême droite, s’ils trouvent que les Fêtes de la Mirabelle sont très bien. » (RL du 19/08)

Mais il me vient aussitôt à l’esprit cette morale de la fable :

« Mon bon Monsieur, apprenez que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ».

Cette valorisation des Fêtes de la Mirabelle n’a pas couté d’argent, mais cela ne signifie pas qu’elle n’a pas un coût. Ce coût est symbolique et politique. Cette labellisation s’inscrit dans une stratégie de l’extrême droite qui consiste à porter un message culturel identitaire sous couvert de valorisation des terroirs.

Les flatteurs, ce sont ceux qui portent le projet Péricles dont le but est d’ organiser la victoire de l’extrême-droite  en 2027.

Nous tenons à vous faire part de notre défiance vis-à-vis de ce Label .

Nous aurions davantage de plaisir à participer aux fêtes de la Mirabelle, si comme beaucoup d’autres, vous refusiez ce cadeau empoisonné.

Pour la LDH

Bernard LECLERC

Président de la section METZ MOSELLE

La rançon d’Haïti

Le 10 mai, nous célèbrons l’abolition de l’esclavage.

L’occasion d’éclairer une partie de notre histoire commune avec Haïti-Saint Domingue.

Saint Domingue en 1791 est une colonie française, dont 90% des habitants sont esclaves, et parmi ceux-ci, une majorité sont nés en Afrique, déportés par la traite. Depuis 1789, la promesse d’égalité contenue dans la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen a fait son chemin. Les esclaves se révoltent. Le 29 aout 1793 Toussaint LOUVERTURE déclare « Je veux que la liberté et l’égalité règnent à Saint Domingue ». L’esclavage est aboli localement à Saint Domingue.

Le 4 février 1794, «La Convention nationale déclare aboli l’esclavage dans toutes les colonies ; en conséquence, elle décrète que tous les hommes, sans distinction de couleur, domiciliés dans les colonies, sont citoyens français, et jouiront de tous les droits assurés par la Constitution.».

En 1801, Napoléon décide d’une expédition vers Saint Domingue et l’esclavage est rétabli le 20 mai 1802. Toussaint LOUVERTURE est fait prisonnier et déporté. La résistance des anciens esclaves et libres de couleur, unifiée au sein de l’Armée Indigène, triomphe avec une victoire décisive en novembre 1803. Les troupes françaises capitulent et évacuent Saint-Domingue.

En 1825, le 17 avril, Charles X, roi de France concède par ordonnance, aux habitants de la partie française de Saint-Domingue, l’indépendance pleine et entière. Cette partie Française prendra le nom d’Haïti. Mais il y a une condition : il faut dédommager les propriétaires d’esclaves. Le dédommagement demandé est de 150 millions de Francs Or. « cette somme représente environ 2% du revenu national français de l’époque, soit l’équivalent de plus de 40 milliards d’euros aujourd’hui si l’on considère une même proportion du revenu national de 2018 »1.

La jeune république Haïtienne n’a pas les moyens de payer. Elle doit emprunter. « Les créditeurs français sont parvenus à extraire du pays l’équivalent de 5% du revenu national Haïtien, par an , en moyenne ».2

Cette dette, avec les intérêts a maintenu « Haïti dans une position de dépendance et freiné son développement, transformant la brutalité de la colonisation et du système esclavagiste en une dépendance prolongée à l’égard de son ancienne métropole »

Le 17 avril, c’est le 20ème anniversaire de la « rançon d’Haïti ».

A cette occasion nous demandons au Président de la République de demander pardon au peuple haïtien au nom de la France pour plus de cent ans de colonisation, de traite et d’esclavage, et pour l’injustice redoublée qu’a été ensuite pour lui l’imposition de cette « double dette » qu’il a intégralement remboursée, à force de sacrifices.

Il doit aussi engager la France à agir en faveur d’Haïti dans un esprit de réparation, d’abord pour aider le pays à sortir de la crise actuelle, et ensuite pour l’accompagner sur le chemin de sa reconstruction.

Voir la lettre commune adressée en ce sens au Président de la République

Le 17 avril, le Président Macron a reconnu le poids injuste pour Haïti de cette dette imposée par la France en 1825. Il a institué une commission mixte institué mixte franco-haïtienne ayant pour mission d’explorer deux siècles d’histoire, y compris l’impact de l’indemnité de 1825 sur Haïti. A suivre….

Bernard Leclerc

Cet article est paru d’abord dans le numéro 103 de la lettre mosellane des droits de l’homme

1 Thomas PIKETTI Capital et idéologie Seuil p 263

2 La double dette d’Haïti (1825-2025) Note de la fondation pour la mémoire de l’esclavage


 

Communiqué suite au meurtre d’Aboubakar

Vendredi 25 avril 2025, à la mosquée de la Grand-Combe (Gard), Aboubakar, 22 ans, a été tué sauvagement alors qu’il priait.

L’agresseur, inconnu de la victime, a revendiqué son acte avec des propos ouvertement antimusulmans. Le caractère raciste de ce meurtre ne fait aucun doute.

Face à cet acte odieux, nous exprimons notre solidarité aux proches d’Aboubakar et aux musulmanes et aux musulmans de France.

Dans un contexte de hausse continue des actes racistes, xénophobes et antimusulmans, nous attendons des paroles fortes de l’exécutif. Alors que trop de paroles publiques alimentent un climat de haine, la parole des responsables politiques doit être exemplaire.

Nous demandons que la parole publique retrouve hauteur et clarté.

Nous exigeons des autorités qu’elles combattent clairement cette haine qui fait le terreau de passages à l’acte dramatiques.

Nous demandons aux citoyennes et aux citoyens de s’engager massivement contre les haines qui défont notre société, et notamment celle qui vient de frapper mortellement Aboubakar.

Que l’on estime que la motivation de cet acte doive être qualifiée de racisme antimusulman, d’islamophobie ou de haine envers les musulmans, nous condamnons le meurtre qui a frappé le jeune Aboubakar du fait de sa confession musulmane.

27 avril 2025

Télécharger le communiqué

LA LETTRE DE LA LDH EN MOSELLE : N°103

Dans ce numéro de la lettre :

  • Le droit des enfants,
  • La protection de l’enfance,
  • L’humanisme et l’état de droit,
  • Les libertés, le droit de ne pas être toujours surveillés,
  • Le conflit Israélo Palestinien,
  • Le passé colonial toujours présent,
  • Des invitations à voir , à lire, à réfléchir.

Bonne lecture !

Pour lire la lettre

La persécution des femmes en Afghanistan : une urgence féministe mondiale

Depuis le retour au pouvoir des talibans en 2021 après des décennies de guerres impérialistes, les droits des femmes dans l’espace public et dans l’espace privé sont broyés. Femmes et filles sont soumises à une discrimination systématique et généralisée, un « crime contre l’humanité fondé sur le genre » selon Amnesty International. 

L’isolement forcé

Le régime taliban efface les femmes de la société. Il a détruit les institutions judiciaires qui défendaient leurs droits. Leurs fenêtres sont murées, elles ne doivent plus être vues ni entendues. Leur droit à l’éducation a été suspendu : en 2023, 80 % des filles étaient privées d’accès à l’école, 30 % n’avaient jamais commencé l’enseignement primaire. Selon ONU Femmes, d’ici 2026, la déscolarisation des filles élèvera de 45 % le taux de maternité précoce. Ce fléau touche déjà des milliers de femmes. La situation s’aggrave pour les plus jeunes : 28,7 % des filles de moins de 18 ans sont mariées, 10% avant l’âge de 15 ans.

Dans ce pays dévasté par la guerre et rongé par la misère, le mariage est un mécanisme de survie. Leur retrait du système éducatif a des conséquences dramatiques. Leur santé mentale est gravement atteinte. Le nombre de leurs suicide augmente, 80% sont des suicides de femmes.

En mars 2024,le Ministre du Vice et de la Vertu a restauré la lapidation des femmes accusées d’adultère et la flagellation. Ces graves atteintes aux droits humains ont été sévèrement critiquées par des experts, comme Abdul Wahid Sadat, président de l’Association des avocats afghans: “Du point de vue du droit musulman, elles contredisent les principes fondamentaux selon lesquels la promotion de la vertu na jamais été définie par la force, la coercition ou la tyrannie.” 

Malgré la persécution, les femmes afghanes font preuve d’une résilience et d’un courage remarquables. Elles résistent en dépit des interdictions et des menaces, organisent des radios, des classes clandestines et en ligne pour filles, forment des communautés de soutien. Beaucoup continuent de lutter pour la liberté, la dignité et le droit à la vie. « Les talibans veulent étouffer les femmes, mais elles ne seront pas réduites au silence » (Zubaida Akbar, militante afghane). Ces courageuses actions clandestines montrent la détermination des femmes afghanes.

La France et l’asile

Le monde et les pays occidentaux doivent réagir et traduire leurs engagements en actions concrètes. La situation sur le terrain est désastreuse. Les femmes qui parviennent à rejoindre des pays voisins, comme l’Iran ou le Pakistan, se heurtent à la difficulté d’obtenir un visa, la procédure est trop lente, restrictive. Laissées sans protection, beaucoup sont exposées à de nouvelles violences.

Des initiatives comme celles du « Comité International de Défense des Femmes Afghanes » appellent à une mobilisation internationale et font campagne pour l’accueil des femmes afghanes réfugiées. En juin 2024, Amnesty a remis une pétition à l’Élysée signée par 148.000 personnes demandant des visas pour les femmes afghanes. 

Le 11 juillet 2024, la Cour nationale du droit d’asile a estimé que les femmes afghanes doivent toutes pouvoir bénéficier du statut de réfugiée. Ce tournant reconnaît la persécution fondée sur le genre en Afghanistan: le gouvernement français doit désormais prendre ses responsabilités. 

La France a promis de protéger les femmes afghanes, elle doit passer de la parole aux actes et mettre en place les trois piliers d’un programme d’urgence: * la protection des femmes fuyant l’Afghanistan pour les pays voisins, ** la délivrance accélérée des visas leur permettant d’entrer en France, *** l’accueil des femmes et de leurs enfants sur le territoire national.

Le cabinet du préfet de Moselle a reçu le 9 décembre notre délégation départementale du « Comité International de Défense des Femmes Afghanes » qui demandait que les dossiers déposés en préfecture soient traités favorablement. La sécurité intérieure a entendu notre demande et la transmettra au service compétent (la direction de l’immigration) sans garantie de réponse.

Nous poursuivons notre campagne pour un accueil digne de toutes les femmes afghanes et notre appel à signer notre lettre ouverte au Ministère des Affaires étrangères. 

Une mobilisation mondiale

Les violences et discriminations infligées aux femmes en Afghanistan ne sont pas seulement une tragédie locale, mais un défi mondial que doit combattre une solidarité internationale exigeant des gouvernements qu’ils agissent pour les en protéger.

Les femmes et les enfants restent les premières victimes des guerres, des catastrophes climatiques et du patriarcat, et nous devons faire en sorte qu’elles ne soient pas oubliées. Le combat pour la sécurité et la liberté des femmes ne peut plus se limiter à des actions symboliques ou ponctuelles.

Buchers, talibans, culture du viol ou industrie pornographique, les châtiments corporels infligés aux femmes obscurcissent l’horizon et nous devons nous demander ce qu’ils révèlent de la misogynie dont reste imprégnée l’humanité. Il est vital que partout nous utilisions nos plateformes afin d’organiser la mobilisation et la solidarité pour mettre fin à cette violence destructrice. 

Aldjia MOULAI

Membre du Comité international de défense des femmes afghanes

Article parut dans « La lettre  » N°102

Pour la liberté de création et de diffusion

Le 14 Mars 2025, le centre Pompidou Metz et l’association Frag/ment organisent un concert de Keiji Haino. Ce concert est un évènement musical associé à l’exposition de Cerith Wyn Evans au centre Pompidou.

Le concert devait se dérouler à la Cathédrale de Metz. Suite à une vidéo diffusée sur Youtube et relayée par des proches de Civitas, le centre Pompidou de Metz déplace le concert : il n’aura pas lieu à la cathédrale mais dans une salle du centre Pompidou.

Après l’annulation du concert de Bilal HASSANI en avril 2023, pour la deuxième fois une structure culturelle messine se soumet aux injonctions d’intégristes catholiques. « Le diocèse et le chapitre de la cathédrale de Metz ne sont aucunement décisionnaires dans le choix fait par le Centre Pompidou de déplacer le concert », a indiqué le diocèse à l’AFP, expliquant qu’il s’agissait d’une « décision du Centre Pompidou, pour raison de sécurité ». Celui-ci dit que le choix de ce transfert s’est fait « dans le souci de préserver l’événement comme un moment de partage ».

Les injonctions et les menaces ne doivent pas fixer les règles de ce qui est permis ou non en terme de création et de diffusion culturelles à Metz.

Face à cela, nous ne pouvons pas rester indifférents

Nous ne pouvons pas nous résigner collectivement à ce que la soumission à de telles injonctions devienne la règle.

Mais qui est étranger à Mayotte ?

Mayotte est l’une des quatre îles de l’archipel des Comores. L’ONU considère que les Comores constituent un état. En 1974, les COMORES ont voté majoritairement pour leur indépendance. L’indépendance est proclamée le 6 juillet 1975. Mayotte se distingue en exprimant le souhait de son rattachement à la France en 1974, puis 1976. L’Assemblée générale des Nations unies a condamné cette prise de position l’assimilant à une violation de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la République indépendante des Comores. Pour l’ONU, les Mahorais sont des Comoriens. En 2011, Mayotte devient un département français.

La départementalisation, ça change quoi ?

Etat civil

Aux Comores si le grand-père Abou a un fils qui s’appelle Mohamed, Mohamed s’appellera Mohamed Abou. Si Mohamed-a un fils Omar, Omar s’appellera Omar Mohamed et Abou disparaîtra. Les femmes perdent leur nom à la naissance des enfants, ce qui marque leur état de mère. Depuis 2011, c’est l’état civil français qui s’impose.

Cadastre et propriété des terres

Le foncier était un foncier collectif. C’était un quartier, un village qui disposait de terres. Quand il y avait un mariage, une famille qui s’agrandissait, le village se réunissait pour accorder une terre à cette nouvelle famille. Un jardin pouvait s’agrandir en fonction de la taille de la famille, et ou se rétrécir s’il n’y avait plus lieu.

En 2011, on passe dans un foncier titrisé sur une personne. Chaque terre a un propriétaire. Aujourd’hui, un peu plus de 50% des terres sont cadastrées. Ces opérations d’enregistrement cadastral ont permis à certains de capter des terres et de s’enrichir. Le foncier est devenu un foncier d’investissement

Habitat et logement

Les maisons appartenaient aux femmes et se transmettaient de mère en fille. C’était des maisons modestes de deux pièces. Les constructions légères, en tôle représentent environ 40% des logements. La pauvreté, l’insuffisance de logements sociaux conduisent les foyers à se tourner vers ce type d’habitat. Il est fragile, mais il peut être facilement reconstruit. Les opérations de démantèlement de ces habitats précaires apparaissent bien vaines et inhumaines.

Economie

Selon un rapport de la Cour des comptes, en 2022, la dépense publique représente 80 % du produit intérieur brut (PIB) de l’île, la seule fonction publique étatique occupant 41 % des emplois salariés ! Le salaire médian à Mayotte est de 260€. Mais Mayotte est géographiquement un ilot de richesse : le PIB par habitant est 8 fois celui d’un comorien et 23 fois celui d’un malgache. Mayotte est à la fois le département le plus pauvre de France, mais aussi un eldorado dans son environnement.

Et les paradoxes sont nombreux. L’INSEE note qu’en 2000, le revenu disponible brut moyen d’un habitant (RDBH) mahorais représentait 19,6 % de celui de la moyenne des habitants du pays (DOM compris). Vingt ans plus tard, le chiffre grimpait à 35,4 %. Une belle progression, même si le décrochage reste très important. Mais par ailleurs, «  la situation de Mayotte n’a cessé de se dégrader depuis la départementalisation : l’insécurité a augmenté, le cadre de vie se dégrade avec des logements qui ne répondent pas à la demande, un système scolaire débordé avec des enseignants souvent mal ou pas assez formés, etc. Cela génère même une vague d’émigration des Mahorais. Selon l’Insee, 25 900 d’entre eux ont quitté l’île entre 2012 et 2017 « [1]

Ce que met en évidence la catastrophe provoquée par le passage du cyclone

La violence de ce cyclone met d’abord en évidence les risques associés au changement climatique, risques qui vont devenir de plus en plus nombreux et de plus en plus violents. Mais cette catastrophe met aussi en évidence la fragilité de la situation géopolitique de Mayotte.

 » En disloquant l’archipel des Comores, la France a créé une situation très compliquée, déjà flagrante depuis plusieurs années, mais qui éclate au grand jour avec le cyclone Chido. Avec cette frontière entre Mayotte et les autres îles de l’archipel, elle a séparé un peuple qui partage une histoire commune. Bien sûr, elle a répondu au choix de Mahoraises et des Mahorais, mais, ce faisant, elle a contribué à déstabiliser la région » [2].

Mayotte est isolée par la situation conflictuelle entre la France et l’Union des Comores. La France ne peut pas répondre à tous les besoins créés par le cyclone. Les solidarités locales sont indispensables. La situation de l’agriculture Mahoraise en est un exemple. Saïd Anthoumani[3] précise la situation et les besoins après le cyclone : « Il faut 6 mois à un plant de manioc et 11 à 12 mois à un bananier pour produire. Mayotte a besoin de plants, et on ne pourra pas compter sur ceux de la métropole, inadaptés à la situation locale « .

Quel avenir ?

Mayotte fait partie de l’ensemble des Comores, elle y est rattachée par sa culture. Les migrations entre les îles des Comores ont toujours été très importantes. Une même famille a des attaches sur les différentes îles. Vouloir transformer Mayotte en forteresse française est absurde. Faire de l’immigration le problème principal de l’ile, c’est vouloir consolider cette frontière créée en 1976.

« Rendre la vie impossible aux « étrangers » ainsi que le souhaitent les derniers ministres de l’intérieur ne rajoutera que de l’indignité à leur situation et attisera les discours de haine et les tensions qui les accompagnent. Les solutions restent à trouver, et la France ne les trouvera pas à elle seule.

Pour en savoir plus :


[1] Rémy CARAYOL « Mayotte est reliée de manière superficielle et superflue à l’Hexagone » in Alter Eco

[2] Rémy CARAYOL id

[3] Saïd Anthoumani est président de la chambre d’agriculture de Mayotte

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