Energie : les eurodéputés adoptent le label « vert » pour le gaz et le nucléaire

Alors que le parlement européen a donné le label « vert » au gaz (énergie fossile) et au nucléaire début juillet 2022, des états en Europe (l’Ukraine) comme ailleurs en Afrique (le Sénégal et la Mauritanie) se lancent dans l’extraction massive de gaz dans leur pays…Selon le nouveau rapport du GIEC du 4 avril 2022, les émissions mondiales de gaz à effet de serre devront baisser à partir de 2025, sans quoi il sera impossible de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C.

Publié sur latribune.fr le 6/07/2022

Les eurodéputés ont approuvé le label « vert » accordé par la Commission européenne au gaz et au nucléaire. Autrement dit, ces deux sources d’énergie seront désormais reconnues comme nécessaires pour lutter contre le changement climatique. Des eurodéputés tentaient de s’y opposer. Mais leur proposition de veto a été rejetée à une majorité de 328 voix, contre 278 voix favorables à cette objection.

Peut-on considérer comme « durables » les énergies liées au gaz et au nucléaire et leur apposer un label « vert » ? Pour la Commission européenne, lors d’un texte présenté en janvier qui s’inscrit dans l’objectif de neutralité carbone de l’UE en 2050, c’est désormais acté. Les eurodéputés ont approuvé ce mercredi lors d’un vote le le label « vert » pour qualifier le gaz et le nucléaire.

Réunis en session plénière à Strasbourg, les eurodéputés ont finalement rejeté une proposition de veto contre ce projet, à une majorité de 328 voix. L’objection a recueilli seulement 278 voix.

Cette reconnaissance de la contribution du gaz et du nucléaire à la lutte contre le changement climatique, en s’appuyant sur la base de rapports d’experts, a suscité la colère d’organisations écologistes qui dénoncent une opération de « greenwashing ». Hier, encore, quelque 150 personnes défilaient vers le siège du Parlement européen, avant un débat en session plénière. « Le nucléaire ne sauvera pas le climat », lisait-on sur une banderole.

Le feu vert des Etats membres étant déjà acquis, les opposants ont annoncé qu’ils lanceraient une procédure en justice, seul moyen désormais disponible pour bloquer l’initiative. Seuls huit pays, dont l’Allemagne, l’Autriche et le Luxembourg, ont exprimé leur opposition, lors de consultations menées par la présidence française du Conseil de l’UE, loin de la « super-majorité » de vingt pays nécessaire pour bloquer le projet.

Ainsi, en février en 2022, lors de la présentation de ses résultats 2021, EDF expliquait que l’inclusion du nucléaire dans la taxonomie allait faciliter en France la « construction de nouveaux réacteurs de technologie innovante, les modifications visant à étendre la durée de vie de centrales et le financement de la recherche et développement dans ce domaine ».

« Il n’y a rien de durable dans les énergies fossiles », a estimé l’eurodéputée suédoise Emma Wiesner (groupe Renew, libéral). » « Comment pouvons-nous demander aux autres pays de réduire leur utilisation des énergies fossiles si nous les classifions comme vertes ? Cela va nuire à l’accord de Paris » , a renchéri le Néerlandais Bas Eickhout (Verts).

Après le nouveau rapport du GIEC, amplifions nos mobilisations pour la justice climatique

Publié lundi 4 avril 2022 sur le site d’Attac

Si les papiers précédents du GIEC avaient traité de l’aggravation des dérèglements climatiques, le dernier volet du sixième rapport publié aujourd’hui, axé sur les stratégies d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre, confirme l’accumulation du retard pris par les États pour éviter une catastrophe climatique et humaine. Les projections d’émissions pour 2030 sont supérieures aux engagements des États, engagements qui sont par ailleurs insuffisants pour limiter le réchauffement au-dessous de 1,5°C à la fin du siècle. Résultat, on se dirige tout droit vers une augmentation située entre 3,3 et 5,4°C.

Le premier constat du GIEC est celui d’une poursuite de la hausse des émissions. Même si le rythme de celle-ci s’est ralenti entre 2010 et 2018 par rapport à la décennie précédente, les émissions globales ont augmenté de 11 % par rapport à 2010, et leur volume n’a jamais été aussi important. Si le CO2 reste le principal vecteur du changement climatique, les émissions de gaz fluorés ont bien augmenté (430 % entre 1980 et 2018) et jouent désormais un rôle majeur dans les dérèglements climatiques. L’augmentation des gaz à effets de serre est notamment due à la croissance de certaines productions et consommations ayant un fort degré d’émissions : +28,5 % pour l’aviation,+ 17 % pour l’achat de SUV, +12 % pour la consommation de viande… entre 2010 et 2020.

Le GIEC insiste également sur le fait que les investissements sont à un cinquième de ce qu’il faudrait pour éviter une augmentation de la température globale de 1,5°C ou 2°C à la fin du siècle. Il demande donc aux gouvernements d’accélérer la mise en place de politiques publiques, législatives, d’augmenter fortement les investissements et de réguler les lois du marché, en vue d’atteindre un pic d’émissions de CO2 avant 2025 et d’envisager une décroissance globale des émissions après cette date. Dans le cas contraire, le coût global, économique et humain, sera plus élevé, et les investissements nécessaires devront être d’autant plus importants.

Le GIEC met aussi en cause la pensée économique néolibérale, constatant que les investissements du secteur privé sont très loin des besoins identifiés pour arriver aux objectifs climatiques. C’est la première fois que le groupement de chercheurs plaident pour une rupture avec la logique de croissance inhérente au capitalisme et fait écho à ses scénarios et hypothèses qui n’oublient pas les exigences d’égalité sociale dans les politiques à mettre en œuvre. En effet, il dénonce les inégalités qui s’accroissent dans la responsabilité de la situation présente, pointant le fait qu’à l’échelle mondiale, les 10 % les plus riches sont à l’origine de 36 à 45 % des émissions, quand 10 % des plus pauvres sont responsables de 3 à 5 %.

On peut donc y lire une revendication de justice climatique, dont les stratégies doivent passer par une redistribution des richesses et une juste répartition des efforts de réduction des émissions, afin de permettre aux populations les plus impactées, et non responsables des dérèglements climatiques, de pouvoir s’adapter et faire face aux changements à venir. En particulier, la question des financements, que ce soit à l’échelle internationale pour soutenir les pays du Sud global, ou en France pour financer les mesures nécessaires à une bifurcation juste, nécessitent une réforme fiscale qui fasse la chasse à l’évasion fiscale et s’en prenne aux profits des grandes entreprises.

Enfin, les auteurs du rapport du GIEC précisent que c’est bien d’un changement structurel, profond, des modes de financements et d’institutions dont nous avons besoin, et que les appels aux modifications des comportements individuels sont largement insuffisants.

Tout en étant appuyé sur de solides travaux scientifiques, ce nouveau rapport du GIEC est, de fait, un acte d’accusation contre l’inaction climatique, dont le quinquennat d’Emmanuel Macron qui s’achève constitue une lamentable démonstration. Alors que la campagne pour l’élection présidentielle a très peu évoqué les dérèglements climatiques, c’est bien un choix crucial auquel nous faisons face : continuer comme avant en attendant les catastrophes à venir, ou changer le système pour ne pas changer le climat. Dès maintenant, amplifions les mobilisations pour la justice climatique !

 SAMEDI 9 AVRIL : À 14H, PLACE DE LA RÉPUBLIQUE À PERPIGNAN – MARCHE POUR LE FUTUR – ORGANISÉE PAR  ALTERNATIBA66, CITOYENS POUR LE CLIMAT ET EXTINCTION REBELLION SOUTENUS PAR DE NOMBREUX MOUVEMENTS DU TERRITOIRE TELS LA CGT, LE SYNDICAT SOLIDAIRES 66, La LDH 66 OU YOUTH FOR CLIMATE

COP26 : un petit pas pour les négociateurs, un rendez-vous raté pour l’humanité

Greenpeace – le 13 novembre 2021

Après avoir joué les prolongations, les négociateurs de la COP26 se sont finalement entendus samedi à Glasgow sur un texte d’accord. Las, la révolution attendue n’a pas eu lieu. Si l’objectif de 1,5° reste sur la table, les engagements pris nous mènent toujours vers un scénario catastrophique de réchauffement de +2,4°C à l’horizon 2100 par rapport à l’ère préindustrielle, et le texte de décision finale ne contient pas de disposition suffisamment contraignante pour combler rapidement le fossé avec l’objectif de l’Accord de Paris.

Les maigres avancées obtenues sont le résultat de la mobilisation des jeunes, des leaders des communautés autochtones, des activistes et des pays qui sont en première ligne du changement climatique sans qui ces négociations auraient été un total désastre. 

L’appel à réduire de 45% les émissions de GES d’ici à 2030 est conforme à ce qu’il faut mettre en œuvre pour tenir l’objectif de +1,5° mais reste à voir comment il sera effectivement appliqué. En 2022, il sera crucial que les pays présentent des objectifs plus ambitieux. 

Plusieurs annonces ont émaillé ces deux semaines de négociations, de l’arrêt de la déforestation en 2030 aux engagements sur le méthane en passant par la coalition pour la sortie progressive du gaz et du pétrole. Sans calendrier de mise en œuvre concret ni moyens contraignants pour les faire respecter, ces engagements restent pour le moment incantatoires. Si les pays les plus riches ont finalement commencé à prêter attention aux demandes des pays les plus vulnérables à recevoir des financements et des ressources pour faire face à l’augmentation des températures, les promesses sont loin de ce qu’il est nécessaire d’apporter sur le terrain.

Sur la question centrale des énergies fossiles, leur mention dans la décision finale constitue une première encourageante dans l’enceinte des conférences climat onusiennes, tout comme est essentielle la référence à une transition juste ; mais dans le monde réel, la faiblesse du langage utilisé et les précautions ajoutées en dernière minute ne confèrent aucun caractère contraignant ni n’imposent d’échéancier concret, ce qui contribuera à accroître les retards et le décalage de la communauté internationale vis-à-vis de l’urgence climatique.

Quant à l’article 6, censé régler la coopération internationale pour réduire les émissions de CO2, il se trouve détourné de son sens initial pour autoriser la mise en place de compensations carbone massives, sous forme de marchés et de crédits inopérants et dangereux, qui risquent de vider rapidement l’Accord de Paris de toute substance. Les émissions doivent être réduites à la source, les pays riches et les multinationales doivent en porter en priorité la responsabilité.

Pour Clément Sénéchal, chargé de campagne climat pour Greenpeace France : “Les États les plus riches, en dépit des alertes scientifiques qui s’accumulent, se sont montrés incapables de discuter d’un calendrier de sortie des énergies fossiles. Leur trahison est double : d’abord ils refusent de mettre sur la table les financements nécessaires pour que les pays les plus vulnérables puissent faire face au réchauffement climatique, ensuite ils mettent en place des crédits carbone pour pouvoir continuer à polluer impunément, au risque de transformer l’Accord de Paris en gigantesque machine à greenwashing. Pour eux, le futur des jeunes générations et la survie de certains pays semblent pleinement négociables, mais pas les intérêts criminels de leurs industries fossiles.”

La France semble avoir abandonné sa tutelle sur l’Accord de Paris. Repris de justice climatique, Emmanuel Macron s’est pourtant permis de venir les mains vides à la COP26, sans objectif plus ambitieux de réduction des émissions de GES, ni mesures additionnelles pour combler les retards accumulés. La France s’est contentée de rejoindre des initiatives non contraignantes, comme sur la déforestation ou l’aviation, ou encore en prenant des engagements sans effet concret sur son arsenal législatif. Son ralliement in extremis à la coalition sur la sortie progressive du gaz et du pétrole n’acte en rien la fin immédiate des nouveaux permis d’exploration d’hydrocarbures, pourtant indispensable pour respecter l’accord de Paris, selon l’Agence internationale de l’énergie. De même, l’initiative sur la fin  des subventions internationales pour les projets d’hydrocarbures inclut une dérogation pour les projets dotés de dispositif de compensation ou de captage des émissions, et n’aura donc probablement aucun impact par exemple sur le soutien public de l’Etat au méga-projet gazier de Total en Arctique. Bref, de l’affichage facile en fin de quinquennat. Il devra en être tenu responsable dans les urnes. La priorité diplomatique française s’est portée ailleurs : parvenir à faire intégrer le gaz dans la taxonomie verte européenne, quitte à faire capoter un Green Deal déjà poussif.”