La surpopulation carcérale


Prisons : presque deux fois plus de détenus que de places dans les maisons d’arrêt de Vivonne et Niort


Le nombre de détenus en France a atteint un nouveau record au 1er juillet 2025, avec 84 951 personnes derrière les barreaux. Dans le Poitou, cette tendance se fait aussi sentir avec une surpopulation carcérale qui atteint les 180% aux maisons d’arrêt de Vivonne et Niort.



Pour comprendre ce phénomène, il nous semble utile de remonter dans le temps pour, sinon le comprendre, au moins tenter de l’expliquer.

La prison apparaît en Europe à la fin du XVIIIème siècle comme une alternative aux châtiments corporels qui avaient alors cours pour détenir, assister et corriger les actes que la société réprouvait et voulait punir.

C’est entre 1750 et 1850 qu’elle devient « un espace alors proprement pénal » et suscite d’emblée un besoin de réforme. Les conditions de vie carcérale sont déjà dénoncées par des philantropes qui souhaiteraient en faire le lieu de la transformation morale des individus condamnés, en les soumettant à une stricte discipline.

Au XIXème siècle, le modèle cellulaire fait consensus en Europe. La question de l’isolement fait déjà débat mais les divers projets d’aménagement se heurtent aux problèmes de surpopulation qu’on commence à observer, ainsi qu’aux contraintes financières et à la vétusté des bâtiments.

Au début dun XXème siècle, on commence à classifier les criminels en distinguant parmi les détenus les délinquants « occasionnels », supposés avoir une chance de s’amender et pouvant bénéficier d’une libération conditionnelle ou d’un sursis.

La Convention européenne des Droits de l’homme en 1950, fixe des cadres normatifs, qui contraignent progressivement les États européens à reconnaître des droits fondamentaux aux détenus.

C’est dans les années 1950 que commencent à se poser de façon cruciale les problèmes de surpopulation carcérale, préoccupation qui conduit à faire baisser la population des prisons dans l’Europe du Nord, certains pays s’étant engagés dans des choix alternatifs à la prison, tandis que l’Europe de l’Ouest et du Sud est confrontée à des révoltes carcérales dans les années 1970, liées à la hausse de la population carcérale.



En 1990, L’Observatoire International des Prisons (OIP) constate que le principe de l’encellulement individuel est bafoué depuis sa proclamation en 1875. Le taux d’occupation des établissements pénitentiaires est alors de 124%.

Le 15 août 2014, la Loi n°2014-896 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales, prévoit un bilan à deux ans pour évaluer l’impact de la réforme (dite réforme Taubira) introduisant la contrainte pénale et la libération sous contrainte, réforme que l’OIP juge aussi indispensable qu’inaboutie.

Le 6 octobre 2016, à l’occasion de la cérémonie de fin de formation de la 190ème promotion de surveillants pénitentiaires, à l’École nationale d’administration pénitentiaire d’Agen (Lot-et-Garonne), Manuel Valls, Premier Ministre, annonce la rénovation du parc pénitentiaire, avec l’objectif d’un taux de 80 % d’encellulement individuel, la construction de 33 nouvelles prisons et le recueil du renseignement au sein de l’administration pénitentiaire.

Las, le 6 décembre 2016, le ministère de la Justice présente son rapport au Parlement, rapport qui annonce en grande pompe un plan de construction de 20 000 nouvelles places de prison, en prévision d’une progression de 10 % de la population détenue dans la décennie à venir. Comme attendu, l’objectif d’une promotion des alternatives et des aménagements de peines n’est pas atteint, mais il n’est pas question d’y remédier.

La réforme Taubira est enterrée. « Nos prisons ne sont pas des hôtels et elles ne sont plus des bagnes », explique Jean-Jacques Urvoas, le garde des Sceaux.

En 2012, le candidat Hollande avait fustigé «la fuite en avant vers le tout carcéral» pratiquée sous l’ère Sarkozy. Chef de l’Etat, il n’est pas parvenu à inverser la donne. A l’heure où il quitte l’Elysée, les prisons françaises n’ont jamais été aussi surpeuplées avec 69 430 détenus. La promesse de prisons «conformes à nos principes de dignité» est également loin d’être atteinte. Le 3 mai, la justice a de nouveau sommé l’administration pénitentiaire d’éradiquer les animaux et insectes nuisibles qui prospèrent à Fresnes… (Libération, 9 mai 2017)

En 2020, on observe une baisse sensible du taux d’incarcération en raison  de la baisse du flux de mises sous écrou à compter du 1er confinement de mars. Le crise sanitaire a permis de « vider » les prisons, le creux de la vague de juillet-août, donnant encore un taux d’occupation des prisons de 110%. On observe même une « courte surcapacité » (entre juin et novembre 2020).

En mars 2021, les prisons françaises comptent 67 971 détenus pour 60 398 places opérationnelles. Les alternatives à la détention, telles que la « détention à domicile » sous bracelet (plus de 13000) se multiplient et permettent notamment une baisse très significative des conditions de détention précaires comme l’usage de matelas à même le sol : 849 en mars 2021 contre 1640 en juillet 2020 soit une quasi division par deux.

On observe également une augmentation du nombre de mineurs détenus, attribuée à un afflux de mineurs non accompagnés (MNA), clairement attribué aux « carences de l’Etat dans l’animation de la politique de protection de l’enfance, mal articulée avec les politiques départementales dédiées « .




La LOI n° 2021-403 du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention est suivie d’un Décret n° 2021-1194 du 15 septembre 2021 relatif au recours prévu à l’article 803-8 du code de procédure pénale et visant à garantir le droit au respect de la dignité en détention.




Au 1er septembre 2022, le taux d’occupation des prisons est remonté à 118% avec 71 669 prisonniers pour 60 715 places. « La surpopulation se concentre dans les maisons d’arrêts, qui accueillent les personnes en attente de jugement et celles condamnées à des courtes peines de prison. Dans ces établissements, qui abritent plus des deux tiers de la population carcérale, le taux d’occupation moyen est de 139,7%, contraignant deux à trois personnes – parfois plus – à partager une même cellule et plus de 1 830 personnes à dormir chaque nuit sur des matelas posés au sol. « 

Pour l’OIP, « L’inflation carcérale que connaît la France depuis plusieurs décennies est avant tout le fruit de politiques pénales qui ont misé sur l’incarcération et une répression croissante des déviances sociales. »




En octobre 2023, « La surpopulation dans les prisons atteint des sommets et, seul contre tous, le gouvernement rejette explicitement la seule option qui permettrait de les désengorger dans l’urgence : un dispositif contraignant de régulation de la population carcérale. 34 associations, syndicats et institutions lui demandent de s’y résoudre. »




Un an après, un nouveau communiqué des associations alerte: « Les nouveaux chiffres de la population carcérale au 1er octobre, publiés hier par le ministère de la Justice, marquent d’énièmes tristes records. Trente-deux organisations du milieu prison-justice dénoncent des annonces politiques insensées qui ne feront qu’aggraver cette situation dramatique. Quant aux orientations budgétaires actuellement discutées au Parlement, elles signent un gaspillage de l’argent public et l’impensé du sens de l’incarcération et de la sortie de prison. »




En février 2025, « Trente et une organisations expriment leur profonde indignation quant à l’annonce par le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, d’une instruction ministérielle ordonnant l’arrêt de toutes les activités en prison autres que le « soutien scolaire », « la langue française » et ce qui touche au travail ou au sport. Un acte de pure démagogie, aux conséquences désastreuses pour les personnes détenues comme pour la société. L’emballement a déjà gagné de nombreux établissements pénitentiaires, où l’ensemble des activités visé par le garde des sceaux est temporairement suspendu. »

Arié Alimi, vice-président de la LDH interroge dans une tribune: « Peut-on sortir du populisme pénal ? L’exploitation du désir de vengeance et de la volonté de punir mine la démocratie. Face à cela, il faut protéger la justice et le droit. »



En avril, alors qu’une proposition de loi, portée par le parti Horizons, pour revenir sur les aménagements de peine a été votée, l’OIP dénonce l’hystérie sécuritaire » du Parlement et un »populisme pénal » qui contribuent à « créer les conditions d’une vulnérabilité et donc de nouveaux passages à l’acte « . Dans le cadre de sa niche parlementaire, le groupe a fait adopter en première lecture ce texte qui consacre le rétablissement des peines de prison ferme de moins d’un mois. 



Ce »populisme pénal » est également dénoncé par les professionnels de l’Education et de l’Enseignement, dénonçant le loi Attal qui vise à « restaurer l’autorité » de la justice des mineurs, alors que « Entre 2016 et 2024 le nombre de mineurs en infraction a reculé de 17 à 12% sur la même période. Quant au travail de la justice, le taux de réponse pénale  est aujourd’hui de 93% et le nombre de mineurs incarcérés (900), est au plus haut en 2024. »



Les détenus de la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, en région parisienne, demandent en urgence des mesures pour améliorer leurs conditions de détention et dénoncent un « climat de violence » au sein de leur établissement pénitentiaire, dans leur requête inédite, envoyée mardi 29 juillet, car les recours de détenus pour conditions de détention indignes, bien que possibles, relèvent de l’exception.



Cerise sur le gâteau, le ministre de la Justice souhaite faire « contribuer » les détenus au coût de leur détention. Alors que la proposition de loi se profile, les familles perçoivent ce fardeau financier supplémentaire comme une « double peine ».



On a la nette impression que notre duo de ministres préférés a engagé une course à la surenchère sécuritaire et pénale. Le Premier ministre François Bayrou n’étant pas en mesure de siffler la fin de la récré, nous ne risquons pas de nous ennuyer d’ici à mai 2027. « Car toutes ces gesticulations, tous ces coups de mentons et ces poings tapés sur la table, toutes ces peurs et ces haines attisées n’ont qu’un but, se positionner pour la présidentielle. » (Libération

Après la polémique sur les faux massages en prison, l’interdiction des activités ludiques en prison annulée par le Conseil d’État



Trois mois après l’histoire de prétendus massages délivrés le jour de la Saint-Valentin à des détenus de la prison de Seysses près de Toulouse (Haute-Garonne), le Conseil d’État est revenu sur l’interdiction des activités ludiques décidées sur le moment par le garde des Sceaux, Gérald Darmanin.



Le Conseil d’État annule l’interdiction des activités ludiques en prison


Dans une instruction en date du 19 février 2025, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a encadré les activités pouvant être proposées aux personnes détenues et a notamment demandé l’interdiction d’organiser toute activité « ludique ou provocante ». 

Plusieurs associations et syndicats ont formé un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’État considérant que l’instruction « méconnaît les dispositions du code pénitentiaire relatives aux activités en détention, en particulier de l’article l’article R. 411-8 de ce code ». 



« Cellules vétustes », psychiatrie en crise… Ce que dénonce la contrôleure générale des lieux de privation de liberté dans son rapport annuel


Alors que la surpopulation carcérale atteint des records en France, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot, dévoile mercredi son rapport d’activité pour 2024.

Surpopulation carcérale : le nombre de détenus dans les prisons en France a atteint 79 631, un nouveau record



La France figure parmi les mauvais élèves en Europe en termes de surpopulation carcérale.

Le nombre de détenus en France a atteint un nouveau record au 1er octobre, avec 79 631 personnes incarcérées contre 78 969 le mois précédent, selon des chiffres du ministère de la Justice consultés mercredi par l’AFP. En un an, ce sont près de 5 300 personnes supplémentaires qui ont été incarcérées dans les prisons françaises, malgré la surpopulation chronique.

Prisons : « 101 détenus qui dorment par terre » et des personnels au bout du rouleau, la surpopulation carcérale à son « paroxysme » à Perpignan



La surpopulation carcérale atteint des records à Perpignan. Une fois de plus, les syndicats de la pénitentiaire tirent la sonnette d’alarme. Plus d’une centaine de détenus dorment sur des matelas par terre. Une surpopulation carcérale qui s’ajoute à une insuffisance de personnel.

L’OIP saisit le Conseil d’État d’une demande de stop-écrou à la prison de Tarbes



Lors d’une audience de référé qui a duré deux heures et demie, l’OIP a réclamé, dans le cadre d’un recours contre une décision du tribunal administratif de Pau concernant la maison d’arrêt de Tarbes,  une mesure de stop-écrou. C’est la première fois que le Conseil d’État est saisi d’une telle demande ; elle vise à bloquer les nouvelles arrivées dans un établissement surpeuplé.

Prisons : 76 258 personnes étaient détenues en France au 1er février, un nouveau record


La surpopulation carcérale s’établissait à 123,5% au début du mois, avec une très forte hausse de personnes contraintes de dormir sur un matelas.

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Un nouveau record pour les prisons françaises, avec plus de 75 000 personnes incarcérées début novembre


Les établissements pénitentiaires du pays ne comptent que 60 975 places opérationnelles, et la densité carcérale globale est donc de 123,2%.

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La surpopulation carcérale à un niveau sans précédent en France

« Un mètre carré par personne » : la population carcérale atteint un niveau historique en France



Plus de 74 000 personnes étaient incarcérées dans les prisons françaises au 1er juillet, d’après les chiffres du ministère de la Justice. Un record historique qui devrait encore augmenter dans les prochaines semaines, avec des conséquences dramatiques pour les conditions d’incarcération.

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Prisons : un nombre record de 73 162 détenus dans les prisons françaises au 1er mai pour 60 867 places, une surpopulation de 120,2%


C’est dans la direction interrégionale des services pénitentiaires de Paris que le nombre de détenus est le plus important, avec 13 454 détenus.

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Surpopulation carcérale : « Il faut travailler sur le sens de la peine », assure François Molins

Prisons : le nombre de détenus atteint un nouveau record, avec 73 080 personnes incarcérées


C’est le troisième mois consécutif que le nombre de détenus est à la hausse dans les prisons françaises, où le problème de surpopulation est chronique.

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Surpopulation carcérale : « 230% d’occupation, c’est inadmissible », les surveillants bloquent la prison de Carcassonne


La prison de Carcassonne était bloquée, ce mercredi matin, par des agents pénitentiaires. Les grévistes protestent contre le manque de personnel et dénoncent aussi la surpopulation carcérale constante.

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Bois-d’Arcy : face à la surpopulation et au délabrement, la Contrôleure des prisons demande de «suspendre les incarcérations»

Cellule individuelle partagée par trois prisonniers dans le centre pénitentiaire du Bois d’Arcy. ( CGLPL)


La Contrôleure générale des lieux de privations de liberté (CGLPL) vient d’émettre une recommandation rare : «suspendre les incarcérations» dans cette maison d’arrêt. Mis au courant, Eric Dupond-Moretti évoque une «situation préoccupante».

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Le nombre de détenus atteint un niveau historique en France


Des détenus dans leur cellule à la prison de Gradignan (Gironde), le 3 octobre 2022. THIBAUD MORITZ / AFP


Au 1er octobre, on recense 72 350 personnes dans les prisons françaises, un chiffre record. Le nombre de matelas au sol dans les établissements a bondi de 39 % en un an.

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« Il y a dix détenus qui participent à KohLantess mais il y en a 1.900 sur le carreau »


On a parlé conditions de détention, surpopulation et violences carcérales avec Matthieu Quinquis, nouveau président de l’Observatoire International des Prisons.

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« 5 détenus dans une cellule à 50 degrés, c’est compliqué » : à Carcassonne, les syndicats dénoncent les conditions de détention pendant la canicule

Dans les prisons de la région, les températures elles aussi grimpent ce qui complique les conditions de détention. A Carcassonne, plusieurs syndicats prennent la parole pour dénoncer une situation qui risque d’empirer à l’approche des premières périodes de canicule. • © MAXPPP


Dans les prisons de la région, les températures grimpent dangereusement ce qui complique les conditions de détention. A Carcassonne, plusieurs syndicats dénoncent une situation intolérable en période de canicule.

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Des migrants manifestent devant le centre d’accueil de Melilla pour dénoncer les « violences systématiques » des gardiens


Surpopulation carcérale : « Envoyer tant de monde en prison, ça ne sert à rien et ça coûte très cher », alerte la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté

Un couloir de la prison de Fleury-Mérogis. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)


Dominique Simonnot appelle à « prendre des mesures exceptionnelles pour faire sortir du monde », car « il y a énormément d’alternatives possibles ».

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