Lettre ouverte aux parlementaires contre le projet StopCovid

Lettre ouverte nationale adressée a tous les parlementaires de Nantes et du pays nantais par la section de Nantes de la LdH – Nantes le 24/04/2020 

 

Lettre ouverte aux députées, députés, sénatirces, sénateurs

Paris, le 24 avril 2020

LE PRESIDENT

Objet : Vote sur la mise en œuvre de l’application StopCovid

Mesdames les députées, Messieurs les députés,

Mesdames les sénatrices, Messieurs les sénateurs,

En principe, le 28 avril à l’Assemblée nationale, vous serez appelé à un débat suivi d’un vote sur l’éventuelle mise en œuvre de l’application de suivi de contacts StopCovid, destinée à lutter contre la pandémie Covid-19 et présentée comme une application de déconfinement.

Installée sur les smartphones, cette application serait capable d’alerter son propriétaire s’il a « croisé », dans les jours qui précèdent, une personne atteinte de la maladie afin qu’elle prenne les précautions d’usage pour d’arrêter la propagation de la maladie. Un service d’attribution de pseudonymes permettrait à StopCovid de ne pas révéler l’identité de la personne infectée croisée, et le Bluetooth ne permettrait pas la géolocalisation.

Annoncée comme conforme, notamment aux principes du Règlement général sur la protection des données (RGPD), elle respecterait la vie privée dans la mesure où l’anonymat des alertes serait garanti, et où l’utilisation du Bluetooth ne permettrait pas de géolocaliser les personnes, elle ne serait installée que sur la base du volontariat.

Présentée comme étant d’une grande simplicité, StopCovid comporte pourtant de nombreux paramètres qui posent problème, qu’ils soient d’ordre technologiques, médicaux, scientifiques ou éthiques.

Si le Bluetooth ne permet pas de géolocaliser les personnes, il ne permet pas non plus d’évaluer avec précision la distance entre celles-ci, ni même de détecter si elles étaient séparées par un plexiglas, une vitre ou un mur.

Comme il permet d’accéder aux données du téléphone, y compris contre la volonté de son propriétaire, son activation est généralement déconseillée et doit donc être volontaire mais il peut être désactivé par certaines fonctions du téléphone, comme la lecture de sa messagerie ou autre, ce qui rendra StopCovid inopérant.

Entre les deux principaux systèmes opérationnels sur les smartphones, (IoS pour les Iphones d’Apple et Android de Google pour la plupart des autres marques) les connexions Bluetooth passent mal, c’est pourquoi les deux entreprises proposent exceptionnellement un protocole de communication entre leurs deux systèmes, protocole dont on peut craindre qu’il permette aux deux « géants » d’avoir accès à quelques données du téléphone. C’est aussi la raison pour laquelle le secrétaire d’Etat au numérique a demandé à Apple de modifier cette désactivation du Bluetooth par défaut, allant ainsi à l’encontre des principes du RGPD alors qu’il devrait en être l’un des garants.

Par ailleurs quelles que soient les promesses d’anonymat, il n’est techniquement pas possible de le garantir, même si l’on nous affirme qu’un serveur central qui distribuerait des pseudonymes sera « honnête et sécurisé ».

Les connaissances sur les modes de transmission du virus sont encore incertaines, et comme le Bluetooth ne permet pas de mesurer la distance entre les personnes ni la durée du « contact », les alertes de l’application pourraient signaler de nombreux « faux positifs ». D’un autre côté, se déclarer atteint du Covid-19 (ou être déclaré par une autorité non encore définie) nécessite d’avoir été testé, or les tests manquent et sont pratiqués avec parcimonie. Par ailleurs, selon les projections mathématiques, il serait nécessaire pour que StopCovid soit efficace qu’au moins 60 % de la population l’installe, or même dans un Etat comme Singapour, pourtant donné en exemple, moins de 20 % de la population a installé l’application équivalente (et le confinement a dû être rétabli).

Le choix d’utiliser les smartphones est un facteur de discrimination qui mettra toute une partie de la population à l’écart. En effet seulement 44 % des « plus de 70 ans » possèdent un téléphone portable tandis qu’au moins 14 % des Français ne sont pas à l’aise avec les manipulations comme l’activation du Bluetooth ou l’installation d’une application, pourtant ce sont souvent les populations considérées comme les plus « à risques ».

Les problèmes techniques relevés pourraient, a contrario, mettre en danger les individus trop confiants dans l’application qui ne pourra pas signaler qu’un malade qu’ils n’ont jamais croisé a touché la poignée de porte de leur boutique préférée.

L’installation de StopCovid sur la base du volontariat traduirait le consentement des individus, mais le caractère libre et éclairé de celui-ci n’est pas avéré. En effet la pression sociale et patronale, l’éventuel refus d’accès à certains services, la stigmatisation des « réfractaires » risque d’obliger un grand nombre de personnes à l’installer.

Enfin la solution technologique que l’on vous propose de voter pour mettre fin à la pandémie porte en elle le risque d’une habituation à une surveillance généralisée, banalisée et pérenne. La fin de la pandémie étant tout à fait incertaine, la suppression de l’application, que l’on nous promet à la fin de la crise sanitaire, risque de ne jamais intervenir, d’autant plus qu’elle pourrait bien servir pour prévenir d’autres risques à venir.

Les risques d’atteinte au respect de la vie privée et au secret médical, les risques de surveillance généralisée au regard d’une efficacité tout à fait incertaine conduisent la Ligue des droits de l’Homme (LDH) à vous demander instamment de vous opposer au projet StopCovid.

Vous comprendrez que cette démarche soit rendue publique.

Nous vous prions d’agréer, Mesdames les députées, Messieurs les députés, l’expression de nos salutations les meilleures. 

Malik Salemkour

Contact : direction@ldh-france.org

Le délit de confinement : une stratégie répressive au détriment des plus fragiles ?

Communiqué de l’Observatoire Nantais des Libertés (ONL) – Nantes le 22/04/2020

La situation sanitaire exceptionnelle actuelle a amené la rédaction du nouvel article L. 3136-1 du code de la santé publique avec la création d’une contravention et d’un délit relatifs au non-respect du confinement.

L’Observatoire nantais des libertés (ONL) suit avec attention l’application de ce nouveau texte.

Il s’inquiète des contours particulièrement flous de cette infraction et de l’insécurité juridique qui en résulte.

Ainsi, l’ONL note que de multiples questionnements ont suivi la venue de ce nouveau-né : les forces de l’ordre peuvent-elles contrôler le caractère « de première nécessité » des achats ? Le déplacement pour l’activité professionnelle doit-il être justifié par une attestation de l’employeur ? L’attestation peut-elle être remplie au crayon de bois ?

L’ONL est particulièrement attentif à l’issue qui sera donnée aux questions prioritaires de constitution-nalité transmises, à ce jour, à la Cour de Cassation pour contrôle de la constitutionnalité du texte susvisé, recours soulignant sa grande insécurité juridique.

Pour l’heure, l’ONL s’inquiète de l’application qui peut en être faite sur le territoire local.

Il rappelle que l’état d’urgence sanitaire ne doit pas être en rupture avec l’État de droit et ne saurait justifier des contrôles discriminatoires, ni un recours à la force injustifié ou disproportionné par les forces de l’ordre.

Il constate que les attestations éditées par le gouvernement n’existent qu’en langue française ou anglaise et que cela place dans de grandes difficultés les individus ne maîtrisant aucune de ces deux langues.

Il déplore que des poursuites aient pu être engagées, pour ce délit, de manière quasi-systématique par la voie particulière de la comparution immédiate, à l’égard de personnes dans des situations de grande fragilité.

Il s’indigne, notamment, que des poursuites aient été engagés, le 03 avril 2020, à l’égard d’un homme sans domicile fixe, verbalisé alors qu’il « faisait la manche » sur l’espace public.

Il s’indigne qu’un autre homme, sans domicile fixe, et en fauteuil roulant, ait été jugé en comparution immédiate ce 20 avril et condamné à deux mois d’emprisonnement ferme, notamment pour non-respect du confinement (il aurait été contrôlé trois fois dans la même journée alors qu’il allait chercher à manger) et vol d’une paire de chaussures.

Il a tenté de se mutiler dans l’enceinte du tribunal.

L’ONL appelle les autorités administratives et judiciaires à ne pas renforcer les inégalités et les difficultés que rencontrent les publics précaires par une application disproportionnée et inadaptée des mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.

L’ONL exerce toujours sa vigilance quant au respect des libertés publiques et se tient à la disposition des personnes qui s’estiment atteintes dans leurs droits (un guide pratique sur les contraventions relatives au confinement est disponible).

L’Observatoire nantais des libertés avec les associations Association Républicaine des Anciens Combattants, Attac, Droit au logement, France Palestine Solidarité, Ligue de l’Enseignement-Fédération des Amicales Laïques, Ligue des droits de l’Homme, Maison des Citoyens du Monde, Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples, Mouvement National de Lutte pour l’Environnement, Syndicat de la Médecine Générale, Syndicat des Avocats de France, Tissé Métisse. ONL@rezocitoyen.net

Les personnes à la rue doivent être mises à l’abri sans délai !

Communiqué du collectif Personne à la rue – Nantes le 16 avril 2020

Bien avant cette crise, et aujourd’hui encore dans l’agglomération nantaise, il y a toujours des personnes à la rue,en squats ou bidonvilles indignes. Et parmi elles, beaucoup souffrent de pathologies qui les mettent en grand danger en cas de contamination par le Covid19. Autant de situations qui ne permettent pas le respect des consignes qui ont été données par le gouvernement en matière de confinement et de protection de la santé.
Le gouvernement a mobilisé des moyens financiers conséquents (65 millions d’euros), a donné des instructions aux préfets pour mobiliser, en réquisitionnant si nécessaire, des places supplémentaires d’hébergement et toute forme d’habitat vacant ou d’établissement (décret du 28/03/2020 et instructions interministérielles du 27/03/2020).

Qu’en est-il pour la Loire Atlantique et quelles sont vos mesures ?

Monsieur le Préfet, ces personnes à la rue ou vivant en habitat indigne ont besoin d’urgence de ces lieux pour se mettre à l’abri de la contamination et vivre dans des conditions décentes. Elles risquent en effet des complications graves du Covid 19, d’autant plus par leur situation de fragilité.
Il faut aussi réduire la sur-occupation des squats et équiper les bidonvilles des services essentiels, pour protéger tout le monde. Vous avez les moyens pour y parvenir ! Les associations et bénévoles attendent des mesures fortes.

Quand allez-vous mettre en œuvre un plan de réquisitions à la mesure de la situation ?

L’inter-collectif « Personne à la rue ! » avait lancé un premier appel le 18 mars pour la protection de toutes ces personnes précaires. Malgré des prises en charge par le Samu Social -115 ; il reste environ 300 personnes en liste d’attente pour accéder à un hébergement d’urgence. et l’épidémie de coronavirus touche maintenant les lieux d’hébergement que les associations accompagnent.
Droit Au Logement 44 vous a interpellé le 26 Mars 2020 par une lettre ouverte, et relancé le 9 avril 2020. Cette association attend toujours une communication de votre part.
Sans le travail bénévole des associations, toutes ces personnes fragiles seraient encore plus marginalisées, avec le risque qu’elles contribuent en plus à la transmission du virus. L’exclusion n’est pas acceptable en cette grave crise sanitaire et sociale.
Monsieur le Préfet, nous attendons depuis le début de la crise vos  informations sur le dispositif mis en place et sur les décisions visant à protéger l’ensemble des personnes en grande détresse que nous accompagnons.

Monsieur le Préfet, que comptez-vous mettre en œuvre ?

Nous ne saurons nous satisfaire d’annonces concernant la mise à l’abri de quelques personnes à Saint-Aignan, et l’ouverture d’un gymnase et de places en hôtel quand nous identifions encore sur l’agglomération 200 personnes exposées à des risques graves pour leur santé, du fait de leur fragilité et de leurs conditions de vie.
Il convient également de se préparer à l’après Covid19, pour que toutes ces personnes (clairement identifiées à ce jour par les services compétents) ne se retrouvent de nouveau à la rue. Il faudra trouver des logements et des hébergements pérennes.

Appel lancé par l’inter-collectif » Personne à la rue ! personnealarue@gmail.com
Liste des membres signataires : ATD Quart Monde, ATTAC, Afrique Loire, ASAMLA, Collectif des Hébergeurs solidaires de Nantes et alentours, Collectif des Sans-Papiers de Nantes, Collectif Refus de la Misère, Collectif Solidarité Indrais, Collectif Soutien migrants Nantes, Collectif Urgence jeunes migrants 44, CSF, DAL44, Du Monde dans la classe, Emmaüs 44, GASPROM, GREF, Habitat & Humanisme, JRS Loire-Atlantique, La Cimade, L’Autre Cantine, L’Autre Classe, La Maison, LDH, Le Logis Saint Jean, Les Bienveilleurs 44, Ligue de l’enseignement – FAL 44, Maison des citoyens du Monde, Médecins du Monde, MRAP, NOSIG, Prépa Solidaire, RESF, Romeurope, L’Intersyndicale 44 (UD CGT – CFDT – FSU – UNSA – SOLIDAIRES 44)

ONL – Appel à la vigilance

Communiqué de l’Observatoire nantais des Libertés – Nantes le 2 avril 2020

La pandémie du Covid-19 crée une situation mondiale inédite. Notre pays a été placé sous le régime de l’État d’urgence sanitaire.

Au regard des expériences passées à l’occasion de l’État d’urgence, il nous faut être attentif sur les applications faites de l’État d’Urgence Sanitaire avec la possibilité pour l’Exécutif de décider par voie d’ordonnance.
Les pouvoirs publics prennent des mesures avec de très fortes restrictions des libertés publiques en s’arrogeant des pouvoirs extrêmement larges sans contrôles et contre-pouvoirs effectifs.

Nous pouvons craindre des dérives : surenchère sécuritaire, surveillance généralisée, …

Ainsi, en dehors de notre région, un arrêté anti-vente d’alcool qui heureusement a été annulé, dans notre région, l’utilisation d’un drone pour surveiller la côte du Croisic, la verbalisation d’une femme faisant ses courses avec son enfant alors qu’elle vit seule avec lui et que l’attestation ne le prévoit pas, ne semblent pas proportionnées au regard des objectifs de sécurité sanitaire…

Nous invitons les citoyennes et les citoyens ainsi que les organisations associatives, syndicales et politiques à signaler tout fait qui vous paraîtrait attentatoire aux libertés.

Il faut débattre collectivement afin d’évaluer où placer le curseur entre sécurité et liberté.

L’Observatoire nantais des libertés (ONL) sera vigilant sur les situations d’atteintes aux libertés et aux droits.

L’Observatoire nantais des libertés avec les associations Association Républicaine des Anciens Combattants, Attac, Droit au logement, France Palestine Solidarité, Ligue de l’Enseignement-Fédération des Amicales Laïques, Ligue des droits de l’Homme, Maison des Citoyens du Monde, Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples, Mouvement National de Lutte pour l’Environnement, Syndicat de la Médecine Générale, Syndicat des Avocats de France, Tissé Métisse. ONL@rezocitoyen.net