Le cas Arnault



« Je serai intraitable » : quand Bernard Arnault interdit aux cadres de LVMH de parler à certains médias.

Bernard Arnault, la plus grosse fortune de France, a pris la plume pour interdire par mail aux cadres de son groupe de luxe LVMH, de s’adresser à certains médias dont Mediapart, le Canard enchaîné ou encore La Lettre qui a révélé le document, le 18 septembre dernier.



Merci Patron «Bernard Arnault, le procès aura lieu» : François Ruffin obtient un procès civil sur ses accusations d’espionnage par LVMH.

L’ex-insoumis accuse le groupe de luxe de l’avoir fait surveiller pendant la réalisation du documentaire « Merci Patron ! ». Les poursuites pénales engagées en 2019 avaient été abandonnées après un accord entre le groupe de luxe et la Justice.



C’est touchant. C’est juste un petit classeur, rouge, avec dedans des transparents. Le même que des centaines d’écoliers. Moins d’un euro chez Carrefour. Et il faut en dire la beauté, pourtant, de ce petit classeur rouge. Car voilà comment se conserve une tranche d’histoire populaire, comment est sauvé de l’oubli un drame qui, pourtant, a fait basculer des milliers d’existences. Juste un petit classeur rouge. Tandis qu’en face, ils se font bâtir des musées, ils réalisent des films sur leur success story, ils publient des ouvrages qui les célèbrent, et distordent ainsi une mémoire à leur gloire.



Mardi 2 décembre, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet est l’invitée de 8h20 sur France Inter, pour la première fois depuis la rentrée. L’occasion d’entendre les revendications des travailleurs ? Ou, pour les deux intervieweurs, de se faire les porte-voix du grand patronat.



Trahisons, manipulations, surveillance… Les méthodes de Bernard Arnault disséquées dans «Cash Investigation».

L’émission d’enquête de France 2 s’intéresse jeudi 4 décembre au parcours et aux procédés du patron de LVMH, l’empire français du luxe. De ses débuts dans l’immobilier à la conquête de Dior et Louis Vuitton, l’homme de Roubaix a utilisé tous ses appuis et toutes les combines pour construire son groupe.



Bernard Arnault paierait proportionnellement 6 fois moins d’impôts qu’un Smicard, selon Zucman.

L’économiste Gabriel Zucman, spécialiste mondialement reconnu des inégalités et de l’évasion fiscale, souligne que le taux d’imposition sur les revenus de Bernard Arnault est six fois inférieur à celui d’un salarié au SMIC, soit 1,25 % contre 9,7 %.



De son côté, le propagandiste d’extrême-droite au service de l’ami Bolloré, Pascal Praud, lance à propose de l’émission Cash Investigation sur LVMH : “On devrait faire une statue à Bernard Arnault ! »




L’itinéraire sans surprise d’un héritier

(Source Wikipedia)


Enfant issu d’une famille aisée, entré à Polytechnique en 1969, il est diplômé en 1971. Puis il choisit l’École des mines de Paris comme « école d’application ».

Dès sa sortie de l’école, en 1971, Bernard Arnault rejoint l’entreprise familiale de bâtiment et travaux publics Ferret-Savinel. Nommé directeur de la construction de l’entreprise en 1974, il est promu directeur général en 1977 à l’âge de vingt-sept ans, avant de succéder à son père à la tête de la société en 1978.

Il reconvertit l’entreprise dans la promotion immobilière avec pour slogan : « Férinel, propriétaire à la mer » (Férinel sera rachetée en 1995 par la Générale des eaux puis renommée Nexity).

En 1981, il s’expatrie aux États-Unis où il fonde l’entreprise Férinel Inc. et fréquente le promoteur immobilier Donald Trump.

En 1984 il se porte candidat au rachat du Groupe Boussac, qui possède alors Christian Dior (à l’exception des parfums, alors séparés depuis les années 1970), le grand magasin Le Bon Marché, l’enseigne de distribution Conforama et le fabricant de couches Peaudouce. Il souhaite s’emparer de Dior et rachète le groupe Boussac, alors en difficulté, en promettant de maintenir l’emploi et d’assurer « la survie du groupe en évitant son démantèlement ».

Pour ce faire, il bénéficie de l’appui de la banque Lazard en la personne de l’influent Antoine Bernheim, surnommé « le banquier faiseur de rois » et s’engage dans un document de quarante-quatre pages à maintenir 12 252 des 16 000 emplois du groupe Boussac Saint-Frères.

Bernard Arnault devient PDG de Dior en 1985. Bien qu’ayant obtenu des subventions publiques de l’État pour ce rachat, il n’honorera jamais sa parole, et quelques mois plus tard, seuls 8 700 des 12 252 emplois garantis subsistent ; de 15 000 employés, le groupe en conserve 8 000 quelques années après le rachat.

En 1987, la Commission européenne estime que les aides accordées par l’État français ont faussé le jeu de la concurrence au sein des États membres et exige du groupe de Bernard Arnault le remboursement de 338,56 millions de francs, y compris des aides datant d’avant le rachat par Bernard Arnault, lorsque l’entreprise était une société à capitaux publics.

En juillet 1988, Bernard Arnault rachète Celine.

L’année suivante, en 1988, le groupe est à la recherche d’investisseurs. Avec plus de 25 % des actions, Bernard Arnault devient l’un des actionnaires principaux du groupe.

Pour prendre le contrôle définitif du groupe, Bernard Arnault lance une offre publique d’achat (OPA). Profitant de la pagaille boursière et actionnariale, il devient, en juillet 1988, premier actionnaire de LVMH et actionnaire majoritaire le 6 janvier 1989, avec l’aide de la banque Lazard et du Crédit lyonnais.

Il réunit, en 1989, les parfums et la couture au sein de la holding Christian Dior SA. Cette holding a alors pour filiales Christian Dior Couture et LVMH, qui possède la marque Parfums Christian Dior, anciennement propriété de Moët-Hennessy. En 1989, il devient le PDG de LVMH.

En 1993, il rachète le quotidien économique La Tribune sans parvenir à redresser ses ventes, malgré des investissements qui s’élèvent à près de 150 millions d’euros. Il décide en novembre 2007 de revendre le titre pour acquérir l’autre grand quotidien économique français, Les Échos, pour 240 millions d’euros.

Dans les années 1990, les acquisitions de son groupe s’enchaînent. Il rachète 21 % des parts de Guinness et entre à son conseil d’administration. En 1997, il échoue à bloquer la fusion entre Guinness et GrandMet qui aboutit à la création de Diageo en 1998.

À la fin des années 1990, Bernard Arnault fait de l’art le pilier de la stratégie de communication de son groupe en achetant Phillips, le numéro trois mondial de la vente aux enchères, pour 125 millions d’euros, et Tajan, le premier français de ce même secteur.

En 1996, le groupe de Bernard Arnault acquiert 38 % du capital de Château d’Yquem, grand cru classé de Sauternes, dans le vignoble bordelais. En 1998, il devient majoritaire avec 64 % des actions.

Pour symboliser la croissance et la force du groupe LVMH aux États-Unis, Bernard Arnault décide dans les années 1990 de regrouper ses activités au sein d’une même tour à New York, la LVMH Tower. Il choisit l’architecte Christian de Portzamparc pour réaliser ce projet, dans lequel il s’implique personnellement. Le 8 décembre 1999, la tour LVMH est inaugurée en présence d’Hillary Clinton.

Entre 1998 et 2001, il se passionne pour la nouvelle économie et investit notamment dans boo.comLiberty Surf et Zebank au travers de sa holding spécialisée Europ@web. Le krach des valeurs Internet à partir de mars 2000, et plus encore les attentats du 11 septembre 2001, le convainquent d’accélérer sa sortie de ce secteur par cession au groupe SuezLiberty Surf est vendue à Telecom Italia alors que Zebank est vendue à Egg plc. Bernard Arnault investit également dans Betfair et Netflix dont il est l’un des premiers investisseurs.

En 2001, il trouve un accord avec François Pinault dans la bataille qui les opposait pour la maison de couture Gucci, en vendant les 20 % de titres Gucci détenus par LVMH pour 2,13 milliards d’euros.

En association avec Colony CapitalGroupe Arnault entre dans le capital de Carrefour le 23 mars 2007 et siège donc au conseil d’administration du groupe français de grande distribution.

En 2008, il se lance sur le marché du yacht en s’offrant le constructeur britannique Princess Yachts  pour un total de 253 millions d’euros, puis en prenant le contrôle de Royal van Lent pour un montant équivalent.

En septembre 2012, à la suite des révélations au sujet de sa demande de nationalité belge, Bernard Arnault se voit consacrer la une du quotidien Libération, sous le titre « Casse-toi riche con ! », qui entraîne une polémique. En janvier 2013, la quasi-totalité de ses actifs du Groupe Arnault et du Groupe familial Arnault sont transférés en Belgique et Thierry Breton assure la présidence de cette fondation Protectinvest.

À la suite de la parution du numéro de Libération, les sociétés dépendant du groupe LVMH retirent leurs publicités prévues jusqu’à la fin de l’année, entraînant un manque à gagner de 150 000 € pour le quotidien.

En 2012 toujours, Bernard Arnault, victime d’un chantage, fait officieusement appel, à travers Bernard Squarcini, aux services de la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI), anciennement DCRI, qui met à disposition, aux frais de l’État français, un important dispositif d’espionnage, aboutissant au licenciement d’un employé de LVMH. À son arrivée au pouvoir, François Hollande ne reconduit pas dans ses fonctions Bernard Squarcini, que Nicolas Sarkozy a nommé à la tête de la DCRI. Il est alors embauché chez LVMH.

Bernard Arnault devient l’un des principaux actionnaires du journal L’Opinion, fondé en 2013.

Le 10 avril 2013, dans un entretien au Monde, Bernard Arnault annonce qu’il retire sa demande de nationalité belge et réaffirme son « attachement à la France ». Il ajoute qu’il aurait, dans tous les cas, continué de résider en France et n’a pas souhaité échapper à l’impôt. Toutefois, en avril 2014, les journalistes de l’émission de France 2 Complément d’enquête retrouvent des documents montrant que Bernard Arnault a rempli une déclaration fiscale belge en 2012 et qu’il a commencé à payer ses impôts (13 000 €) dans le pays, avant de revenir en arrière.

En 2016, alors que LVMH fait de l’origine française de ses produits un argument commercial, le documentaire satirique Merci Patron !, réalisé par François Ruffin, critique la gestion sociale de LVMH, révélant que de très nombreux produits sont en fait confectionnés en Pologne, à Madagascar ou en Asie, pendant que les usines françaises ferment. Face à la controverse, Bernard Arnault tente de faire pression sur les médias dépendant de son groupe pour étouffer l’affaire, provoquant l’indignation des journalistes. Bernard Arnault dénonce des attaques venues d’« observateurs d’extrême gauche ». Invoquant des créations d’emplois, il soutient que le groupe est un « contre-exemple » pour des organisations politiques qui cherchent à le critiquer.

Le 3 juillet 2017, Bernard Arnault finalise l’acquisition de la société Christian Dior Couture, alors filiale à 100 % de la holding Christian Dior SA, unifiant ainsi la couture et les parfums au sein de LVMH.

Mi-mars 2020, lors de la pandémie de Covid-19 en France, Bernard Arnault demande à l’ensemble des unités de production de parfums de plusieurs marques du groupe LVMH de produire à grande échelle des solutions hydroalcooliques et de les mettre gratuitement à disposition des autorités sanitaires. Quelques jours plus tard, le groupe annonce par ailleurs avoir « réussi, grâce à l’efficacité de son réseau mondial, à trouver un fournisseur industriel chinois capable de livrer dix millions de masques en France dans les prochains jours » ; Bernard Arnault demande à LVMH de financer la première semaine de production (environ cinq millions d’euros) pour accélérer la livraison.

Aux côtés de Jean-Pierre Mustier et de Tikehau Capital, Bernard Arnault lance en février 2021 un SPAC (de l’anglais « special-purpose acquisition company », en français « société d’acquisition à vocation spécifique ») , appelé Pegasus et destiné à réaliser des acquisitions dans le secteur des services financiers.

En novembre 2024, Bernard Arnault et ses enfants, dont le fils ainé Antoine Arnault porteur du projet, annoncent devenir actionnaires majoritaires (à hauteur de 52 %) du Paris FC, le deuxième club professionnel de football basé à Paris.

Le 2 décembre 2024, il est élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques, au fauteuil n°1 de la section Économie politique, Statistique et Finances, laissé vacant par le décès de Denis Kessler.


Une histoire de famille et un microcosme

Enfants issus de son premier mariage avec Anne Dewavrin (qui épousera par la suite en secondes noces, en 2001, le gestionnaire de fortune Patrice de Maistre), Delphine Arnault, née en 1975, est administratrice du groupe LVMH depuis 2004 et PDG de Christian Dior Couture depuis le 11 janvier 2023 et Antoine Arnault, né en 1977, est directeur général de Berluti.

Trois fils naissent du deuxième mariage avec Hélène Mercier (pianiste québécoise): Alexandre Arnault, né en 1992, directeur exécutif de Tiffany & Co. ; Frédéric Arnault, né en 1995, PDG de TAG Heuer ; et Jean Arnault, né en 1998 directeur marketing et développement pour les montres Louis Vuitton.

Depuis 2010, Bernard Arnault est le beau-père de Xavier Niel, homme d’affaires et vice-président d’Iliad, qui a épousé sa fille Delphine.

RD

Le gouvernement lâche du lest, les patrons ne lâchent rien


Prix de l’électricité, bonus auto, taxe foncière  : Lecornu lâche du lest pour sauver le budget.

Le Premier ministre démine le terrain des sujets polémiques avant la dernière ligne droite sur le budget. Si le PS souhaite trouver un compromis, les LR, par la voix de Bruno Retailleau, haussent le ton.



Taxe foncière : le gouvernement cède à la pression et suspend la fiabilisation des valeurs locatives.

Face au tollé des élus nationaux, locaux et des propriétaires, le gouvernement a décidé de suspendre la fiabilisation des valeurs locatives des logements prévue en 2026. Une reculade qui laisse craindre le pire pour la poursuite de la grande réforme des valeurs locatives, pourtant réclamée par tout le monde local.



Critique contre les grands patrons : Sophie Binet annonce sa mise en examen pour injure publique.

La leader de la CGT, Sophie Binet, a annoncé mardi sur France Inter sa mise en examen pour « injure publique » après avoir qualifié en janvier à la radio les patrons de « rats qui quittent le navire » dont « le seul objectif, est l’appât du gain ».



Qui est Sophie de Menthon, à l’origine de la plainte contre Sophie Binet ?

Sophie Binet vient d’annoncer être mise en examen pour injure publique. La secrétaire générale de la CGT avait qualifié les patrons qui menaçaient de délocaliser leur entreprise en cas de surtaxe du gouvernement « de rats qui quittent le navire » . A l’origine de la plainte, Sophie de Menthon, une présidente du lobby patronal Ethic, qui a l’habitude de tisser des liens entre les patrons et l’extrême droite.

Menaces sur la Sécu

Par Rémy Dufaut



Annonces sur le budget : aux maux de la santé, Bayrou propose les remèdes habituels

On ne compte plus les alertes sur le déficit de l’assurance maladie. 13,8 milliards d’euros en 2024, avec le risque de plonger à 16 en 2025. Alors François Bayrou, qui a présenté ses orientations budgétaires ce mardi 15 juillet, était attendu sur ce volet. Et il a dressé le cap : faire baisser le coût de la santé, dans le cadre d’une réduction de 5 milliards d’euros des dépenses sociales annuelles.



La Sécu

Décidément, l’assurance maladie fait encore parler d’elle. Et pas en bien, comme d’habitude. La protection sociale coûte trop cher. La droite et le patronat n’ont de cesse, depuis sa création, que de faire supporter leurs frais de leur santé aux Français, par l’intermédiaire des organismes privés.

Les assurances sociales furent créées par la Loi du 5 avril 1928 pour tous les salariés, sous la forme d’une Assurance Vieillesse fondée sur le principe de la capitalisation ainsi qu’une Assurance Maladie. Celle-ci fut complétée par la Loi du 30 avril 1930 qui instituait le premier système d’assurance sociale en France, destiné aux salariés dont le revenu se situait en dessous d’un certain plafond. Il était alors confié à toutes sortes de mutuelles, dont celles des fonctionnaires. Les plus aisés avaient recours à des assurances libres.

En octobre 1944, le Ministre du Travail dans l’éphémère gouvernement de Gaulle (septembre 1944 à octobre 1945), Alexandre Parodi, confie à Pierre Laroque, directeur général des Assurances sociales et de la Mutualité, la tâche de mettre en place un plan de Sécurité sociale. 

C’est à Ambroise Croizat, ministre communiste du Travail de 1945 à 1946 et en 1947, que reviendra la tâche de le mettre en œuvre, dans le cadre du programme des « Jours heureux », par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 qui actent la création de la Sécurité sociale, avec pour but de protéger l’ensemble de la population. La Sécurité Sociale va (brièvement) connaître ses heures de gloire. « En 1945, la pensée keynésienne [du nom de l’économiste britannique John Maynard Keynes]est dominante en Europe et dans les pays ‘riches’. Cette pensée économique [voit] les dépenses publiques comme un soutien à la consommation. La Sécurité sociale est pensée comme partie prenante du modèle keynésien », souligne Bruno Palier.  » [On pense] que si on est malade et qu’on continue de toucher un revenu, on peut donc continuer de consommer. »

Ce podcast de France culture en 4 épisodes a servi de base de départ à cet article. On s’y référera fréquemment tout au long de celui-ci.


5 ans après sa création, on évoquait déjà le déficit

Face à l’augmentation des dépenses dans les années 1950, les caisses nationales présentent plusieurs déficits. L’expression « trou de la Sécu » n’est pas encore employée, car le déficit n’est pas perçu comme un problème à résoudre, bien que des critiques de la Sécurité sociale soient cependant déjà en germe.

En 1967, les ordonnances Jeanneney transforment le visage de la Sécurité sociale. Elles mettent en place trois caisses nationales autonomes : maladie, vieillesse et famille. Elles marquent surtout une première pression de l’État sur la Sécurité sociale, jusque-là gérée par les représentants du monde du travail.

L’année 1967 est celle qui comptabilise le plus de journées de grève depuis l’instauration de la Ve République.

La manifestation du 17 mai entend protester contre la réforme de la sécurité sociale par voie d’ordonnances, contre le blocage des salaires et contre l’attribution des pleins pouvoirs au gouvernement. Elle marquera les esprits.



Mai 68

Un an après, ce qu’on qualifie d’« événements de 1968 », année marquée par une contestation générale des valeurs et des pouvoirs établis, n’est que la suite d’une série de prises de conscience par les populations d’un besoin de changement profond dans la société et dans les principes qui la régissent.

Le « mouvement » amorcé en France s’étend au monde entier.



Les réformes se multiplient

On observe alors la publication de décrets modifiant profondément, par exemple, les règles du contrôle médical du régime général de la Sécurité sociale et la participation des assurés aux tarifs servant de base au calcul de ces prestations, en abrogeant purement et simplement la totalité des dispositions prises antérieurement. Ces décrets seront par la suite à diverses reprises eux-mêmes à nouveau abrogés et modifiés.

La Sécurité Sociale se réforme jusque dans ses propres rangs: la Convention collective nationale de travail du 25 juin 1968 régit les conditions des agents de direction et des agents-comptables des organismes de Sécurité sociale et d’Allocations familiales. Mais seuls les cadres sont concernés par cette avancée.

Le  patronat fait tout pour garder en main les orientations des caisses, s’appuyant généralement sur un syndicat représentatif notablement favorable aux orientations patronales.



Dans les années 1970, le « trou de la Sécu » devient un problème politique et sert de levier pour faire encore des réformes.

À partir de 1973, la croissance ralentit fortement au lendemain du premier choc pétrolier. Le déficit de la Sécurité sociale se creuse et bascule très vite dans le champ des problèmes politiques. Pour freiner le déficit, l’augmentation des cotisations sociales n’est plus présentée comme une solution.

En 1976, le Premier ministre Raymond Barre est le premier à dire que le déficit pose problème. Selon lui, il faut se centrer sur une politique de l’offre et non plus de demande pour boucher le « trou de la Sécu ». À partir de là, les plans de financement vont se mettre en place tous les ans.


Dans les années 1980 la notion de « trou de la sécu » s’enracine dans les discours politiques.

Le politiste Bruno Palier fait remarquer le symbole des mots employés pour décrire la Sécurité sociale : « On parle souvent de cathédrales – quelque chose qui vient du passé, de très imposant, mais qui risque de s’effondrer. En 1987, lors des États généraux de la Sécurité sociale, on choisit le symbole de la baleine – un animal sympathique, mais qui risque de disparaître. » Il poursuit : « Les années 1980 vont ajouter au débat la notion de charge pour changer l’appellation des cotisations sociales. […] Yvon Gattaz, à la tête du Conseil national du patronat français (CNPF), lance la ‘bataille des charges’ pour faire comprendre aux Français et au gouvernement que les cotisations sociales pèsent beaucoup trop dans le contexte du marché européen dans lequel on compare le coût du travail. » Pour Bruno Palier, « c’est un retournement contre la Sécu, par son mode de financement. »

Désormais, la priorité pour les gouvernements de droite comme de gauche est de mettre en place des réformes visant à réduire les déficits, même si cela entraîne des limitations de l’aide sociale.

En 1995, le plan Juppé finit d’étatiser la Sécurité sociale en créant notamment la loi de financement de la Sécurité sociale. La maîtrise des dépenses sociales incombe à présent majoritairement à l’État qui éloigne un peu plus le pouvoir des bénéficiaires de la Sécurité sociale.

Ce « plan Juppé » déclenche une mobilisation massive qui fait plier le gouvernement, qui lâche sur les choses qui n’étaient pas essentielles pour lui. Il voulait reprendre en main la Sécurité sociale. Il a lâché sur les autres éléments du plan Juppé, c’est-à-dire la retraite avec la fin des régimes spéciaux et l’augmentation de la durée de cotisation pour les fonctionnaires, le contrat de plan à la SNCF…


La victoire n’est donc que partielle et le patronat ne démord pas de son projet: démanteler la protection sociale.

Des solutions pratiques sont pourtant avancées par Olivier Nobile et Bernard Teper qui publient Pour en finir avec le trou de la Sécu, repenser la protection sociale au XXIème siècle (Editions Penser et agir, Eric Jamet Editeur (2014), 270 pages, 20 euros)

Ils proposent 2 grandes lignes d’action :

« Réhabiliter d’urgence le DROIT SOCIAL comme fondement d’un nouveau projet de République Sociale ». Pour Olivier Nobile, une réforme visant à l’amélioration du fonctionnement de la Sécurité sociale est tout à fait envisageable : réforme de la démocratie sociale visant à faire de la Sécurité sociale un lieu d’expression citoyenne et républicaine. Réforme du système de santé visant à sortir du tout curatif pour réhabiliter un système de santé accessible et gratuit incluant la perte d’autonomie. Réforme des retraites afin de garantir des ressources pérennes aux régimes de retraite par répartition en vue d’un rétablissement de la retraite à 60 ans. Réforme du système des prestations familiales autour de la création d’une allocation sociale à l’enfant et au jeune enfant, dès le premier enfant.

Mais surtout réhabilitation du salaire et de la cotisation sociale

Il s’agit bien de rompre avec les politiques d’austérité et de modération salariale tout en créant les conditions d’une dé-financiarisation de l’économie. Cela implique une mobilisation citoyenne au niveau de l’Europe et une prise de pouvoir des peuples sur l’ensemble des déterminants de l’économie. »


30 ans après, les questions se posent toujours dans les mêmes termes.

Mais la pression des patrons ne cesse de s’accentuer sur le pouvoir, déjà en bien mauvaise forme.


Economies santé : les malades à la double peine

Le 15 juillet, le Premier ministre, François Bayrou, a présenté les grandes orientations de son budget 2026. Il entend faire près de 44 milliards d’euros d’économies, dont une partie (environ cinq milliards) concerne les dépenses de santé. Il a aussi décidé d’une année blanche pour toutes les prestations sociales, y compris les pensions de retraites, gelées donc sans revalorisation au rythme de l’inflation. Alors que comporte la purge annoncée ?



Six idées reçues sur la fraude sociale : la manne financière, les cartes Vitale usurpées, les pauvres qui profitent du système…

Parmi les pistes d’économies présentées par François Bayrou lors de son discours sur le budget, le durcissement de la lutte contre la fraude sociale. Estimée à 13 milliards d’euros par an, celle-ci draine des idées reçues : la désignation des responsables, l’origine du déficit de la Sécurité sociale ou la manne financière qui échapperait aux caisses de l’Etat.



Contre le « plan Bayrou » le 10 septembre 2025 ?

Un collectif « Mobilisation10septembre » appelle à bloquer le pays le 10 septembre prochain, en marge des principaux syndicats (qui ont lancé leur propre pétition), non sans rappeler les prémices  des « gilets jaunes » et des « bonnets rouges ». Le magazine Blast remarque que les groupes Telegram semblent avoir remplacé les groupes Facebook, ce qui ne manque pas d’interroger…

La journée en images

Législatives (sans commentaire)

Elections régionales 2021


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Une campagne marquée par la diffusion massive de fausses informations


La campagne des législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024 a été marquées par une forte désinformation, aussi bien du fait des ingérences russes en faveur de l’extrême droite mais aussi du fait des candidats, des partis et des personnalités politiques.



Liste d’avocats « à éliminer » : 68 avocats déposent plainte notamment pour « menaces de mort »


En tout, 98 noms d’avocats ont été inscrits sur cette liste publiée sur un site d’extrême droite appelant à les « envoyer dans un fossé ».

Une plainte a été déposée ce jeudi soir par 68 avocats auprès du parquet de Paris pour « menaces de mort envers un avocat », « cyberharcèlement » et « provocation à la commission d’une infraction pénale », a appris franceinfo auprès des avocats des plaignants. D’autres plaintes devraient s’ajouter.



« Stop aux blacks » : des tracts racistes distribués dans les boîtes aux lettres d’une commune des Yvelines


Les habitants de cette commune des Yvelines ont retrouvé des tracts racistes sur leur voiture ou dans leur boîte aux lettres. Selon SOS Racisme, ces actes se multiplient depuis les élections législatives.

Depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale et la potentielle arrivée de l’extrême droite au pouvoir, les paroles et autres actes racistes semblent se multiplier. C’est un phénomène difficile à quantifier, mais plusieurs faits, parfois particulièrement violents, sont signalés à travers la France. Exemple à Chatou, en région parisienne : des dizaines de tracts contre les personnes noires ont été distribués dans des boîtes aux lettres le mois dernier, mais aucune interpellation n’a été réalisée à ce stade.



Dans le Médoc, le député RN Grégoire de Fournas vendange les difficultés sociales


Les raisons de la colère. Dans la 5ème circonscription de la Gironde, le député viticulteur du RN Grégoire de Fournas pourrait être réélu par des habitant·es désabusé·es, pour qui l’écologie est devenu un gros mot. Reportage dans ce territoire délaissé.



Pour qui roule le syndicat agricole Coordination Rurale?


Les bonnets jaunes des agriculteurs de la Coordination Rurale ont été très présents lors du mouvement de colère des paysans en début d’année en France. Alors qu’approche le deuxième tour des législatives, l’un des leaders de ce syndicat se verrait bien ministre de l’agriculture en cas de gouvernement d’extrême droite.



Le patronat passe-t-il à l’extrême droite ?


Le Rassemblement national semble ne plus faire peur aux grands patrons français. Certains sont déjà des soutiens de l’extrême droite, quand les grandes organisations patronales se taisent alors que le RN est aux portes du pouvoir. Décryptage.



Dans la Seine-et-Marne, la candidate RN a plus peur de l’islam que du réchauffement climatique



AGNÈS LAFITTE DÉFEND LA THÉORIE RACISTE DU GRAND REMPLACEMENT DEPUIS 2019.

Agnès Lafitte est candidate dans la 7e circonscription de Seine-et-Marne. Sur les réseaux sociaux, elle enchaîne défense de la théorie raciste du grand remplacement et les sous-entendus racistes.



La montée du RN inquiète les médecins étrangers


Alors que le Rassemblement national (RN) est arrivé largement en tête du premier tour des législatives, la perspective de voir l’extrême-droite remporter la majorité absolue inquiète à l’hôpital. Le parti a inscrit dans son programme le principe de la « préférence nationale », qui vise notamment à réserver certains emplois aux ressortissants français. Or l’hôpital public dépend très fortement des médecins étrangers.



Les approximations de ces candidats RN sur le programme de Bardella


Pendant la campagne des législatives, l’audiovisuel public a organisé de nombreux débats entre candidats. Sur France 3 et France Bleu, plusieurs candidats du Rassemblement national se sont illustrés par la méconnaissance du programme de leur parti. Et leur incapacité à le défendre.



Culture et Création contre le RN


292 professionnel·les des industries culturelles et créatives, du luxe et de la mode invitent les artistes, artisan·es, intermittent·e·s, auteur·ices, et toutes les personnes participant aux métiers de la création à se mobiliser, à signer et relayer cette tribune. « Le projet populiste et fasciste porté par le RN est incompatible avec les valeurs que nous défendons au quotidien dans nos métiers ».



L’extrême droite, un danger pour la culture, les exemples Italie, Argentine, Brésil, France…


Quand l’extrême droite arrive au pouvoir, la culture est souvent attaquée en premier. Le premier geste en 2019 de Jair Bolsonaro en Brésil et en 2024 de Javier Milei en Argentine était de supprimer le ministère de la Culture. En Italie, depuis le succès de son parti post-fasciste, Giorgia Meloni a écarté des étrangers de postes d’institutions culturelles. À l’occasion du Festival d’Avignon, des représentants culturels français, italien, argentin et brésilien racontent leurs expériences et leurs craintes face à l’extrême droite.



Manifeste des sciences humaines et sociales contre le fascisme et la fascisation


« Instruit·es par les expériences de nos collègues turc·ques, brésilien·nes, argentin·es, qui ont vécu les effets d’un gouvernement d’extrême droite dans leurs universités, nous savons qu’il est possible que demain, on prétende nous empêcher d’exercer nos métiers ». Face à ce péril, un large ensemble d’enseignant·es en sciences humaines et sociales appellent les gouvernances universitaires à résister à l’implémentation de politiques injustes et de pratiques autoritaires qui menacent les fondements de leurs disciplines.



Les « citoyens de seconde zone » contre le Rassemblement National


« Sans grande surprise, le programme du RN se caractérise par des attaques sans précédent aux droits politiques fondamentaux des certains français, les descendants d’immigrés, les binationaux, les naturalisés, en somme, des citoyens de seconde zone pour cette extrême droite aux portes du pouvoir. » Quelques jours avant un scrutin décisif, un collectif de citoyen·nes, artistes, militant·es binationales appellent à la mobilisation massive pour le Nouveau Front Populaire



Les électeurs de gauche sont plus enclins au barrage que ceux de droite


La campagne pour le deuxième tour vit son dernier jour, ce vendredi 5 juillet, avant la période de silence électoral la veille du vote de dimanche. L’occasion de dernières prises de paroles de la part des représentants du Nouveau Front populaire, de la macronie, de la droite et du Rassemblement national.



Législatives : les « brebis galeuses » de Bardella se reproduisent par centaine


Le président du Rassemblement national reconnaît « quatre ou cinq brebis galeuses » parmi les candidatures de son parti. Il soutient en réalité au moins 106 aspirants députés aux propos haineux et complotistes. Mediapart présente les vrais visages du RN, déjà élus ou qualifiés au second tour.



« Tour de France de la honte » : un site internet recense les dérapages de plusieurs candidats RN de la région


Ces derniers jours, Jordan Bardella s’est défendu de nombreux candidats RN encore en lice au second tour des législatives, qui font l’objet de scandales liés au racisme ou à l’antisémitisme.

« Le Tour de France de la honte », c’est un site internet qui fait beaucoup parler depuis sa création ces derniers jours, jusqu’à être partagé par le Premier ministre Gabriel Attal. Lire ICI