Comment va se dérouler la deuxième phase du plan de paix à Gaza, concocté en partie par le président américain Donald Trump ? Le groupe palestinien Hamas et Israël ont entamé des discussions préliminaires, alors que les négociations étaient suspendues depuis la semaine dernière pour laisser la première phase s’appliquer plus sereinement. Car cette deuxième phase s’annonce encore plus compliquée, abordant la gouvernance de Gaza, le « Conseil de paix » présidé par Donald Trump et Tony Blair, le désarmement du Hamas.
A peine une semaine après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu dans la bande de Gaza, la situation reste extrêmement instable. Le régime génocidaire israélien continue de mener des opérations militaires sporadiques dans l’enclave palestinienne, en violation totale de l’accord. Dans le même temps, l’aide humanitaire reste extrêmement limitée, d’après des organisations et le personnel de santé sur place.
Les termes de l’accord entre le mouvement islamiste et l’Etat hébreu prévoyaient que tous les otages, vivants ou morts, seraient remis dans les soixante-douze heures suivant la mise en application du cessez-le-feu. Dix-neuf dépouilles manquent encore.
« On ne sait pas qui est encore en prison et qui est mort »
Et voilà. Les captifs israéliens ont été libérés après deux ans passés entre les mains du Hamas. Parmi eux, il y a des soldats qui étaient stationnées dans les postes militaires de la périphérie de Gaza. Tout le monde est content. Leurs familles sont contentes, les Israéliens sont contents, Trump est content, l’Occident est content. Tout le monde est content parce que vingt personnes ont été libérées. Les captifs israéliens ont raconté comment ils ont été déplacés plusieurs fois, dans des tunnels, dans des conditions de détention terribles d’après eux. Les discours et les commentaires, en Israël et en Occident, se félicitent de la libération des otages, qui était une priorité. Les dirigeants politiques parlent de la grande fête du retour des captifs à la maison. Mais on les entend moins se réjouir de la fin de la guerre. On ne parle plus du génocide que nous avons vécu. On fait mine d’oublier que sur les près de 2 000 Palestiniens libérés par Israël en échange de ces vingt Israéliens, 1 718 ont été enlevés pendant les deux ans d’invasion de Gaza.
Pendant que Trump vante son plan de paix pour Gaza, en Cisjordanie, les attaques de colons contre des Palestiniens se poursuivent. Face aux violences, des volontaires internationaux et israéliens tentent de soutenir villageois et cultivateurs.
Le Hamas a libéré lundi les derniers otages israéliens encore en vie retenus dans la bande de Gaza. Une foule en liesse et en pleurs a par ailleurs accueilli à Ramallah l’arrivée de cars transportant des Palestiniens tout juste relâchés par les autorités israéliennes.
Y retourner ou rester là? À Gaza, des centaines de milliers d’habitants affluent vers le nord
Des centaines de milliers de Palestiniens déplacés sont rentrés chez eux ce samedi 11 octobre dans le nord de la bande de Gaza pour découvrir l’ampleur des destructions causées par deux ans de guerre. La Défense civile de Gaza, organisation de premiers secours opérant sous l’autorité du Hamas, a annoncé que plus de 500 000 personnes déplacées par la guerre étaient revenues dans le nord de l’enclave depuis le début du cessez-le-feu, la veille.
Amira Hass. Pourquoi la Cisjordanie ne s’est pas soulevée
Amira Hass est une journaliste israélienne du quotidien de gauche Haaretz, installée depuis vingt ans à Ramallah, en Cisjordanie. Elle explique pourquoi aucune intifada n’a éclaté dans ce territoire occupé, et largement occulté, après le 7 octobre 2023. À l’inverse de ce qu’avaient imaginé les chefs du Hamas à Gaza. Entretien.
« Il a fallu des mois, parfois près de deux ans, pour que certains admettent qu’Israël a violé la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide.
Un facteur a été déterminant dans ces aveux. Ce facteur est la « famine », à savoir la famine délibérée infligée par Israël à 2,1 millions de Palestiniens qui habitent cette minuscule bande de terre densément peuplée. »
L’autrice de ces lignes, Maryam Jamshidi, est écrivaine et professeure agrégée de droit à la faculté de droit de l’université du Colorado et ne peut être taxée de militantisme pro-palestinien.
Si les avis ont été longtemps partagés sur cette qualification de « génocide », un rapport du Comité spécial de l’ONU, daté de septembre 2024, rendu public en novembre, estimait que les méthodes utilisées par Israël « correspondaient aux caractéristiques d’un génocide ».
Aujourd’hui, malgré les accusations d’ « antisionisme radical d’une partie de la gauche » et d’« idéologisation » de la justice internationale, on ne peut plus rejeter le « risque plausible de génocide à Gaza », reconnu comme tel par la Cour internationale de Justice (CIJ) en janvier 2024. Plus récemment, c’est Daniel Blatman et Amos Goldberg, professeurs israéliens d’histoire de la Shoah et d’études sur le génocide à l’Université hébraïque de Jérusalem, qui ont publié dans le quotidien israélien Haaretz du 30 janvier 2025 un article intitulé « Il n’y a pas d’Auschwitz à Gaza. Pourtant, c’est un génocide ».
« La qualification des actes commis à Gaza, notamment l’existence d’un possible génocide, mobilisera les juristes internationaux pour les années à venir » pour l’avocat international Johann Soufi.
Ce que dément Israël qui réagit avec des mots très forts au rapport de l’ONU, qui confirme qu’une famine est en cours dans le gouvernorat de Gaza et qu’elle devrait s’étendre à ceux de Deir Al-Balah et de Khan Younès d’ici à la fin du mois de septembre. « Il n’y a pas de famine dans l’enclave palestinienne », affirment les responsables israéliens.
Pendant ce temps, unis autour des familles des otages, les Israéliens se mobilisent massivement, estimant devoir à présent devoir « faire quelque chose de plus radical ». Plusieurs centaines de milliers de manifestants se sont rassemblés, mardi 26 août, dans tout le pays pour clore une journée de solidarité avec les otages retenus à Gaza et demander la fin de la guerre, au moment où l’exécutif israélien discutait de la poursuite des opérations militaires.
Cet élan contre le gouvernement d’extrême-droite laisse toutefois dubitatifs certains commentateurs palestiniens qui n’y voient qu’un désir de fin du conflit, qui y « apparaît non comme une revendication en soi, mais comme un prix nécessaire », le seul moyen de parvenir à la libération des otages. « Le génocide en cours à Gaza et la catastrophe humanitaire qui frappe les Palestiniens restent largement absents de ces discours. »
Car aujourd’hui, les chars israéliens se sont rapprochés du centre de la ville de Gaza et de son million d’habitants, pendant que Donald Trump présidait à Washington une réunion en vue d’échafauder des plans d’après-guerre pour le territoire palestinien dévasté.
Human Rights Watch a déclaré hier que des membres du personnel militaire des États-Unis risquent d’être tenus responsables d’assistance aux forces israéliennes commettant des crimes de guerre à Gaza. Un bonne partie du personnel politique et tout particulièrement son chef, à qui certains voudraient voir décerné le Prix Nobel de la Paix, pourrait bien également être poursuivis pour complicité de ceux-ci.
Il y a quelques jours, l’ancien chef des services de renseignement militaire israéliens justifiait ainsi les massacres à Gaza : « Ils ont besoin d’une Nakba de temps en temps ». Ce genre de cynisme n’est pas de nature à nous laisser espérer la fin de ce massacre.
Car pendant ce temps, Israël continue de bombarder les rares hôpitaux encore à peu près debouts, visant tout particulièrement les journalistes, pour faire disparaître le maximum de témoins. Paris, Londres, Berlin et même Donald Trump s’en émeuvent. Mais le Premier ministre israélien réplique en accusant les dirigeants qui ont annoncé leur intention de reconnaître un Etat palestinien, comme la France, de faire le jeu du Hamas, et de ne pas lutter suffisamment contre l’antisémitisme dans leurs pays respectifs.
Un navire de journalistes est en route pour Gaza, reprenant l’idée de la flotille humanitaire, dans un projet dénommé « Witness for Gaza ».
« « Attendre, c’est perdre la trace ». Plus le temps passe, plus les preuves disparaissent : des témoignages effacés, des données perdues, des récits remplacés par la propagande. Il s’agit de rappeler que la liberté de la presse ne peut être mise entre parenthèses.
C’est cette urgence qui justifie une action aussi risquée que l’envoi de ce navire. Rappelons que des initiatives similaires de bateaux civils en direction de Gaza ont déjà été interceptées par le passé. Mais cette fois, il ne s’agit pas de convois humanitaires : il s’agit de journalistes, revendiquant leur droit d’entrer et de documenter. «
Rami Abou Jamous constate amèrement que cette fois, il n’y a pas de plan B.
« Voilà le carrefour : ou l’effacement de l’existence palestinienne à Gaza, ou l’arrêt de la guerre. Je m’adresse à ceux qui négocient à l’étranger au nom de 2,3 millions de personnes. Je leur demande de prendre en considération que la défaite ou la victoire se jouent avec l’existence des Palestiniens. Je leur dis que ce n’est pas une honte d’arrêter le combat, quelles que soient les conditions, quand on affronte une armée surpuissante qui nous massacre tous les jours. Nous vivons un génocide, un nettoyage ethnique, et une famine sous les yeux du monde entier, au XXIe siècle. Ce n’est pas une honte de décider de respirer un peu. »
« On sait très bien qu’un jour la Palestine sera libérée. On sait très bien qu’un jour la justice régnera, que les Palestiniens auront leurs droits. L’histoire en témoigne, la logique, la nature en témoignent : l’injustice ne dure pas éternellement. »
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Les retards survenus ces dernières heures avant la conclusion d’un accord de trêve ont été vécus comme une « torture » par les familles des otages. C’est ce qu’explique Stephen Brisley, un proche d’otage, dans les colonnes du Guardian. « Je suis prudemment optimiste, mais un peu méfiant en même temps », explique-t-il. Il attend la libération de son beau-frère, dont l’épouse (sa sœur) et les deux fillettes (ses nièces) ont été tuées le 7 octobre. De son côté, Gilad Korngol, 63 ans, « ne sait pas ce qui est arrivé à son fils de 39 ans, qui avait été enlevé au kibboutz Be’eri ». « Ne pas savoir », explique-t-il, « nous a fait vivre comme des zombies, au cours des 467 derniers jours ».
L’angoisse d’une mère : un fils libéré de Gaza, un autre laissé derrière
Des deux fils de Ruth Strom, Yaïr Horn, souffrant, fait partie des 33 otages qui seront libérés dans le cadre de la phase 1 alors qu’Eitan Horn restera à Gaza pour l’instant.
Cessez-le-feu Israël-Hamas : les images des impressionnants convois humanitaires prêts à entrer à Gaza
Depuis l’annonce de l’accord, des chauffeurs de camion égyptiens ont convergé vers le point de passage de Rafah pour apporter de la nourriture, de l’eau et du carburant aux Gazaouis.
Trêve, cessez-le-feu, pause ? Les termes varient, reflétant les sentiments mitigés que laisse l’accord annoncé pour ce dimanche 19 janvier 2025. Mitigés, d’abord, car nous savons le déchaînement de feu et de sang qui s’abattra dans les prochains jours sur la bande de Gaza, jusqu’à la minute ultime prévue pour sa mise en œuvre ; à l’image de ce qui s’est passé au Liban, et comme il en a toujours été dans les guerres menées par Tel-Aviv.
Un cessez-le-feu ne mettra pas fin au programme génocidaire d’Israël
L’accord pourrait réduire l’intensité de la vague de meurtres perpétrée par Israël, mais il risque d’ouvrir la voie à une nouvelle phase éprouvante de nettoyage ethnique, avec le soutien total de Trump.
“Ce 7 octobre marque le triste anniversaire des crimes commis par le Hamas et les groupes palestiniens à l’encontre de la population civile israélienne. Des crimes atroces et injustifiables pour lesquels nous appelons à la justice devant les juridictions internationales. Nous continuons d’appeler également et avec force à la libération immédiate et sans condition des otages retenus à Gaza.
Ce 7 octobre marque malheureusement aussi le début de l’offensive destructrice menée par les forces israéliennes à Gaza : une catastrophe humanitaire sans précédent, un risque majeur de génocide, une extension du conflit qui laisse craindre un embrasement régional. Nous continuons à exiger un cessez-le-feu immédiat. Nous continuons à exiger le respect du droit international et la justice pour toutes les victimes de ce conflit effroyablement meurtrier.”
Anne Savinel-Barras, Présidente d’Amnesty International France
Attaques du 7-Octobre : la droite israélienne, le Hamas et la guerre sans fin
Les attaques terroristes du 7 octobre 2023 menées par le Hamas dans le sud d’Israël et la riposte israélienne visant à l’anéantissement du mouvement palestinien à Gaza ont précipité le Moyen-Orient dans une spirale de l’enfer. Les deux principaux acteurs de cet affrontement, le Hamas palestinien et la droite nationaliste et religieuse israélienne, refusent depuis plus de trente ans toute solution négociée en Israël-Palestine. Explications.
Guerre à Gaza: «Des enfants qui n’ont pas une vie d’enfant»
Il y a une année, le 7 octobre 2023, survenait l’attaque terroriste la plus meurtrière de l’histoire d’Israël. Plus de 1 200 personnes tuées par les commandos du Hamas. L’hécatombe. Un anniversaire tragique qui marque également le début de la guerre à Gaza, et le carnage qui y est commis par l’armée israélienne. Le massacre de près de 42 000 Palestiniens. Majoritairement des femmes et des enfants. À Jérusalem, rencontre avec un responsable de l’Unicef Palestine, tout juste revenu de Gaza.
« Il faut que le monde voie l’ampleur des horreurs » : un an de guerre entre Israël et le Hamas vu par sept photojournalistes israéliens et palestiniens
Deux journalistes d’Al-Jazira tués dans une frappe israélienne à Gaza
Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien dans la bande de Gaza, le 7 octobre 2023, le bureau de la chaîne à Gaza a déjà été bombardé et deux autres de ses correspondants tués.
Dans la bande de Gaza, un musicien donne des concerts pour aider les enfants «à surmonter leur traumatisme»