Menaces sur la Sécu

Par Rémy Dufaut



Annonces sur le budget : aux maux de la santé, Bayrou propose les remèdes habituels

On ne compte plus les alertes sur le déficit de l’assurance maladie. 13,8 milliards d’euros en 2024, avec le risque de plonger à 16 en 2025. Alors François Bayrou, qui a présenté ses orientations budgétaires ce mardi 15 juillet, était attendu sur ce volet. Et il a dressé le cap : faire baisser le coût de la santé, dans le cadre d’une réduction de 5 milliards d’euros des dépenses sociales annuelles.



La Sécu

Décidément, l’assurance maladie fait encore parler d’elle. Et pas en bien, comme d’habitude. La protection sociale coûte trop cher. La droite et le patronat n’ont de cesse, depuis sa création, que de faire supporter leurs frais de leur santé aux Français, par l’intermédiaire des organismes privés.

Les assurances sociales furent créées par la Loi du 5 avril 1928 pour tous les salariés, sous la forme d’une Assurance Vieillesse fondée sur le principe de la capitalisation ainsi qu’une Assurance Maladie. Celle-ci fut complétée par la Loi du 30 avril 1930 qui instituait le premier système d’assurance sociale en France, destiné aux salariés dont le revenu se situait en dessous d’un certain plafond. Il était alors confié à toutes sortes de mutuelles, dont celles des fonctionnaires. Les plus aisés avaient recours à des assurances libres.

En octobre 1944, le Ministre du Travail dans l’éphémère gouvernement de Gaulle (septembre 1944 à octobre 1945), Alexandre Parodi, confie à Pierre Laroque, directeur général des Assurances sociales et de la Mutualité, la tâche de mettre en place un plan de Sécurité sociale. 

C’est à Ambroise Croizat, ministre communiste du Travail de 1945 à 1946 et en 1947, que reviendra la tâche de le mettre en œuvre, dans le cadre du programme des « Jours heureux », par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 qui actent la création de la Sécurité sociale, avec pour but de protéger l’ensemble de la population. La Sécurité Sociale va (brièvement) connaître ses heures de gloire. « En 1945, la pensée keynésienne [du nom de l’économiste britannique John Maynard Keynes]est dominante en Europe et dans les pays ‘riches’. Cette pensée économique [voit] les dépenses publiques comme un soutien à la consommation. La Sécurité sociale est pensée comme partie prenante du modèle keynésien », souligne Bruno Palier.  » [On pense] que si on est malade et qu’on continue de toucher un revenu, on peut donc continuer de consommer. »

Ce podcast de France culture en 4 épisodes a servi de base de départ à cet article. On s’y référera fréquemment tout au long de celui-ci.


5 ans après sa création, on évoquait déjà le déficit

Face à l’augmentation des dépenses dans les années 1950, les caisses nationales présentent plusieurs déficits. L’expression « trou de la Sécu » n’est pas encore employée, car le déficit n’est pas perçu comme un problème à résoudre, bien que des critiques de la Sécurité sociale soient cependant déjà en germe.

En 1967, les ordonnances Jeanneney transforment le visage de la Sécurité sociale. Elles mettent en place trois caisses nationales autonomes : maladie, vieillesse et famille. Elles marquent surtout une première pression de l’État sur la Sécurité sociale, jusque-là gérée par les représentants du monde du travail.

L’année 1967 est celle qui comptabilise le plus de journées de grève depuis l’instauration de la Ve République.

La manifestation du 17 mai entend protester contre la réforme de la sécurité sociale par voie d’ordonnances, contre le blocage des salaires et contre l’attribution des pleins pouvoirs au gouvernement. Elle marquera les esprits.



Mai 68

Un an après, ce qu’on qualifie d’« événements de 1968 », année marquée par une contestation générale des valeurs et des pouvoirs établis, n’est que la suite d’une série de prises de conscience par les populations d’un besoin de changement profond dans la société et dans les principes qui la régissent.

Le « mouvement » amorcé en France s’étend au monde entier.



Les réformes se multiplient

On observe alors la publication de décrets modifiant profondément, par exemple, les règles du contrôle médical du régime général de la Sécurité sociale et la participation des assurés aux tarifs servant de base au calcul de ces prestations, en abrogeant purement et simplement la totalité des dispositions prises antérieurement. Ces décrets seront par la suite à diverses reprises eux-mêmes à nouveau abrogés et modifiés.

La Sécurité Sociale se réforme jusque dans ses propres rangs: la Convention collective nationale de travail du 25 juin 1968 régit les conditions des agents de direction et des agents-comptables des organismes de Sécurité sociale et d’Allocations familiales. Mais seuls les cadres sont concernés par cette avancée.

Le  patronat fait tout pour garder en main les orientations des caisses, s’appuyant généralement sur un syndicat représentatif notablement favorable aux orientations patronales.



Dans les années 1970, le « trou de la Sécu » devient un problème politique et sert de levier pour faire encore des réformes.

À partir de 1973, la croissance ralentit fortement au lendemain du premier choc pétrolier. Le déficit de la Sécurité sociale se creuse et bascule très vite dans le champ des problèmes politiques. Pour freiner le déficit, l’augmentation des cotisations sociales n’est plus présentée comme une solution.

En 1976, le Premier ministre Raymond Barre est le premier à dire que le déficit pose problème. Selon lui, il faut se centrer sur une politique de l’offre et non plus de demande pour boucher le « trou de la Sécu ». À partir de là, les plans de financement vont se mettre en place tous les ans.


Dans les années 1980 la notion de « trou de la sécu » s’enracine dans les discours politiques.

Le politiste Bruno Palier fait remarquer le symbole des mots employés pour décrire la Sécurité sociale : « On parle souvent de cathédrales – quelque chose qui vient du passé, de très imposant, mais qui risque de s’effondrer. En 1987, lors des États généraux de la Sécurité sociale, on choisit le symbole de la baleine – un animal sympathique, mais qui risque de disparaître. » Il poursuit : « Les années 1980 vont ajouter au débat la notion de charge pour changer l’appellation des cotisations sociales. […] Yvon Gattaz, à la tête du Conseil national du patronat français (CNPF), lance la ‘bataille des charges’ pour faire comprendre aux Français et au gouvernement que les cotisations sociales pèsent beaucoup trop dans le contexte du marché européen dans lequel on compare le coût du travail. » Pour Bruno Palier, « c’est un retournement contre la Sécu, par son mode de financement. »

Désormais, la priorité pour les gouvernements de droite comme de gauche est de mettre en place des réformes visant à réduire les déficits, même si cela entraîne des limitations de l’aide sociale.

En 1995, le plan Juppé finit d’étatiser la Sécurité sociale en créant notamment la loi de financement de la Sécurité sociale. La maîtrise des dépenses sociales incombe à présent majoritairement à l’État qui éloigne un peu plus le pouvoir des bénéficiaires de la Sécurité sociale.

Ce « plan Juppé » déclenche une mobilisation massive qui fait plier le gouvernement, qui lâche sur les choses qui n’étaient pas essentielles pour lui. Il voulait reprendre en main la Sécurité sociale. Il a lâché sur les autres éléments du plan Juppé, c’est-à-dire la retraite avec la fin des régimes spéciaux et l’augmentation de la durée de cotisation pour les fonctionnaires, le contrat de plan à la SNCF…


La victoire n’est donc que partielle et le patronat ne démord pas de son projet: démanteler la protection sociale.

Des solutions pratiques sont pourtant avancées par Olivier Nobile et Bernard Teper qui publient Pour en finir avec le trou de la Sécu, repenser la protection sociale au XXIème siècle (Editions Penser et agir, Eric Jamet Editeur (2014), 270 pages, 20 euros)

Ils proposent 2 grandes lignes d’action :

« Réhabiliter d’urgence le DROIT SOCIAL comme fondement d’un nouveau projet de République Sociale ». Pour Olivier Nobile, une réforme visant à l’amélioration du fonctionnement de la Sécurité sociale est tout à fait envisageable : réforme de la démocratie sociale visant à faire de la Sécurité sociale un lieu d’expression citoyenne et républicaine. Réforme du système de santé visant à sortir du tout curatif pour réhabiliter un système de santé accessible et gratuit incluant la perte d’autonomie. Réforme des retraites afin de garantir des ressources pérennes aux régimes de retraite par répartition en vue d’un rétablissement de la retraite à 60 ans. Réforme du système des prestations familiales autour de la création d’une allocation sociale à l’enfant et au jeune enfant, dès le premier enfant.

Mais surtout réhabilitation du salaire et de la cotisation sociale

Il s’agit bien de rompre avec les politiques d’austérité et de modération salariale tout en créant les conditions d’une dé-financiarisation de l’économie. Cela implique une mobilisation citoyenne au niveau de l’Europe et une prise de pouvoir des peuples sur l’ensemble des déterminants de l’économie. »


30 ans après, les questions se posent toujours dans les mêmes termes.

Mais la pression des patrons ne cesse de s’accentuer sur le pouvoir, déjà en bien mauvaise forme.


Economies santé : les malades à la double peine

Le 15 juillet, le Premier ministre, François Bayrou, a présenté les grandes orientations de son budget 2026. Il entend faire près de 44 milliards d’euros d’économies, dont une partie (environ cinq milliards) concerne les dépenses de santé. Il a aussi décidé d’une année blanche pour toutes les prestations sociales, y compris les pensions de retraites, gelées donc sans revalorisation au rythme de l’inflation. Alors que comporte la purge annoncée ?



Six idées reçues sur la fraude sociale : la manne financière, les cartes Vitale usurpées, les pauvres qui profitent du système…

Parmi les pistes d’économies présentées par François Bayrou lors de son discours sur le budget, le durcissement de la lutte contre la fraude sociale. Estimée à 13 milliards d’euros par an, celle-ci draine des idées reçues : la désignation des responsables, l’origine du déficit de la Sécurité sociale ou la manne financière qui échapperait aux caisses de l’Etat.



Contre le « plan Bayrou » le 10 septembre 2025 ?

Un collectif « Mobilisation10septembre » appelle à bloquer le pays le 10 septembre prochain, en marge des principaux syndicats (qui ont lancé leur propre pétition), non sans rappeler les prémices  des « gilets jaunes » et des « bonnets rouges ». Le magazine Blast remarque que les groupes Telegram semblent avoir remplacé les groupes Facebook, ce qui ne manque pas d’interroger…

États-Unis : la grande purge de Donald Trump



Depuis son investiture le 20 janvier dernier, Donald Trump ébranle la démocratie américaine en gouvernant à coups de décrets présidentiels. Coupes drastiques dans les budgets, retrait d’accords internationaux, licenciements massifs d’employés fédéraux… Il va si vite que les tribunaux sont saturés par les procès en contestation, dont les décisions pourraient prendre des années à être rendues. L’objectif affiché de l’administration Trump est de tailler dans les dépenses publiques, mais il existe aussi une volonté sous-jacente de remodeler les institutions selon une idéologie de droite identitaire et religieuse. Reportage de notre correspondante aux États-Unis, Fanny Allard.



Trump a-t-il manipulé les marchés ? L’image qui alimente les soupçons


Après sa volte-face surprise sur les tarifs douaniers, le président américain est sous le feu des critiques.

Avec son revirement sur les droits de douane, Donald Trump s’est-il rendu coupable de manipulation boursière ? Ce sont les accusations portées par l’opposition en cette fin de folle semaine pour les marchés financiers.



L’administration Trump prive des milliers d’immigrés de la sécurité sociale en les déclarant morts


L’administration Trump a ajouté plus de 6 000 immigrés à une base de données de bénéficiaires de la sécurité sociale décédés, coupant de fait les prestations et leur capacité à travailler, ont rapporté, jeudi 10 avril, des médias américains.

Les contre-visites médicales ou comment surveiller ses employés en arrêt maladie

Avis médicaux bidons, usurpation d’identité et harcèlement moral



Le business des contre-visites médicales, organisées par des boîtes privées plutôt que par la Sécu’, permet à de nombreux employeurs privés ou publics de lutter contre les arrêts maladie frauduleux… Quitte à mettre la pression aux travailleurs.

Réforme de l’assurance chômage : et les perdants sont les jeunes, les seniors et tous les autres



Les demandeurs d’emploi verront leurs droits réduits avec la nouvelle réforme de l’assurance chômage détaillée par le gouvernement. Les jeunes et les seniors seront particulièrement touchés, dénoncent les syndicats.

Aller « toujours plus loin » pour « retrouver le chemin du plein-emploi ». Et réaliser, au passage, 3,6 milliards d’euros d’économies : voilà pour la philosophie de la réforme de l’assurance chômage dévoilée par le Premier ministre, Gabriel Attal, dimanche 26 mai. Sur le fond, pour cette troisième réforme depuis 2017, c’est un nouveau durcissement des droits des personnes sans emploi qui entrera en vigueur au 1er décembre. Une « punition collective », selon François Hommeril, secrétaire général de la CFE-CGC, le syndicat des cadres, qui touchera particulièrement les jeunes précaires et les seniors, alors même que la question de l’employabilité de ces derniers reste sans réponse.


L’assurance chômage s’enrichit mais les droits des chômeurs reculent


La réforme de l’assurance chômage entrera en vigueur ce 1er juillet. Au programme, un énième recul des droits des privés d’emploi, alors que les comptes de l’Unédic sont au vert. Et des économies réalisées sur le dos de notre modèle social.

Lors des périodes de croissance, « le régime d’assurance chômage doit accélérer son désendettement » pour assumer dans le futur sa fonction assurantielle et « afin qu’il retrouve des marges de manœuvre financière pour jouer son rôle de protection en cas de crise ». Lors de la réforme particulièrement destructrice des droits des chômeurs de 2019 – appliquée entièrement fin 2021 – le gouvernement n’hésitait pas à mobiliser cet argument financier et cet effort de désendettement, pour exiger dans sa lettre de cadrage aux organisations syndicales et patronales cogestionnaires de l’assurance chômage, près de 4 milliards d’économies en 3 ans. Des économies qu’il avait fini par décider unilatéralement, faute d’accord, à l’issue de plusieurs mois de négociations.




France travail : le logiciel Macronien à l’œuvre


Alors que le Premier Ministre vient d’annoncer la mise en application à la fin de l’année une nouvelle réforme de l’assurance-chômage, les critiques fusent de toutes parts. Dans un contexte où le mauvais fonctionnement de France Travail est pointé du doigt, nombreux sont ceux qui y voient une énième attaque visant à réduire les droits des bénéficiaires.

Au même moment, une enquête menée par Radio France révèle la désorganisation de la protection des données des bénéficiaires, sur les vingt dernières années, notamment la récente fuite massive de 2023. Dont, on apprend que celle-ci fut signalée des mois avant que l’attaque ayant touché les données de 43 millions de personnes n’ait eu lieu. 

Selon les informations recueillies, des failles béantes dans le système de protection des données ont été mises à jour

France: Gabriel Attal souhaite une nouvelle réforme de l’assurance chômage


Le Premier ministre français s’est exprimé au 20 heures de TF1 ce mercredi 27 mars. Gabriel Attal a préconisé mercredi un durcissement des conditions d’indemnisation du chômage en France dans le cadre d’une nouvelle réforme afin de favoriser, selon lui, le retour à l’emploi.

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« Fabriquer des pauvres », « taper sur la tête des chômeurs »… Tour d’horizon des réactions à l’annonce de Gabriel Attal


Déficit public : une réforme de l’assurance-chômage pour renflouer les caisses de l’État ?


Une dégradation de la condition des femmes


Comment le régime s’est durci pour les demandeurs d’emploi depuis 2019

Chasse aux arrêts de travail : des médecins dénoncent « une campagne d’intimidation générale »


L’Assurance maladie contrôle des centaines de médecins généralistes qui prescriraient, selon elle, trop d’arrêts de travail, et leur impose des quotas au mépris de la situation des patients. Des médecins, « écœurés », contestent la démarche.

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Quand le gouvernement ne respecte pas ses engagements sur l’assurance chômage


En deçà de 9% de chômage, le gouvernement prévoit de réduire de 25% la durée d’indemnisation de la plupart des demandeurs d’emploi, à l’exception des allocataires qui se trouvent en outre-mer et des intermittents du spectacle.

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Chantiers JO de Paris : dix ouvriers attaquent en justice les géants du BTP


Alors que les débats sur la Loi Immigration portée par Gérald Darmanin, adoptée à l’Assemblée nationale, n’en finissent pas de déchirer la classe politique, les travailleurs étrangers se mobilisent pour faire respecter leurs droits. Dix ouvriers ayant travaillé sur les chantiers des JO 2024 assignent en Justice Vinci, Eiffage, Spie Batignolles et GCC, ainsi que huit sociétés sous-traitantes pour travail dissimulé et non-respect du droit du travail.

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NOTATION DES ALLOCATAIRES : L’INDÉCENCE DES PRATIQUES DE LA CAF DÉSORMAIS INDÉNIABLE


Après plus d’un an de mobilisation contre les pratiques de notation des allocataires de la CAF au côté des collectifs Stop Contrôles et Changer de Cap1, et après avoir détaillé le fonctionnement de l’algorithme de la CAF et son cadre politique, nous publions aujourd’hui le code source de cet algorithme de notation. Nous vous invitons aussi à consulter notre page de présentation sur l’utilisation d’algorithmes similaires au sein d’autres administrations.

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Pourquoi les allocataires des minima sociaux ne sont-ils pas des « inactifs » ?



Dans son projet de loi pour le « plein emploi », le gouvernement veut conditionner le RSA à plusieurs heures d’activité par semaine. Mais les personnes sans emploi sont loin d’être « inactives », défend Marion Ducasse, de l’association Aequitaz.

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Une personne sur quatre a déjà renoncé à des soins pour raisons financières, selon une enquête



Selon un sondage de l’Ifop commandé par le Crédit Mutuel, les personnes les plus défavorisées en France sont les premières concernées par le renoncement à des soins ou des équipements médicaux.

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“Un boulot de dingue !” La LDH a fait sa rentrée


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