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Les désastres environnementaux forcent des millions de personnes à migrer. Résultat, le trafic d’êtres humains s’accroît, alerte l’ONU.
Les désastres environnementaux forcent des millions de personnes à migrer. Résultat, le trafic d’êtres humains s’accroît, alerte l’ONU.
Le journal The Guardian révèle que des dizaines de mineurs non accompagnés hébergés dans un hôtel de Brighton, dans le sud de l’Angleterre, ont été enlevés par des gangs criminels. Sur 136 enfants portés disparus alors qu’ils étaient logés dans l’établissement, 79 sont toujours introuvables.
Des vidéos, filmées par « le Monde », le collectif Lighthouse Reports et plusieurs médias européens, ont récemment révélé la détention illégale de réfugiés dans une cage en Bulgarie, à la frontière avec la Turquie.
En ce début d’année 2023, un énième projet de loi « asile et immigration » sera proposé par le gouvernement français. Depuis 30 ans, les textes relatifs à la politique migratoire de la France stigmatisent toujours davantage les personnes exilées en les présentant comme un problème à régler. Jean-Claude Samouiller, le président d’Amnesty Intrernational, prend la parole sur le sujet.
Un homme s’est jeté sous un train, mardi, en périphérie de Calais, à proximité d’un point de distribution de repas aux migrants. D’après une association sur place, il s’agit d’un migrant soudanais d’une trentaine d’années. Une enquête a été ouverte.
Des migrants bangladais, syriens, égyptiens ont été ramenés en Libye par les « forces spéciales de la marine », à proximité de Benghazi, dans l’est du pays, où les départs se sont multipliés dernièrement. Ils étaient quelque 650 à bord d’un chalutier en direction des côtes européennes.
Plus de 45 000 traversées illégales de la Manche depuis l’Europe continentale vers le Royaume-Uni ont été recensées en 2022, dépassant le record de l’an dernier qui était de plus de 28 000, selon les chiffres du gouvernement publiés dimanche. Dans ses vœux du Nouvel An, le Premier ministre britannique Rishi Sunak a repris la position très dure de ses prédécesseurs, évoquant le sujet de l’immigration illégale comme l’une de ses priorités.
Les associations d’aide aux migrants fustigent le coût très élevé du déploiement massif de forces de l’ordre dans les Hautes-Alpes, dénonçant «un gaspillage» et des «entraves à la solidarité régulières».
La plus haute cour administrative de France a donné raison à l’État français qui avait demandé l’annulation d’une décision de la justice ayant permis à une dizaine de familles avec des enfants, d’accéder à un hébergement d’urgence, en plein mois de décembre. La plupart de ces familles sont originaires d’Afrique de l’Ouest.
Face aux besoins croissants de protection à l’échelle mondiale, plusieurs ONG européennes avaient demandé en octobre aux États membres de l’UE la réinstallation d’au moins 40 000 réfugiés en 2023, en plus d’au moins 8 500 Afghans ayant besoin d’une protection.
Bien que la Commission européenne indique que le soutien aux réfugiés afghans sera « maintenu et renforcé » en 2023, le nombre de places promises pour leur réinstallation n’a pas été communiqué.
Le nombre de personnes déplacées dans le monde dépasse pour la première fois les 100 millions et les conflits sont plus nombreux que jamais depuis la Seconde Guerre mondiale.
Les organisations de la société civile rappellent l’urgence de développer les voies d’accès légales et sûres, dont les programmes de réinstallation.
Bras droit d’Eric Zemmour, Nicolas Bay s’appuie sur un communiqué de l’agence européenne de surveillance des frontières qu’il comprend de travers.
La surveillance aérienne permet l’interception en Méditerranée de migrants et leur renvoi vers des situations de danger.
La France a été condamnée, jeudi, par la Cour européenne des droits de l’Homme à verser 5 000 euros à trois familles de demandeurs d’asile, dont la mise à l’abri n’avait pas été respectée en 2018.
Plusieurs fois par semaine, Nour, un réfugié de 18 ans atteint de paralysie cérébrale, se déplace avec peine durant une heure sur les pistes poussiéreuses ou boueuses de l’installation de Kutupalong pour se rendre de son abri étouffant à un centre communautaire où il peut se sentir inclus et passer du temps avec les autres.
Après 7 heures de travail à bord du bateau humanitaire Geo Barents, une rescapée fuyant la Libye a donné naissance à un bébé, en pleine mer Méditerranée. La jeune maman et ses trois autres fils ont été évacués quelques heures plus tard sur l’île italienne de Lampedusa.
Une enseignante de philosophie devait emmener sa classe préparatoire Hypokhâgne du lycée Watteau de Valenciennes aux abords d’un camp de migrants de Calais. Un projet pédagogique qui a déclenché une levée de boucliers et des menaces de militants d’extrême droite du parti Reconquête ! d’Éric Zemmour. Le rectorat de Lille a porté plainte.
Baignade interdite
On peut s’asseoir ?
Je vous en prie.
Qu’est-ce que vous faites ?
On attend.
Vous attendez quoi ?
Les migrants.
Les migrants ? des oiseaux ?
Non, des femmes, des hommes, des enfants.
Et, ils viennent d’où ?
De là-bas, en face, loin.
Vraiment loin ?
Aucune idée. De l’autre côté, en tous cas.
Ils arrivent quand ?
Aucune idée. Ils n’ont pas d’horaire.
C’est embêtant !
Des fois, on perd notre temps. Aucun n’apparaît. Mais c’est rare.
Curieux, ce manque d’organisation. Et, ils viennent faire quoi ?
Ils fuient.
Ils fuient ? quoi ?
La guerre, la faim, la misère. Des choses comme ça.
Classique !
Oui classique.
Pourquoi venir ici ? spécialement ici ?
Sans doute pensent-ils que c’est mieux que là-bas.
Les pauvres !
Comme vous dites.
Et quand vous en voyez, qu’est-ce que vous faites ?
Rien. Que voulez-vous qu’on fasse ? il y en a tellement. On ne peut pas les aider tous, alors pourquoi les-uns plutôt que les autres ? ce ne serait pas juste. Autant n’aider personne. C’est plus équitable. Et puis, ma femme et moi, on ne sait pas bien nager.
Et eux, ils savent ?
Les migrants ? pas vraiment, ils flottent plus qu’ils ne nagent. Et souvent quand ils flottent, ils sont bleus et raides.
Assez morts, en somme ?
Oui.
Pas très ragoutant, c’est une plage ici, où des gens se baignent l’été.
Pas ici !
Pourquoi ?
Vous n’avez pas vu le panneau ? baignade interdite ! il y a des courants dangereux !
Ils ne le savent pas ?
Comment voulez-vous qu’ils le sachent ?
Le panneau !
On ne peut le voir que de la plage.
En effet. Et si on le tournait vers eux, vers le large ?
Il faudrait déjà qu’ils sachent lire.
Ils ne savent pas ?
Aucune idée.
Ils nous ressemblent ?
Pas tout-à-fait.
Comment ça ?
Ils sont plus maigres. Et puis, ils ont des yeux.
Des yeux ?
Différents, intenses, fiévreux, tourmentés. Un peu fou.
Ils sont fous ?
Non. Enfin, pour entreprendre une traversée pareille. Tout de même, oui. Ce qui est beau, c’est de les voir apparaître. Debout, tous serrés les uns contre les autres. On dirait qu’ils marchent sur l’eau, comme Jésus, car le bateau disparaît sous leur poids.
Il arrive qu’il coule ?
Parfois oui, parfois non. Quand ça coule, ça coule vite. La mer les avale, comme une bouche. Et puis plus rien.
Un peu frustrant ?
Je ne dirais pas cela. C’est un spectacle différent.
Certains abordent ?
Certains.
Vous leur parlez ?
Non, pourquoi ? on n’en connaît aucun. Et puis, il y a la barrière de la langue.
Ils ne parlent pas notre langue ? Vous leur avez demandé ?
Non, mais ça se voit. Et puis ils claquent tellement des dents qu’ils seraient incapables de dire un mot.
Et ce qu’ils veulent, c’est manger, boire dormir sous un toit, pas faire la conversation.
Vous leur donnez cela ?
Non, c’est petit chez nous. Et la vie est chère, vous le savez bien. D’ailleurs, s’ils avaient une idée du coût de la vie ici, ils ne viendraient pas. Mais une fois qu’ils y sont ils restent, ils ne partent plus.
Ils le voudraient ?
On ne sait pas.
Qu’est-ce que vous faites après, quand vous les avez vus ?
On rentre.
Et c’est tout ?
Oui, c’est tout.
Mais pourquoi vous venez, alors ?
Pour passer le temps … pour les voir en vrai.
A la télé, ils paraissent plus grands. Alors qu’en vrai, ils sont tout petits, ils font moins peur, on repart rassurés.
Quand on ne sait pas, on se fait des idées. En les voyant, on constate qu’ils sont inoffensifs.
Tenez, vous voyez là-bas ?
Où ?
Là-bas, en haut de la grande vague. Ce sont des migrants.
Vous en êtes sûr ?
Certain, j’ai l’habitude, faites-moi confiance.
Ça, des migrants. Je les aurais crus plus grands.
Qu’est-ce que je vous disais.
Ils vont accoster ?
S’ils ne coulent pas, oui.
Vous pensez qu’ils peuvent couler ?
Il y a des chances. La mer grossit, les vagues se creusent. Pas bon. Pas bon du tout. On va peut-être rentrer d’ailleurs. Tous ces nuages, pas envie de nous faire tremper.
Vous n’attendez pas de savoir s’ils vont couler ou atteindre le rivage ?
Non, on reviendra demain.
Demain ?
Oui, il y en aura d’autres. Ne vous tracassez pas.
Alors, bonne soirée.
Bonne soirée.
A demain, si vous permettez ?
Vous êtes le bienvenu, la plage est à tout le monde.
Philippe Claudel
(in bienvenue, 34 auteurs pour les réfugiés)